Il était temps

Disclaimer : L'univers et les personnages appartiennent à Yumi Hotta. Je ne touche aucun argent pour mes écrits.

Bonjour à tous !

Me voici enfin sur un nouveau fandom que celui de Sherlock BBC, et pas un des moindre ! Hikaru No Go est mon manga préféré, et le « NoGo » de mon pseudo est un hommage à ces mangas. Je suis vraiment super contente de me lancer dedans !

Si vous êtes tombé sur cette fic par hasard et que vous ne connaissez pas ce manga, arrêtez immédiatement votre lecture et allez le lire ! C'est un des meilleurs mangas qui soit, et même si beaucoup de tomes ne sont aujourd'hui plus imprimé (il est quand même sorti entre 1998 et 2003), les bibliothèques l'ont souvent, et il existe des scans sur Internet. De plus, vous risquez de ne pas comprendre cette fic sans connaitre l'univers du manga.

Challenge : ce texte a été écris dans le cadre du challenge de février 2016, « UA Coffee Shop » (l'action doit prendre place dans un café).
Le Collectif NoName est un rassemblement d'auteurs et de lecteurs de tous fandoms qui met l'accent sur la communication entre auteurs et lecteurs, via review et autres. Chaque mois, les membres proposent des thèmes, puis un vote a lieu et le thème choisi devient le challenge du mois, et ceux qui veulent écrivent dessus. Ce n'est bien sûr pas obligatoire, et ça permet de donner de l'inspiration à ceux qui sont bloqué et aux membres de découvrir d'autres auteurs et fandom !
N'hésitez pas à aller voir le profil du collectif sur le site (lien dans ma bio), et à nous rejoindre si vous voulez :D !

Question du challenge : quelle boisson ou nourriture consommeriez-vous dans un Coffee Shop ?
Comme je suis une grande enfant, ce serai un chocolat, et même un chocolat viennois pour changer du chocolat que je bois déjà chaque matin au petit déj. Je pourrais aussi prendre un thé à l'occasion, ou un soda en été. En fait la seule boisson que je ne prendrais jamais, ce serai du café X)

Petite info (qu'il vaut mieux lire quand même) : Comme vous le savez, le manga prend place au début des années 2000, quand internet était encore assez peu connu. Hikaru ne pense au go sur internet que lors d'une présentation dans une convention, et beaucoup de personnages n'ont pas d'ordinateurs chez eux. Mais aujourd'hui, internet s'est démocratisé (c'est le moins qu'on puisse dire !) et tout le monde connaît ça. Et je suis parti de l'idée que si Hikaru avait rencontré Sai une décennie plus tard, alors il aurait tout de suite pensé au go sur Internet. Ainsi, il n'aurait pas rencontré Akira ni tous les autres, et n'aurait pas eu à arrêter ! Cet OS prend place quand Hikaru et Akira ont 18 ans (3 ans après la disparition de Sai donc).

Bonne lecture :)

Enjoy !


« - J'abandonne. »

Akira se pencha en avant pour saluer son adversaire. Cet Isumi, bien que seulement deuxième dan, était très fort et lui avait donné du fil à retordre, mais il l'avait finalement remporté après une bataille acharnée au centre du goban.

« - Félicitation Toya-sama, cette victoire vous permet d'obtenir votre cinquième dan ! C'est un beau cadeau pour vos 18 ans, n'est-ce pas ? lui demanda le journaliste présent dans la salle.

- Oui, effectivement » répondit presque sèchement Akira, qui s'était légèrement renfermé au rappel de la date.

Le commentaire de la partie débuta, mais Akira était très loin de la discussion. Il pensait plutôt à son anniversaire, qu'il avait réussi à oublier pendant la partie. Cette année, ce serai la première fois qu'il serait totalement seul pour le fêter. Bien qu'il n'ait jamais invité d'enfants de son âge pour cette journée, ses parents avait toujours été là. Mais cette année, ils étaient en chine, où son père parrainait un tournoi de go amateur international, et ils n'avaient pas pu faire le voyage de retour.

Akira y pensait encore en sortant de la salle, surtout en voyant d'autres pros – Waya et Fuku, s'il se souvenait bien – venir réconforter Isumi de sa défaite. Lui, personne de son âge ne vient jamais lui parler après une partie – sauf parfois Ogata, mais c'est de plus en plus rare - qu'il ait gagné ou perdu.

