-Chapitre 1-

Namjoon se réveilla en sursaut. Le visage baigné de sueur et la respiration saccadée, il mit un moment avant de comprendre où il était. Confortablement installé dans un lit simple, tout son corps hurlait de douleur, comme si on le marquait au fer blanc, et toutes ses pensées étaient dans un état de panique, centrées sur l'instant présent. Il ne voyait que le plafond blanc crème au-dessus de lui. Il commençait à entendre l'agitation qui régnait non loin de lui, de l'autre côté du mur de la chambre. Il tourna la tête vers la porte à sa droite pour essayer d'avoir quelques information sur ce qu'il se passait et il vit un autre lit à quelques centimètres du siens. Le cou entouré d'une minerve épaisse, Seokjin était étendu, là, complètement immobile, les yeux fermés, et Namjoon sut instinctivement qu'il n'était pas juste endormi : la dernière fois qu'il l'avait vu, il avait été frappé par un démon ailé et avait fait une chute de plusieurs dizaines de mètres de haut. Tous les événements qui les avaient conduits sur ces lits d'hôpital revinrent en mémoire de Namjoon. Il s'assit sur le matelas, non sans gémir à cause de ses blessures qui se ravivèrent de manière lancinante. Ils avaient combattu le Démon dans l'enceinte même de l'Académie, et les dégâts avaient été catastrophiques. Sa gorge se noua, il n'osait croire qu'il n'avait pas été assez préparé pour une telle attaque. Personne ne s'y était attendu, et encore moins de la façon dont elle s'était produite, si soudaine, et tout le monde avait été aveugle. D'autres lits entouraient le sien : en tout, ils étaient six, et les cinq autres blessés étaient encore inconscients.

Les larmes coulaient sur les joues de Namjoon tandis que la porte de la chambre s'ouvrit sur un homme en blouse blanche, un des médecins de l'Académie, accompagné du Directeur. Ils paraissaient surpris de le voir réveillé.

— Comment te sens-tu ? demanda le médecin.

— Combien de victimes ? fit Namjoon d'une voix plus éraillée que d'habitude.

— Namjoon… murmura le Directeur.

— Combien ? répéta le jeune homme.

— Cinquante-huit décès parmi les élèves, répondit le Directeur avec une profonde tristesse dans la voix. Et vingt-cinq sont encore dans un état grave, y compris Yoongi et Seokjin. Les autres sont hors de danger et devraient bientôt se réveiller.

Namjoon leva les yeux vers un des trois lits qui lui faisaient face. Dans celui qui était le plus à droite, il y avait Yoongi. Le teint blanc, les cheveux d'un noir de jais, il était le seul à avoir un tube dans la gorge pour l'aider à respirer. Son corps n'avait pas l'air pourtant d'avoir ne serait-ce qu'une infime trace de blessure. A l'inverse, Jimin, à ses côtés, avait des bandages jusqu'au cou, et Hoseok dans le lit de gauche en avait même sur la moitié du visage. Namjoon eut un flash, une vision soudaine des deux garçons lacérés de toute part, se vidant de leur sang sur l'herbe du parc du domaine, sous la lumière de la lune. Il regarda enfin à sa gauche, s'attendant à voir Jungkook. Il n'avait pas de bandages mais son visage était amoché au niveau des tempes, des pommettes, du menton et des arcades sourcilières, et son corps devait être recouvert d'ecchymoses. Il avait été sévèrement battu par le Démon, et aucun d'entre eux n'avaient pu faire quoi que ce soit. Ils étaient pourtant appelés les Saints Prodiges, avec la marque blanche de l'Académie sur le dos de la main gauche en forme de « P » en majuscule cursive latine, les meilleurs éléments de l'école depuis des siècles, maîtrisant leurs pouvoirs sur le bout des doigts. Jungkook était appelé le Génie parmi les Génies, excellant dans tous les domaines, et il avait à peine pu effleurer le Démon avec sa seule force.

