Chapitre 1: La boîte à secrets

Résumé (plus complet) de la fiction: Naruto et Sasuke. Sasuke et Naruto. D'abord deux enfants puis deux hommes que le destin s'acharne à réunir dans le pire comme dans le meilleur. Deux âmes en peine avec lesquelles la vie s'amuse, se distrait. Elle les unit un temps, les fait s'aimer ardemment, puis les sépare sans scrupules, imperméable à leurs sanglots, sourde à leurs complaintes, et finalement décide de les unir encore. Définitivement ? Rien n'est moins sûr. Lentement, elle les entraîne dans une valse macabre, leur donne le vertige, ébranle leurs convictions, leur fait perdre l'équilibre au milieu d'un tourbillon de sentiments.

Il était plus de dix neuf heures et le crépuscule tombait sur Kyoto, la drapant d'un manteau sombre. Le soleil, étincelant d'un rouge flamboyant, tombait dans l'horizon comme un astre mort, au milieu d'un ciel où une multitude de filaments roses et oranges se mêlaient sans pudeur, perforant les nuages cotonneux qui avançaient au gré du vent. Au cœur des ruelles ombragées, les commerçants fermaient boutique, baissaient les volets, éteignaient les enseignes. Seuls les bistrots et les restaurants demeuraient ouverts. Enfermé dans son bureau, dans un charmant duplex en bordure d'un large boulevard, Sasuke Uchiha se perdait dans les méandres de son esprit. Debout face à la fenêtre entrouverte, les mains dans les poches de son jean, il contemplait d'un œil absent la ville réduite à la taille d'une maquette. Les voitures, minuscules, arpentaient les rues embouteillées en laissant derrière elles des relents de fumée noirs. D'habiles conducteurs parvenaient tant bien que mal à s'extirper de l'effroyable bouchon en multipliant les queues de poisson et exécutant d'impensables manœuvres. On aurait dit que des petites billes colorées zigzaguaient furtivement sur une surface plane et noire éclairée par la lumière blafarde des réverbères. Les coups de klaxons, hâtifs ou rageurs, fusaient dans l'air. Sur les trottoirs bordés de réverbères en fer forgé grouillait une masse humaine pressée. Téléphone portable à l'oreille ou dans la main, les gens se bousculaient, se piétinaient, se plantaient devant le passage pour piétons et traversaient sans même prendre garde aux voitures déboulant de nulle part. Les pneus crissaient, les injures volaient, les éclats de voix couvraient presque le bruit assourdissant des moteurs. Un homme imprudent manqua de se faire renverser par une imposante Audi blanche.

Le chauffeur s'arrêta net, à seulement deux millimètres de la silhouette svelte et sombre du trentenaire. La fenêtre s'ouvrit tandis que le piéton, choqué, recouvrait peu à peu ses esprits, une main sur le cœur. Une tête rondouillette et dépourvue de cheveux apparut pour l'assommer de reproches. L'homme s'énerva, jeta son attaché-case sur l'asphalte, et asséna un violent coup de poing au capot de l'Audi tout en insultant son propriétaire de danger public. Le danger public en question se vexa, bondit hors de son véhicule et se rua sur l'homme pour lui refaire le portrait. Comme des chiffonniers, ils se battirent sur la chaussée, nullement importunés par les regards à la fois dépités et inquiets des passants. Sasuke secoua la tête en croisant les bras. Un soupir lourd de sens franchit le barrage de ses lèvres. Décidément, le monde devenait fou. Las de son observation, il tourna les talons et balaya la pièce de son regard sombre. Une dizaine de cartons se trouvaient entassés par-ci et par-là, quelques tableaux, emmitouflés dans du papier journal et posés contre l'un des murs chamarrés, attendaient sagement d'être accrochés. Un large bureau en bois d'acajou dominait le bureau pourvu d'une longue baie vitrée. Aplati sous ses quatre pieds, un tapis vert orné de formes géométriques complexes jonchait le plancher. A côté de la bibliothèque où s'amoncelaient une quantité impressionnantes d'ouvrages, se trouvait un ficus aux feuilles défraîchies. Apparemment, le déménagement ne l'avait pas laissé indemne. Suspendu au plafond peint d'un blanc cassé étincelait un lustre en cristal, héritage que Sasuke avait obtenu de son arrière-grand-mère, décédée quatre ans plus tôt.

Cela faisait environ deux semaines qu'il avait emménagé dans ce coquet immeuble situé en face d'un boulevard bruyant et empestant le pot d'échappement, bien loin de la grande maison de campagne où résidaient encore ses parents. Sakura Haruno, sa compagne, s'y sentait comme chez elle. Elle avait déjà terminé de remplir la garde-robe, de recouvrir les murs du salon avec d'immondes peintures, de remplir les étagères de la cuisine, de décorer la salle de bains, d'acheter de nouveaux draps pour le lit. Sasuke s'épuisait rien qu'en la regardant. Sakura était une vraie pile électrique. Elle courrait dans tous les sens, telle une petite fourmi débordée. Son incroyable capacité d'adaptation fascinait presque son conjoint. Alors qu'il peinait encore à trouver le sommeil quand venait la nuit, dérangé par le vacarme incessant de la circulation, Sakura dormait à poings fermés, blottie au creux de ses bras. Vêtue de son élégante et sensuelle nuisette en soie noire, elle l'embrassait chastement, un sourire sur les lèvres, et lui souhaitait de passer une agréable nuit. Puis, doucement, elle posait sa tête parsemée de cheveux roses sur son torse imberbe et il l'étreignait avec tendresse. L'une de ses mains courrait sur son épaule nue et, bercée par le souffle calme de sa respiration, elle sombrait dans un sommeil profond. Souvent, Sasuke glissait une main dans ses cheveux soyeux, redécouvrant leur douceur singulière, humant leur parfum fruité. Alors elle gémissait un peu avant de soupirer profondément. Pour Sasuke, devenu insomniaque, les nuits semblaient interminables.