Ça ne le gênait pas, avant. Quand il était jeune, le go ne le faisait côtoyer presque que les adultes du cercle de son père, ce qui l'a fait mûrir plus vite que ses camarades de classe. Ceux-ci ne comprenaient pas sa passion pour le Go, et Akira s'accommodait très bien de ne pas jouer avec eux. Le Go lui suffisait.

Aujourd'hui, Akira essai toujours de se persuader que ça ne le gêne pas, mais c'est plus dur. Ces pros sont de son âge, et partagent sa passion pour le Go. Ils y consacrent leurs vies, eux aussi. Alors pourquoi ne se parlent-ils jamais ?

Akira suppose que c'est de sa faute, même s'il ne sait pas pourquoi. Et au fil du temps, cela lui pèse de plus en plus.

Le jeune Toya finit par secouer la tête pour chasser ses pensées défaitistes, et se met en route vers la sortie de la Nihon Ki-in. Le chemin vers le coup divin est long et solitaire, il l'a toujours su. Il a fait un pas de plus sur cette route aujourd'hui avec l'obtention de son cinquième dan, et c'est la seule chose qui compte.

Alors qu'il se retrouvait dans la rue devant le bâtiment, Akira sentit une goutte de pluie, qui fut rapidement suivie par ses jumelles. En quelques minutes, ce fut le déluge.

Jurant tout bas, Akira se mit à courir vers un café pas loin, pour pouvoir s'abriter. Il eut juste le temps de lire le nom du commerce, écrit en lettres occidentales, avant de s'y engouffrer : Café baduk (1).

Une fois à l'intérieur, le brun jeta un coup d'œil curieux autour de lui. Le café dégageait une ambiance chaleureuse, avec ses murs peints en beige et lambrissés, et ses tables dépareillées et dans différentes essences de bois, qui formaient un tout étrangement harmonieux. Il y avait un bar qui occupait le mur en face de l'entrée, devant des étagères qui supportait le poids d'énormément de bouteilles, ainsi qu'un présentoir avec des pâtisseries qu'Akira n'avait encore jamais vu.

A cette vue, il se rappela que ce café proposait des spécialités européennes, et qu'il était, grâce à son emplacement juste en face de la fédération, très fréquenté par les autres joueurs de go, surtout les jeunes. Akira passait devant tous les jours, mais n'était encore jamais rentré.

Aujourd'hui, à cause de la pluie, il était le seul client du café. C'était peut-être une bonne chose, après tout. Il va pouvoir attendre la fin de l'averse en paix en buvant quelque chose.

Le vieil homme qui lisait un livre derrière le bar leva les yeux vers lui.

« - Bonjour Monsieur, installez-vous ! »

Akira lui rendit ses salutations poliment, et alla s'installer à une table au fond. Il sursauta soudain quand le vieil homme cria :

« - Hikaru, lâche ce foutu ordi et vient faire ton job !

- Seulement si tu arrêtes de crier, vieux croulant ! »

Akira se retourna vers l'origine de la voix, curieux. Il remarqua alors deux postes internet, invisible depuis l'entrée. Un adolescent, sûrement de son âge, était devant celui qui était allumé. Sur l'écran, Akira reconnu un goban virtuel, sur lequel la partie semblait terminé. Mais il n'eut pas le temps d'en voir plus car le serveur éteignit l'écran, se leva et se dirigea vers lui.

Akira remarqua tout d'abord qu'il était grand, plus grand que lui probablement. Bien qu'il ait effectivement son âge, son visage gardait des traces de l'enfance, comme s'il avait trop vite grandi. Il avait des traits réguliers, et aurait pu passer pour banal sans ses cheveux, brun coupé court à l'arrière avec deux grandes mèches blondes qui encadraient son visage. Mais ce qui le distinguait surtout des autres, c'était le grand sourire sur son visage, qui semblait totalement naturel. Akira se dit que c'était le genre de personne qui pouvait devenir ami avec quelqu'un en quelques minutes.

Tout le contraire de lui en somme.

