Salut tout le monde ! Je suis contente de revenir avec une nouvelle fanfic ! J'ai eu du temps pour mener à bien mes projets et, après une année de silence, je reviens pour réinventer l'histoire de Stephenie Meyer. Seuls les personnages et les lieux lui appartiennent, et encore, vous aurez du mal à les reconnaitre ! Les premiers chapitres servent à mettre en place le décor, alors ne vous attendez pas à avoir des étreintes torrides dès le troisième chapitre ;) Sur ce, bonne lecture :

Jessica regarda le ciel gris avec ennuis. Les nuages la rendait de mauvaise humeur et, déjà, elle priait pour que le soleil revienne. Mais l'on n'était qu'en Septembre et le soleil ne reviendrait que l'année prochaine. Cette réalité fit soupirer la lycéenne.

Elle décrocha son regard du ciel pour aller le poser sur une forme frêle qui se faufilait vers l'imposant bâtiment. Elle plissa les yeux, désireuse de reconnaître la jeune élève. La veste rayée, la capuche relevée, le sac ballotant sur l'épaule, les bras croisées dans une veine tentative pour se réchauffer, et le pas pressé. Voilà les seules indices que la mystérieuse jeune fille laissa à Jessica. Celle-ci haussa les épaules et n'insista pas. Elle s'apprêtait à tourner le pas pour rentrer chez elle quand un coup de vent renversa la capuche de Bella.

Car c'était bien d'elle dont il s'agissait. Incrédule, Jessica reconnut les reflets roux de son amie. Mais que pouvait-elle bien faire au lycée R... ? Elle n'y était même pas inscrite ! D'ailleurs, c'était plutôt une bonne chose pour elle. Elle n'avait aucune attache ici. Et puis, il y avait Sam. Jessica fronça le nez. Il faudra se montrer discrète, garder ses distances avec Bella. Sinon, la guerre recommencerait.

1. Bella

L'éternelle brume de Forks encadrait avec une certaine poésie le lycée R... Mais la jeune femme qui traversait les grilles de l'immense bâtisse n'y pris garde. En réalité, elle était à 1000 lieus de son lycée, de son quartier, de sa ville ou encore, de la brume. Rien n'importait que la musique qui lui vrillait les tympans et qui l'aidait à se vider la tête. Lamentablement, elle faisait défiler en boucle son emploi du temps, tentant de l'apprendre par cœur.

Ce matin, elle s'était levée et préparée pour faire sa rentrée au lycée R... Pour elle, c'était la meilleure initiative. Certes, elle y serait seule, une inconnue parmi tant d'autres, atterrie dans cet établissement avec deux semaines de retard. Mais retourner à la Réserve était au-dessus de ses forces. Elle avait déjà trop perdue. Cela ne devait jamais recommencer. Et pour se faire, elle devait fuir ces lieus maudits.

Aussi, c'est avec assurance qu'elle franchit l'entrée de l'édifice. Contrairement à ce qu'elle avait connu, ce lycée était majestueux et imposant. Une arche surmontée par un cadran accueillait les élèves pour les conduire sur une allée bordée de lampadaires qui, pour l'heure, étaient éteints. Presque intimidée par la solennité de l'endroit, Bella se ratatina sur elle-même et essaya de se fondre dans la masse des quelques élèves déjà présents. Elle s'était rendue à l'accueil vendredi dernier pour pouvoir régler les derniers détails de son inscription et se familiariser avec les lieus. Pour l'y aider, Mme V lui avait gentiment donné un plan. Le lycée était composé de trois bâtiments avec, en plus, un gymnase et un réfectoire. La cafétéria se trouvait à l'extérieur de l'enceinte.

Elle regarda avec impatience sa montre et grimaça en se rendant compte qu'elle devrait attendre encore dix bonnes minutes. Bien que peu désireuse de se frotter à ses nouveaux camarades, la perspective d'attendre seule dans un couloir froid ne la réjouissait pas plus que ça. C'est donc sans entrain qu'elle grimpa les marches du bâtiment C jusqu'au premier étage. A son grand regret, déjà trois élèves discutaient devant la salle. Deux grands jeunes hommes, tous deux boutonneux et sans attrait particulier, et une jeune femme, grande et mince, les cheveux coupées courts. Quand Eolia s'assit à même le sol en face d'eux, la jeune fille lui jeta un coup d'œil curieux. Néanmoins, elle se contenta de poursuivre la conversation qu'elle entretenait avec ses deux camarades. La nouvelle venue lui en fut reconnaissante. Elle n'était pas d'humeur à déblater un flot de paroles dans le but d'expliquer sa présence ici. Elle avait juste envie de fermer les yeux et d'écouter ce son qui, autrefois, la faisait vibrer. Elle monta le son de son mp3.

