Prologue :

Tu étais blessée, j'ai cru te perdre et me perdre. J'ai hurlé ton nom et tu m'as regardée comme si c'était la dernière fois. Je t'ai vue m'abandonner, encore. J'ai fini par succomber aussi face au nombre. Mais on s'est relevées toutes les deux ensemble, dans un même mouvement. Le combat a repris et l'on dût battre en retraite. Je t'ai entendue du haut des marches. Tu as fait ton choix. C'était comme si tu me plantais un couteau dans le cœur, encore. Alors j'ai couru, couru et sauté dans ce bus qui m'emportait au loin. Mais pas assez loin, puisque tu étais toujours là.

Détruit, il ne reste plus rien. On peut dire qu'on a fait fort pour cette apocalypse. Tu as l'air fière de toi, fière de ce que tu viens d'accomplir mais tu ne me tromperas pas. Tu n'as jamais pu. Je te regarde et tu contemples ce cratère. Comme j'aimerai connaitre tes pensées, à quoi penses-tu ou peut-être à qui ? Je le vois, tu penses à lui. Je me demande ce que tu as prévu pour la suite. Est-ce que je suis dans tes projets d'avenir ? Non surement pas. Il vaut mieux que je te laisse vivre ta vie et que j'apprenne à vivre sans toi. Loin des yeux, loin du cœur.

C'est ce jour-là que j'ai compris que tu n'étais pas encore prête pour moi et que j'ai accepté la proposition de Giles.

Chapitre 1 :

C'est une nuit magnifique sur L.A., je suis sur le toit de l'Hypérion, celui-là même où Buffy m'a protégée contre les membres du conseil jusqu'à l'arrivée d'Angel. Celui où elle a promis de me battre à mort si je m'excusais, il y fait calme malgré que l'on soit en plein centre-ville. J'en profite après l'agitation de ces derniers jours. Je sais que demain, je vais partir, marcher au loin. Je n'ai plus ma place ici mais ce soir, je suis juste là à profiter. B doit rentrer de l'hôpital demain soir, ma présence n'est donc plus nécessaire.

Je me couche sur la couverture que j'ai apportée et observe les étoiles. Les souvenirs de ces derniers jours me frappent avec force. Je pleure doucement tout ce que je vais perdre.

Quelques jours auparavant :

Je suis au fond du bus qui nous tire de l'enfer. J'ai toujours été au fond du bus, suppose que c'est donc ma place. Quand j'étais gamin, l'arrière de l'autobus était pour ma bande. Nous venions secrètement fumer des cigarettes que nous avions volées à nos parents. Le chauffeur du bus nous avait demandé d'expliquer les empreintes de chaussures sur le plafond de l'autobus, et nous étions restés là à rire. Yep, nous étions considérés comme les mauvais enfants d'aussi loin que je me souvienne.

Grâce à un peu d'intimidation, je suis parvenue à avoir quelques rangées de libre autour de moi. J'aspire juste à prendre un peu de repos mais il semble que je sois la seule dans ce cas. Les Newbies fêtent bruyamment leur victoire depuis tantôt et de nombreux chants viennent me faire regretter l'absence de radio. Je me redresse et observe l'agitation autour de moi. Je repère vite B à l'avant. Elle a l'air épuisée. Je le vois à la façon qu'elle a de répondre aux questions des Scoobies par des haussements d'épaules et à cette moue qu'elle arbore. Elle va craquer bientôt ça n'en fait pas un doute. Soit, je n'ai pas envie d'attendre, je tire mon couteau de son étui à ma cheville. Je me lève et fais mon chemin jusqu'à Vi, elle est celle qui fait le plus de bruit. Je sais qu'il va falloir une grande action pour la faire taire mais se donner en spectacle est quelque chose qui m'est familier maintenant. Elle me tourne le dos dans l'allée et ça m'arrange bien. Je me glisse silencieusement, les filles continuent de babiller sans faire attention à moi. Suppose qu'elles me font confiance maintenant, pensent que je ne suis plus psycho. Je ne le suis peut-être plus mais je reste dangereuse …

En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, je suis derrière Vi, la tenant dans une prise de tête, mon couteau posé sur sa gorge. Très rapidement, on n'entend plus que nos deux respirations dans tout le bus. Même B est en état de choc mais je sais que dans son cas, ça ne durera pas alors il faut que je fasse passer mon message avant.