« - Bonjour ! Je m'appelle Hikaru Shindo, c'est moi qui vais m'occuper de toi, puisque le vieux est trop fatigué pour se lever. » rajouta-t-il en élevant la voix pour bien se faire entendre de l'homme au bar, qui se contenta de grogner sans détacher les yeux de son livre, comme s'il en avait l'habitude. « Qu'est-ce que je te sert ?

- Heu… je ne sais pas trop, je ne connais pas grand-chose aux pâtisseries européennes. Qu'est-ce que tu me propose ? demanda Akira, un peu perdu.

- On a plein de chose ! Des spécialités française bien sûr, mais nous avons quelque gâteaux Allemand et hollandais aussi. Ou alors, on a du pudding anglais. Mais je ne te le conseille pas » rajouta-t-il d'un ton complice en baissant la voix.

Akira senti ses lèvres se retrousser dans un sourire impossible à réprimer. La familiarité dont faisait preuve le jeune homme l'étonnait, mais était plutôt plaisante tout compte fait.

« - Que me conseilles-tu alors ?

- Pour commencer, un croissant devrait faire l'affaire ! Avec un chocolat chaud, tu verras que c'est très bon, surtout par ce temps.

- Va pour ça alors ! » Acquiesça avec enthousiasme Akira, se surprenant lui-même.

Rapidement, le méché lui rapporta sa commande en lui souhaitant bon appétit, puis retourna à son ordinateur. Silencieux, Akira se plongea dans l'observation de la pluie qui tombe sur la vitre, s'amusant à essayer de deviner quelle goutte arrivera en premier en bas. Il se sent bien, ici. Le chocolat chaud est délicieux, et le beurre du croissant fond sur sa langue. Tout est silencieux, mais ce n'est pas le silence angoissant qui règne chez lui, et même dans sa vie. Il y a le bruit de la pluie qui s'écrase sur la vitre, le clic régulier de la souris de l'ordinateur, le bruit des pages tournées par le patron. C'est un silence habité, et ça fait sourire Akira pour la troisième fois depuis qu'il est entré ici.

Perdu dans ses pensées, Akira n'entendit pas Shindo se lever et sursauta quand il apparut devant lui.

« - Tiens, cadeau de la maison ! Joyeux anniversaire. »

Interloqué, Akira baissa les yeux vers l'assiette que le serveur avait posé devant lui. C'était un muffin, avec une bougie allumé planté dessus.

« - Co… comment tu sais que c'est aujourd'hui ?

- Je l'ai lu dans le go weekly, la semaine dernière, répondit Shindo. N'oublie pas de faire un vœu ! »

La gorge trop serré pour répondre, Akira se contenta de souffler sur la bougie. Puis il releva les yeux vers le brun et réussi à souffler « Merci. »

Le sourire que lui renvoya Hikaru lui sembla soudain être la plus belle chose au monde.

oOo

« - Hey, Hikaru ! »

Occupé à prendre la commande de clients, Hikaru ne fit qu'un signe de la main en réponse à Waya.

Habitué à l'endroit, Waya traîna Isumi vers les deux postes d'ordinateurs, et sorti un goban du meuble à côté, qui contenait aussi quelques jeux de société occidentaux (plus pour la déco qu'autre chose). Il le posa ensuite sur une table libre, et attendit que Hikaru ai un trou dans son service en discutant avec Isumi.

C'était une sorte de rituel qui s'était mis en place depuis trois ans, soit depuis que Waya avait rencontré Hikaru dans ce café, peu avant que ce dernier ne commence à y travailler. Waya avait toujours aimé ce café, proche de la Nihon Ki-in, abordable au niveau des prix et avec de très bons produits qui changeait du quotidien. Il y allait presque chaque semaine pour se changer les idées, et était tombé un jour sur Hikaru qui jouait au Go sur Internet. Curieux de son niveau, il lui avait demandé une partie.

Il s'était fait complètement rétamé.

Depuis, à chaque fois qu'il venait, il demandait une partie à Hikaru. Il avait aussi emmené Isumi, pour voir comment Hikaru s'en sortirai face à son ami. Isumi gagnait légèrement plus que lui, son jeu tranquille et réfléchi mettant parfois Hikaru, qui jouait de façon plus risqué, en difficulté.