Désespérément, elle chercha en elle ce qui, il n'y a pas si longtemps, lui faisait apprécier la musique au point d'en oublier le monde autour d'elle. Mais maintenant qu'elle en avait le plus besoin, rien ne vint l'aider à oublier son présent. Elle sentait toujours sur elle les regards discrets de la lycéenne ainsi que le sol froid sous ses fesses. Frustrée, elle ouvrit les yeux, maugréa dans sa barbe quelques paroles intelligibles et se recentra sur les vibratos de la voix qui aurait dû la bercer. Cependant, plus elle cherchait à percer le secret de la mélodie, plus elle s'en éloignait. Finalement, furieuse de devoir rouvrir les yeux sur son quotidien, elle éteint son baladeur pour le fourrer rageusement dans son sac.

Les choses avaient changé autour d'elle : c'était maintenant une vingtaine d'élèves qui la scrutaient des yeux tout en papotant entre eux, ce qui créait un brouhaha bien différent de ce qu'elle écoutait jusqu'à maintenant. Curieuse de découvrir sa nouvelle classe, elle laissa son regard glisser sur chacun d'eux. Mais aucun n'accrocha son attention. Tous étaient d'une banalité effrayante. Tous divisés en groupes de quatre, cinq personnes, discutant avec animation de leur week-end. Les garçons arboraient presque tous un casque autour du cou alors que les filles, elles, semblaient toutes porter la même paire de ballerines.

C'est avec soulagement qu'Eolia vit le professeur d'économie arriver. C'était un petit homme maigre aux yeux exorbités et au crane presque chauve. Le gars qui est à deux doigts de prendre sa retraite et qui ne rêve que de partir voyager très loin de la brume. Il ne la remarqua même pas, se contentant d'ouvrir la salle et de laisser entrer ses élèves, répétant inlassablement le même "Bonjour" Se demandant quelle démarche elle devait suivre, Eolia hésita entre aller s'asseoir directement avec les autres ou aller prévenir le professeur de sa venue. Au final, entre cette trentaine de têtes curieuses et le professeur morbide, elle choisit le professeur.

Prenant un air assuré, elle se présenta devant lui en posant sur son bureau la fiche que chacun de ses enseignants devra remplir. Enfin connecté à la réalité, M. L lui signa le papier sans commentaire. Soulagée et reconnaissante devant tant de discrétion, elle esquissa un maigre sourire auquel il ne prit pas la peine de répondre. Bizarrement, elle prit ça comme un encouragement. De toute évidence, il lui en fallait peu pour relativiser.

Une fois assise au fond de la classe, elle sortit mollement son trieur et sa trousse. Avec application, elle se borna à écrire en lettres manuscrites "Economie" sur son premier intercalaire alors qu'elle savait pertinemment qu'elle ne prendrait jamais les cours. Néanmoins, cela lui donna l'impression de prendre un nouveau départ. Sentiment bien vite balayé une fois le cours commencé. La monotonie de la leçon était telle que Bella se sentit découragée. Très vite, elle décrocha pour laisser son esprit s'envoler par la fenêtre.

De là où elle était assise, on pouvait apercevoir une partie du quartier où elle habitait. Cependant, son appartement restait hors de vue. Elle pensa avec tristesse à sa sœur qui était rentrée pour la deuxième fois en cinquième. Carlie, ce petit diable trop plein de vie n'avait était que trop absent de sa vie ces derniers mois. Bella s'en voulait pour ça, sa petite sœur avait très mal vécue son redoublement. Mais les choses n'avaient pas toujours étaient claires dans sa tête et sa famille était passée au deuxième plan. Pourtant, elle avait besoin d'eux. Son père, simple fonctionnaire de police, bien que distant et sans cesse gêné par sa présence, avait toujours était là en cas de besoin. Quand à Renée (sa mère), jamais elle ne pourrait vivre sans. Tête en l'air et capricieuse, elle avait cependant fait de son enfance le plus beau comte de fée qui soit. Jamais jeune fille n'eut autant de rêves que cette enfant -et jamais aucune ne connut telle désillusion.