Ses prunelles onyx s'arrêtèrent sur le premier tiroir du bureau. Il s'approcha en traînant les pieds et se laissa tomber sur le fauteuil en cuir noir. Il ouvrit le tiroir, y dénicha une clé qu'il glissa ensuite dans la serrure du second tiroir. Ce dernier s'ouvrit en émettant un geignement plaintif. Délicatement, comme s'il s'agissait d'un bijou inestimable, Sasuke en extirpa un petit coffre revêtu de bois. Avec les années, il commençait à s'user et les motifs fleuris qui autrefois l'embellissaient avaient presque complètement disparus. Sasuke ôta le couvercle. Son regard s'adoucit. Il n'était pas d'un naturel sentimental et se surprenait d'accorder tant d'importance à une simple boîte. En réalité, le coffret lui importait peu. Sa peau de bois pouvait bien s'effriter, la peinture dont il était enduit pouvait bien s'écailler, il pouvait même se briser en mille s'il le souhaitait du moment que les souvenirs qu'il contenait demeuraient intacts.

Intacts comme au premier jour.

Une bonne vingtaine de clichés soigneusement pris par ses soins reposaient au fond de ce qu'il aimait appeler sa boîte à secrets. Une panoplie de souvenirs résidaient dans les entrailles de ce simple coffret boisé anodin aux yeux des autres mais essentiel pour les siens. Des clichés jaunis par les années, des gribouillis d'enfants, de vieux pendentifs à moitié brisés, des mèches de cheveux blonds et noirs enlacés en une courte tresse, une grosse bague en plastique orange, une feuille pliée en quatre. Du bout des doigts, Sasuke effleura les sourires à jamais figés sur le papier glacé et son cœur rata un battement. Sur la photographie, on pouvait apercevoir deux enfants âgés de six ans qui se tenaient par l'épaule.

Leurs sourires rayonnaient de bonheur et il était difficile de croire que la photo avait été prise au sein d'une chambre d'hôpital. Sasuke, petit garçon rêveur et jovial, portait la tenue réglementaire, autrement dit une hideuse chemise de nuit piquée de petits points noirs. Quelques mèches de cheveux ébène lui tombaient sur les yeux, masquant un peu l'authentique sérénité défilant dans ses prunelles noires et cerclées d'un timide violet. Lorsqu'on se laissait prendre au piège de ses sourires, on ne décelait aucunement la présence d'une leucémie. A ses côtés se trouvait un garçon d'aspect plus frêle, plus fragile. Son crâne, chauve et lisse, faisait penser à une coquille d'œuf luisante. La lueur blafarde des néons se reflétait sur cette surface de chair où commençait à poindre un halo de cheveux blonds. La fatigue crispait les traits de son visage hâlé par le soleil et de larges cernes soulignaient ses grands yeux bleus.

Naruto Uzumaki. Celui qu'il surnommait autrefois son compagnon de galère. Celui qui fut là aux heures les plus sombres. Celui avec lequel Sasuke jouait aux cartes ou au Monopoly pendant les séances de chimiothérapie. Naruto, cet enfant atteint d'une tumeur au cerveau, cet enfant doux aux yeux rieurs qui lui rappelait à la fois les meilleurs et les pires instants de ses premières années de vie. Pendant des semaines entières, des mois incessants, des années insatiables, ils partagèrent leur quotidien, connurent les mêmes souffrances, goûtèrent aux mêmes plaisirs. Ensemble, main dans la main, ils traversèrent les saisons, les regardèrent s'égrener en se demandant s'ils seraient grands un jour, s'ils fouleraient encore le sol de la Terre l'année suivante.

Quand venait l'automne, période maussade où la chaleur de l'été s'attenue, ils contemplaient la chute des feuilles en réprimant leur immense désir de s'échapper de l'hôpital pour aller les piétiner sans remords. Comme cela devait être drôle de les entendre crépiter sous les semelles de ses chaussures. Agenouillés face à la fenêtre, en appui sur un coude, ils regardaient les Japonais marcher sous une pluie de feuilles chatoyantes. Leurs épaules en étaient recouvertes et ils s'en débarrassaient d'un geste vif de la main. Emmitouflés dans de gros manteaux, ils arpentaient les ruelles avec un parapluie en main, prêts à se protéger d'une soudaine averse. Quand les infirmières s'accordaient une pause, Naruto ouvrait en grand la fenêtre de la salle de jeux en ignorant superbement les râles plaintifs de ses camarades. Alors le vent âpre de novembre se faufilait dans la pièce empestant le cire et la désinfectant pour caresser ses cheveux blonds, faire rosir ses joues pleines et ponctuées par deux mignonnes fossettes, hérisser toute la surface de sa peau ambrée. Grelottant, Sasuke se collait à lui, posait la tête sur son épaule. Et, en proie à une douce mélancolie, ils regardaient le monde extérieur avec les yeux d'enfants qui ne pourraient peut-être jamais découvrir l'immensité de ses merveilles.