« - Bonjour Waya, Isumi, salua Hikaru en s'asseyant face à Waya. Comment vous allez ?

- Bien, répondit Waya en faisant Nigiri. J'ai gagné ma partie contre un septième dan, ce matin. »

Il eut noir. Sans attendre, il posa sa première pierre. Hikaru commença à réfléchir à son premier coup, tout en demandant :

« - Et toi Isumi ?

- Bien, bien…

- Il s'est fait battre par le fils Toya il y a une semaine, grogna Waya. Quelle plaie, ce mec !

- Akira Toya ? Il est venu au café la semaine dernière, sûrement juste après votre partie, ajouta Hikaru en direction d'Isumi. Il avait l'air sympa.

- Quoi ? s'écria Waya en relevant les yeux vers lui, suspendant son geste sous la surprise, sa main au-dessus du goban. Lui, il est venu dans un café ? Il devait avoir pris un coup sur la tête ! Il avait l'air malade ? Sûrement de la fièvre, pas possible qu'il ait eu toute sa raison. Comme si ce fils à Papa pouvait rentrer dans un endroit comme celui-ci !

- Il avait l'air tout à fait normal, peut-être un peu perdu, c'est tout, répondit Hikaru en haussant les épaules. On a un peu discuté, il a été très poli. Ah, deux secondes, faut que j'y aille » rajouta-t-il en voyant deux clients entrer.

Il se leva et se dirigea vers eux, laissant Waya, interloqué, derrière lui.

« - T'y crois, toi ? demanda-t-il à Isumi en se tournant vers lui.

- Tu sais, tu es le seul qui est aussi vindicatif envers Toya. Il est juste discret.

- Tu parles ! Il nous prend de haut, avec son petit air hautain.

- Préjugé, dit tranquillement Isumi, faisant se renfrogner Waya. Tu devrais plutôt réfléchir à ton prochain coup, il est déjà en avance.

- Je sais, ouais.

- Il devient de plus en plus doué, tu ne trouves pas ? demanda pensivement Isumi.

- Pas assez vite. Je n'arrive même pas à comprendre comment il a pu devenir aussi fort sans avoir jamais joué contre un pro avant nous. J'aimerais pouvoir jouer avec lui dans une vraie partie pro, sans qu'il n'ait besoin de se lever pour s'occuper de clients.

- Je sais, tu dis ça à chaque fois, s'amusa Isumi. Mais va falloir t'y faire, il aime trop ce café pour en partir.

- Oui, mais tout ce talant gâché ! Se lamenta Waya.

- tu devrais plutôt être heureux qu'il ne soit pas pro, on a déjà assez à faire avec Toya et Ochi, et tous les vieux joueurs pros comme Ogata-san et Kuwabara-san. Ne vient pas nous rajouter un autre joueur trop fort, j'aimerais gagner au moins un titre dans ma vie ! Pourquoi tu tiens tant que ça qu'il devienne pro ? »

Waya ne répondit pas, silencieux. Puis il pointa du doigt une pierre.

« - Regarde ce coup. Ça ne te rappelle rien ? »

Isumi se pencha, examinant le goban avec attention. Il ne voyait pas vraiment en quoi ce coup était différent des autres, il semblait même plutôt mauvais. Isumi jeta un regard interrogateur à son ami.

« - Regarde mieux » se contenta de lui dire celui-ci.

Isumi se concentra, essayant de lire plus loin dans le jeu. Peu à peu, il commença à entrevoir un schéma. C'était loin, très loin dans le jeu, mais ce coup, si mauvais en apparence, pouvais à terme faire gagner la partie à Hikaru !

Isumi releva les yeux, interloqué. Ce coup, ça lui faisait penser à…

« - Sai, lâcha-t-il dans un souffle.

- Oui.

- Mais… Ce n'est pas Sai. Ça ressemble à son jeu, mais ce n'est pas Sai !

- Je sais. J'y ai beaucoup pensé, et je pense que c'était son élève, lui révéla Waya.

- Son élève ? » Murmura pensivement Isumi, réfléchissant à cette possibilité.

Ils se turent tous les deux lorsque Hikaru revint. La partie repris, mais Isumi ne suivait plus. A la place, il observait Hikaru, se demandant s'il avait un lien avec Sai. Est-ce qu'il pouvait vraiment avoir la réponse au plus grand mystère du monde du Go de ces dernières années ?