Aujourd'hui, Renée travaillait dans une école primaire où elle était Assistante Vie Scolaire (A.V.S) Chaque jour, elle devait s'occuper de petits défavorisés par la nature, que cela soit physique ou mental. Chaque nouvelle année apportait avec elle de nouveaux élèves en quête d'avenir et d'espoir. Sa mère se faisait alors un plaisir de leur apporter un peu de sa magie.

Bella grimaça à l'évocation de ce mot. Fermant son esprit aux mauvais souvenirs qui ne tarderaient pas à surgir, elle essaya de se déconcentrer sur le cours. Les élèves autour d'elle étaient tous plongés dans une léthargie paralysante. Seuls les trois adolescents du premier rang semblaient trouver un quelconque intérêt à l'évolution des actions d'Airbus.

A sa droite, deux chaises plus loin, une blonde aux grands yeux lui sourit timidement. Cela devait faire cinq bonnes minutes qu'elle l'observait avec avidité. Cette fille aux bras maigres et aux épaules fragiles avait éveillé la curiosité de Lauren. Jamais elle ne l'avait vu auparavant dans l'enceinte du lycée. D'après les dires de Gaby, elle était auparavant scolarisée à la Réserve. Cependant, elle habitait les environs depuis toujours et sa petite sœur se trouvait au collège R... En y réfléchissant bien, elle connaissait déjà Carlie. C'était la jeune cinquième qui lui avait un jour craché à la figure. A se souvenir, son sourire se fana.

Bella, de son côté, prit ce changement d'habitude comme une réaction à son mutisme. Tentant de rassurer la blonde, elle lui rendit (avec quelques secondes de retard, certes) son sourire. Mais déjà, cette dernière s'était retournée vers le professeur.

Soupirant tristement, Bella essaya de mémoriser le plus de visages. Elle les compta pour passer le temps (comme on compte les moutons pour s'endormir) : 33. 33 camarades. Très vite, elle repéra le maillon faible de la classe : le 33éme, le nombre impaire, le solitaire. C'était une jeune fille assise à l'opposé de la classe. Un peu boulote et toute petite, les cheveux courts et bruns, elle fixait le mur avec résignation. Avec un crayon à papier, sans s'en rendre compte, presque inconsciemment, elle traçait de longues courbes sur sa feuille à grands carreaux. Bella suivit des yeux le tracé de la main. Ses formes rondes et aériennes lui firent du bien. Doucement, une musique au rythme lent vint lui chatouiller la mémoire.

Les hommes claquaient des mains tandis que les femmes laissaient leur voix les porter vers des mondes lointains. La nuit était noire et seul le feu de joie éclairait les visages hilares. Elle les connaissait tous, ces visages, mais elle s'efforça de les effacer de son esprit, comme on déchire une photographie un peu trop floue. Avec impatience, elle fit défiler dans sa tête les différents visages présents dans la classe pour chasser ceux qui avaient envahit son esprit. Elle devait s'en débarrasser. Cette période était finie, rien ne reviendrait. Elle devait tout oublier.

Mais la mélopée poursuivait son rythme sans se soucier des états d'âme de la jeune fille. Avec horreur, elle sentit les larmes monter. Cela devait cesser avant qu'elle ne puisse plus rien contrôler. Ses doigts tremblaient déjà et le feu dans ses yeux allait se répandre bien trop rapidement. Elle s'enfonça les ongles dans la peau et se concentra sur le monologue du professeur :

" ... en d'autres termes, on peut dire que l'achat de la compagnie italienne reviendrait à classer Airbus comme étant un monopole mais ..."

Avec soulagement, le stratagème fonctionna et Bella se relaxa, à fond dans les dires du professeur. Elle venait de comprendre pourquoi rien ne lui revenait. Pourquoi plus rien ne la faisait frémir. En fuyant le chagrin, elle s'était terrée dans une bulle sans sentiment. Evidement, elle en avait payé le prix. Les figures mornes autour d'elle en étaient la preuve. Plus jamais elle ne sentirait le vent lui répondre et plus jamais elle ne reverrait son ancienne famille. C'était trop risqué, et elle devait se montrer très prudente.

La sonnerie annonçant la fin du cours délivra enfin les élèves. Peu encline à se rendre à son prochain cours, elle se dirigea néanmoins à la suite de ses camarades. Cette fichue fiche allait la suivre toute la journée et il était hors de question que ses parents reçoivent un avertissement dés le premier jour. Maugréant discrètement, elle ne remarqua pas la jeune fille qui la fixait avec de grands yeux hésitants. Ce n'est que quand elle l'appela qu'elle leva la tête vers elle :

"Bella Swan ?

