Chapitre 1 : Sa vraie nature.

Dark est un adolescent qui vient de mourir, et son grand réiatsu attire les Hollows de la région. Byakuya trouve son âme et, au vue de sa forte pression spirituelle, décide de l'emmener avec lui au Seireitei. Inexplicablement, une étrange relation semble s'installer entre lui et le garçon qui lui cache pourtant beaucoup de choses y compris le fait qu'il est en fait une fille.

Avec des yeux de merlan frit, Dark fixait la lame plantée dans son ventre. Merde, il ne l'avait pas vu venir, celle-là. Il reporta son regard vers l'homme qui tenait le manche du couteau :

― Et une vermine de moins sur cette Terre. Je t'avais dit, pourtant, que ça te coûterait cher de refuser mon deal.

D'un geste sec, il retira la lame, laissant un flot de sang s'échapper de la blessure de Dark. L'adolescent aux cheveux noirs tomba par terre, le souffle court. L'homme nettoya son couteau le plus tranquillement du monde et le rangea, retournant ensuite Dark sur le dos d'un mouvement de pied dédaigneux.

― Qu'est-ce que tu fous ? grinça Dark en le voyant s'asseoir sur ses hanches.

― Je vérifie un truc. Bouge pas ou je te crève les yeux. Et crois-moi, même à l'article de la mort, t'auras le temps de sentir la douleur.

Sans hésiter, l'homme fit glisser la fermeture éclair de la veste de Dark et souleva son t-shirt. Il sourit :

― J'en étais sûr.

Dark frissonna :

― Dégage sale con ! tenta-t-il de hurler, mais sa voix ne fut pas plus forte qu'un murmure.

― Chut. Pas bouger toi, ordonna l'agresseur.

Une sirène retentit non loin de là. Des lumières rouges et bleues se succédèrent sur les murs des immeubles.

― Merde ! T'avais appelé les flics ou quoi ? paniqua l'assassin en se relevant de sur Dark.

― Bien sûr. Juste entre le moment où tu m'as enfoncé ta lame dans le ventre et celui où tu m'as désapé, t'as rien vu hein ? ironisa Dark.

― Alors c'est juste une patrouille, sourit à son tour l'homme. Dans ce cas, ils ne sont pas là pour toi, on a encore du temps à perdre avant que tu clamses.

Réunissant ses dernières forces, Dark envoya un furieux coup de pied dans les parties sensibles de l'homme qui hurla à pleins poumons. Alerté par le cri, les policiers se garèrent juste devant l'impasse.

― Aucune chance, sourit Dark en voyant que l'homme paniquait.

― Aucune pour toi non plus, crevard !

L'assassin essaya de sauter par-dessus le capot de la voiture mais fut attrapé au vol par un policier. Le deuxième avança prudemment dans la ruelle mal éclairée, flingue à la main. Il rengaina en voyant Dark et prit l'adolescent contre lui.

― Appelez une ambulance ! cria-t-il.

― Un corbillard plutôt, corrigea Dark.

― Tiens bon petit, on va faire venir un médecin qui va te soigner.

― Ou m'autopsier…

― Tais-toi, garde tes forces. Accroche-toi !

Dark ferma les yeux :

― J'ai tellement sommeil…

― Non petit ! Ne t'endors pas ! Petit ! Petit !

La tête de Dark bascula sur le côté. Le policier mit deux doigts dans sa nuque. Plus de pouls.

― J'ai coffré le mec ! Y'a un blessé ? demanda le deuxième policier en arrivant.

― Heure de la mort…Vingt-deux heures et sept minutes... Note-la pour la donner au médecin légiste… répondit tristement le policier qui tenait toujours le corps de Dark contre son torse.

Secoué, il passa sa main gantée de blanc sur les yeux de Dark, la pulpe de ses doigts encore recouverte de la poudre de son arme lors d'un coup de feu tiré plus tôt. Derrière lui, son collègue rangea son revolver dans son étui de cuir sombre et respectait une minute de silence pour la vie qu'ils n'avaient pas pu sauver.

Froid. Son corps était froid. Cela en aurait inquiété plus d'un dans d'autres circonstances, mais Dark était d'un pragmatisme qui battait parfois des records. Après tout, si il pouvait encore ressentir les températures, qu'elles soient basses ou élevées, c'était que ça n'allait pas si mal, non ?

