Toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire

Bonjour à vous qui passez par ici et merci de vous intéresser à cette fanfiction ! C'est ma première fanfic sur Thor, aussi j'espère que vous l'apprécierez. Elle se déroule bien avant les films, quand les neuf mondes étaient en paix et… *regarde tout le monde se foutre sur la gueule* ouais ou pas... Je m'attaque donc au SifxLoki, car je suis une inconditionnelle des pairing hautement improbables.

Et puis ce sont deux personnages que j'aime beaucoup !

Loki : On ne s'en serait pas douté…

*l'ignore sinon on n'a pas fini* Ne vous inquiétez pas (vous avez le droit de ne pas vous inquiéter aussi/SBAF/), les autres personnages seront aussi très présents.

Après cette entrée en matière d'une « originalité » déconcertante (il se fait tard, ce doit être pour ça… *regarde l'heure qui affiche midi et ne dit rien…*), je vous souhaite une bonne lecture ! N'hésitez pas à poster une review pour laisser vos impressions, bonnes ou mauvaises.

Crédits : l'univers et les personnages appartiennent à Marvel… sauf Loki /SBAF/ Ok ok tous les personnages.


POV : Sif

Qu'est-ce qui nous pousse à mentir ? Je ne m'étais jamais réellement posée la question pour la simple raison que je n'avais jamais eu à user de mensonges auparavant. L'acte de mentir, on l'attribuait essentiellement aux humains… et à quelques exceptions asgardiennes. En règle général, on omettait davantage qu'on mentait. Vous me direz que techniquement cela revient au même. Pas tout à fait. Moi je faisais la nuance. Non, mentir ne faisait pas partie de mes habitudes. Jusqu'ici, je m'étais toujours évertuée à rester droite car honneur et loyauté constituaient les deux grandes valeurs de mon existence. Oui j'avais bien dit « jusqu'ici ». En vérité, on pouvait trouver des tas de raisons pour mentir. Et il avait suffi d'une seule pour que je me retrouve totalement submergée…

Généralement, on commence par un petit mensonge qui semble insignifiant. Mais moi, il fallait que je fasse les choses en grand évidemment, alors j'avais débuté directement avec un énorme mensonge. Et le voila qui commençait à menacer dangereusement mon petit monde jusque là à peu près tranquille. Enfin, tranquille était un bien grand mot, j'en convenais…

Dame Sif. C'est ainsi que l'on me nommait communément. Une manière polie de m'adresser la parole ou de me désigner en ma présence. Pourtant, si l'on prêtait oreille aux bruits de couloir –et ils étaient nombreux au palais d'Asgard- on entendait les femmes de bonne naissance s'indigner. Elles disaient que je n'avais rien d'une dame uniquement car je portais les armes. Une jeune femme de haut rang qui se bat comme un guerrier, n'était-ce pas révoltant ? Pour ma part, je me demandais qui avait décrété une chose pareille que j'aille lui faire goûter l'acier de ma lame.

Je n'étais pas pour autant mieux considérée par les soldats. A l'inverse, eux ne voyaient que la femme en moi et ils s'étaient tous mis en tête que je ne pouvais pas être aussi bonne qu'eux. Quant à l'idée que je puisse devenir meilleure, cela suffisait à défriser les poils de leurs barbes. Que le Père de toute chose m'accorde un tant soit peu sa confiance n'arrangeait pas leur opinion à mon égard et c'est parfois avec une trogne de troll sorti de sa caverne qu'ils m'observaient durant les entraînements. Quelques uns cependant sortaient du lot et me voyaient sous un bon jour, mais ils n'étaient pas foule. Pas encore, me disais-je pour rester optimiste. Quoiqu'il en soit, cela ne changeait rien à mon attitude et à mes valeurs. Je n'étais pas de ces femmes qui attendaient docilement et dans la soumission au fond de la pièce que les hommes aient terminé de parler bataille. J'admirais depuis toujours la reine Frigga qui incarnait l'un des piliers essentiels du pouvoir d'Asgard. Elle savait orienter les décisions d'Odin lorsqu'elle jugeait qu'il s'égarait. C'est à ce genre de femme que je voulais ressembler, sauf que moi je n'étais pas une reine, mais une guerrière, n'en déplaise à mes détracteurs.