- Oui, c'est bien moi.

Curieuse, elle contempla la jeune solitaire qu'elle avait tantôt remarquée. Ainsi, elle ne l'avait pas été par choix, mais plutôt par injustice (celle de la vie, bien évidement)

- Salut, je m'appelle Angela Weber. Comme tu es nouvelle ici j'me disais que ça te dérangerais pas trop de t'asseoir avec moi.

Sous le choc, Bella s'arrêta de marcher. Elle la contempla avec surprise et demanda avec une voix qu'elle aurait souhaitée amusée :

- Pourquoi cela me dérangerait-il ? Serais-tu connue pour avoir un jour tuée ta voisine de classe ?

Cette remarque la dérida quelque peu. Elle lui sourit avec entrain et lui expliqua que c'était juste une question de point de vue :

- Les gens n'aiment pas trop rester avec moi.

- Et pourquoi ça ? Tu n'as pas l'air trop peste.

- Oh ! Tu sais, généralement, ce sont les plus méchants les plus sociables.

- Et tu te considères comme étant associable ?

Elle rit et parla des quelques rares amies qu'elle avait :

- Dans cette classe, y'a vraiment rien à faire. Ils se croient tous supérieurs avec leurs fêtes et leurs histoires à la con. Mais y a que de la grande gueule. Par exemple, aucun d'eux n'a un jour fumé un pet.

- Moi non plus, je n'ai jamais fumé que du tabac !

- Moi je n'ai jamais fumé tout court !

Elles pouffèrent.

- Ce que je veux dire, c'est que ces tous des fistons à papa bons à ne porter que des slips kangourou.

- Ca, je l'avais remarqué.

- Laisse tomber, c'est vraiment trop mort en T ES 3."

Sur ce, elle l'entraina en cours d'Histoire. Le prof était assez jeune, pas encore au bout du rouleau mais presque dépressif. Cependant, il sourit à la plupart de ses élèves. Evidement, il se sentit obliger de rajouter une couche quand Bella lui apporta son feuillet :

"Ah ! Une nouvelle recrue ! Et si vous vous présentiez devant tout le monde."

La grimace qu'afficha l'adolescente ne laissa aucun doute sur la façon dont elle voyait la chose. Malheureusement, M. D était sérieux. C'est donc toute rouge qu'elle alla réciter son nom ainsi que son âge. Quand il lui demanda où elle avait été scolarisé jusqu'à maintenant, elle resta muette, incapable de lui répondre. Surpris, il attendit néanmoins qu'un son sorte de sa bouche. Mais ce fut la blonde aux yeux clairs qui répondit à la place de Bella :

"Elle vient de la Réserve, M'sieur."

Des chuchotements commencèrent à se faire entendre mais l'enseignant s'empressa de les faire taire. Cherchant confirmation auprès de la principale concernée, il se retourna vers sa nouvelle élève. Cette dernière s'était reprise et validait à présent la réponse de sa camarade d'un hochement de tête. Elle essaya de ne pas croiser le regard de celle qui avait craché son ancien foyer avec mépris. Elle aurait voulu lui faire mal, lui faire comprendre qu'à côté, son lycée c'était de la merde et que jamais, jamais on ne l'aurait traité avec autant d'arrogance là d'où elle venait.

Car là bas, on connaissait le vrai sens du mot respect. On s'écoutait les uns avec les autres et surtout, on protégeait ceux qu'on aimait. Seulement, ce n'était pas toujours suffisant. Chassant en vitesse ces sombres pensées, elle partit rejoindre Angela. Celle-ci l'attendait, apparemment désireuse de la questionner sur ce monde qu'elle connaissait peu. Mais Bella ne lui laissa pas le temps de commencer son interrogatoire :

"La Réserve est une banlieue comme une autre. Les légendes n'ont pour autre but que de vous faire trembler. N'Y a rien de toutes les conneries qu'on raconte sur elle.

- Mince ! Dommage."

Cette réflexion ne plut pas vraiment à Bella. Mais en même temps, elle ne pouvait que comprendre la fascination de ce lieu. Après tout, n'en avait-elle pas été une victime ?