L'Académie des Saints réunissait les élus du genre humains nés avec des facultés surnaturelles. Durant des siècles, ils avaient été les protecteurs du monde contre les créatures du Monde d'En-Dessous, menés par le Démon aux ailes noires, Lucifer. Celui-ci avait été vaincu deux cents ans avant que Namjoon n'entre à l'Académie, par les prodiges de l'époque. Pourtant, l'école ne ferma pas ses portes après cette victoire et continua à accueillir ceux qui possédaient le pouvoir de lutter contre les créatures des ténèbres, car le risque de les voir revenir existait toujours. Le monde était plus paisible, et la vie à l'Académie n'était pas si différente du quotidien des jeunes humains dans les universités du commun des mortels. On intégrait cette école particulière à l'âge de dix-sept ans, et on la quittait quand on le voulait, car personne n'était forcé de suivre un apprentissage poussé de ses facultés, ni d'en apprendre de nouvelles, et d'apprendre des techniques de combat ancestrales. Jungkook avait été le seul à entrer à l'Académie à l'âge de quinze ans, et à l'époque Namjoon n'était déjà plus considéré comme un élève mais comme un tuteur, l'étape intermédiaire entre le statut de celui qui apprend à celui qui enseigne. Cette année-là avait également vu l'arrivée de Jimin et Taehyung, des maîtres des éléments doubles.

Il existait trois grandes classes de Saints. Dans un premier temps, il y avait les Elementi, maîtres des éléments tels que l'eau, le feu, la glace, l'air, la terre, le métal et la foudre. Les Corpuri, eux, étaient parvenus à dépasser les limites du corps humain à travers la téléportation, la vitesse, la force, le dédoublement, ou encore la faculté de soigner les blessures. Et enfin les Spiriti, les maîtres de l'esprit, qui étaient plus rares car leurs pouvoirs étaient trop dangereux : ils pouvaient faire bouger des objets par la pensée, ou encore pénétrer l'esprit d'autrui, et les plus puissants pouvaient créer des champs de force. Certains Saints Prodiges pouvaient combiner plusieurs de ces facultés, voire même cumuler les spécificités de deux ou trois classes mais c'était un phénomène exceptionnel.

Namjoon était le Master de sa génération, à la fois Elementi et Corpuri, il était doté d'une force surhumaine et excellait dans la maîtrise de la terre. Avec Seokjin, il était un des premiers Prodiges désignés par le Grand Conseil, grâce à ses résultats qui surplombaient de loin ceux des autres. Seokjin, lui, avait des capacités plus mesurées : il était un double Corpuri avec un don incontestable pour la guérison, mais aussi pour la téléportation, mais il devait sa place parmi les Prodiges grâce à ses talents d'alchimiste. Il était même devenu le professeur attitré dans cette matière. Yoongi était le troisième à avoir acquis ce titre : il était le plus puissant des rares Spiriti qui résidaient à l'Académie. C'était le seul et unique Mage : il possédait à la fois les dons de télékinésie et de télépathie, et n'avait aucune limite. Il pouvait également créer des boucliers de protection avec son champ de force. Ses yeux noirs prenaient une teinte violette lorsqu'il activait ces pouvoirs. Hoseok les avait rejoint peu après, comme Namjoon, il était double classe Elementi et Corpuri : il se déplaçait à une vitesse phénoménale et maîtrisait le métal. Son don lui permettait de faire sortir des lames de toutes sortes de son corps, de fines aiguilles, des flèches d'acier, jusqu'à des semblants d'épée. Il était également un excellent tireur, et ne loupait jamais sa cible dans n'importe quelle circonstance. Enfin, Jimin, Taehyung et Jungkook étaient les plus jeunes à avoir rejoint les Prodiges. Jimin et Taehyung étaient tous deux des doubles Elementi, le premier maniant le feu et l'eau, et l'autre l'eau et l'air. Ils pouvaient combiner leurs dons avec des mouvements d'arts martiaux. Jungkook quant à lui était non seulement un double classe Elementi et Corpuri, mais il maîtrisait deux éléments : le feu et surtout la foudre, en plus de se déplacer à une vitesse qui égalait celle de Hoseok. En complément de leurs dons naturels, ils apprenaient les préceptes de l'alchimie et le maniement des armes forgées, comme le sabre ou l'épée, et également le tir à l'arc.