Fronçant les sourcils alors que la douleur cuisante avait miraculeusement disparu, Dark ouvrit un œil. Il se sentait léger, si léger.

― Je suis vivant ? J'ai survécu ?

Il s'assit sur le sol. Un tintement lui fit baisser les yeux.

― Qu'est-ce que c'est que ça ? paniqua-t-il en avisant la chaîne reliée à sa poitrine.

Il tira dessus, en vain, ce truc était vraiment implanté en lui. Par quel miracle ? Il n'en savait rien. Il était là, assis dans la rue alors qu'il se pensait mort, une chaîne accrochée en son cœur. La situation avait de quoi le dérouter. Il regarda autour de lui, cherchant du regard une solution ou une explication. Ses yeux tombèrent sur son propre corps, recouvert d'un drap blanc, symbole de la mort que l'on voilait au public qui s'agglutinait autour des banderoles de sécurité, avide de faits divers.

« C'est moi... Je suis... mort... » songea-t-il, affolé.

Il se mit sur ses pieds en un tintement. Qu'était-ce donc que ce phénomène ? De la projection astrale, comme dans les films ? Non, il ne croyait pas à la magie, aux fantômes, ni même à l'au-delà. Mais la situation actuelle chamboulait légèrement ses opinions.

Un policier était dos à lui, essayant de contenir et dissoudre la foule à grands renforts de « circulez, il n'y a rien à voir », en vain.

― Excusez-moi, vous pourriez m'expliquer ce qui se passe ? Hasarda Dark.

Il s'attendait à ce que le policier fasse une syncope en le voyant. Ou alors allait-il peut-être se réveiller et découvrir que tout ceci n'était qu'un cauchemar ? Mais à son grand désarroi, le policier ne réagit pas. Il l'ignora.

― Excusez-moi ! Qu'est-ce qui se passe ? réitéra le mort.

Il fut de nouveau snobé.

― Hey ! Vous m'écoutez ?

Il lança ses doigts contre l'épaule de l'homme, espérant que le contact le tirerait de ses songes. Mais sa main ne rencontra jamais le tissu rêche de l'uniforme stricte. Elle le traversa.

Pour ne rien arranger, un cri strident retentit. Pivotant, Dark devina avec horreur le visage d'une chose parfaitement immonde et effrayante, perchée quelques mètres en hauteur.

― Qu'est-ce que c'est que ça ?

Le Hollow renifla l'air et tourna son visage blanc vers lui. Dark frissonna, ayant la désagréable sensation d'être en danger sans savoir le pourquoi du comment. La bête s'élança en sa direction.

― Courrez ! Courrez ! Le monstre arrive ! paniqua l'adolescent, désireux d'alerter les humains sur le passage de la chose.

Rien à faire, ils ne l'entendaient pas plus qu'ils ne le sentaient. Ayant perdu trop de temps en vains cris de prévention, Dark fut frappé de plein fouet par le monstre au masque immaculé aux yeux étroits. Le Hollow tendit sa gigantesque main vers lui. Dark se mit à courir comme un fou dans un tintement de maillons de chaîne.

― Qu'est-ce qui se passe ? Où suis-je ? Est-ce qu'au moins je suis vivant ?

Une forte emprise sur sa taille lui confirma que s'il était mort, même les anges pouvaient ressentir la douleur d'une entraille broyée entre des mains trop puissantes pour des os trop décalcifiés. Le monstre referma davantage son poing sur ses côtes, le soulevant de terre.

― Ton âme dégage un parfum délicieux, je vais me régaler.

Merde, ça causait en plus, ces bêtes là ?

― Mon... âme ? répéta difficilement Dark, suffoquant.

― Tu es mort, tu ne te souviens pas ? Tu as quitté ton corps et maintenant je vais te dévorer, tu dégages un réiatsu tellement délicieux. Comme une pomme bien juteuse arrivée à maturation et que je serai le premier à cueillir. Bon appétit !

Encore un record en perspective. Dark allait mourir deux fois en une heure à peine.

Inexorablement, Dark se vit dirigé vers la bouche baveuse du monstre, gorge abyssale dans laquelle il distinguait un deuxième jeu de dents d'une taille plus humaine. Apeuré, il ferma les yeux. Affronter en face la mort une deuxième fois était trop dur.

