Voici la réédition de ma première fic, publiée sur un autre site. Bonne lecture !
Prologue
Ce matin-là, ces quelques secondes suivant le réveil, ces mystérieuses secondes où l'on ne sait plus où l'on est, s'éternisèrent. Non, vraiment, je ne reconnaissais plus les lieux, cette chambre immense et sombre, ce grand lit à baldaquin dont le dais de velours me semblait écrasant et même le dessus de lit de brocard vert. Comme je commençais à m'affoler, une autre sensation prit le pas sur la première : la douleur. Une douleur énorme, qui s'enflait encore et encore. Je m'aperçus que je pleurais, en sentant l'humidité sur mes joues et un goût salé sur mes lèvres.
Une voix près de moi déclara :
- Ça y est. Elle se réveille ! Allez vite prévenir votre père !
Ces quelques mots résonnèrent dans mon crâne comme si on les avait hurlés. Je ne pus m'empêcher de gémir et fermais les yeux un instant, comme pour les tenir à distance. Puis je rouvris péniblement les yeux et tournai la tête vers la personne qui les avaient prononcés. Ce mouvement déclencha un violent élancement et ma vue se troubla. Je distinguai peu à peu une femme blonde aux yeux clairs qui m'observait avec sollicitude.
- Comment vous sentez-vous ma chérie ?
- J'ai mal à la tête...
- Au moins, vous voilà réveillée. Nous étions si inquiets pour vous. Ce maudit sort... Nous avons craint de vous perdre...
Les mots « nous » et « sort », tourbillonnèrent dans mon cerveau embrumé comme feuilles en automne, soulevant mille questions aussitôt oubliées. Je ne pus en formuler aucune. Cela me demandait trop d'efforts. Et puis, des pas dans le couloir voisin et des voix vinrent me distraire de ce sujet.
Deux personnes entrèrent dans ma chambre. Un simple coup d'oeil suffisait pour identifier le père et le fils. Tous deux étaient d'un blond presque blanc, avec les mêmes yeux gris, et cet air de dignité et de noblesse qui caractérise les gens sûrs d'eux-mêmes et de leur place. Le regard de l'homme fut inquisiteur et je me sentis presque écrasée contre l'oreiller blanc par le poids de ce regard. Celui du jeune homme qui l'accompagnait semblait plus curieux.
- Quelles sont les nouvelles ?
- Elle s'est réveillée à l'instant et dit souffrir de maux de tête, mais rien d'étonnant à cela...
- Alors, Elvira, comment allez-vous ?
- Elvira...
Ce prénom ne rencontra en moi aucun écho. Non, je ne m'appelais pas Elvira ! Je m'appelais... Mais comment m'appelais-je ? Je ne m'en souvenais pas, je ne me souvenais de rien d'ailleurs. Qui étaient ces gens ? Comment étais-je arrivée ici ? Mon mal de tête augmenta encore si c'était possible et un voile noir passa devant mes yeux. Puis ce fut le néant.
