DE PASSAGE

Prologue


Madison avait toujours été seule. Ce n'était pas tellement parce que personne ne l'aimait, mais plutôt parce qu'elle n'allait pas vers les gens. Son chien était son meilleur ami, et sa vie sociale se résumait à ses parents. Certains pourraient mettre ça sur le compte de la timidité. Elle devait se sentir mieux sur les réseaux sociaux, pourraient-ils penser. Pas vraiment. Oh, bien sûr, elle avait un compte Twitter. Parmi ses abonnements, on ne retrouvait cependant que trois comptes : Wolf Haven International, International Wolf Center et Howling For Wolves. Autrement dit, la plus grande obsession de Madison, c'était les loups. Elle était passionnée par ces majestueux animaux sauvages. Et les nombreux posters présents dans sa chambre pouvaient en témoigner. La seule partie du mur qui n'était pas recouverte de posters était celle consacrée à la fenêtre de sa chambre.

Madison venait d'arriver à Beacon Hills. Pour elle, c'était une ville comme une autre. Elle avait cessé de s'attarder sur la beauté des villes après son cinquième déménagement. Tout abandonner pour recommencer ailleurs ne la dérangeait pas tant que ça. Ce n'était pas comme si elle laissait des amis derrière elle. Et puis, elle s'était rapidement faite à l'idée. Elle était comme le loup Oméga : solitaire et errante.

Si sa famille déménageait autant, c'était en partie à cause de son père. Monsieur Green travaillait dans la police depuis maintenant presque vingt ans, et il ne s'en était jamais plaint. Passionné par son job, et aveuglé par sa soif de connaissance, il n'hésitait pas à se proposer lorsqu'une mutation était annoncée. Il souhaitait toujours faire face à de nouveaux cas, démarrer de nouvelles enquêtes, rencontrer de nouveaux collègues. Madame Green, quant à elle, était longtemps restée mère au foyer, avant de reprendre son métier de secrétaire. Ça n'avait pas toujours été facile de s'investir dans un job, tout en déménageant tous les ans. Mais lorsque Madison avait demandé à sa mère si ça la dérangeait de tout abandonner pour aller vivre ailleurs, celle-ci lui avait répondu, avec un sourire tendre : « Un jour, tu tomberas amoureuse, et tu comprendras. » Madison n'avait jamais compris.

La jeune fille était tranquillement en train de ranger les dernières affaires qu'elle venait de déballer quand trois coups furent frappés à la porte de sa chambre. Elle sursauta en même temps que son chien, ce qui la fit sourire, et leva les yeux pour voir sa mère sur le pas de la porte. La jeune femme approchait de la quarantaine, mais n'avait rien perdu de sa beauté. Ses cheveux étaient noirs, parsemés de blond, et éclairaient son visage bronzé. Elle la regardait de ses yeux noisettes tendres, un sourire aux lèvres.

- Je peux t'aider ? Demanda Madison en déposant sa figurine de loup sur son bureau.

- À vrai dire, je venais juste voir comment ça avançait, répondit la femme en désignant la chambre d'un signe de tête. Tu t'en sors mieux que ton père. Il essaie toujours de brancher la télévision.

- Je lui ai déjà dit que je pouvais le faire, mais il m'a limite poussée hors du salon, déclara la jeune fille en riant doucement.

- Tu connais ton père. Il veut tout faire lui-même.

Le sourire de la jeune femme s'agrandit, avant qu'elle ne hausse les épaules.

- Tu comptes sortir, ce soir ? Demanda-t-elle finalement.

- Je sais pas, répondit Madison en haussant une épaule, appuyée sur la chaise de son bureau.

- Tu es restée dans ta chambre toute la semaine, insista sa mère.

- Oui, mais regarde le résultat ! S'exclama fièrement la jeune fille en élançant un bras vers le reste de sa chambre.

- Madie.

Madison croisa le regard déçu de sa mère, et leva les yeux au ciel.

- D'accord ! J'irais visiter un peu, céda-t-elle en soupirant.

Un grand sourire étira instantanément les lèvres de sa mère.

- Essaie de te faire des amis, lança celle-ci avant de descendre les escaliers.

Se faire des amis ? C'était facile à dire. D'un air désemparé, elle se posta face à son miroir, et s'étudia longuement. Elle n'était habillée que d'une tunique violette et d'un jean slim bleu foncé, qu'elle avait rentré dans ses bottes noires, mais elle pourrait certainement entrer dans un des clubs de la ville. Elle étudia ses yeux noisettes, et se força à les mettre en valeur par une fine couche de mascara, histoire de montrer à sa mère qu'elle avait fait un effort. Elle coiffa rapidement ses longs cheveux bruns, et se tourna vers son chien.

- Allez, viens Lycos ! Appela-t-elle avant de descendre, elle aussi, les escaliers.

Aussitôt, le husky se leva de son panier, et descendit derrière elle. Une fois arrivés en bas, Madison n'eut pas besoin de faire le moindre geste : le chien alla s'installer devant le canapé, et ne bougea plus. Elle fit un rapide signe de la main à son père, qui semblait toujours aussi peu avancé sur la télévision, et sortit de la maison. C'est à ce moment là qu'elle réalisa qu'elle ne savait pas du tout où aller. Elle sortit les clés de sa voiture – une laguna rouge – et prit place derrière le volant. Après quelques minutes, elle décida de prendre la route.