Le soir, quand elle retourna chez elle, elle repensa à tout ce que lui avait dit Angela. Pour elle, seuls les irlandais de la rive gauche étaient susceptibles d'amener un peu d'ambiance au lycée R... Les "irlandais", comme le disait si bien Angela, étaient une famille composée uniquement de garçons dont le plus jeune était scolarisé en première. Cependant, les trois autres ne se gênaient pas pour envahir quotidiennement le lycée. Seul le plus vieux travaillait, et encore, ce n'était qu'un C.D.D dans une pizzeria. D'après Angela, leur mère serait déjà venue quatre fois gueuler en publique sur ses rejetons.

"Un pure moment de bonheur à chaque fois !" s'était-elle exclamée en riant.

Son rire perçant s'évapora de la tête de Bella quand celle-ci fut arrivée chez-elle. Son chien -un batard à la bouille d'enfant- lui fit bruyamment la fête en secouant la queue. Attendrie comme à chaque fois qu'elle voyait sa petite bouille de martyr, elle lui tapota gentiment le museau. Aux anges, Pirate bava avec application sur son jean. Le repoussant sévèrement, elle essaya de s'avancer dans l'entrée sans tout faire renverser. Sa mère n'était pas encore là mais elle savait que sa sœur ne devait pas être loin. Si elle n'était pas devant l'ordi, c'est qu'elle traînait dans le centre commercial du coin, une hypothèse qui déplut fortement à Bella.

Passant devant le sourire figé de sa sœur prise en photo lors d'une sortie à la mer, elle la fusilla du regard. Ce n'était pas le moment de déserter la maison et les cours. En soupirant, elle contempla désespérément les cheveux châtains et courts de sa petite sœur. Elles n'avaient pratiquement rien en commun.

Alors que Bella avait de longs cheveux auburn, Carlie possédait de beaux cheveux aux teintes variant entre le brun et le blond. Sa peau était dorée quelque soit le moment de l'année tandis que la sienne passait directement du blanc au rouge rendant inutiles les tonnes de crèmes solaires absorbés chaque année par son épiderme. De plus, elle possédait une bouche de bébé qui ne s'étirait que très rarement pour former un sourire au contraire de sa sœur qui donnait l'impression de tourner 24h/24 une pub pour Colgate. Leur seul point commun devait être la couleur de leurs yeux : verts.

Vite distraite par un second portrait, Bella parcourut rapidement des yeux sa famille. Mais aujourd'hui, elle n'était pas d'humeur à être sentimentale. Piochant une boîte de céréales dans le placard, elle partit s'affaler sur le canapé bien décidée à passer le reste de l'après-midi devant la télé à s'abrutir. Mais c'est sans compter le téléphone qui sonna.

En voyant le nom de celui qui l'appelait, elle s'empressa de couper le son de la télé.

"Allô ?

- Hello petite puce. Laisse-moi deviner : tu es encore devant la télévision.

- Mais pas du tout, marmonna telle en croisant les doigts.

- Allez ! Arrête de me mentir, je te connais comme si je t'avais faite ! Même mieux !

Voilà un point sur lequel elle ne pouvait nier.

- Alors, tu as quoi de prévu pour le week-end prochain ?

- Ben, on n'est que lundi !

- Et alors ? On n'a jamais été si proche du prochain week-end !

- J'ne suis pas d'humeur à sortir ...

- Tsss, tsss ... Dis pas de bêtises. Je ne vais pas te laisser dépérir sans rien dire. Ca te dit d'aller rendre une visite à Clio ? Son grand-frère ouvre son resto samedi et elle nous a invités. Ce serait mal poli de refuser.

- Tu es impossible ...

- Allez ! Fais-moi plaisir !

- Y aura tes potes de la caverne ?

La caverne : lieu où une vingtaine de garçons plus ou moins stupides s'amusent à échanger leur vie contre quelques heures de jeux virtuels.

- Non, t'inquiète.

- Je ne sais pas. Je suis sure que Clio ne m'a jamais invitée.

- Allez ! Ca fait des lustres que tu ne l'as pas vu !

- Bon, c'est d'accord, soupira telle.

- Ouais ! Oh ! Et j'allais oublier ! Cette semaine, le fou prend le Roi !

- Et en français ça veut dire ..?

- Ca veut dire que le chef de meute aura la folie des grandeurs ! Evidement, tu sais de qui je veux parler.

- Non, assura-t-elle froidement.

- Un indice alors : le Roi noir. Bonne chance ma poule.

Ben était un sacré garnement. En première, il s'amusait à prévoir l'avenir dans les parties d'échec qu'il faisait avec son club. Elle l'avait rencontré en classe de ski. Elle n'était alors qu'en 5éme. Il lui avait alors promis que jamais le chevalier ne toucherait à la Dame. Mais que le danger viendrait du Roi. Evidement, elle n'avait rien compris. Mais les histoires d'horreur qu'il raconta le soi-même la ravissent à tel point qu'elle ne put plus se passer de lui.

