Rien ne laissait supposer que Jane et Elisabeth Bennet soient sœurs. L'aînée Jane était une belle jeune femme blonde aux yeux bleus qui avait rencontré un certain succès dans le milieu du mannequinat lorsqu'elle était plus jeune. Elisabeth de deux ans sa cadette avait une abondante chevelure brune et les yeux verts. Elle avait également été approchée par la même agence de modèles quelques années auparavant mais avait décliné l'offre. Ce milieu ne l'attirait pas.
Elisabeth n'avait rien à envier à sa soeur Jane. Même si cette dernière avait une silhouette filiforme et une beauté qui correspondaient parfaitement aux standards des modèles actuellement en vogue, sa cadette de taille similaire avait quant à elle un corps plutôt mince mais galbé et tonique par la pratique régulière d'une activité sportive. Elle se défendait toutefois d'être qualifiée de beauté brune et au delà de son physique avantageux dont elle n'avait semble-t-il pas conscience, ses grands yeux verts lui donnaient un charme fou.
Très proches et très complices depuis leur plus tendre enfance, les deux soeurs se distinguaient également par leur tempérament. Le calme et la douceur de Jane contrastaient avec la vivacité et l'impertinence de sa soeur. Jane n'avait pas souhaité poursuivre sa carrière de modèle et s'était lancée avec réussite dans les études de décoratrice d'intérieur. Tout juste diplômée de l'École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris, elle avait déjà quelques succès à son actif. Elisabeth de son côté avait choisi une toute autre voie. Lorsqu'elle décida de se lancer dans des études d'infirmière, son père n'en fut pas vraiment surpris car il savait que sa fille aimait venir en aide à son prochain. Un autre trait de caractère distinguait les soeurs Bennet. Contrairement à Jane qui était plutôt casanière, Elisabeth adorait les grands espaces, les promenades interminables dans la campagne environnante en toutes saisons, le footing aux premières lueurs du jour. Elle pouvait rester des heures à contempler la nature et aimait griffonner des esquisses de la faune. Elle avait un certain talent même si la encore elle s'en défendait.
La famille Bennet était très respectée à Meryton, petite ville située dans le comté de Hertfordshire à une trentaine de miles au nord-ouest du centre de Londres. La propriété Longbourn qui était dans la famille depuis des générations était devenue un hôtel il y a une cinquantaine d'années. L'imposante bâtisse à l'architecture néo-classique était élégante et avait conservé son charme d'antan. Elle faisait la fierté de Monsieur Bennet de même que les écuries qui jouxtaient l'hôtel et qui abritaient quelques beaux spécimens d'équidés.
Jane et Elisabeth étaient les filles aînées de Thomas Bennet. Elles étaient ses rayons de soleil. Le patriarche avait fait l'acquisition d'Apollon, un Pur sang anglais réformé des courses, il y a cinq ans pour le dix-huitième anniversaire d'Elisabeth. Cheval audacieux, intelligent, vif et à la personnalité complexe, le Pur sang correspondait bien au caractère de sa seconde fille. Apollon était une vraie beauté à la robe noire qui avait besoin de détente et de travail et Elisabeth mettait un point d'honneur à le faire galoper autant que possible dans la campagne environnante. Monsieur Bennet se plaisait à dire que l'homme qui parviendrait à capturer le cœur de sa Lizzie aurait à batailler ferme, à faire preuve de beaucoup de patience et être doté d'un caractère fort pour apprécier la personnalité de sa fille et s'y adapter. Jane de son côté s'était vu offrir Téthys sept ans plus tôt, une jument Hunter irlandais docile et calme de dix ans. Moins téméraire que sa soeur, elle se contentait de monter occasionnellement pour des promenades bien moins sportives que la formidable paire que formaient Elisabeth et Apollon. Monsieur Bennet avait bien cerné le caractère de chaque cheval et avait offert à ses filles le compagnon idéal.
Il ne s'était pas remarié après le décès dix ans plus tôt de sa femme Edith qu'il avait chérie jusqu'à son dernier souffle et il mettait toute son énergie dans la gestion de l'hôtel familial. Il avait une troisième fille Lydia, une jeune écervelée de dix-huit ans, très jolie mais qui jalousait la beauté et l'indépendance de ses aînées. Elle n'avait aucun goût pour les études et ne pensait qu'à flirter. Son unique but dans la vie était de rencontrer un homme fortuné et d'en faire son mari, au grand dam de Thomas Bennet. Bien que Lydia détestait les chevaux, il lui offrit tout de même pour son dix-huitième anniversaire un cheval nommé Didi dont elle se détourna rapidement prétextant qu'il n'était pas aussi beau que les chevaux de ses sœurs. Mais en réalité, Lydia n'en avait cure et laissa l'animal aux bons soins de qui le souhaitait.
Didi était une jument de huit ans de race Hunter irlandais, tout aussi magnifique et docile que Thétys. Didi comme Thétys, ainsi que trois Henson faisaient le bonheur des clients de l'hôtel qui pouvaient découvrir, lors de leur séjour dans la région, la campagne environnante sur de bien belles montures.
Contrairement aux autres chevaux des écuries, Elisabeth était la seule à monter Apollon car le cheval ne se laissait pas facilement approcher par des étrangers. La jeune femme avait trouvé chez l'animal son fidèle compagnon à quatre pattes qui avait un caractère bien trempé comme le sien et elle en était très fière.
Après leurs études respectives, Jane et Elisabeth avaient toutes deux décidé de s'installer à Meryton, leur ville natale, jusqu'à ce qu'elles rencontrent leur prince charmant s'amusaient-elle à préciser. Elles partageaient un bel appartement depuis deux ans. Jane, décoratrice d'intérieur, était à son compte tandis qu'Elisabeth travaillait au bloc opératoire de l'hôpital de la ville.