Heureusement, ma place je savais où la trouver et ce depuis de nombreuses années, au point que jamais les railleries ou les reproches n'avaient ébranlé mes résolutions… bon, je mentirais en avouant que cela ne me faisait rien, mais on apprenait à relativiser dans ce genre de situation, non ? Et il fallait bien une personne sachant justement relativiser dans l'entourage de Thor, fils d'Odin. Je n'étais même pas certaine que ce mot lui soit connu. Plus impulsif, c'était difficile à faire et je préférais ne pas savoir ce que cela donnerait. Néanmoins, quoiqu'il arrive je serais aux côtés de Thor, lui qui m'avait toujours soutenu, à l'instar de Fandral, Hogun et Volstagg. Leur soutien, c'est tout ce qui m'importait, bien que je ne leur avouerai jamais ce genre de choses en face. Parlez-leur de subtilité à ces hommes là et vous risquez de perdre définitivement les rares neurones assez téméraires pour coloniser leur cerveau. Surtout Thor. Il voyait en moi le guerrier quand je souhaitais qu'il regarde la femme et il considérait la femme lorsque j'endossais le rôle du guerrier. Etait-il possible d'être plus sot que ça ? Pour un dieu maniant la foudre, je ne le trouvais pas toujours très éclairé. Pourtant, Thor n'était pas simplement un idiot de prince asgardien. C'est aussi pour ça que je l'aimais davantage que je ne l'aurais dû… quand bien même je savais que ce n'était pas réciproque.

Je m'ébrouais, tirée brusquement de mes pensées par le vent cinglant de Vanaheim qui me rappela à la dure réalité. Pour l'heure, j'étais loin d'Asgard. Le domaine des Vanes, bien moins grandiose que le royaume des Ases mais non dénué de beauté, s'étendait devant moi. Seulement c'est à peine si je le voyais. J'observais les lieux d'un regard morne qui ne me ressemblait pas, tout mon désarroi s'affichant certainement sur mon visage comme une pancarte. Et cette expression ne fit que s'accentuer lorsque je me reportais aux débris éparpillés dans mes mains, dont certains s'écrasèrent sur le sol. Après avoir vainement tenté de les rassembler, je contemplais bêtement les morceaux comme si les regarder allait reconstituer la pierre magique qu'ils étaient autrefois. Oui, avant que l'objet que j'étais venue spécialement récupérer ne se fasse écraser dans un effondrement, à l'intérieur d'une caverne. J'en étais ressortie quasiment indemne, mis à part quelques égratignures, et je devais bien avouer que j'aurais préféré récolter des blessures plutôt que de voir la pierre magique se faire ratatiner sous la roche de la grotte.

En ce moment, je me demandais comment j'allais bien pouvoir affronter le regard du Père de toute chose. Comment le regarder dans les yeux –ou plutôt l'œil, vu qu'il n'en a plus qu'un… hum- après cela ? Il m'avait chargé d'une mission. Il me l'avait confié Lui-même, en personne ! Tous les soldats ne se voyaient pas gratifiés d'un tel honneur ! C'était la première fois qu'il faisait officiellement appel à moi pour une quête aussi importante.

C'est donc pour cette noble raison que je me tenais là, à la lisière d'une forêt de sapins particulièrement dense, des débris entre les mains. Disparu le large sourire que j'arborais auparavant, alors que je me voyais déjà la remettre au Père de toute chose, avant d'aller raconter ma quête achevée à Thor et aux Trois Guerriers qui décideraient certainement d'arroser cela. Volstagg aurait été trop content de trouver une nouvelle occasion pour boire. Moi j'avais bien une raison de boire oui, mais c'était davantage pour noyer ma honte et mon désespoir dans la boisson que pour fêter la réussite de ma mission. Car ladite mission venait d'être réduite à néant en même temps que la pierre, l'objet de ma quête.