Cela faisait quelques années que les sept Prodiges faisaient les grands jours de l'Académie. Même si le danger était écarté, ils avaient besoin de valoriser les Saints, car les démons du Monde d'En-Dessous attendaient le bon moment pour envahir la surface de la terre. Il n'y eut pourtant aucun incident de mémoire d'homme durant des décennies entières, mais il fallait rester vigilant. L'Académie des Saints se situait sur un vaste domaine à l'écart de toute civilisation. La bâtisse était un immense château à la façade claire, les murs parsemés d'immenses fenêtres, au milieu d'un parc qui faisait plusieurs kilomètres d'hectares, constitué de jardins taillés avec soin, avec symétrie, de fontaines, et même d'un lac et quelques petits bois. L'intérieur de l'Académie ressemblait à un véritable musée : les Saints logeaient dans les ailes est et ouest, les cours se déroulaient dans le bâtiment principal et il y avait de grands halls d'entraînements. Il y avait beaucoup de tableaux et de statuts qui racontaient l'histoire des Saints et leurs combats contre les Démons. L'Académie proposaient des cours spécifiques à chaque classes, afin qu'ils puissent apprendre toutes les arcanes et les secrets de leurs dons, savoir les combiner, savoir les manipuler lors d'un combat. Il leur était également enseigné l'art de l'alchimie, des armes, des arts martiaux, et de l'histoire des Saints et des principaux combats qu'ils avaient menés durant des millénaires. Tel était le quotidien des Prodiges et de tous leurs camarades, garçons et filles, de dix-sept à trente ans. Le Directeur de l'Académie, Laurel, de son vrai nom Sam Young, était un Spiriti d'une quarantaine d'années, spécialiste de la télékinésie. Une vingtaine de professeurs travaillaient pour lui, la plupart sortant tout juste de leurs études et continuant sous le statut de chercheurs dans les domaines réservés aux Saints, comme Seokjin et l'alchimie, mais il y avait également des médecins, avec ou sans pouvoir de guérison, des personnels de maison qui se chargeaient de l'intendance, des cuisiniers, des bibliothécaires, car le château contenait une immense réserve d'ouvrages accessibles aux étudiants, et divers personnels administratifs.

Trois années après leur constitution définitive, les sept Prodiges étaient devenus tous très proches les uns des autres, surtout Namjoon et Seokjin qui se connaissaient depuis quatre ans. Leurs liens d'amitié permettaient une véritable entente à chaque fois qu'ils utilisaient leurs pouvoirs ensemble. Ils connaissaient leurs points forts, leurs faiblesses, et avaient appris à s'harmoniser, si bien que c'en était devenu naturel. Ils avaient tous leur propre réputation au sein de l'Académie, surtout Jungkook qui était un véritable phénomène. Il était conscient de sa nature exceptionnelle et de son charisme qui hypnotisait quiconque le regardait. Le jeune homme aimait charmer tout ce qui était à sa portée, homme ou femme, il n'avait aucune limite et n'avait peur de rien. D'aucuns considéreraient cela comme de l'arrogance, comme lorsqu'il faisait démonstration de ses pouvoirs électriques, mais il n'était pas le genre de garçon à surévaluer ses forces : il se savait doué dans toutes les matières enseignées, mais il ne se proclamait pas non plus comme étant le meilleur. Il n'était pas aussi bon que Seokjin en alchimie, il n'égalait pas Hoseok au combat au corps à corps, avait plus de difficultés que Namjoon à résoudre des problèmes et mettre en place une stratégie, mais il était quand même bien classé.

xXx

Jimin sortit de son rêve en hurlant. Le tonnerre à l'extérieur faisait vibrer les grandes fenêtres de sa chambre. Il n'avait même pas fermé les rideaux et la pluie gouttait à torrent sur les vitres. Des gouttes de transpiration coulaient sur ses tempes, humidifiant les pointes de ses cheveux noirs. Assis sur le matelas, il attendait que sa respiration ne retrouve un rythme plus calme.

— Ce cauchemar a dû être terrible, dit une voix dans la pénombre.