« Serait-il possible de dormir maintenant ? Non, parce que quand je n'ai pas mon compte de sommeil, j'ai tendance à perdre le contrôle. »

Je sens Vi trembler contre moi. Elle ne se débat pas et aucune de ses amies n'osent faire un geste vers moi. J'allais relâcher ma prise, estimant que mon avertissement est suffisant, lorsque je sens une petite main chaude qui se pose sur mon épaule.

« Donne. »

Je lève les yeux et rencontre le regard flamboyant de Buffy en face de moi. Oops, j'y ai peut-être été un peu fort. Je baisse les yeux et recule d'un pas, lâchant Vi. Celle-ci s'empresse de sortir de mon espace et se place derrière Buffy. Dans un soupir, je lève mes mains en signe de reddition et tends mon couteau à B, manche en avant. Elle le prend et me repousse jusqu'au fond du bus sans que j'oppose de résistance. Je n'ai pas envie de me battre avec elle et je crois qu'elle l'a très bien compris. D'une poussée plus forte, elle m'incite à m'asseoir sur la dernière rangée et me force à lui faire de la place. J'attends l'explosion qui ne manquera pas de venir. Je vois déjà le discours : tu ne dois pas mettre en danger la vie des autres, ce n'est pas un jeu, blablabla. J'aime quand elle commence à …

« Merci. »

Ok, ça s'est plutôt inattendu. « Hein, pourquoi … » Je suis surprise et je pense que ma tête le montre car je l'entends rire doucement. Je me tourne vers elle juste à temps pour saisir l'expression de douleur qu'elle cache aussitôt.

« Tu es blessée ? Où ?» Je n'attends pas sa réponse et soulève sa veste. Une large tâche de sang est visible sur son top blanc. Je tends ma main pour dégager le top mais elle m'attrape le poignet avant que je n'ai pu faire le geste. « Laisse, ce n'est rien qu'un peu de sommeil et une guérison slayer ne peut résoudre. » Je peux voir dans ces yeux qu'elle est sérieuse ou du moins qu'elle pense ce qu'elle dit. Je n'ai pas envie de me battre mais je ne peux la laisser blessée sans m'être assurée que ce n'est rien. « Ne joue pas au Général Buffy avec moi. Montre-moi et je te laisserai tranquille. »

« Quoi ? Oh ok, regarde. » Elle soulève son débardeur et je vois sa blessure. Elle est assez profonde mais ne semble pas avoir touché le moindre organe vital. Je fais courir mes doigts autour des bords, elle frissonne à mon contact. Un bref regard à son visage m'apprend qu'elle a fermé les yeux et que ses traits sont détendus. Bon pas besoin de points de suture ici, la blessure est propre et a déjà commencé à cicatriser. A contre cœur, je me recule et m'appuie à nouveau contre la vitre. Je lâche l'air que je retenais inconsciemment.

« Tu vois … Je te l'avais dit. Peut-on dormir maintenant ? » constate-t-elle. Sa voix est faible et elle n'a toujours pas rouvert les yeux.

« Ouais, ouais, tu peux retourner devant. Je vais dormir aussi de toute façon. » Je fais un vague geste de salut et me tourne vers l'extérieur. Je la sens qui hésite à côté de moi.

« Bonne idée … » Elle se lève, s'apprête à faire son chemin vers l'avant et ça me brise le cœur. « En fait, c'est au-dessus de mes forces. Pousse-toi un peu que je trouve une position confortable» me dit-elle en se rasseyant plus près de moi. Elle pose ses pieds sur la banquette et sa tête sur mon épaule. Son dos appuie contre mon côté et je ne sais pas très bien quoi faire de mon bras. Je me sens comme entrain de vivre un rêve. Finalement, je me tourne, enroule mes bras autour d'elle et la tire plus proche encore. Au bout de quelques minutes, je la sens se relaxer et son souffle qui se ralentit.

J'aimerai m'endormir aussi facilement qu'elle mais la chaleur qu'elle dégage et les restes de la grande bataille me torturent. Quelle douce torture. Merde, je tiens B. dans mes bras et aucune de nous deux n'est inconsciente, enfin si mais rien d'anormal. On peut dire qu'il y a un sacré progrès. Peut-être que l'on peut prendre un nouveau départ et être ami, non que je n'aimerai pas plus mais soyons réaliste, B. est plus hétéro que l'ensemble du bus réuni et je sais que je ne suis pas vraiment son type. Il me faut une bonne heure avant d'arriver à fermer les yeux à mon tour.