Cela n'expliquait pas ce qu'avait cette fameuse pierre, j'en conviens. Après tout, quitte à aller ramasser des cailloux pour le puissant Odin, j'aurais pu rester à Asgard plutôt que de voyager jusqu'ici par le Bifrost. Cette pierre n'était autre qu'un vieux talisman magique –extrêmement fragile- qui permettait de guérir les plaies, mêmes les plus graves. On racontait que les runes de la pierre avaient été gravées il y a fort longtemps par les Alfes lumineux, lui conférant ses propriétés magiques. Chaque fois qu'un rayon de lumière accrochait les inscriptions, ces dernières se mettaient à briller. Le talisman fut pourtant dérobé par les Nains, qui revendiquaient leur droit de posséder la pierre puisque c'est eux-mêmes qui l'avaient taillé. Ainsi la discorde s'était-elle installée, avant que le talisman ne passe de nouveau dans d'autres mains : celles des Géants.

Et voilà qu'aujourd'hui, le talisman était encore gardé par l'un de ces Géants qui se l'était approprié alors qu'elle ne lui revenait pas. Les guérisseurs d'Asgard avaient dernièrement réclamé l'objet magique pour nos guerriers, aussi le Père de toute chose m'avait-il chargé de le récupérer. La menace des rebelles au pouvoir d'Odin nécessitait toujours la présence de soldats, et il fallait bien avouer que Neuf mondes à gérer, ce n'était pas rien les blessures finissaient par s'accumuler même pour un peuple solide comme les asgardiens.

Comme le Géant n'avait pas vraiment envie de me la céder docilement vu le nombre d'insultes dont il m'avait gratifié, il m'avait fallu négocier longuement pour obtenir l'objet convoité. Négocier avec un Géant dans une caverne, une tâche aussi ardue qu'obtenir des paroles cohérentes de Volstagg lorsqu'il était saoul, de résonner Thor ou -pire encore- de pousser Fandral à se marier. Alors que j'étais restée intègre et diplomate, conformément à mes valeurs et bien décidée à ne pas lui ôter la vie sans essayer de le raisonner au préalable, cette ordure m'avait tendu un piège. En un battement de cil, la caverne s'était effondrée sous mes yeux, manquant de m'ensevelir avec l'objet de ma quête. Au lieu de ça, elle avait seulement écrasé, piétiné, broyé ce qui aurait pu m'ouvrir la voie des louanges. J'avais bien tenté de retrouver la vile créature afin d'en finir avec la diplomatie et de l'envoyer rejoindre Hel, mais le Géant restait introuvable. J'aurais dû me douter que cette caverne était bien trop accessible et que cela devait forcément induire des pièges dissimulés à l'intérieur. J'avais été trop téméraire et pas assez réfléchie.

Et voilà que je décevais les attentes d'Odin, alors qu'il m'avait fait l'honneur de me confier une mission qu'il aurait pu donner à quelqu'un d'autre. Au lieu de me couvrir de gloire, j'allais me couvrir de honte. Inutile de préciser que je préférais la première option à la deuxième.

_ Je veux mourir, lançais-je en me laissant tomber au sol pour contempler les restes de la pierre magique qui n'avait désormais de magique que le nom. C'est un cauchemar et je vais me réveiller. Je vais me réveiller maintenant.

Sauf que je ne me réveillais pas. Je n'avais plus qu'à me mettre en route pour Asgard et chercher comment j'allais pouvoir expliquer la situation au Père de toute chose. Tout s'était passé tellement vite que je n'arrivais toujours pas à y croire. Thor et les Trois Guerriers risquaient de m'en parler pendant longtemps. J'étais certaine qu'ils ne mesureraient pas la gravité de la situation. Pas comme moi. Ils allaient en rire très certainement. Je devrais faire semblant que cela ne me faisait rien tout en les fusillant du regard et en me vengeant sur les entraînements… tout en étant mortifiée à l'intérieur.

Je perçus alors un mouvement, un léger bruit feutré qui m'indiqua cependant la présence de quelqu'un d'autre à proximité. Un guerrier –en l'occurrence une guerrière- sentait toujours plus facilement ce genre de choses. Notre instinct maintenait constamment nos sens en éveil, au point que même ce bruissement insignifiant et cette impression de ne pas me trouver seule me fit tourner lentement la tête. J'avais posé une main sur la garde de mon épée, juste au cas où. Peut-être était-ce ce maudit Géant qui revenait pour se rire de moi. Cette fois-ci, je ne comptais pas me montrer aussi clémente. Je jurais même de passer ma colère sur lui, le premier responsable de ce fiasco. Pour le reste… et bien j'étais quand même concernée également –mais seulement en deuxième !- aussi endosserais-je mes responsabilités une fois à Asgard.