Sai était un joueur qui était apparu sur Internet il y avait maintenant 6 ans. Bien que passant relativement inaperçu au début, il attira vite l'attention le jour où il battit Akira Toya à plate couture, et ce deux fois de suite. Cela lui valut l'attention de quelques pros, qui lui demandèrent une partie. Ils se firent aussi battre. Ce fut à ce moment-là que la rumeur commença : le dieu du Go jouait sur Internet. Sai commença à attirer l'attention de beaucoup de monde, et quelques pros s'inscrivirent sur le site rien que pour pouvoir jouer avec lui. Et le phénomène grossit. De plus en plus de pros et amateurs du monde entier, même les plus réfractaires au Go sur Internet, commencèrent à suivre les parties de Sai et à lui en demander. Parfois, Sai pouvait avoir jusqu'à une cinquantaine de demande à la fois, et quelques centaines de spectateurs. Les parties étaient analysées en ligne, et chacun saluait son talent.

Une autre chose qui avait contribué au phénomène « Sai », c'était le mystère autour de ce joueur. Il n'y avait absolument aucune information sur son profil, ni âge, ni avatar, rien du tout. Sai n'avait jamais répondu à aucun message non plus. La seule information que l'on avait, c'était son pseudo. Peu à peu, des groupes de personnes commencèrent à chercher qui pouvait bien être ce joueur. Chaque année, les parties des éliminatoires pour l'examen pro étaient attentivement observé, au cas où Sai ait décidé de devenir pro. Partout dans le monde du Go, la question était la même : mais qui pouvait bien être Sai ?

Et puis, il y avait 3 ans, Sai avait tout simplement disparu. Tout d'un coup, silence radio de sa part. Et puis un jour, deux mois après, un message apparu sur sa bio, le premier message de sa part en 3 ans. Il disait seulement : Sai est mort.

Ce fut la dernière activité connue de Sai. Depuis, différentes hypothèses avaient été avancé, la plus fréquente et probable étant celle d'une maladie grave, qui aurait empêché Sai de passer pro. Mais après trois ans, aucune réponse n'avait été trouvée, et il était probable que le fin mot de l'histoire ne soit jamais connu.

Quand Hikaru se releva pour aller s'occuper des clients, Isumi reprit la conversation :

« - C'est seulement une hypothèse, ou tu sais quelque chose de plus ? »

Waya releva la tête vers lui, prenant un moment pour comprendre de quoi parlait Isumi.

« - Et bien, tu sais que j'ai rencontré Hikaru avant qu'il ne commence à travailler ici ? C'était aussi avant la disparition de Sai. Il était en train de jouer sur Internet et venait de terminer sa partie, et je me suis dit que ça pourrait être intéressant de jouer contre lui. Pour moi, ce serai une victoire facile, et ça me changerait les idées. C'était pendant l'examen pro, je venais de perdre contre Ochi… Enfin bref, tu vois dans quel état j'étais.

- Oui. Mais il t'a battu, c'est ça ?

- Plus que ça ! J'ai abandonné avant même le milieu de la partie, j'avais beaucoup trop de point de retard. Mais ce n'était pas le plus important.

- Comment ça ? S'étonna Isumi.

- Ce jour là, j'ai joué contre Sai. Je ne peux pas te l'expliquer, mais je te jure que c'était contre Sai que j'ai joué ! J'étais persuadé de l'avoir trouvé, même si ça me semblait impossible que ce soit un ado de 15 ans. J'ai glissé le nom de Sai dans la conversation, mais il n'a pas réagi. Je me suis dit qu'il me suffisait de le prendre sur le fait, alors je suis retourné régulièrement ici pour essayer de regarder son écran quand il rejouerait, pour avoir la preuve que c'était lui. Quand je l'ai recroisé, une semaine plus tard, il sortait du café, donc je ne pouvais pas mettre mon plan à exécution. Je lui ai quand même proposé une partie, et on a été dans un club de Go. Cette fois, c'est moi qui ai gagné, et je l'ai battu plutôt facilement. C'était comme si j'avais joué avec deux personnes différentes, je ne comprenais pas comment c'était possible. »

Waya eut un moment de silence, se remémorant les événements. Finalement, il reprit la parole :

« - Quelques jours plus tard, Sai a disparu, et Hikaru aussi. Je suis passé régulièrement au café, mais je ne l'y ai jamais revu. Et un jour, deux mois après, je suis tombé sur lui dans la rue. Je l'ai traîné ici, dit-il d'un ton gêné.