Lorsque je me réveille, je sens tout de suite qu'elle est toujours contre moi. Mes bras sont autour d'elle et ses doigts tracent des formes compliquées sur mes mains jointes. C'est ce toucher délicat qui m'a tirée de mes rêves mais la réalité est juste meilleure pour le moment. Je n'ai pas vraiment envie de la lâcher. Je ne bouge pas, espérant qu'elle pense que je dors encore. « Bien dormi ? » Okay c'est officiel, je suis vraiment une mauvaise actrice autant être honnête.

« Ouais, la meilleure sieste que j'ai eue depuis longtemps. » Elle se tortille un peu pour regarder dans mes yeux. Sans doute pour juger ma sincérité mais je tourne mon regard vers l'extérieur. Le désert a été remplacé par la ville et l'on peut apercevoir quelques maisons par ci, par là. Je sais qu'elle m'observe toujours alors je finis par céder à son regard insistant.

« Quoi ? Où sommes-nous ? » Ouch, sa tête est plus proche que je ne le pensais. Il me suffirait de me pencher un peu plus pour l'embrasser. Cette pensée me gèle complètement et je loupe sa réponse. J'ai envie de lécher doucement ces lèvres pleines, de les prendre délicatement entre mes dents, de jouer avec elles. Je ne reprends conscience de la réalité que lorsqu'elle me punche légèrement dans le ventre en rigolant un petit peu. Je me détache de ses lèvres pour écouter sa question. « Que vas-tu faire quand on sera à L.A. ? » répète-t-elle. Elle semble vraiment préoccupée par le sujet et tout son corps se contracte en attendant ma réponse. Reste à l'apaiser, je lui donne la réponse que j'ai préparée sachant qu'on me poserait surement la question.

« Sans doute, retourner en prison. Pas vraiment achevé ma peine tu vois. Bon avec l'évasion et tout ça, je dois être pas mal recherchée donc vaut mieux pas qu'on me trouve en votre compagnie. » Je dis ça sur un ton blasé en me détachant de son visage. Je n'ai pas besoin de le voir pour savoir qu'elle est contrariée. Elle a repris son toucher léger sur mes mains qu'elle regarde fixement mais son corps est toujours tendu. « Et si tu restais avec nous ? Je … »

« Buffy, Giles m'envoie te dire qu'on va bientôt arriver chez Angel. » Fuck, Rouge, t'as vraiment un timing de merde. Je crois que B. pense la même chose car elle renvoie Willow d'un geste sans même lui répondre ou la regarder. Ce qui n'empêche pas Rouge de me regarder comme si elle allait me tuer avant de nous laisser à nouveau seules. Enfin aussi seules que l'on peut être dans un bus rempli de Tueuses avec une audition améliorée, suppose qu'elle va demander à Ken de nous écouter pour être sûre que je ne vais pas tuer Buffy à nouveau.

« Pense pas que ça soit une bonne idée B. Regarde … » Mais je n'ai pas le temps de finir qu'elle se redresse dans mes bras pour se retrouver face à moi. « Oh, allez Faith … » Je sens ses mains qui se posent sur la banquette à quelques centimètres de mon ventre alors qu'elle me fixe droit dans les yeux. « Laisse-nous une chance. Je te veux près de m… nous. Je veux apprendre à te connaitre. » Son visage est proche de moi, trop proche pour que je puisse réfléchir clairement. « Je ne … » J'allais sortir un refus mais elle me fait sa moue. Raah, cette façon qu'elle a de laisser trembler sa lèvre me fait toujours craquer. « Merde, d'accord, je vais rester un mois pour t'aider et puis je retourne en prison. Suppose qu'un mois ne fera pas une grande différence de toute façon. » Elle n'est pas entièrement satisfaite de ma réponse. « Très bien, ça me laisse un mois pour te convaincre de rester. »

Sur ces derniers mots, le bus s'arrête et tout le monde commence à sortir. Je desserre mes bras et lui permets de se relever en prenant appui sur moi. Lorsque nous ne sommes plus que toutes les deux, elle fait son chemin à travers les rangées sans se retourner. Je devine plus que je n'entends les mots qu'elle murmure. « Même si je dois me battre pour que tu restes cette fois. »