Mais visiblement ma vengeance devrait attendre car aucun Géant ne se profilait à l'horizon, auquel cas je pense que je l'aurais vu…

A la place, une silhouette se découpait entre les arbres, me forçant à plisser les yeux. Chose surprenante : elle me semblait familière. Elle m'observait également et ce ne fut que lorsque je m'approchais, distinguant ainsi les cheveux noirs qui soulignaient la pâleur de son teint, que je reconnus l'individu. Une alarme s'enclencha aussitôt dans mon esprit en découvrant ce visage froid et renfermé qui donnait sans cesse l'impression de calculer. De là où je me trouvais, j'avais presque le sentiment de pouvoir discerner ses yeux verts insondables. Loki, frère de Thor, maître incontesté du mensonge et de la ruse. C'était tellement insensé de le croiser ici que j'en demeurais muette. Aussitôt, cette soudaine apparition m'incita à la méfiance, d'autant plus que mon visage exprimait certainement ce que je ressentais à cet instant : la honte d'être prise sur le fait, les débris de pierre entre les mains et les traits complètement décomposés. Mes pensées défilèrent à toute vitesse dans mon esprit et je craignis un instant qu'il ne sache ce qu'il venait de se produire.

Comme s'il s'agissait d'un simple mirage, le prince asgardien disparut entre les arbres et seul son regard soupçonneux demeura ancré dans ma tête. Cette histoire ne sentait pas bon et c'était encore plus vrai à présent. Sans perdre un instant, je me hâtais de retourner à Asgard, appelant Heimdall. Le gardien du Bifrost entendit mon appel et je me fis la réflexion peut-être inutile que cette omniprésence avait parfois des avantages... mais beaucoup d'inconvénients. Heureusement qu'Heimdall était un asgardien des plus sérieux. Malheureusement, ce zèle pourrait me desservir si jamais il avait vu le talisman se faire ratatiner dans l'effondrement. Mais mes réflexions en restèrent là tandis que le pont arc-en-ciel déferlait vers moi.

Happée par le Bifrost, je me laissais entraîner dans une explosion de couleurs arc-en-ciel jusqu'à atteindre Asgard. Ma gorge se noua une fois que je me retrouvais face au gardien en personne. Ses yeux ambrés me dévisagèrent sans ciller et j'eus bien du mal à dissimuler mon malaise. Je n'avais jamais éprouvé de gêne face à Heimdall, aussi devait-il sentir que quelque chose n'allait pas.

_ Bon retour parmi nous, Dame Sif. Comment s'est déroulé ta quête ? Demanda le gardien du Bifrost d'une voix neutre et grave.

J'écarquillais les yeux, redressant la tête aussitôt. On pouvait dire qu'il savait entrer dans le vif du sujet…

_ Tu ne le sais pas ? Le questionnais-je, surprise qu'il ne soit pas déjà au courant de mon échec.

Un léger soupir franchit ses lèvres, alors qu'il se tenait droit comme un i, aussi guindé que de coutume. Un jour, il finirait par avoir des crampes à rester toujours debout, les mains fixées sur la garde de son épée.

_ Non. Mon attention s'est portée sur Thor à Muspellheim. Je crains que le fils d'Odin n'ait encore fait des siennes.

Pourquoi cela ne m'étonnait pas ? Je levais les yeux au ciel, avant de me rappeler que je ne pouvais guère réprimander le Prince de la foudre avec ce qu'il m'était arrivé. Allez, Sif, courage ! Le calme reviendrait certainement après la tempête. Je crois… J'espère…

Soudain, je me rappelais de quelque chose.

_ Heimdall, Loki est-il rentré à Asgard lui aussi ?

Ce fut au tour du gardien de marquer la surprise, bien que chez lui cela se résume à un simple haussement de sourcil.

