La Fille au Visage Lunaire
Résumé :
Lunaire : adjectif. Relatif à la lune.
Au sens figuré : fantaisiste, chimérique.
Dans les deux cas, ça parlait à Remus.
Dans les deux cas, ça lui déplaisait.
Dans les deux cas, ça la décrivait.
Première Année
Je reste sur ma chaise, les jambes serrées, mes muscles tendus mais mon dos courbé.
Je suis en présence d'un assez grand nombre d'élèves, et surtout, ils sont très proches des moi. Je suis heureux mais je sens que ça m'énerve aussi. Je n'ai pas l'habitude, j'ai la certitude qu'ils vont me blesser, me briser, m'abandonner... Et ce, sans même connaître ma nature.
C'est bizarre, pourtant c'est moi la bête ici. Pourquoi ai-je si peur ? La société n'est vraiment pas faite pour les gens comme moi. Je n'aurais jamais dû venir ici, j'ai eu tort.
Cette peur me tord le ventre, elle est presque aussi intense que celle que j'ai lorsque je vois la pleine lune se lever dans le ciel.
Je déglutis difficilement et gigote, embarrassé. Les garçons de mon dortoir restent à la table à laquelle je me suis installé et discutent sans m'adresser la parole. D'un côté, je fais semblant de lire donc pourquoi ça m'étonne ? Stop !
Il faut que j'étudie, afin d'avoir un bon travail... Je ne sais pas si je pourrais faire le travail que je veux, je ne sais même pas ce que je veux... Peut-être devenir médicomage. Je suis plutôt apte à comprendre la souffrance des autres ! Tout le monde respecte les guérisseurs et les études ne me font pas peur, donc c'est plutôt une bonne idée. Et je pourrais montrer que même malade, on peut réaliser ses rêves... Bien que ce ne soit pas vraiment un rêve mais plus un objectif.
En attendant, je continue de lire mon manuel sur les ingrédients en potions et je n'y comprends rien du tout.
C'est utile, Potion, pour devenir médicomage ? Quelle matière idiote tout de même. Mélanger des choses aussi dégoûtantes pour avoir des effets très relatifs et ne toujours pas savoir guérir les maladies les plus graves.
Je relève la tête en écoutant une blague de James Potter, un garçon avec des lunettes rondes comme dans les livres d'enfant et des cheveux terribles. Tous ses amis éclatent de rire et je tente de rester silencieux bien que je sourie aussi. Il est vraiment très drôle. Tout le monde l'adore ! Je suis un peu jaloux mais vu qu'il me parle de temps en temps, j'ai du mal à sérieusement lui en vouloir d'être plus aimé que moi.
D'avoir plus que moi.
Il est populaire, on lui pardonne toujours lorsqu'il fait perdre des points et il est assez doué en magie on dirait. Souvent, il parle de quidditch et il raconte des aventures qu'il a vécues sur son balai et c'est incroyable. Il est vraiment passionné et s'est promis de postuler pour l'équipe de Gryffondor l'an prochain. J'étais malade lors du premier cours de vol mais tout le monde m'a rapporté qu'il était vraiment doué !
Il traîne souvent avec Sirius Black, un garçon de très bonne famille un peu agressif de temps en temps mais jamais pour rien. Bon, je lui en veux encore de m'avoir presque hurlé dessus parce que je ne lui répondais pas au sujet de mes absences mais il s'est excusé et me laisse tranquille la plupart du temps, comme s'il respectait mon désir d'être un peu seul. Parfois, il me propose même ses cours pour que je rattrape mon retard. Je me demande s'il ne fait pas ça à contrecœur parce qu'un professeur le lui aurait demandé ou s'il s'en veut... Surtout qu'il semble toujours boudeur quand il me tend ses parchemins. Et puis, il n'arrête pas de me jeter des regards soupçonneux. Je pense qu'il ne m'aime pas beaucoup et ça n'attire pas ma sympathie. Mais vu qu'il m'aide malgré tout, je ne peux pas le haïr non plus.
Je n'arrive pas à comprendre pourquoi ça me blesse : je ne l'apprécie pas, lui non plus et pourtant... Je pense que j'aimerais être ami avec James, comme lui... Et aussi avec lui. Ou peut-être que ce que je veux c'est être comme lui : en bonne santé, d'une famille respectée et qui n'a aucun mal à se faire entendre. J'ai toujours peur qu'on m'en veuille, qu'on me fuie si j'élève la voix ; lui il le fait et tout va bien.
Tout ça à cause de cette fichue lune.
Soudain une fille noire -Sue je crois- apparaît pour nous demander ce qui nous fait rire. Et tu es là, à ses côtés... Alice Emmerson. Tu ne peux pas te déplacer toute seule on dirait, tu es toujours cachée derrière ta cousine Carmel Wallen ou une de nos camarades de classe. Tu rougis avant même que ta copine ne parle, tu te tiens les mains comme un bébé et tu baisses le regard, apparemment terrifiée. Tu es petite et plutôt ronde et tes cheveux coupés en carrés ne font qu'accentuer cet effet.
Je ne t'apprécie pas du tout.
Tu es fatigante, on doit toujours te demander de répéter tes babillages insensés et tu finis par t'enfermer dans ton mutisme lorsqu'un professeur te pose une question, nous faisant perdre des points. Tu pourrais penser aux autres ! Les autres qui te taquinent de temps en temps et dont tu prends les remarques toujours trop au sérieux. En plus, tu mets tout le monde mal à l'aise en étant sans arrêt au bord des larmes. Je n'arrive pas à croire que tu sois au collège.
D'ailleurs, on dirait que tu n'as que huit ans.
Je ne m'entends pas très bien avec les filles, quoi de plus normal pour un garçon et en plus, elles sont trop curieuses donc je préfère les rabrouer rapidement, quitte à avoir une mauvaise réputation. Au moins, ainsi, on me laissera tranquille. Mais toi, c'est tout simplement physique. Je ne peux pas te voir sans ressentir le besoin de partir loin ou de te cogner pour que tu te taises. Et pourtant, ce n'est pas le loup en moi qui me fait penser ça, non, lui n'arrive qu'après ces premières pensées et me propose de te mordre, de t'arracher des morceaux de chair et de me régaler. Bien évidemment, j'arrive à me contrôler et refuse ce genre d'idées mais ça ne calme pas ma haine pour autant. Tu es toujours là, à minauder avec tes airs de petite princesse ridicule alors que tu ne sais pas agir toute seule ! Tu ne sais pas être naturelle et tu n'es pas intéressante du tout. Tu n'y connais rien en quidditch alors que tu es issue d'une famille de sorciers, tu critiques sans arrêt les autres garçons et tes idées sur le monde sont ridiculement niaises, comme si tout t'étais dû...
Une enfant pourrie gâtée.
Tu devrais franchement apprendre la vie, ma petite !
Je me demande souvent ce que je fais à Gryffondor et j'arrive parfois à trouver des explications, mais pour toi, jamais !
Tu n'oses même pas me regarder dans les yeux. Ce serait risible si ça ne me faisait pas douter au sujet du fait qu'on puisse voir mon autre moi à travers mes pupilles. A cause de toi, je pense à ça, j'ai l'impression que tu le vois aussi, mon autre côté. Et ça me met en rage.
Je ne veux pas que tu me voies.
Je replonge dans mon livre avec un reniflement méprisant afin de me calmer.
C'est peut-être mieux que je ne sois pas populaire, au moins, je n'ai pas à te supporter comme James Potter.