L'hiver, ils fêtaient Noël entre les murs recouverts de dessins enfantins de la salle de jeux du Centre Hospitalier Universitaire de Tokyo, leur ville natale. Un clown avec une boule rouge en guise de nez venait les distraire, essayait de les faire rire, avant qu'un Père-Noël à la fausse barbe blanche ne leur offre un cadeau. Souvent, il s'agissait d'une peluche puante et éclopée ou d'une poupée mutilée. Des présents modestes, des déchets que la population daignait leur offrir une fois lassée, qui mettaient un sourire sur leur visage d'enfants malades. En compagnie d'une dizaine d'autres enfants, ils dégustaient une bûche chocolatée au milieu d'un brouhaha sonore et de chants de Noël agaçants. Parfois, depuis la rue leur provenaient les éclats de rire des autres enfants, ceux qui avaient le privilège de se trouver à l'extérieur, de disputer de féroces batailles de boule de neige, de sauter à pieds joints dans la poudreuse scintillante. Dans ces moments-là, les voix se taisaient, les sourires s'effaçaient, les bouches cessaient de mastiquer. Leur différence, leur infirmité, leur maladie, s'imposait de nouveau à eux pour leur rappeler que leur vie ne pourrait jamais être la même que ceux des autres marmots de leur âge.

Quand arrivait le printemps, accompagné de ses températures clémentes et de ses brises délicates, ils regardaient le monde défiler à travers la fenêtre ouverte. D'un œil rêveur, ils enviaient les moineaux occupés à virevolter dans l'étendue infiniment bleue du ciel d'avril. De temps en temps, lorsque leur état physique le permettait, ils allaient s'asseoir sur l'un des bancs du parc de Shinjuku Gyoen pour dévorer un cornet de glace avec leurs parents et s'émouvaient de la beauté naturelle des cerisiers en fleurs. Naruto choisissait toujours les saveurs pistache et stracciatella. Sasuke, quant à lui, préférait de loin le classique mélange de la vanille et de la fraise. Alors, les lèvres sucrées et les joues barbouillées de crème glacée, ils courraient comme des petits fous, bras levés vers le ciel, et poussaient des cris de joie. Ils s'agenouillaient au bord du lac dont la surface se trouvait piquée de nénuphars verdâtres et jetaient des morceaux de pain rassis aux canards. Quand il ne restait plus qu'une seule tartine au fond du sac, ils se chamaillaient pour savoir lequel des deux la lancerait aux volatiles affamés. Bien souvent, l'un des parents se levait pour la couper en deux parts égales et tendait une moitié à chacun. Ensuite, les deux amis faisaient la lippe pendant une petite demi-heure avant d'enterrer la hache de guerre.

A chaque apparition de l'été, ils mourraient d'envie de s'exiler à la mer, d'y plonger la tête la première afin de découvrir la beauté de ses profondeurs. Nager avec une multitude de poissons multicolores, frôler la barrière de corail, sauter dans les friselis blanchâtres des vagues, faire un concours de châteaux de sable ou explorer les dunes à la recherche de coquillages. En août, Sasuke fêtait son anniversaire et à l'approche de l'évènement, Naruto se montrait euphorique. Son père l'emmenait faire les magasins pour qu'il puisse trouver un cadeau idéal pour son meilleur ami. Les parents de Sasuke apportaient un gâteau au chocolat où trônait un nombre variable de bougies enflammées. Voraces, les enfants engloutissaient leur part sans même prendre le temps de la savourer. Les moelleux morceaux de chocolat à peine mâchés dégringolaient dans leur trachée. Certains s'étouffaient presque et se laissaient surprendre par une interminable quinte de toux. Sasuke se rappellerait toujours de ses sept ans. Cette année-là, il faisait une rechute et devait impérativement rester alité. Mikoto et Fugaku Uchiha n'apportèrent pas de gâteau à l'été de ses sept ans mais Naruto lui offrit un cadeau particulier. Alors qu'il était au plus mal et que ses cheveux noirs chutaient en grosses poignées sur ses épaules osseuses, Naruto était apparu dans l'embrasure de la porte. Son sourire lumineux aurait pu éclairer la plus sombre des pièces. Sasuke ne put y résister. Il l'invita à entrer. Sa présence lui fit un bien fou. Elle fut un meilleur remède que toutes ces pilules qu'on l'obligeait à avaler.