_ Je n'ai pas vu le Prince Loki de la journée, répondit-il.

Je me rembrunis sous l'œil du gardien du Bifrost. Etrange… J'étais persuadée qu'il s'agissait bien de Loki à Vanaheim. Je pouvais difficilement le confondre avec quelqu'un d'autre.

_ Tu ne m'as pas répondu, insista Heimdall, me tirant de mes réflexions.

Je supposais qu'il parlait de la mission…

_ Oh… Hum…, articulais-je avant de lui offrir un sourire forcé qui se voulait innocent. Ça s'est passé.

Cela ne voulait absolument rien dire, mais on ferait avec.

_ As-tu la pierre qu'Odin t'a demandé de lui rapporter ?

C'était bien la première fois mais je devais avouer que je commençais à trouver Heimdall un peu lourd. L'idée de lui dévisser les cornes de son casque me traversa l'esprit, mais je n'en montrais rien. Le fait de préciser que le Père de toute chose me l'avait demandé ne fit que rajouter à ma honte et à mon humeur. Je continuais cependant à sourire tout en hochant la tête, incapable d'articuler un mot.

J'aurais dû lui dire que non, je le savais. Je me fis cette réflexion alors que je chevauchais jusqu'au palais, mais j'avais été incapable de lui avouer la vérité. Je n'avais rien dit du tout. Dans la précipitation, c'était comme si j'avais manqué de discernement. Je commençais déjà à m'en vouloir.

Alors que je passais les portes du palais, un garde vint à ma rencontre.

_ Dame Sif, vous êtes de retour. Avez-vous la pierre qu'Odin vous a envoyé chercher ?

Je soupirais, avant de sourire à nouveau, sans dire un mot. Le garde s'effaça pour me laisser entrer, tandis que je ruminais. Je ne pouvais pas me mettre en colère car tout était de ma faute… et de celle du Géant ! Surtout du Géant ! Seulement, je ne pouvais pas dire cela au Père de toute chose. Je devais endosser l'entière responsabilité de mon échec.

Mes pas résonnèrent dans le couloir, se répercutant sur les hautes colonnes du palais. Leur splendeur ne me fit rien ce jour là, car j'étais trop préoccupée. Tellement préoccupée que je passais devant Volstagg sans même le voir, ce qui ne manqua pas de l'interloquer. Il me héla aussitôt, l'air affable :

_ Hé ! Sif ! Tu es de retour ! Alors, ce caillou d'Odin ?

Par l'Anneau de Nibelungen, y avait-il une seule personne en ce royaume qui ne me parlerait pas de cette fichue pierre !

_ Pas maintenant, Volstagg ! Lançais-je avec humeur tout en le laissant planté là au milieu du couloir, un air de profonde incompréhension sur le visage.

Tandis que je prenais le chemin de la salle du trône, je me souvins subitement de la présence de Loki à Vanaheim. Heimdall m'avait confié ne pas l'avoir vu, mais je savais que le frère de Thor connaissait d'autres passages que le Bifrost pour voyager entre les mondes. Il aurait pu utiliser l'un d'eux. De toute façon, cela ne me concernait pas. En revanche, le fait qu'il m'ait vu me fit rebrousser chemin et je pris aussitôt la direction de ses appartements, en espérant qu'il y soit. Il fallait absolument que je lui parle avant ma confrontation avec Odin. Cela ne changerait pas grand-chose à ma situation, mais peut-être avait-il déjà parlé au Père de toute chose ou prévoyait-il de le faire. Je préférais d'abord mesurer le degré de difficulté qui m'attendait afin de mieux m'y préparer. Cela ne m'étonnerait guère que Loki ait couru tout raconter à son roi de père, tel l'ignoble petit farceur qu'il était. En cela, les années écoulées ne l'avaient guère changé.