Mais les réjouissances du Hollow furent de courte durée. Une forme noire venait de bondir par-dessus eux. Dark avait rouvert les yeux en sentant une ombre passer sur ses paupières, croyant d'abord voir un papillon la survoler. Au lieu de ça, c'était un homme armé d'un long sabre qui s'était interposé entre le dîner et son chasseur. Stupéfait, la pression sur les côtes flottantes de Dark s'amenuisât jusqu'à disparaître tandis que la moitié gauche du corps du Hollow s'éloignait de sa consœur.

Dark retomba sur ses pieds, miraculeusement intact. A quelques mètres devant lui, l'homme en noir rengaina son sabre. Il marqua une pause et se tourna vers Dark :

― Es-tu blessé, gamin ?

Dark se vexa de suite :

― Gamin ? A qui tu crois causer, le vieux ? J'ai quinze ans !

Byakuya ne put retenir un haussement de sourcil contrarié :

― Ta langue en tous cas semble en parfait état de marche, siffla-t-il.

― Byakuya !

Le noble tiqua.

― Kurosaki Ichigo, je t'ai déjà dit de m'appeler avec un titre plus honori-

― Putain t'es malade de partir en flèche comme ça ! J'ai failli pas pouvoir suivre ! Espèce de dingue !

Le rouquin reprit difficilement son souffle. Bordel, de tous les Shinigamis qui auraient pu lui apprendre à enterrer correctement les âmes, pourquoi lui avait-on assigné Byakuya en particulier ? Pourquoi pas plutôt Renji ou Rukia ? Yamamoto ne devait franchement pas plus laxiste avec l'âge...

D'abord évincé, Dark reprit part aux événement quand Byakuya s'approcha de lui avec son sabre, exigeant du lycéen qu'il observe ses moindres faits et gestes. Il leva son zanpakutoh, manche vers le bas, et l'abaissa d'un coup pour frapper le front de Dark. Mais l'adolescent esquiva :

― Nan mais vous foutez quoi là ?

Byakuya soupira. Encore un à qui il fallait tout expliquer. Ichigo, lui, trouvait la situation intéressante. C'était pas tous les jours que la chambre à cryogénisation tombait sur une grande gueule.

― Tu es mort, gamin. Ta chaîne du karma s'est brisée et tu es à présent une âme. Si tu ne veux pas que d'autres monstres tel que ce Hollow te dévorent, tu dois aller à Soul Society.

Byakuya fronça les sourcils après sa tirade. Quand il était arrivé, un étrange réiatsu avait attiré son attention, non pas par son intensité toute relative, mais plutôt par ses fluctuations inhabituellement instables pour une simple âme. Le Hollow qu'il avait débusqué était pourtant tout ce qu'il y avait de plus basique. A moins que...

― Et en quel honneur j'irai à Bled-Society là ? demanda Dark, l'air suffisant.

― Plait-il ?

― J'ai pas envie de me tirer, c'est clair ?

Byakuya écarquilla les yeux. Une âme têtue, en voilà en nouveauté ! Il s'apprêtait à lui lancer une réplique froide et acerbe comme seul un Kuchiki savait en trouver, mais s'arrêta brutalement. Les fluctuations qu'il avait tantôt repérées émanaient clairement de son jeune impertinent. Par tous les Saints...

― Gamin, quel est ton nom ?

― Dark. Et je ne suis pas un gamin !

― Tu vas venir avec moi.

― J'ai pas envie !

― C'est un ordre.

― Je m'assoies dessus !

― Hey ! T'étais pas censée l'enterrer ? Depuis quand les âmes passent par le Senkaimon ? beugla Ichigo.

Le capitaine lança un regard empli d'éclairs au lycéen, expliquant succinctement mais efficacement qu'il lui arracherait les cordes vocales à mains nues s'il ne la bouclait pas dans la seconde. Kurosaki saisit le message subliminal et déclara devoir rentrer chez lui pour finir ses devoirs.
Byakuya reporta ses yeux d'encre sur Dark qui le toisait. S'il y avait bien quelque chose qu'il ne tolérait pas, c'était le manque de respect, l'insolence et autres synonymes d'impétuosité dirigés contre sa personne. Après tout, qui c'était le noble hautain ici, hein ? Ce gamin filait un mauvais coton dans son estime, et sa patience s'épuisait. Il fit augmenter son réiatsu, histoire de le calmer.