- Tu l'as forcé à faire une partie !? S'exclama Isumi.

- Non ! Enfin, pas trop… Enfin bref, dit Waya précipitamment. On a commencé à jouer, et au milieu de la partie, Hikaru s'est mis à pleurer. Il a quitté le café sans la finir. Et le lendemain, le message de Sai était posté. »

Isumi ne répondit pas, intégrant tous ces nouveaux éléments.

« - Tu ne lui as jamais posé la question ? Demanda-t-il alors.

- Si, mais il ne répond jamais. »

Isumi rouvrit la bouche pour poser une autre question, mais il fut coupé par le retour d'Hikaru, qui se laissa tomber sur sa chaise, et posa une pierre sur le Goban.

« - De quoi vous parlez ? S'enquit-il alors que Waya posait une pierre à son tour.

- de Sai » répondit Isumi, observant attentivement la réaction d'Hikaru.

En apparence, il ne sembla pas réagir, mais Isumi vit la tension soudaine qui envahi le méché. Il se redressait sur sa chaise, et claqua sa pierre un peu trop fort.

« - Et ? » Demanda-t-il, essayant de paraître absorbé par le Goban.

Isumi pensa un instant à le presser de questions, pour pouvoir le faire craquer. Mais il voyait bien que ça ne ferai que le braquer. Alors il prit sur lui, et répondit :

« - Rien de bien important. »

oOo

Akira s'arrêta devant le café, indécis. Depuis la semaine dernière, il pensait beaucoup à ce café, et surtout au serveur, Hikaru Shindo. Pour la première fois, il avait l'impression qu'il pourrait avoir un ami. Mais peut-être espérait-il trop ? Peut-être qu'Hikaru l'avait déjà oublié…

Il était déjà passé devant le café pendant cette semaine, mais il avait vu à travers la vitre Hikaru en compagnie de deux autres pros, en train de disputer une partie. Il n'avait pas osé entrer, ne voulant pas entendre les remarques qu'ils lui auraient faites, surtout devant Hikaru.

Mais cette fois, il était venue en pleine matinée, vers 10h, une heure creuse pour le café. Hikaru serai sûrement seul.

Prenant son courage à deux mains, il poussa la porte du café et entra.

Le vieil homme de la dernière fois, toujours derrière le bar avec un livre dans la main – à croire qu'il n'avait pas bougé en une semaine – le salua chaleureusement.

Akira repéra tout de suite Hikaru. Il était au fond, en train de débarrasser une des table et de passer le chiffon. Il se dirigea vers lui.

« - Bonjour » marmonna-t-il, soudain peu sûr de lui.

Le méché se retourna vers lui, et lui fit immédiatement un grand sourire.

« - Hey Akira ! » Le salua-t-il joyeusement.

Le brun écarquilla les yeux, surprit par l'emploi de son prénom (2). Mais au lieu de s'en offusquer, il trouva ça agréable, bizarrement.

Hikaru, qui avait remarqué son trouble, s'excusa rapidement.

« - Désolé, c'est l'habitude. George est français » dit-il en désignant le vieil homme qui était toujours derrière le bar et les ignorait totalement, « et là-bas ils s'appellent par leur prénom facilement. J'ai commencé à faire pareil.

- C'est pas grave, se surprit à répondre Akira. Tu peux continuer à m'appeler par mon prénom, ça ne me gêne pas.

- D'accord, mais seulement si tu fais de même !

- Ok Hikaru. » accepta Akira en savourant les syllabes du prénom alors qu'il les prononçait. C'était nouveau, comme sensation. C'était agréable.

« - Bon, tu veux quelque chose ? Demanda Hikaru, reprenant son rôle de serveur.

- Oui » acquiesça Akira en reprenant contenance. Il se redressa, et planta ses yeux dans ceux d'Hikaru, déterminé. « Je veux jouer une partie avec toi. »

Hikaru reprit lui aussi son sérieux.