Je côtoyais Loki depuis aussi longtemps que Thor, certes. Et c'est justement pour cela que j'avais appris à me méfier de lui. Thor ne partageait pas cette suspicion de notre part, à moi et aux Trois Guerriers, mais je demeurais sceptique. Loki avait toujours semblé vouloir faire bande à part avec son attitude distante et plus froide. Même avec nous, il se montrait parfois hautain. Enfin, nous pouvions nous estimer chanceux, car son attitude devenait bien pire avec tous les autres individus. Il n'hésitait pas à se rire d'autrui dès qu'il le pouvait et les occasions ne manquaient pas puisqu'il était le meilleur illusionniste d'Asgard et sûrement des neuf mondes. Peut-être accepterait-il de rester en dehors de tout cela en souvenir des moments que nous avions passés ensemble, bien que ces moment n'aient jamais été très agréables et que, de ce fait, nous ne soyons pas vraiment des amis.

Je marchais vite. Tellement vite que je finis même par courir. Je sentais ma queue de cheval battre dans mon dos au rythme de mes pas précipités et je finis par arriver devant la porte, après avoir croisé quelques personnes qui s'étonnèrent de me voir passer comme un coup de vent.

Je frappais à la porte, la trouvant tout à coup immense. Aucun son de l'autre côté ne m'indiqua la présence de Loki, mais je retentais ma chance, sachant qu'il adorait faire attendre tout le monde. Toujours rien. Je me mis à marteler la porte, avant d'appuyer mon front contre elle pendant un long moment. Je fermais doucement les yeux.

_ Maintenant je peux l'affirmer… C'est une sale journée.

_ Que dois-je supposer en voyant cette posture ridicule ? Tu essayes de passer à travers les portes ? Lança soudainement une voix sèche derrière moi, me faisant sursauter.

Je me retrouvais nez-à-nez avec celui que je cherchais justement, aussi retins-je un soupir de soulagement à l'idée de ne pas avoir à fouiller tout le palais d'Asgard. Je ne me formalisais pas de ses paroles, sinon j'y passerais certainement la nuit.

_ Loki, tu es là ! Lançais-je sur un ton qui se voulait détaché mais qui trahissait tout de même mes inquiétudes.

Il me jeta un œil surpris, avant d'observer les alentours, puis la porte. Il finit par hausser un sourcil.

_ Oui, puisqu'il me semble que ce sont mes appartements…, répliqua t-il sans dissimuler son sourire ironique.

Ne pas m'agacer. Surtout ne pas m'agacer. Avoir une conversation avec Loki avait toujours été plus ou moins difficile. En vérité, cela dépendait surtout de son humeur. Et là, en l'occurrence, cela risquait d'être plus compliqué, semblait-il…

_ Il faut que je te parle, lui dis-je sur un ton des plus solennels.

_ Et bien c'est chose faite, répliqua t-il sèchement.

Je levais les yeux au ciel, alors qu'il tentait d'entrer dans sa chambre.

_ Non c'est vraiment important, insistais-je. Crois-moi, j'aurais préféré avoir cette conversation avec quelqu'un d'autre, mais cela te concerne.

_ Oh vraiment ?

Son regard signifiait qu'il s'en moquait éperdument. Loki poussa la porte avant de la refermer doucement sur moi. Non mais… Il me fermait la porte au nez ! Cela ne se passerait pas comme ça ! Je mis mon pied dans l'entrebâillement tout en retenant la porte avec ma main, histoire de ne pas me faire écrabouiller comme la pierre auparavant. Souvenir douloureux et encore vif…

_ Vraiment ! Ecoutes-moi au moins.

Le prince asgardien prit l'air de celui qui consent avec le couteau sous la gorge, mais il m'invita tout de même à entrer. Trop aimable…

Je pénétrais à l'intérieur de la chambre, non sans un regard furibond auquel il répondit par un sourire forcé.

La pièce était plutôt sobre. Elégante mais sobre. Il n'y avait que peu de décoration, presque pas de meuble. Je n'avais pas le souvenir d'y être déjà entrée et je n'avais eu aucune raison de le faire. Des piles de livres s'entassaient par ci par là, près du lit, de la fenêtre et... Ah ! Près de la porte… Je remis en place le bouquin sur lequel j'avais manqué de trébucher, ni vue ni connue.

Un silence pesant s'installa entre nous, raison pour laquelle j'entrais aussitôt dans le vif du sujet, les bras croisés, le regard inquisiteur.

_ Tu étais à Vanaheim, n'est-ce pas ? Je t'y ai vu.