Des histoires sur la Réserve, bien sur. Mais cela faisait bien longtemps. Bien longtemps que Bella n'avait plus peur.

De toute évidence, elle n'avait plus rien à craindre. Et même si elle connaissait très bien l'identité du Roi, elle n'était cependant pas certaine de sa couleur. Ces temps derniers, tout avait viré au noir. Sam ne l'acceptait plus comme telle, et ce n'était pas ça qui allait changer l'opinion de James.

Ses pensées furent interrompues par l'arrivée de sa sœur. Gambadant et chantonnant, elle se précipita sur sa sœur en hurlant qu'elle venait d'avoir un 17/20.

"Ouah ! C'est super ma puce ! Et c'est en quelle matière ?

- En sport !

Réellement impressionnée (après tout, c'est un exploit dont jamais elle ne pourrait se vanter), elle félicita chaleureusement son petit monstre. Sur ces encouragements, Carlie la laissa seule avec sa télé muette.

Les images qui défilaient silencieusement devant elle l'entraînaient dans une langueur reposante. Cependant, cet agréable sentiment ne lui épargna pas la vision de son prochain week-end. Elle était terrifiée à l'idée de revoir Clio, la copine de Ben. Elle n'avait jamais beaucoup apprécié cette dernière malgré sa joie de vivre et sa bonne humeur. Trop d'entrain avait le don de lui taper sur le système. Jalousie, envie ... Tant de sentiments que Bella détestait ressentir.

Ce fut au tour de sa mère d'arriver, les bras chargés de sacs en plastique. Venant à son secoure, Bella l'aida à se débarrasser de tout son fatras. Hochant avec automatisme la tête, elle resta stoïque face au bavardage incessant de sa mère. Ainsi allait se dérouler sa prochaine vie. Docile face à ce châtiment, elle était prête à se contenter des rêves de Renée.

Aussi, elle piocha au hasard un D.V.D sur son étagère. Quand la musique du film débuta, elle se rendit compte avec mécontentement qu'il s'agissait des Noces Funèbres de Tim Burton. Malheureusement, elle fut incapable de décrocher son regard de l'écran. Elle adorait ce film, mais le sujet de ce dernier était bien trop tabou en ce moment. Comme elle s'y était attendue, elle pleura tout le long.

Alors que Renée installait la planche à repasser dans le salon -histoire de regarder un bon film en repassant-, Bella s'enfuit dans sa chambre, marmottant qu'elle avait des devoirs à faire. Essayant d'ignorer la musique venant de la chambre voisine -celle de sa sœur-, elle fit le vide dans sa tête et s'allongea sur son lit.

La pièce était assez petite, mais elle l'aimait bien pour ce qu'elle représentait : un endroit sans histoire. Elle se souvenait du temps où elle ne passait par sa chambre que pour aller se coucher ou s'habiller. Mais aujourd'hui, la plupart de ses journées se déroulaient sous la moustiquaire noire, à contempler le morceau de ciel que sa fenêtre voulait bien laisser filtrer.

Au sol, un immense tapis couvrait le froid carrelage et d'immenses fresques faites avec de la peinture indigo extrayaient un peu la pâleur des murs. Ces traits désordonnés et dégoulinants, Bella ne les avait fait il n'y a que très peu de temps. D'un coup, elle avait ressenti le besoin d'aménager sa chambre selon son humeur.

Ignorant son sac et sa pile de livres, elle alluma sa sono et s'oublia pour voyager à travers les vibrations de la musique. Les paroles de BB BRUNES –un groupe français- l'amenèrent dans un monde bien plus optimiste que le sien. Pourtant, cette Houna, muse sans cesse remise en question, avait elle aussi de quoi se laisser mourir :

"Pour oublier cette nuit à se taire, à se tordre
Elle se taillade les veines, les veines ..."

Mais Bella n'était pas du genre à se couper les veines. Très vite, elle avait décidé de vivre. Trop de gens l'aimaient encore et son sourire n'avait pas totalement disparu. Certaines choses la faisaient encore rire. Et rien que pour ces futilités, elle vivrait. Mais jamais pourtant, elle ne s'était sentie aussi peu vivante. Et pour atteindre ce demi-coma, il lui en avait fallu des épreuves.