« - Ok, pas de problème ! Viens, je sors le goban, dit-il en l'emmenant à une table. Tu veux une boisson ?

- Je veux bien un chocolat, demanda Akira avec gourmandise.

- Ah, il est bon hein ? Rit Hikaru. Installe-toi, j'apporte ça. »

Hikaru revint rapidement avec deux tasses, et une assiette avec deux pâtisseries.

« - Ce sont des mille-feuilles. Tu vas voir, c'est délicieux. Bon, tu fais Nigiri ?

- Oui. Tu veux combien de pierre de handicap ? demanda-t-il en posant une poigné de pierre sur le Goban.

- Aucune ! Répondit Hikaru avec assurance.

- Oh, ok. Tu es si fort que ça ?

- Tu verras, se contenta de répondre Hikaru. Bon, j'ai noir ! »

Il posa sa première pierre sur le Goban.

oOo

« - Ce coup était complètement stupide ! Tu aurais plutôt dû faire un œil là, j'aurais été obligé de reculer !

- Mais si j'avais fait ça, j'aurais eu plus de mal à conquérir le centre ! Il aurait mieux valu que tu joues ici, je n'aurais ainsi pas pu jouer là et… (3)

- C'est facile de dire ça, mais c'est quand même moi qui ai gagné !

- STOP ! »

Hikaru et Akira cessèrent de se crier dessus, coupé par l'injonction. Ils se tournèrent tout deux vers George, qui se tenait debout devant leurs table, les bras croisé et leur lançant un regard noir. Leur colère fut soufflée comme une bougie, et ils se lancèrent un regard gêné.

« - Si vous n'êtes pas capable de jouer sans vous battre, alors vous dégagez de mon café. On n'a pas idée de se gueuler dessus comme ça ! »

Hikaru et Akira baissèrent la tête, penaud. George se passa la main dans les cheveux d'exaspération, puis se détourna en rajoutant :

« - Je vais chercher quelques bouteilles à la cave. Quand je reviendrais, je veux que ce Goban soit rangé. Et pas un mot plus haut que l'autre ! »

Puis il quitta enfin la pièce. En silence, Akira et Hikaru commencèrent à réunir les pierres et à les mettre dans leur boîte. Tout en le faisant, Akira se fustigeait mentalement. Il ne se reconnaissait plus ! Il n'avait jamais perdu autant le contrôle de lui. C'était comme si, en présence d'Hikaru, quelque chose se lâchait en lui. Lui, toujours si calme, s'était énervé comme jamais, juste à cause d'une petite remarque ! Maintenant Hikaru allait penser qu'il ne savait pas se tenir…

« - Désolé, marmonna-t-il, n'osant pas regarder l'autre garçon.

- Pourquoi ? Demanda Hikaru, surpris.

- Et bien, pour avoir crié…

- Ça ? C'est pas grave voyons, moi aussi j'ai crié. Je crois qu'on n'est pas fait pour parler calmement autour d'un Goban, ça arrive. Tu devrais me voir avec mon grand-père parfois ! Bon, je ne pense pas que l'on pourra rejouer ici. Tu ne connaîtrais pas une adresse où… Quoi, qu'est-ce qu'il se passe ? » Demanda-t-il en remarquant enfin qu'Akira avait cessé tous mouvements, et le regardait avec un air de surprise.

- Ça… Ça ne te gêne vraiment pas ? Tu veux quand même rejouer contre moi ?

- Bien sûr ! Tu verras un jour, je te vais te battre ! »

Akira se redressa face à ces paroles. Peu importe l'état dans lequel il se trouvait, il prenait toujours un défi au sérieux. Mais malgré tout, il ne se sentait pas menacé. En fait, il était intéressé de voir si Hikaru pourrait vraiment le battre. Mais il ne se laisserait pas dépasser aussi facilement !

« - N'y compte pas trop, Hikaru. Tu joues très bien, mais ce n'est pas encore suffisant !

- Tu trouves que je joue bien, sourit Hikaru en prenant le Goban.

- Mais que ce n'est pas suffisant ! Rappela le brun.