La pression spirituelle de Dark explosa en guise de représailles. Byakuya fut déstabilisé sur le coup. Il se n'était pas trompé, ce réiatsu étrange lui appartenait véritablement.

Byakuya fut encore plus surpris par le parfum qui s'en dégageait. Il sentait que le réiatsu était rebelle, se dispersant comme il voulait et ondulant à sa guise. Sensuel, voilà comment ce réiatsu lui apparaissait. Jamais avant il n'en avait rencontré de semblable, et il n'était pas loin de se laisser enivrer.

Le capitaine se ressaisit et écrasa le réiatsu de Dark du sien. Tout particulier qu'était ce gamin, il était tout de même un haut gradé du Seireitei. La nouvelle âme tomba à genoux, essoufflée, le rythme cardiaque plus emballé qu'un lévrier dopé.

― C-Comment t'as…

Byakuya s'approcha et le saisit fermement par l'épaule, le souleva de terre et amena son visage à la hauteur du sien :

― Ne crois pas être en présence d'un Shinigami de base, gamin. Je suis Kuchiki Byakuya, capitaine de la sixième division et tu vas à présent me suivre auprès de mes supérieurs pour que tu nous expliques cet étrange pression spirituelle. J'exige que tu gardes le silence durant le trajet, et je ne souffrirai pas un nouveau manque de respect ou acte de rébellion. Fais un seul écart de conduite et tu mourras deux fois en moins d'une journée. Ai-je été assez clair ?

« Voilà qui devrait le calmer », ajouta-t-il pour lui-même.

― Oui m'sieur. Répondit timidement Dark.

― Très bien.

Byakuya le reposa à terre. Il contacta la Soul Society grâce à son téléphone spirituel et, quelques temps après, un portail fut ouvert.

Alors qu'ils faisaient le chemin en silence, Byakuya ne cessait d'analyser le réiatsu de Dark. Il n'en était pas sûr, mais il avait l'impression que la pression spirituelle de l'insolent se tassait, s'effondrait sur elle-même, phénomène d'autant plus étrange de par sa nouveauté.

Dark suivait Byakuya sans broncher. Il ne tenait pas à mourir une deuxième fois, encore moins de la main d'un glaçon, ça ne péterait franchement pas dans la revue nécrologique.

― Il a l'air tout gentil comme ça mais il a une putain d'autorité ce mec…Flippant…

L'ambiance dans le portail était aussi jouasse que dans une réunion tupperware de croque-morts. Dark et Byakuya marchaient dans un silence ecclésiastique, mais l'adolescent commençait à ne pas pouvoir se contenir davantage :

― Oh ! T'as fini de me mater oui ? Tu veux ma photo ou quoi ?

Byakuya pensait que ses coups d'œil avaient été plus discrets que cela. Raté.

― Je ne faisais que me poser une question, se justifia le capitaine.

― Bah pose-la et range tes yeux.

― Es-tu sûr d'être un homme ? Tu me parais bien féminin dans ton allure.

― Tu sais ce qu'elle te dit mon allure ?

Dark se retrouva soudainement collé au mur du Dangai, épée sous la gorge :

― Ne t'ai-je pas dit que je ne tolérerai aucune insulte ? Dois-je ajouter l'agressivité injustifiée sur ta liste d'interdits ?

Dark fixa la lame avec une anxiété certaine. Qu'est-ce qui le retenait d'envoyer son pied dans les valseuses de ce goujat déjà ? Ah oui, l'arme sous sa carotide… Byakuya finit par le lâcher et poursuivit :

― Ton visage me paraît bien fin pour appartenir à celui d'un homme, quant à tes formes, je ne veux pas m'avancer car elles ne sont que peu discernables sous tes vêtements larges, mais tu m'as l'air bien fluet.

― Tu t'es pas vu toi niveau finesse du visage.

― Je doute néanmoins que l'on tergiverse longtemps sur mon sexe quand on me voit. Dans ton cas, je n'arrive toujours pas à t'attribuer une identité.

― Qu'est-ce que ça peut te foutre d'ailleurs ?

― Cela m'est très frustrant de ne pas savoir si je dois t'appeler gamin ou gamine.