Le blondinet obtempéra, mains jointes derrière le dos. Une lueur espiègle dansait dans son regard. Avec effort, il se hissa sur le lit de Sasuke pour s'y asseoir. Ses petits pieds nus pendouillaient dans le vide, se balançant d'avant et arrière. Il plaqua une publicité sous le nez de son ami. Sourcils en circonflexe, Sasuke parcourut l'affiche, sceptique. Apparemment, il s'agissait d'une réduction pour une croisière sur le Nil, en Egypte. Sans doute Naruto l'avait-il récupérée dans une agence de voyage. Un magnifique paquebot blanc flottait sur une mer aux multiples nuances cobalt. La coque blême du navire luisait sous les rayons du soleil et si on y prêtait attention, on pouvait même apercevoir une horde de dauphins en train de sautiller près des hélices. Naruto se pencha vers son ami et ancra son regard dans le sien. Il y avait tant d'intensité au fond de ses yeux que Sasuke en fut troublé. Toi et moi, on ira voir la mer un de ces jours. Je te le promets. Voici mon cadeau d'anniversaire. Je t'offre l'océan. Telles furent les paroles de Naruto. Il les lui avait chuchotées d'une voix tremblante, empreinte d'une attendrissante candeur, les joues striées de pourpre. Sasuke n'eut pas le luxe de rétorquer. Naruto abandonna la publicité sur les genoux de son ami et sauta du lit. Il disparut en courant. A peine deux secondes plus tard, des éclats de voix lui parvinrent depuis le couloir. Naruto s'était fait enguirlandé par une infirmière. Il se souvint d'en avoir souri.

Aujourd'hui, cette affiche publicitaire reposait au fond de son précieux coffret, pliée en quatre et intercalée entre deux clichés. Naruto et lui n'étaient jamais allé voir la mer, finalement. Du moins, pas ensemble. La première fois qu'il vit la mer ailleurs que sur un écran de télévision fut en juillet dernier. En compagnie de Sakura. En cet après-midi estival, le soleil était brûlant et lui mordait la nuque. Le vent soufflait à n'en plus finir à tel point qu'il devait hurler dans les oreilles de sa petite amie pour se faire comprendre. L'alizé malmenait ses cheveux, griffait ses joues, soulevait les pans de sa chemise. La marée était basse et une multitude de flaques salées maculaient le sable opalin. Certaines étaient sombres, abyssales, presque effrayantes. Elles semblaient détenir moult secrets insaisissables, mystères insondables. Leur côté énigmatique lui donna envie d'y plonger la tête pour les découvrir. D'autres en revanche étaient plus claires, au point qu'on aurait pu croire qu'elles fabriquaient de la lumière. Au fond d'elles gisaient de petits coquillages blanchâtres à la coquille ébréchée. Sasuke en ramassa plusieurs, les essuya soigneusement avec un pan de sa chemise et les glissa dans la poche de son pantalon. Sakura le regardait faire, attendrie. Au-dessus de leurs têtes, le soleil roulait entre les nuages, projetait des éclats de lumière. Un sillon doré venait se graver à la surface ondulante des mares.

Sakura lui tenait la main et l'entraînait vers les vagues en souriant. Agitée, la mer s'élevait en de gros rouleaux écumeux, propulsant des algues verdâtres sur le sable humide. Un peu plus loin, encouragées par le vent, les vagues allaient se briser contre la barrière de corail avant de venir mourir sur l'étendue sablée. Hypnotisé par la beauté des lieux, Sasuke ne put que suivre les pas de Sakura. Elle s'était attaché les cheveux ce jour-là. Sasuke la trouvait toujours incroyablement belle avec les cheveux noués. Ce genre de coiffure mettait en valeur l'ovale élégant de son visage et le vert sombre de ses yeux. Elle s'était accroupie pour retrousser son jean et retirer ses baskets. Puis, comme s'il s'agissait de quelque chose de parfaitement naturel, elle glissa ses pieds dans l'eau froide et salée. Une ribambelle de frissons dégringola le long de son échine et elle se trémoussa un peu. On aurait dit une fillette au comble du bonheur. Dans un élan d'affection, Sasuke l'avait prise dans ses bras pour l'embrasser. Un de ces rares instants où il dévoilait une tendresse insoupçonnée.

Néanmoins, malgré l'allégresse du moment, une chape de douleur lui tomba sur le cœur, telle une lourde enclume. Ses pensées s'étaient dirigées vers Naruto. Son sourire angélique et ses prunelles d'azur s'étaient dessinées sous ses paupières à demi-closes. Un souvenir douloureux heurta sa mémoire et il regretta presque de s'être rendu sur les plages d'Okinawa en compagnie de sa chère et tendre. Il eut la désagréable impression d'avoir trahi un vieil ami, manqué à l'un de ses devoirs, oublié d'honorer une promesse. Souvent, il se demandait ce qu'était devenu Naruto. Vivait-il toujours à Tokyo ? Sasuke s'efforçait de ne pas imaginer un scénario macabre. Il se plaisait à croire en la survie de Naruto. Après tout, il n'ignorait rien de son tempérament combattif et de son exemplaire détermination. Naruto était vivant. Sasuke en était persuadé. Il le sentait jusque dans ses tripes. Il avait foi en Naruto comme d'autres ont foi en Dieu. Rien ne pouvait l'expliquer. Il restait persuadé qu'un trait d'union invisible les maintenait unis malgré la distance et l'absence.