Le garçon chercha des yeux d'où pouvait provenir cette voix qu'il connaissait parfaitement. Il aperçut la silhouette élancée de Jungkook, installé dans un fauteuil en face du lit. Vêtu d'un pantalon noir et d'une chemise blanche entrouverte, il semblait attendre quelque chose. Jimin ne fut pas étonné de le voir, juste décontenancé d'avoir été surpris au réveil d'un mauvais rêve. Il enfouit son visage dans ses mains qui tremblaient encore. Le sourire de Jungkook s'effaça et il rejoignit Jimin avec une légère inquiétude.

— C'était horrible, dit-il d'une voix étouffée. Tout le monde était mort.

— Comment ça ?

— Je ne sais plus qui, mais il nous a tous tués. Jin, Hoseok, Namjoon, Yoongi, Taehyung, puis toi… on était dans le parc près du lac et il y avait du sang partout, répondit Jimin faiblement. J'ai vu des ailes noires, et je ne me souviens plus du reste.

Son corps entier se mit à trembler, comme s'il avait vécu quelque chose de traumatisant. Jungkook posa la main sur son épaule et il l'emmena contre lui pour le rassurer.

— Tout va bien, lui chuchota-t-il. Je suis là. Ce n'était qu'un cauchemar.

— C'était plus que ça, murmura son vis-à-vis. J'ai un très mauvais pressentiment.

Jungkook ne savait que répondre à cela. Il ne pouvait pas dire que son ami se faisait des idées, car il ne pouvait pas exclure la possibilité que ce soit une vision, mais si c'était le cas, cela ne présageait rien de bon. Jimin commençait à se calmer dans ses bras, la tête posée dans le creux de son épaule. Il aimait sentir les caresses chaudes des mains de Jungkook dans son dos, son contact rassérénant et protecteur. Une fois qu'il fut bien calmé, il releva la tête pour déposer ses lèvres sur celles de son camarade qui le laissa faire. Il entrouvrit la bouche et vint lui titiller la langue. Jungkook répondit à son appel sans se faire prier, et ses caresses se firent plus sensuelles dans son dos, glissant sur ses hanches, descendant dans le pantalon de toile que Jimin portait pour la nuit. Le mauvais rêve rapidement mis de côté, celui-ci attrapa la chevelure brune soyeuse de son compagnon entre ses doigts, et il le laissa tomber sur le matelas, l'emportant avec lui. Jungkook avait commencé à le caresser plus intimement, si bien que Jimin se cambra sous lui, prêt à s'offrir entièrement. Les mains qui effleuraient sa peau le brûlaient avec délice. Il l'embrassait encore et encore, à s'abreuver de lui. C'était comme si Jungkook avait ce pouvoir caché d'attiser le désir de tous ceux qu'il croisait, et il le leur rendait bien. Il ouvrit la chemise de Jimin, lui retira son pantalon, et la tempête avait beau ne pas s'essouffler dehors elle n'égalait en rien le tumulte qui agitait les deux garçons au milieu de la nuit. Le corps de Jimin était dévoilé et Jungkook commença à embrasser chaque parcelle de peau qui se trouvait à portée de lèvres. Le creux du cou, le torse, il joua même un peu plus longtemps sur les tétons qui durcissaient sous la langue experte. Les joues rouges, Jimin gémissait de plus en plus fort, l'intimant de se hâter. Il enserra la taille de Jungkook de ses jambes et ses hanches remuaient avec envie, mais son amant ne semblait pas vouloir le satisfaire tout de suite, presque avec sadisme. Le plus jeune posa doucement la main sur la virilité tendue qui s'offrait à lui, et il entama une série de lents va-et-vient, attisant les plaintes de plus en plus aigues de son vis-à-vis.

Jimin s'agrippa aux pans de son oreiller en se mordant la lèvre inférieure pour ne pas crier trop tôt tandis que son corps était aux mains de Jungkook qui connaissait exactement ses zones les plus sensibles. Il en avait assez des préliminaires, alors il attrapa la main marquée de la stigmate des Prodiges de son amant et entreprit de lui suçoter les doigts langoureusement. Jungkook le regarda faire avec un sourire aguicheur, et quand Jimin eut fini, il glissa sa main entre ses jambes et lui caressa son intimité plus en profondeur, insinuant petit à petit un premier doigt en lui, suivi par un second, lui laissant le temps de s'habituer à sa présence. Tout en le préparant, il observait avec attention les réactions de Jimin qui se laissait complètement aller. Ce n'était pas la première fois qu'il le touchait, il savait comment détendre son corps comme il le fallait, et Jungkook savait très bien comment s'y prendre.