Byakuya attrapa de justesse la cheville destinée à sa mâchoire.

― En plus de l'agressivité injustifiée, j'ajouterai donc la violence gratuite à la liste de tes interdits.

Dark se renfrogna :

― Et pour info, je suis un mec ! Beau, intelligent, viril et classe d'ailleurs.

« Et mort », se dit le noble.

― Ce n'est pas ce que me dit ta voix et le reste de ton corps.

― J'ai juste pas mué.

― A quinze ans ?

― J'en ai que treize.

― Tu as dit en avoir quinze tout à l'heure.

― Bon, okay, j'ai un petit retard de croissance…

― Es-tu bien sûr ?

― Je sais quand même si je suis un mec ou une fille.

Sceptique, Byakuya annonça qu'ils arrivaient au bout du Dangai.

― C'est ça alors, Soul Society ? Le royauuuume des mooooorts, fit Dark d'une voix chevrotante en agitant les doigts et exorbitant les yeux.

Le tout était censé ressembler à un zombie ou un fantôme, mais Byakuya ne vit là que la marque d'une débilité profonde et incurable.

― Oui, nous sommes ici au Seireitei, le quartier réservé aux Shinigamis.

― Shinigamis ?

― Les âmes semblables à la mienne, possédant assez d'énergie spirituelle pour combattre les Hollows.

― Hollows ?

― Le monstre que tu as vu tout à l'heure et qui en voulait à ton réiatsu.

― Réiatsu ?

― Ton énergie spirituelle, ta force.

― Force ?

― Ce…

Byakuya s'interrompit et se tourna vers Dark qui lui souriait de toutes ses dents :

― « Je devrais donc ajouter le foutage de gueule sur ta liste d'interdits », c'est ça ? Imita Dark.

― Je te trouve bien insolent et bien sûr de toi pour un jeune homme fauché par la mort dans la fleur de l'âge il y une heure à peine.

― Bof, pour ce qu'était ma vie en même temps… Je suis presque…

Dark écarquilla les yeux. Le voilà qui songeait à voix haute !

― Bon, tu voulais pas m'amener à ton chef ?

Byakuya tiqua. Il ne supportait pas que ce gamin le tutoies, mais bon, il voulait bien laisser passer ça. Son indulgence le perdrait, à coup sûr.

― Nous y allons. Suis-moi. J'ai prévenu les autorités de ton arrivée tout à l'heure par téléphone, ils nous attendent.

Dark emboîta le pas à Byakuya, stressé. Il n'avait aucune idée concernant la suite mais tout ce qu'il espérait, c'était que « Monsieur Inexpression Faciale » ne lui fasse pas trop de misères.

Reconnaissant le capitaine Kuchiki, les gardes devant la première division du capitaine-commandant ouvrirent les lourdes portes battantes donnant sur la salle de réunion des capitaines. Tous étaient déjà là, attendant patiemment. Byakuya entra d'un pas rapide et se plaça au centre de la pièce, sachant pertinemment qu'il aurait des comptes à rendre pour avoir réveillé tout le monde à vingt-trois heures. Dark s'arrêta quelques pas derrière lui.

― Quoi ? S'égosilla Zaraki. Kuchiki, on nous fait lever en nous parlant d'une puissance phénoménale et tu nous ramènes ce gosse ?

― Ils n'ont jamais parlé de puissance phénoménale, juste d'une fluctuation spirituelle anormale. C'est vous qui avez mal compris, trancha Soi Fon, vexée elle aussi d'avoir été tirée de son lit.

Il ne lui restait plus qu'à prier pour que son rêve de Yoruichi-sama revienne...

― Ah, vous voilà, capitaine Kuchiki, fit le commandant de sa voix grave à l'arrivée de son subordonné. Pourriez-vous nous exposer la raison pour laquelle vous nous avez alerté ?

― Le plus efficace sera sûrement de juger par vous-mêmes. Focalisez-vous sur sa pression spirituelle, lâcha laconiquement le noble.

Dark vit dans l'instant plusieurs paires d'yeux se poser sur lui, le scrutant jusqu'au bout des ongles. La plupart de ces êtres en haori ne lui inspiraient pas confiance, en particulier celui avec des clochettes dans les cheveux et son voisin qui ressemblait étrangement à un panda avec son visage peint de noir et de blanc.