Je perçus comme une lueur de contrariété qui passait dans son regard. Un bref froncement de sourcil et une légère crispation de la mâchoire. Il croisa les mains dans le dos, faisant quelques pas dans la pièce avant de se tourner vers moi.

_ Si tu m'y as vu pourquoi poses-tu la question ?

Cela n'allait pas être facile… Je le savais, mais je n'imaginais pas que ce serait SI difficile !

_ D'accord, ne tournons pas autour du pot, nous nous connaissons assez pour éviter les longs palabres. Que faisais-tu là-bas ?

Un rire cassant se répercuta dans la pièce.

_ J'ai des comptes à te rendre, maintenant ? Sommes-nous mariés et je ne m'en rappelle plus ? C'est fâcheux.

Je soupirais, lui renvoyant un regard réprobateur.

_ Ne parle pas de malheur. La pierre qu'Odin m'a demandé de ramener s'est brisée. Tu étais là, je veux savoir ce que tu faisais dans les parages.

Je suivis Loki du regard, tandis qu'il s'asseyait sur le rebord de la fenêtre. Il haussa les épaules, affichant un air neutre.

_ J'observais ce qui me semblait être un très bel exemple du désespoir, répondit-il avec un sourire sardonique.

Cela partait vraiment très mal et je me fis la réflexion qu'il venait de réussir l'exploit de me mettre hors de moi en seulement quelques minutes. Ma mésaventure devait m'avoir mis les nerfs à fleur de peau, sans doute…

_ Honnêtement, je ne trouve pas ça drôle, répliquais-je sur un ton acide.

_ Ça l'est pour moi.

Définitivement en colère, je me mis à faire les cents pas, contenant mon envie de lui dévisser la tête et de m'en servir comme presse-papier par la suite. Heureusement pour lui qu'il était le frère de Thor cela lui conférait une forme d'immunité.

_ Oh, tu peux toujours t'en servir pour faire un puzzle. Qui sait, en collant les morceaux peut-être qu'Odin n'y verra que du feu.

Et cela semblait bien l'amuser en plus… Je lui jetais un regard noir, avant de me planter devant lui, les mains sur les hanches. Les paroles que je prononçais me surprirent moi-même, en vérité :

_ J'espérais un peu d'aide de ta part, tu vois.

Il se mit à rire, un rire faux et hypocrite, trop content d'avoir l'avantage sur moi. Loki adorait que l'on dépende de lui, il chérissait par dessus-tout ce sentiment de puissance qui le plaçait au dessus des autres. Avisant mon expression, il s'arrêta progressivement de rire, demandant sur un ton faussement surpris :

_ Ah, ce n'était pas une blague ? Pour quelle raison t'aiderais-je ? Cela ne me concerne pas et c'est plus amusant ainsi.

Oh par toutes les créatures des neuf mondes, je n'avais vraiment pas envie de plaisanter maintenant ! Etais-je la seule à mesurer le drame de la situation ! (aucune exagération, voyons…)

_ Ce n'est qu'une pierre de guérison, reprit Loki comme s'il avait lu mes pensées. Enfin… Je suppose que si tu dis ça à Odin, il ne le verra pas de la même manière…

_ Merci pour cette information, je ne m'en serais pas doutée ! Je peux tout aussi bien lui donner ce morceau en lui avouant que c'est tout ce qu'il en reste, tant qu'à faire ! M'exclamais-je en brandissant l'un des débris du talisman que j'avais ramassé et qui tenait piteusement entre mes doigts.

C'est ce que j'aurais déjà dû faire, d'ailleurs… Mais où mon courage était-il donc passé ?

Nous nous fîmes face un moment, moi furibonde et Loki s'amusant visiblement beaucoup de la situation.

_ Allons, allons, très chère Sif, dit-il pour temporiser, le regard tourné vers la fenêtre. J'entends ton appel désespéré. Je te propose un marché… non négociable selon moi.

Aussitôt, je levais un sourcil, méfiante. Passer un marché avec Loki figurait sur ma liste des choses à ne surtout pas faire. Ses farces idiotes, j'en avais déjà fait les frais par le passé et je n'avais nulle envie de lui tendre la perche pour recommencer. Mais avais-je vraiment le choix, dans le cas présent ? Oui, je l'avais. A mon plus grand désarroi, je constatais cependant que mon désir de briller aux yeux du Père de toutes choses prenait le pas sur mon honnêteté et ma ligne de conduite.