Enfin, Jungkook se positionna devant lui, en lui remontant les genoux jusqu'aux épaules. Tout doucement, il entra en lui, arrachant un cri que Jimin étouffa en plaquant son avant-bras contre la bouche. Il était prêt à supporter les quelques premières secondes douloureuses de la pénétration, attendant patiemment le moment où le plaisir allait le submerger. Jungkook se pencha sur lui pour l'embrasser, et Jimin lui répondait avec tendresse, et les coups de reins commencèrent dans un rythme vigoureux. La voix aigue du garçon résonnait dans toute la chambre, suivie par celle, plus rauque, de son amant qui accéléra la cadence. A dix-huit ans, Jungkook était un jeune homme plein d'énergie. Mais Jimin aussi. Ils étaient encore au milieu de l'acte quand il le fit basculer sous lui, installé à califourchon sur son bas-ventre, imposant son propre rythme en ondulant des hanches. Jungkook le trouvait délicieux, sa peau laiteuse luisant à la faible lueur de la nuit nuageuse. Il avait la chemise ouverte à moitié descendue jusqu'aux coudes, les épaules mises à nues, le buste légèrement penché vers l'arrière et les bras tendus appuyés sur les cuisses de Jungkook. Il ne gâchait pas son plaisir et montait, redescendait, sur la hampe raide de son amant. Le cadet leva les mains vers le torse de Jimin, avec une envie irrésistible de le toucher. Ses doigts glissèrent tout doucement sur son ventre plat et ferme, et il redessina les muscles de ses abdominaux avec envie. La cadence s'accéléra encore, arrachant des cris d'extase à Jimin qui ne se souciait plus de qui pouvait l'entendre. La main de Jungkook se referma sur son sexe pour qui puisse profiter lui aussi de cet instant. Jimin était si proche de la petite mort qu'il sentait son esprit flotter jusqu'au plafond de sa chambre.

Jungkook reprit le dessus en se redressant soudainement, faisant se rallonger Jimin sur le dos. Il vint le premier, dans un long râle, le corps immobile et tendu, et il n'eut pas à attendre longtemps avant que son amant ne jouisse à son tour, la respiration saccadée et tremblant de partout. Sonné, il prit le visage de Jungkook entre ses mains et colla son front humide contre le sien. Son cœur battait fort dans sa poitrine et il embrassa son compagnon qui paraissait lui aussi essoufflé de leurs ébats. Leurs lèvres se délièrent et se retrouvèrent, jusqu'à ce qu'ils retrouvent un souffle plus apaisé.

— Je t'aime, murmura Jimin à son oreille.

L'autre Elementi ne parut pas surpris de cette déclaration, mais il ne répondit pas. Il se contenta de sortir du lit en s'étirant et il remonta son pantalon tandis que Jimin se prélassait dans ses draps, un petit sourire au coin des lèvres, admirant le dos de son amant.

— Tu ne restes pas plus longtemps ?

— Je me ferais étriper si je ne suis pas dans ma chambre au réveil, répondit simplement Jungkook. Passe une bonne fin de nuit.

Il tourna la tête vers lui et lui sourit avant de partir sans aucun bruit. Légèrement déçu, Jimin se leva et se dirigea dans sa salle de bain pour se rafraichir un peu avant de retourner dormir. Il le savait, même si cela le blessait un peu, que Jungkook et lui n'avaient pas les mêmes intérêts dans leur relation. Son cadet n'était pas amoureux, jamais. Il n'était même pas exclusif. Il regrettait lui avoir avoué qu'il l'aimait, mais il n'avait pas pu se l'en empêcher. Au moins, il avait transformé sa mauvaise nuit en quelque chose de plus agréable, et il retourna dormir l'esprit plus serein.

xXx

Quand l'heure de se lever sonna, le ciel était si bleu qu'on n'eut pas l'impression qu'une tempête avait bouleversé la nuit. Seokjin fut l'un des premiers à sortir de son lit, tandis que Namjoon à ses côtés prenait plus de temps à émerger de son sommeil. L'alchimiste lui caressa tendrement les cheveux avant de descendre jusqu'à son laboratoire pour travailler avant que les cours ne commencent. Il était à peine huit heures du matin quand on frappa à sa porte, alors qu'il n'attendait pas ses étudiants avant neuf heures. La tête ronde de Jimin apparut dans l'encadrement de la porte. Il paraissait inquiet et réservé, alors qu'il avait l'habitude de le saluer avec vivacité.