A l'époque, Sasuke voyait leur amitié comme éternelle. Les hauts murs du CHU semblaient moins tristes, moins vétustes, en compagnie de Naruto. Ses sourires et sa bonne humeur embellissaient son quotidien, le rendaient moins pénible. Sans Naruto, Sasuke ignorait s'il se serait battu avec tant de hargne contre cette maladie qui le rongeait depuis sa naissance. Car il y avait des jours où la lutte devenait bien trop laborieuse, des jours où, en dépit de son jeune âge, il ne supportait plus la vie et ses mauvais tours, des jours où les regards compassionnels et peinés de ses proches le dégoûtaient réellement. Mais Naruto était toujours là, joyeux et serein. Il réussissait l'incroyable exploit de le faire éclater de rire avec ses blagues minables. Et puis un jour, Fugaku Uchiha, son père, lui annonça sa mutation à Kyoto. Il venait d'être promu cadre supérieur et son employeur estimait qu'il serait plus utile au sein d'une autre entreprise, située à Kyoto. Ils allaient vivre à plus de trois cents kilomètres de la capitale, à plus de trois cents kilomètres de Naruto. Du haut de ses neuf ans, Sasuke s'y opposa avec véhémence. En apprenant la nouvelle, il hurla son désaccord, déversa des torrents de larmes, répéta qu'il ne voulait pas quitter son unique ami. Ses épaules maigrichonnes tremblaient comme des feuilles. Il se souvint que son frère aîné, Itachi, l'avait prit dans ses bras pour le réconforter. Avec tendresse, il caressa son dos parcouru de soubresauts et lui murmura de douces paroles au creux de l'oreille. Sasuke s'était contenté d'enrouler les bras autour de son cou et de se laisser bercer. Epuisé, il finit par s'endormir. Nous étions en novembre.

Ils quittèrent Tokyo deux semaines plus tard alors que Sasuke connaissait une brève période de rémission. Tractant de lourdes valises, ils grimpèrent dans l'un des wagons du train à destination de Kyoto à neuf heures quarante et une précises. Accompagné d'une infirmière, Naruto s'était rendu jusqu'au quai pour adresser un dernier au revoir à son précieux ami. Pour masquer son crâne chauve, il portait un épais foulard de soie bleu. Un gros nœud peu élégant tombait sous son menton. Ses joues étaient si creuses qu'on aurait pu croire qu'elles étaient aspirées de l'intérieur et son teint, inhabituellement blême, faisait penser à celui d'un noyé.

Naruto rechutait. Sasuke le savait. Avec talent, il avait déchiffré le sens de ses silences. Et il ne sera pas là pour le soutenir comme Naruto l'avait fait pour lui. Il se détestait de s'enfuir au moment où son compagnon de galère avait le plus besoin de lui. Sasuke s'agenouilla sur l'inconfortable banquette verte du wagon et, les mains et le nez collés à la vitre crasseuse, chercha Naruto parmi la foule amassée sur la voie. Vêtus de chauds duffle-coat et d'épaisses doudounes, les passagers se pressaient sur le quai, se bousculaient sans ménagement. Un couple s'embrassait avec ardeur, échoué au milieu de la masse humaine. La femme versait des larmes et son compagnon lui souriait d'un air triste. Eux aussi étaient en train de se quitter. Un large sourire se peignit sur les lèvres fines de Sasuke lorsqu'il aperçut Naruto. Son cœur bondit au creux de sa poitrine. Les rafales âpres du vent de novembre le faisait chanceler. L'infirmière le tenait par l'épaule. Comme il semblait fragile. Une simple bourrasque aurait pu le faire tomber comme un vulgaire insecte. Naruto leva une main gantée de daim et lui fit un petit signe tout en bougeant les lèvres. Adieu, murmurait-il. Sasuke sentit les larmes lui monter aux yeux en lui rendant son geste. Il eut envie de descendre de ce maudit train pour aller l'étreindre avec toute la force dont il était capable.

Les portes se fermèrent. Le contrôleur passa entre les rangées. Un bébé, blotti contre sa mère, se mit à pleurer. Son visage rondouillet devint tout rouge. Le train démarra. D'abord lentement puis de plus en plus vite. Naruto devint bientôt hors d'atteinte. Sasuke se laissa tomber mollement sur sa banquette en serrant les dents et tourna le dos à ses parents. Sa mère, le nez plongé dans un roman d'amour, ne remarqua guère sa détresse et son père, trop occupé à discuter avec un autre passager pour prendre seulement conscience de la présence de son fils cadet l'ignora durant tout le voyage. Seul Itachi se soucia de son désarroi. Il alluma son lecteur MP3 et donna l'un des écouteurs à son petit frère. Ce dernier le glissa dans son oreille sans dire un mot. L'air de Wonderwall fit vibrer ses tympans. Ils traversèrent plusieurs gares. Le train ralentit la cadence quelques instants. D'un air absent, Sasuke essaya de lire le nom des différentes gares inscrites sur les panneaux blancs. D'abord, il y parvint. Puis l'image devint de plus en plus floue, rendant l'exercice plus difficile. Il y arriva une fois sur deux. Enfin, il finit par ne plus y arriver du tout. Un paysage verdoyant défila sous ses yeux éteints. Il clôt les paupières et s'égara dans ses souvenirs. Il ne dit pas un mot durant tout le trajet.