Les deux capitaines aux cheveux blancs, par contre, avaient l'air beaucoup plus sympa. Celui aux yeux bruns n'avait pas l'air agressif pour deux sous et lui fit un sourire radieux qui lui réchauffa le cœur. Quant à l'autre... Et bien, malgré son air sérieux, ce n'était qu'un gosse plus petit que lui.

Les deux femmes, elles, semblaient être des antithèses. La première avait de longs cheveux tressés et un sourire tel qu'on lui aurait donné le bon Dieu sans confession. L'autre, en revanche avait l'air nettement moins sympa, avec ses yeux fins et plissés qui lançaient des éclairs. Dark la trouva tout de même d'une classe indéniable avec ses deux longues mèches blanches ornées d'anneaux dorées.

Quant aux autres, Dark jugea qu'il n'avait pas trop à s'en méfier. Leur chef avait l'air si décati qu'il ne devait sans doute pas faire grand mal, le grand homme à l'impressionnante tête de renard inspirait inexplicablement confiance, et son voisin de gauche, avec sa veste de kimono aux motifs féminins, ne semblait pas bien méchant non plus.

Dark se frotta les yeux, épuisé. Qu'est-ce qu'ils cherchaient à voir en lui, au juste ? D'ailleurs, c'était quoi cette histoire de fluctuation spirituelle ? Ce serait bien la première fois qu'il ferait de l'esprit...

Les capitaines échangèrent des regards entendus. Kuchiki avait bien fait de sonner l'alerte. Quelque chose clochait. Remarquant la fatigue de leur hôte, Unohana proposa aimablement :

― Ce jeune homme est exténué. Quant à son réiatsu, c'est peut-être dû à une simple anomalie passagère. Peut-être pourrions-nous commencer avec une simple visite médicale, qu'en pensez-vous, Commandant ?

― Ah nan ! protesta Dark. Je veux pas de visite médicale ! Nan, nan, nan ! Droit de veto ! Je m'y oppose !

― Nous ne vous avons pas demandé votre avis ! coupa Yamamoto. Quand nous vous aurons examiné, vous serez libre. Unohana Taicho, emmenez ce jeune homme avec vous.

― Putain… même une condamnation à mort vous l'auriez dit plus sympathiquement je suis sûr…bougonna Dark.

― Ne le tente pas, siffla Byakuya, amer.

Dark déglutit difficilement et suivit la femme au beau sourire qui avait proposé de le prendre sous son aile. Arrivé en bas des marches, Dark se tourna vers Byakuya, un petit air désespéré flottant sur le visage. Il semblait vouloir parler, le remercier pour lui avoir sauvé la vie plus précisément, mais aucun son ne réussit à s'échapper de sa gorge.

― Cesse de me dévisager ainsi, gamin, coupa sèchement le capitaine en passant son chemin.

― Ohé ! Byakuya ! Attends-moi ! Fit Ukitake en rattrapant son ami et ancien élève.

― Que se passe-t-il, Jyuushiro ? Pourquoi cette mine sévère ?

― Tu y es allé fort avec ce jeune homme. Tu n'as rien remarqué ?

― Si, un sérieux penchant pour la stupidité.

― Je ne parlais pas de ça, voyons, Byakuya ! Tu n'as pas vu comme il était livide et chancelant ? Ce petit n'a pas du avoir la vie rose sur Terre. Je me demande si c'est lié à cette anomalie dans son réiatsu, d'ailleurs... Vas-y doucement avec lui, d'accord ?

― Je ne pense pas être de nouveau amener à le côtoyer.

― N'en sois pas si sûr, j'ai un pressentiment quant à tout ça... Tu sais comment il est mort ? demanda Ukitake.

― Non, aucune idée.

― Tu devrais aller à la quatrième division. Tu sais, les âmes s'attachent toujours un peu au Shinigami qui les envoie à Soul Society. Tu n'as pas vu qu'il est resté derrière toi tout du long et qu'il te regardait presque au bord des larmes quand il a vu qu'on le séparait de toi ?

― Je n'ai aucune envie de jouer les chaperons pour ce gamin.

― Je ne te l'ai pas demandé. Peut-être pourrais-tu juste aller aux nouvelles, je suis sûr que ça lui ferait plaisir.