— Quelque chose te tracasse ? devina Seokjin.

— Je voudrais partager avec toi un rêve que j'ai fait cette nuit, dit Jimin en baissant la tête.

— C'est si grave ? s'inquiéta son aîné.

Le jeune homme s'assit devant le bureau de Seokjin et commença à raconter le cauchemar qui l'avait réveillé en sursaut, la vision des morts sanglantes de tous les Prodiges. Il caressait machinalement la marque blanche qui ornait le dos de sa main gauche, comme pour se rassurer. Seokjin ne pensa pas une seconde à se moquer de ses craintes, car son ami était réellement inquiet.

— C'est bien que tu sois venu me le dire. C'est peut-être un message pour nous prévenir que la paix n'est qu'une façade et qu'il va bientôt falloir prendre les armes. On en discutera tous les sept avec le Directeur afin de prendre une décision. Mais ne te torture pas trop l'esprit avec ces images. Tu as besoin de séances de méditations ?

— Je pense que ça va aller, Jin, mais c'était vraiment quelque chose que je ne veux absolument pas voir.

— Va te changer les idées. Les cours vont commencer, tu vas pouvoir rejoindre les autres, et ça te rassurera un peu, sourit Seokjin.

Jimin écouta le conseil de son ami et partit dans le hall principal qui commençait à être rempli d'étudiants qui sortaient du réfectoire. Comme lui, tous portaient un uniforme de couleur sombre : le pantalon et la veste étaient d'un bleu de nuit pour les Prodiges, et noirs pour les autres. Par-dessous la veste, qu'ils pouvaient fermer ou non selon leur préférence, la plupart d'entre eux, notamment les Prodiges, avaient une chemise à jabot. Sur chaque côté, contre les murs, étaient disposés des casiers où les Saints pouvaient déposer des affaires sans avoir à retourner dans les dortoirs entre les cours. Le jeune Elementi se fraya un chemin entre les filles et les garçons qui le saluèrent poliment en inclinant la tête, et trouva des têtes familières plus loin, dans un coin, contre les casiers. La tête blonde de Taehyung ne passait pas inaperçu, et quand il vit son camarade, il lui fit un grand sourire et de grands signes pour qu'il les rejoigne. A ses côté, il y avait Yoongi, jeune Spiriti réservé aux cheveux d'ébène, avec un tour de cou noir, et Namjoon, fraichement levé, qui semblait perdu dans ses pensées. Jungkook et Hoseok n'étaient pas encore arrivés, mais ça n'étonnait étrangement personne. Ils étaient tous deux des maîtres de la vitesse, pourtant ils étaient souvent en retard. Tout un paradoxe. Taehyung, voyant que Jimin ne semblait pas être dans son assiette, le serra dans ses bras avec toute son affection. L'Elementi sentait le regard insistant de Yoongi, et il savait que le Spiriti avait tout de suite compris ce qui le chiffonnait.

— Jin veut nous regrouper à la dernière minute, dit-il sans que Jimin n'aie eu à dire quoi que ce soit.

— Pourquoi ? s'étonna Namjoon. Il ne m'a rien dit ce matin.

— C'est par rapport à moi, répondit Jimin en soupirant. Tu peux arrêter de t'infiltrer dans ma tête ?

— Désolé, fit Yoongi en haussant les épaules. C'est plus fort que moi.

Jimin se mordit la lèvre. S'il avait pu lire cette information dans ses pensées, il savait également qu'il avait passé la nuit avec Jungkook, et cette idée le rendait mal à l'aise. Cela ne lui plaisait pas qu'on puisse lire sa vie privée comme un livre ouvert.