_ Dis toujours.

Loki se leva, délaissa sa contemplation de l'extérieur. Il s'avança vers moi avec son éternel air chafouin, tandis que j'observais chacun de ses mouvements avec suspicion.

_ A force de me regarder ainsi, je vais finir par me vexer. On croirait presque que je ne suis pas digne de confiance !

Il sourit, le genre de sourire qui n'avait rien d'amical. En vérité, il était bel et bien conscient que oui, il était vraiment difficile de lui faire confiance, voire suicidaire. Modérant mon impatience, je le laissais jouer à celui qui se prend pour une lumière. Les bras croisés, un pied tapant le sol frénétiquement, je lui renvoyais un sourire forcé très significatif. Pourquoi s'embarrasser de longs discours, hein ?

Loki s'arrêta à quelques pas de moi et nous nous dévisageâmes un long moment, chacun cherchant la faille chez l'autre. Inutile de préciser que la mienne ne fut pas difficile à trouver dans la situation présente. Après cet échange qui ressemblait davantage à un combat visuel qu'autre chose, le dieu de la ruse me tendit la main. Je le regardais interloquée, ne voyant pas bien ce qu'il voulait par là. Il insista un peu plus, bougeant les doigts dans un geste d'impatience qui se perçut également sur son visage. Je compris qu'il souhaitait que je lui remette le débris de talisman. Je m'exécutais, perplexe. Il leva l'objet –ou plutôt ce qu'il en restait- à hauteur du visage, avant de faire la moue. Il exécuta un geste sec de la main et soudain, le talisman apparut devant moi dans son intégralité ! Même la cordelette d'argent accroché autrefois à la pierre avait été restitué ! J'écarquillais les yeux, mon regard allant de l'objet à Loki avec plusieurs allers et retours.

_ Mais c'est…

_ Une illusion, oui. Cela devrait suffire à faire croire à Odin que ta quête fut un succès.

Je reculais d'un pas tout en secouant la tête.

_ C'est un mensonge.

A nouveau, Loki fit la moue. Il paraissait très nettement agacé. L'illusion se dissipa aussitôt, alors qu'il passait la main juste au dessus. Le talisman redevient un petit débris insignifiant.

_ C'est à toi de voir. Tu veux mon aide ou non ? Je peux aussi courir auprès d'Odin pour tout lui révéler…

_ Non ! Surtout pas ! J'ai traversé beaucoup d'épreuves et fais énormément de sacrifices pour en arriver là. Je commence à peine à être reconnue en tant que guerrière par les miens, je ne veux pas décevoir Odin. Ni les autres…

J'avais baissé les yeux en disant cela, avant de les relever pour observer Loki qui grimaçait.

_ Ah, le sentimentalisme ce n'est vraiment pas mon truc.

_ Penses-tu vraiment pouvoir berner le Père de toutes choses avec cette illusion ? Demandais-je soudainement pour en revenir au sujet. La reine Frigga pourrait aussi bien s'en apercevoir. Elle n'est pas novice en matière de magie, loin de là.

_ Je suis au courant, merci, répliqua Loki un peu sèchement. Tu oublies seulement un détail je suis le meilleur illusionniste d'Asgard… Non ! Je suis le meilleur illusionniste des neuf mondes.

Il remit en place l'illusion avec l'air du marchand qui essaye de refiler sa camelote à tout prix, la plaçant dans mes mains non sans un sourire fourbe. J'hochais lentement la tête, le regard sombre, peu rassurée à l'idée de mentir. D'un autre côté, je ne me voyais pas arriver devant Odin avec mon débris et tout lui raconter. Je soupirais, prête à me rendre dans la salle du trône, mais Loki ne lâchait pas le talisman. Je la tirais vers moi, les sourcils froncés, mais il opposa une résistance, m'obligeant à lui lancer un regard interrogateur.

_ Une minute, siffla t-il. Nous n'avons pas parlé de ce que je gagnais moi à t'aider...