La porte d'entrée claqua, l'arrachant à ses pensées. La voix aigüe de Sakura se fit entendre depuis le hall d'entrée. Furtivement, Sasuke rangea sa boîte à secrets au fond du tiroir et quitta son bureau. Accroupie au milieu du salon, Sakura étreignait Kusanagi, l'Akita beige qu'ils venaient à peine d'adopter. Le chien lui léchait les joues en remuant énergiquement la queue. En riant, Sakura l'embrassa entre les deux oreilles avant de se redresser. Elle se débarrassa de sa petite veste en soufflant puis s'approcha de Sasuke, les bras tendus vers l'avant. Sasuke l'enlaça et déposa un doux baiser sur son front. Sans cesser de sourire, elle se blotti contre lui et ferma les yeux. La joue posée contre le torse de Sasuke, elle écoutait les battements réguliers de son cœur, s'enivrait de son parfum aux arômes d'agrumes, succombait à ses chastes caresses. Kusanagi se mit à aboyer en tournoyant autour de d'eux. Sasuke le caressa distraitement en l'intimant de se taire.

-Excuse-moi de rentrer si tard, susurra Sakura, mais j'ai été boire un pot avec les collègues après le boulot.

Il haussa les épaules.

-T'en fait pas. Ca va ?

-Et toi ? chuchota-t-elle en l'embrassant avec tendresse.

Sasuke garda le silence. Secret, il préférait de loin poser les questions plutôt qu'y répondre, surtout quand on l'interrogeait sur son état. Ca va était une question à laquelle il évitait de répliquer. Franc, Sasuke ne désirait pas mentir en clamant haut et fort que tout allait parfaitement bien dans le meilleur des mondes. Réservé et un tantinet égocentrique, il ne souhaitait pas non plus pleurnicher sur son sort en affirmant que rien n'allait comme il le voulait. A son grand bonheur, Sakura n'insista pas. La force de l'habitude, certainement. Elle se décolla de lui et gagna la cuisine. Sasuke la suivit. Une fois encore, le bon goût de sa compagne l'étonna. Seule, Sakura s'était entièrement dévouée à la décoration de la cuisine, pièce qu'elle considérait comme son antre de paix et de labeur. Les murs, peints en rouge, une couleur qui donnait du peps, selon elle, étaient recouverts de tableaux exotiques aux nuances orangées. Une corbeille de fruits reposait sur le comptoir en céramique, juste à côté de la gazinière. On pouvait voir des pommes y mûrir, des bananes y jaunir, des fraises y rougir. Dans la cuisine de Sakura, il y avait toujours des légumes frais occupés à blondir au fond d'une poêle enduite de beurre, du chocolat en train de fondre au bain-marie, du poulet rôti gisant au fond du four, des grains de pop corn sautillant dans une casserole. Elle ouvrait avec un tablier ceint autour de sa taille de guêpe, remontait ses manches et éminçait la viande avec patience, vidait le poisson avec parcimonie, épluchait les pommes de terre avec délicatesse, touillait le riz avec douceur. Souvent, elle allumait la radio posée à côté de l'évier et faisait la vaisselle en chantant à tue-tête. Ses hanches frêles se dandinaient de gauche à droite au rythme de la musique tandis qu'elle prenait son éponge humide pour un micro. Maladroite, elle finissait par répandre de l'eau savonneuse sur le carrelage et poussait des grands cris exaspérés.

Sasuke aimait s'asseoir autour de la table pour la regarder cuisiner. Il avait l'impression de rencontrer une autre facette de Sakura. Il la voyait sous un autre jour, sous un autre angle. Habituellement si agitée, Sakura faisait montre d'un calme et d'une constance surprenantes lorsqu'elle cuisinait. Sans doute était-ce l'une de ses passions. Evidemment, Sasuke prenait toujours grand plaisir à déguster ses petits plats et même lorsque ces derniers se révélaient infects. La plupart du temps, ils dînaient sur la table basse du salon en regardant le journal télévisé. Sakura se tournait vers lui, resplendissante, et lui demandait son avis. La bouche pleine et déformée en une grimace de dégoût, Sasuke lui jurait solennellement qu'il n'avait jamais mangé de met plus exquis. Satisfaite, Sakura relevait le menton et bombait le torse, fière d'elle. Dans ces moments-là, Sasuke pouvait entrevoir la fillette qu'elle avait jadis été. Une enfant débonnaire sous ses airs de dure à cuir, choyée et protégée par les siens. L'enfance de Sakura avait été douce, tendre, dépourvue de tracas. Ses parents avaient tout fait pour l'en préserver. Pour la prévenir des dangers de ce bas monde, ils avaient bâti autour d'elle de solides remparts entièrement faits de sourires et de fous rire partagés. Sakura avait l'assurance et la dextérité d'une femme qui se sait aimée.

-Quand dois-tu te rendre à l'hôpital encore ? demanda-t-elle en ouvrant le frigo.

Sasuke s'assit au bord de la table et croisa les bras.

-Demain matin, répondit-il tandis qu'elle hachait un oignon.

Elle se frappa le front de la main.

-Zut ! Je fais le matin demain, je pourrais pas t'accompagner...

Analyste dans un laboratoire d'analyses médicales situé dans la périphérie de Kyoto, Sakura avait des horaires plutôt flexibles.

-C'est pas grave, t'inquiète pas pour ça.

Sakura regarda par-dessus son épaule et esquissa une mine désolée.

-Tu m'appelles dès que t'es sorti hein ?

Sasuke s'efforça de sourire.

-Evidemment.