— Plus tu y penseras, plus ce sera accessible à mon esprit, tu le sais ça, reprit le Spiriti en le regardant droit dans les yeux.

— Et je ne peux même pas savoir l'effet que ça te fait, grommela Jimin. Tu restes impassible.

— Tu veux que ça me fasse quelque chose ? Comme si je ne le savais pas déjà. Heureusement que j'ai appris à contrôler mes réactions à chaque information que je recevais sans le vouloir.

Sentant qu'il n'y avait aucune issue à la discussion, Taehyung posa une main sur l'épaule de ses deux camarades.

— Je ne sais pas ce qu'il vous passe par la tête mais nous allons tous respirer un bon coup et aller en classe. Les deux autres nous rejoindront quand le cœur leur en dira.

— Après toutes ces années, devoir encore assister à des cours parce que je dois être avec vous, soupira Namjoon.

Il était neuf heures et les Prodiges avaient une leçon particulière sur l'histoire des générations précédentes qui avaient porté le « P » sur la main. Ils retrouvèrent Seokjin dans la salle de classe, portant une blouse blanche par-dessus ses vêtements d'académicien. Comme prévu, Jungkook apparut au dernier moment, l'uniforme volontairement débraillé, et Hoseok arriva juste après lui, l'air boudeur.

— Je l'ai battu pour la troisième fois, expliqua le Génie parmi les Génies avec un sourire rayonnant.

La frange en bataille devant les yeux, il ne saurait être plus beau qu'en cet instant. Jimin rougit, se rappelant de sa nuit exaltante dans ses bras, et de sa déclaration inattendue. Mais son ami faisait comme si de rien n'était et s'installa entre lui et Taehyung qu'il salua chaleureusement. Il adressa un mot pour chacun d'entre eux avec son habituel ton charmeur. L'air de rien, il posa la main sur la cuisse de Jimin qui retint une exclamation de surprise. Jin se leva de sa chaise et se dirigea jusqu'au bureau du professeur. Ce fut à ce moment-là que le Directeur Laurel fit irruption dans la salle à son tour. Jin prit la parole :

— J'ai demandé quelques minutes de délais. Il y a quelque chose dont on devrait discuter. Jimin est venu me voir il y a une heure pour me parler d'un rêve qui pourrait être prémonitoire.

— Le cauchemar de cette nuit ? coupa Jungkook.

— Quel rêve ? demanda Namjoon, les sourcils légèrement froncés.

— J'ai vu un démon aux ailes noires nous tuer les uns après les autres. Je me souviens de chacun de vos corps gisant dans le parc de l'Académie, raconta Jimin d'une voix tremblante comme s'il venait de l'avoir rêvé.

— Qu'est-ce que cela veut dire ? fit Hoseok. Ce n'est qu'un rêve, non ?

— Ou un avertissement, répondit Jin.

— Et qu'est-ce qu'on peut faire ? interrogea Namjoon en se tournant vers le Directeur. Ce n'est pas comme si on ne nous préparait pas au combat depuis des années, déjà. Nous connaissons les risques.

— Qu'ils viennent, sourit Jungkook en claquant des doigts, créant une étincelle autour de sa main. On les attend.

— On ne devrait pas prendre ça à la légère, murmura Taehyung, l'air inquiet. Jimin a vraiment l'air bouleversé.

— Je sais, reprit le plus jeune des Prodiges. J'étais là.

— Je vois.

— Ce qu'on peut faire, coupa Laurel, c'est de doubler la sécurité autour du domaine. Nous serons prévenus suffisamment tôt si jamais les Démons du Monde d'En-Dessous s'approchent de l'Académie. Est-ce que cela te rassure un peu, Jimin ?

— Je ne sais pas. Juste… ce mauvais pressentiment ne me quitte pas, je dois être encore sous le choc d'avoir vu si clairement la mort de mes camarades.

Namjoon lui ébouriffa tendrement les cheveux, touché par l'inquiétude de son cadet. Hoseok aussi lui témoigna une affection toute particulière, tout comme Yoongi, et Taehyung. Leurs liens restaient forts, même dans ces moments d'incertitude. Ils savaient qu'ils étaient là pour une bonne raison, et il était fort probable que le quotidien paisible du monde allait être ébranlé.