Byakuya sut instinctivement que sous cette demande déguisée se cachait un ordre.

― Très bien, j'irai demain matin.

Au même moment, dans la quatrième division :

― Ne me touchez pas, merde !

Frappant les deux infirmiers qui approchaient de trop près, Dark tomba à la renverse et alla se rouler en boule dans un coin de la pièce, tremblant, les yeux écarquillés par une peur inexplicable, pleurant presque.

Un troisième infirmier sortit en trombe de la pièce et aller chercher le capitaine Unohana :

― Il refuse qu'on le touche. On lui a juste demandé de retirer ses vêtements pour mettre un pyjama plus confortable et il s'est mis à hurler. On voulait à tout prier le calmer alors on a essayé de l'attraper mais dès qu'on l'a touché, ça a été pire. Expliqua le premier infirmier.

― Je vois. Dit Unohana. Laissez-moi seule avec lui, je vous prie.

― Mais capitaine !

― N'ayez crainte, ce n'est pas un mauvais garçon. Sourit le capitaine.

Les infirmiers s'exécutèrent et sortirent. Unohana s'agenouilla près de Dark :

― Tu sais, je suis une femme et je sais reconnaître une de mes semblables quand j'en vois une.

Dark releva subitement la tête :

― Vous allez pas vous y mettre ! J'ai dit que j'étais un garçon !

― Tu as peut-être réussi à faire croire ça à des hommes, mais moi petit bouchon, tu ne me tromperas pas. C'est pour ça que tu ne voulais pas te changer devant eux ?

Dark hésita, puis acquiesça à contre-cœur.

― Ton secret sera bien gardé avec moi, n'aies pas peur. Veux-tu néanmoins bien me dire pourquoi tu te travestis ainsi ?

― Je…dans le monde d'où je viens…quand on est à la rue comme moi…c'est…dangereux…d'être une fille…alors…

― Je vois... Je comprends parfaitement, mais nous ne sommes pas ici dans la rue, et nous ne te ferons aucun mal. Tu peux être toi-même quand tu veux. D'accord ?

La fille fit oui de la tête.

― Dis-moi, si je continue de faire confiance à mon intuition, Dark n'est pas ton vrai nom, n'est-ce pas ? C'est un nom que tu as choisi pour impressionner les gens, voire les décourager de t'attaquer ? Un nom peut faire beaucoup, je suppose que tu en es consciente ?

― Vous avez lu dans ma tête ou quoi ?

― Quel est ton vrai nom ?

Dark hésita :

― Youji… avoua-t-elle.

― Youji ? Ça veut dire « bébé », non ? C'est adorable, complimenta Unohana.

― Ouais, adorable… Mes parents n'avaient juste pas envie de me trouver un prénom, alors comme on appelle toujours ses jeunes enfants « bébé »…

Choquée par l'origine de son nom, à savoir le désintérêt total de ses parents pour elle, Unohana commença à imaginer quel genre de vie Dark -ou plutôt Youji- avait du mener jusqu'à maintenant.

― Bon, je vais te faire moi-même les examens médicaux, d'accord ? Je ne dirai rien à personne le temps que tu voudras. Je vais sortir te chercher un repas, en attendant, veux-tu bien enfiler ce pyjama ?

Dark acquiesça.

― N'oublie pas Youji, personne ne veut te faire de mal ici, rappela le capitaine en posant sa main sur les cheveux de la jeune fille. Miraculeusement, Dark ne la mordit pas. Elle acceptait les contacts physiques uniquement s'ils étaient féminins et bien attentionnés.

Un brouhaha étouffa dans l'œuf le début de sympathie qui s'installait entre la capitaine et Dark. Unohana entendit ses hommes crier, visiblement après un intrus. Qui pouvait bien accourir jusqu'ici, à cette heure et dans cette chambre ?

― Bonsoir Unohana Taicho ! Je suis venu chercher le spécimen rare au réiatsu gigantesque pour mes expériences ! Si vous en avez fini avec lui, j'aimerai le disséquer là, maintenant, tout de suite ! fit le capitaine Kurotsuchi en brandissant un scalpel, l'excitation clairement visible sur son visage.

Unohana fronça les sourcils, prête à mettre dehors l'odieux personnage.

― Personne ne veut me faire de mal, hein ? ironisa Dark.