- Je m'en fiche, tu as dit que je jouais bien et je compte bien ne retenir que ça !

Akira s'adouci un peu.

- Oui, tu joues bien. Je trouve même impressionnant que tu sois arrivé à ce niveau sans être passé par les inseïs. Tu es même plus doué que certains pros ! C'est vraiment impressionnant… et assez dommage.

- Ah non, non non non ! Le coupa Hikaru en levant un doigt vers lui. Waya essaie déjà à chaque fois qu'il vient me voir. J'aime travailler dans ce café. Je ne souhaite pas devenir pro, Akira. Je n'en ai pas le niveau, rajouta-t-il avec une pointe de peine dans la voix.

- Attend, tu penses avoir le niveau pour me battre, mais pas pour devenir pro ? C'est ridi… »

Akira laissa sa voix s'éteindre devant le visage fermé d'Hikaru. Il devina qu'il devait y avoir plus que ça derrière cette histoire de pro. Il se demanda s'il devait essayer de tirer les vers du nez à Hikaru. Mais non, ce n'était pas son style. Et de toute façon, ce n'était que la deuxième fois qu'il voyait Hikaru. Même si le courant passait bien entre eux – plus qu'avec n'importe qui d'autre dans son cas – il ne connaissait pas encore assez Hikaru pour pouvoir s'immiscer comme ça.

Alors, il changea de sujet.

« - Mon père a un club de Go, près de la gare. On pourrait s'y retrouver pour jouer ? Et tu pourrais me donner ton pseudo sur le site, on pourra jouer en ligne.

- Pas de problème ! Mon pseudo n'est pas très original, c'est « Hikago ». Et toi ? Demanda-t-il comme s'il ne s'était rien passé.

- C'est juste « Akira », rien de très original non plus. On pourrait s'échanger nos numéros de téléphone, pour que je te passe l'adresse ?

- D'accord ! Tiens, note le moi, dit Hikaru en lui tendant un papier. Bon, midi approche, les clients vont bientôt arriver. Tu veux que je te serve autre chose ? Demanda Hikaru en lui tendant un papier.

- Non, je vais devoir y aller désolé, refusa avec regret Akira en se penchant sur le papier pour écrire son numéro. Je te dois combien pour le mille-feuille ?

- Rien, c'est cadeau de la maison ! Bon, on se prévoit une autre partie bientôt ?

- Pas de problème » lui sourit Akira.

Après s'être salué, Akira quitta enfin le café. Il se rendit d'un bon pas vers la Nihon Ki-in, tout en repensant à la partie qu'il venait de jouer. Certains coups lui avait fait penser à Sai, le déstabilisant quelque peu. Etait-il possible qu'Hikaru le connaisse ? Akira mourrait d'envie de poser la question, mais n'avait finalement pas osé.

Son téléphone vibra dans sa poche, le coupant dans ses réflexions. Il le sorti et consulta le texto qu'il venait de recevoir.

Hello Akira, c'est Hikaru ! Voilà, tu as mon numéro maintenant :D

Akira sourit en le lisant, et répondit rapidement en reprenant sa marche.


(1) « Baduk » est le terme coréen pour "Go" (merci Lord Naryk pour avoir corrigé mon erreur :).

(2) Vous devez le savoir, mais au Japon, ils s'appellent tous par leurs noms de familles. Sauf que dans le manga ils s'appellent « Hikaru » et « Akira » dès le début, alors j'ai cherché à expliquer ça, sauf que mon explication contredit le fait que j'appelle Waya et Isumi par leurs noms. Mais bon comme le manga fait la même chose, je garde ça parce que c'est plus simple :)

(3) Je ne sais pas jouer au go, donc j'ai juste mis des termes qui reviennent dans le manga.


Alors, qu'en pensez-vous ? J'espère ne pas avoir plongé dans l'OOC, ça fait longtemps que je n'ai pas relu les mangas. N'hésitez pas à laisser une review ! (surtout que je ne me fais pas d'illusion, je sais qu'il n'y a plus beaucoup de personnes qui passent sur le fandom de HNG. C'est donc d'autant plus important pour moi d'avoir votre avis !).

Le prochain chapitre sera publié mercredi, et on ira du côté de Hikaru, pour voir comment il a vécu ça de son côté :)