Il lui fallut un certain moment avant de trouver le premier club. Le Jungle. Elle haussa les épaules, descendit de la voiture, et attendit derrière la queue de personnes pour pouvoir entrer. Quand, enfin, ce fut à son tour, le videur la regarda de haut en bas, avant de s'exclamer, après avoir sifflé :

- Super travail !

Madison ne comprit pas vraiment de quoi il parlait. Ainsi, elle le remercia, et entra enfin. La première chose qui la frappa fut la musique : assourdissante. Ce qui la frappa ensuite fut cette odeur étrangement agréable de fumée et d'excitation. Et, enfin, elle réalisa. Elle était dans un bar gay. Elle se dirigea vers le bar, et commanda un cocktail, que le serveur lui apporta rapidement. Elle avait à peine trempé ses lèvres dedans que la pensée du videur lui revint en tête : un travesti ! Il l'avait prise pour un travesti ! Elle ne put contenir le fou rire qui s'empara d'elle.

- Tu es au courant que tu es dans un bar gay, hein ? Lança une voix à côté d'elle.

Elle tourna la tête vers le possesseur de celle-ci, et détailla quelques secondes le garçon en face d'elle. Il était grand, visiblement musclé, et souriait, amusé. Ses yeux bruns étaient fixés sur elle, et ses cheveux noirs d'une longueur parfaite.

- Tu es au courant que tout le monde me prend pour un travesti ? Ne put-elle s'empêcher de répondre en souriant à son tour.

- Ils pensent que tu es un garçon, lança le jeune homme.

- Oh, j'ai remarqué, se contenta-t-elle de rétorquer en haussant les épaules.

Cela ne sembla pas rabrouer le garçon, qui décala son tabouret vers le sien, et lui tendit la main.

- Je m'appelle Danny.

- Tu sais qu'on ne sert pas la main aux filles, hein ? Plaisanta Madison en serrant le pouce de l'Hawaïen.

- Et les filles ne sont pas sensées traîner dans les clubs gays, alors j'imagine que ce n'est pas dramatique, répondit-il en souriant de toutes ses dents.

Madison secoua la tête en riant doucement. Ne trouvant rien à dire, elle se contenta de siroter sa boisson.

- Je ne sais toujours pas comment tu t'appelles, fit remarquer Danny après un moment.

- Oh ! S'exclama la jeune fille, si brusquement qu'elle manqua de s'étouffer avec la gorgée qu'elle venait de prendre.

Elle toussa quelques secondes, avant de se racler la gorge et de reprendre :

- Madison. Mh. Je m'appelle Madison.

- Eh bien, Madison-mh-je-m'apelle-Madison, je suis content de te connaître !

La jeune fille allait rétorquer quelque chose, lorsqu'elle perçut un garçon faire de l'œil à Danny, et vit celui-ci rougir et détourner les yeux. Elle ouvrit la bouche en un 'o' silencieux, avant d'attraper le bras du jeune homme et de le secouer.

- Tu as une touche ! J'y crois pas, tu as une touche et tu fais rien !

- Mais non, il doit pas être intéressé... balbutia Danny.

Il avait l'air tellement gêné que Madison l'aurait bien charrié, mais ça le rendait tellement adorable qu'elle n'osa pas.

- Si tu le dis, répondit-elle en haussant les épaules.

Elle finit rapidement son verre et se leva.

- Tu t'en vas ? S'alarma Danny en se levant instantanément.

- C'est un club gay, je te rappelle, le taquina-t-elle.

- Club gay dans lequel je ne t'avais jamais croisée. Nouvelle ? Demanda-t-il avec empressement, comme s'il avait peur qu'elle s'en aille sans lui répondre.

Madison sourit doucement, alors qu'une sensation perturbante la prenait au cœur. Comme un réchauffement, sachant que quelqu'un s'intéressait à elle.

- Je suis arrivée en début de semaine, répondit-elle simplement.

- Oh ? Donc tu ne connais pas grand monde.

Ce n'était pas une question. Sans prévenir, il attrapa une serviette sur le bar, et y inscrivit tant bien que mal un numéro de portable et une adresse. Il la lui tendit ensuite avec un grand sourire.

- Je t'ai laissé mon numéro, déclara-t-il machinalement. Et cette adresse, ajouta-t-il en tapotant sur la serviette, c'est l'endroit où tu devras venir demain soir. Lydia organise cette super soirée qu'il ne faut absolument pas manquer. Il y aura quasiment tout le monde, alors tu pourras sympathiser.

- Je ne sais pas, je passerais peut-être, répondit maladroitement Madison. Je ne veux pas déranger...

- C'est sans invitation, de toute façon. Alors viens, la pressa-t-il.

- Je ne promets rien, conclut-elle avant d'adresser un signe de la main à Danny et de quitter le club.

Socialiser. C'était peut-être ce qui allait être le plus dur. Mais qu'importe ? Peut-être n'allait-elle plus être une Oméga.


J'espère que ce prologue vous a plu, ou au moins intrigué assez pour vous donner envie de lire le premier chapitre. N'hésitez pas à me laisser votre avis, qu'il soit positif ou négatif. Tant que vous le faites de manière respectueuse, je suis preneuse ! De même, si vous voyez des fautes d'orthographe : j'ai moi-même horreur de ça, alors n'hésitez pas à me le faire savoir. Si vous avez des questions, je suis aussi là pour y répondre : je ne mords pas, envoyez-moi un message privé. ;)