Elle sembla satisfaite. Se sentir importante, privilégiée, la galvanisait au plus haut point. En fredonnant le refrain d'une chanson, elle ouvrit un tiroir, attrapa un couteau de boucher et commença à découper les filets de poulet en fines lamelles. Sasuke et elle se fréquentaient depuis leur avant dernière année de lycée mais Sakura l'affectionnait depuis bien plus longtemps. Elle avait aimé de loin pendant des années, en silence, le lorgnant depuis son pupitre. Un jour, elle désira l'aimer de près, l'aimer entièrement, sans se cacher. Alors qu'ils se trouvaient en plein cours de biologie, Sakura griffonna quelques lignes sur un morceau de papier, le roula en boule et le jeta sur le banc de Sasuke. Ce dernier, stupéfait, l'interrogea du regard. D'un geste du menton, elle l'intima de lire ce qu'elle avait écrit. Perplexe, il s'exécuta et, tant bien que mal, décrypta les pattes de mouche couchées sur le coin de feuille lignée. Sakura lui demandait de l'attendre devant la grille du lycée après les cours. Il accepta en opinant de la tête. Elle parut au comble du bonheur.

Comme convenu, à quinze heures trente, Sasuke se planta à côté de la grille en métal grise de l'établissement. Bras croisés sur la poitrine, il regardait d'un œil absent les autres élèves s'éloigner. Avril fut suffocant, cette année-là. En soupirant, il ouvrit les premiers boutons de la chemise de son uniforme. Au loin, il aperçut Sakura, vêtue de la tenue imposée par le lycée. Une petite jupe émeraude qui lui tombait sur les cuisses et s'arrêtait juste au-dessus de ses genoux osseux, un chemisier blanc où le logo de l'établissement -un joli chêne vert- se trouvait imprimé. Elle approchait d'un pas hésitant, comme si elle avançait vers un échafaud, les yeux rivés sur l'asphalte et les joues marbrées d'un pourpre révélateur.

En silence, ils parcoururent quelques mètres, dépassèrent un arrêt de bus, et arrivèrent sur une grande place pavée. Une belle étendue de glycine violette léchait les façades des restaurants et des bistrots. Les terrasses étaient bondées. On pouvait entendre les couteaux rayer les assiettes, les baguettes en bois tinter contre la paroi en verre des bols remplis de riz, les cuillères cogner le bord des tasses de café brûlant ou d'une coupe de pleine de crème glacée. Une odeur de cigarette flânait dans l'air. Au centre de la place se dressait une majestueuse fontaine en marbre blanc. Incessamment, elle crachait des jets d'eau filiformes. Ils s'élevaient, légers, comme s'ils souhaitaient atteindre le ciel, puis retombaient bruyamment sur les pavés poussiéreux. Un groupe de pigeons venaient se désaltérer, quelques enfants plongeaient les mains dans l'eau froide et transparente pour se rafraîchir.

Sakura s'arrêta non loin de la fontaine. Sasuke l'imita. En silence, ils écoutèrent la mélodie de l'eau. Une brise bienvenue malmena leurs cheveux, transportant avec elle les délicieux fumets échappés des restaurants. Sakura leva les yeux vers Sasuke. Ses orbes de jade étincelaient de mille promesses. Elle ouvrit la bouche et déversa un flot de sentiments maladroits. Sa voix était enrouée, un peu étranglée, comme si elle se trouvait à deux doigts d'éclater en sanglots. Elle lui dit qu'elle l'aimait et voulait demeurer à ses côtés. Empêtrée dans ses sentiments, elle peinait à articuler, comme si ses sentiments à l'égard de ce garçon taciturne et mystérieux contenaient bien trop de choses pour tenir dans de simples mots. Ce jour-là, baignée dans la lueur blafarde de cette fin d'après-midi printanier, elle apparut sous un nouvel angle. Un angle fragile, presque vulnérable. Elle se situait aux antipodes de cette adolescente sûre d'elle et populaire que le jeune homme avait l'habitude de fréquenter.

Sasuke l'embrassa pour la faire taire, ennuyé par sa maladresse. Sakura interpréta son geste d'une autre façon. Ensuite, sans qu'il ne comprenne pourquoi ou comment, ils sortirent ensemble et ne se quittèrent plus. Il finit par y trouver son compte et décida de rester près d'elle. Sakura dégoulinait de douceur. Elle l'encombrait avec son amour mais il ne pouvait se résoudre à la quitter. D'une certaine façon, elle l'apaisait. Compréhensive, Sakura respectait ses interminables silences et se gardait de l'assommer de reproches. Quand Sasuke lui parla de sa leucémie, elle s'effondra mais ne s'éloigna pas. Au contraire. Elle lui donna davantage d'amour, l'accompagna aux séances de chimiothérapie, veilla à ce qu'il suive correctement son traitement, frotta son dos la nuit, quand réveillé par la nausée, il rendait son dîner penché au-dessus de la cuvette des toilettes. D'un an sa cadette, Sakura n'avait pas froid aux yeux. Elle traversait la vie avec un couteau entre les dents et n'hésitait pas à trancher les obstacles qui se dressaient sur son chemin. A vingt et un ans, elle parlait mariage et enfants. Sasuke, quant à lui, restait muet d'effroi. Se lancer dans une telle aventure le tétanisait, peur que contredisait son attitude calme et désintéressée. Oh, il n'était pas malheureux.

Confortablement installé dans une vie dépourvue de tracas, il veillait à ne pas bouleverser le calme de son quotidien. Cependant, il n'avait rien d'un homme comblé. Pareil à un vulgaire mollusque, il se laissait porter par les flots du quotidien, se complaisait dans cette routine tortueuse, cherchait où se trouvait sa place en ce bas monde. Quelque chose lui manquait. Il n'était pas honnête avec lui-même et il le savait parfaitement. Sa vie lui glissait entre les doigts. Elle défilait sous ses yeux sombres comme une bobine de film et il n'essayait pas de l'arrêter pour mieux la contempler, la comprendre davantage ou modifier deux ou trois détails déplaisants. Pourtant, il rêvait de tout recommencer depuis le début, de rembobiner le temps, d'emprunter un autre chemin, de rejouer la scène différemment, de modifier son texte, de décider seul de la fin de l'histoire.

Paradoxalement, les meilleurs instants de sa vie virent le jour dans cette minuscule chambre aux murs peints de blanc cassé de l'hôpital de Tokyo. C'était le bon temps, celui où l'insouciance et l'innocence peuplaient encore son existence. Il devait se rendre à l'évidence: ce bon à rien de Naruto Uzumaki lui manquait. Sasuke n'avait rien oublié de lui. Le souvenir, clair et précis, de Naruto dormait encore dans un coin de sa mémoire, habitait une parcelle de son cœur. Avec une précision extrême, Sasuke se souvenait encore du timbre mutin de sa voix, de ses épais cheveux blonds, un peu rebelles, qui captaient la moindre étincelle de lumière, de ses yeux bleus et rieurs, de son visage en forme de cœur où la bonté semblait inscrite, des petites tâches de rousseur qui piquaient ses joues pleines et rondes, de la chaleur de ses mains et de la tendresse dont elles faisaient preuve quand elles s'égaraient dans ses cheveux d'ébène, le soir, quand il peinait à trouver le sommeil. Dans ses souvenirs, la voix de Naruto était comme la caresse du vent, délicate et éphémère. Elle l'enveloppait d'une infinie douceur, lui contait d'incroyables histoires. Sa voix aussi lui manquait éperdument. Le son de sa voix lui évoquait le parc de Shinjuku gyoen baigné dans la lumière d'un soir d'été, avec son ciel clair peuplé de martins et ses cerisiers aux branches parsemées de fleurs roses. Aujourd'hui plus que jamais, l'absence de son ami d'enfance se faisait cruellement sentir. Et là, au beau milieu de la cuisine aux vitres recouvertes d'une fine couche de buée, la solitude partit à l'assaut de Sasuke Uchiha. Sournoise, elle lui tordit l'estomac et lui noua la gorge.

Sakura disposa les lamelles de poulet dans une casserole brûlante. Un doux fumet plana dans la pièce. Ils pourraient dîner d'ici plusieurs minutes. Sakura était là, comme toujours, fière et droite, prête à accueillir ses tourments et ses confidences, à l'écouter parler sans s'en lasser. Hélas, sa présence ne lui était d'aucun réconfort. Sasuke quitta la table et demanda à sa compagne de l'appeler dès que le repas serait prêt.

L'envie de se plonger une nouvelle fois dans sa boîte à secrets venait de le titiller.


Bonjour tout le monde !

Me revoilà avec une nouvelle fiction... j'avais pourtant dit qu'Embellie serait la dernière et que je me consacrerai désormais exclusivement aux OS. Cependant, je n'ai pas pu m'y tenir x) cette fiction est née de façon complètement inattendue, à partir d'une idée que je traîne depuis pas mal de temps déjà. Elle me tient beaucoup à cœur et j'espère que vous l'apprécierez. Si j'arrive à la mener comme je le veux, elle devrait être riche en émotions... enfin, normalement. Si ce n'est pas le cas, c'est que j'aurais certainement loupé quelque chose x)

Que dire de ce premier chapitre ? Eh bien, je pense qu'il vous apprend déjà pas mal de choses sur la relation entre Naruto et Sasuke lorsque ces derniers étaient enfants. Cependant, vous êtes encore très loin de tout connaître sur eux héhé. Evidemment, rien n'affirme que Sakura et Sasuke finiront leur vie ensemble, il y aura bel et bien du Yaoi dans cette fiction (ben ouais je suis Ha-chan quand même, pas de surprise avec moi). Je suis assez satisfaite de ce chapitre, même si je le trouve pauvre en descriptions... ces dernières sont d'ailleurs vraiment mauvaises, il va vraiment falloir que je fasse des efforts de ce côté-là.

Je tenais à préciser que je ne peux pas vous promettre de publications régulières pour cette fiction, contrairement à mes habitudes plus ou moins stables. Je rentre en dernière année universitaire et je risque de crouler sous une montagne de travail, de ce fait, je n'aurais le temps d'écrire que le week-end donc les chapitres risquent d'arriver plus ou moins tard en fonction de mon temps libre.

J'espère tout de même que ce premier chapitre vous a plu et qu'il vous donne envie de découvrir la suite de cette histoire =)

J'espère vous retrouver pour le second chapitre intitulé Au détour d'une rue.

Gros bisous, à bientôt et merci d'avance pour ceux qui prendront le temps de me laisser leur avis =)