Avants-propos : Et voici le premier chapitre de ma nouvelle fanfiction basée sur l'univers de Harry Potter. Celle-ci a été écrite conjointement avec une amie : Labyrinthe-infini. L'histoire se déroule près de 40 ans après les événements des livres et met en scène une nouvelle génération de sorciers créée par nos soins conjugués. Nous espérons tous deux que vous aimerez autant suivre les aventures d'Arthémis que celle de notre sorcier préféré (oui, on vois les choses en grand). Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter une bonne lecture, et n'hésitez pas à faire part de vos avis dans les commentaires !

Disclamer : l'univers de Harry Potter appartient à J.K. Rowling.


Chapitre 1 - Un rêve troublant

La chaleur écrasante de cette fin de mois de juillet baignait le village de Mirapice de son ombre lourde et moite, faisant transpirer les passants et accablant l'unique lycée de la région de ses rayons éblouissants. Seul le feuillage des quelques rares arbres du parc, savamment placés autours des tables, venaient apporter un peu de rafraichissement au quelques élèves présents qui s'y massaient avec des soupirs de soulagement. Même la murette, lieu de réunion bien connus des lycéens en période scolaire, avait été délaissée ce jour-ci, les pierres et le béton étant tout simplement brûlants.

C'était dans cette atmosphère étouffante qu'Arthémis Grildal attendait, réfugiée à l'ombre du préau longeant le foyer des élèves, servant aujourd'hui de point de rendez-vous pour la Bourse aux Livres, passage de fin d'année traditionnel et obligatoire duquel la jeune fille se serait bien soustraite si elle l'avait pu.

Arthémis était une jeune fille étonnamment grande pour ses quatorze ans, une de celles qui n'avait pas besoin de talons pour se mettre en valeur. Ses lourdes boucles brunes, s'illuminant de reflets chocolat à la lueur du soleil, encadraient son visage pourtant pâle, malgré la canicule qui régnait sur Mirapice depuis des semaines. Sa silhouette fine et svelte était ce jour-ci rehaussée par un simple T-shirt léger, ornementé de motifs en forme de toutes sortes de Cupcakes donnant l'eau à la bouche, et d'un minishort qu'elle s'était finalement décidée à enfiler après de longues minutes d'hésitation. Il émanait cependant d'elle une sorte d'aura, une énergie intimidante qui lui conférait une certaine maturité pour les uns, et une réputation de sainte-ni-touche pour les autres. Pour ses amis, Arthémis n'était pourtant qu'une fille cool, gentille et appréciable, qui se souciait des autres et savait toujours trouver les mots qu'il fallait.

Elle promena son regard mystérieux, vert cerclé d'or, sur les larges bâtiments dans lesquels elle déambulerait d'ici peu, à la fin des vacances d'été. Le lycée… Un rythme de travail plus soutenu l'attendait et elle s'y était préparée –Arthémis avait toujours été une élève studieuse- cependant elle ne pouvait s'empêcher d'appréhender ce nouveau cap dans sa vie. Le collège lui avait réservé son lot de surprises, de désillusions et de tristesses, mais de joie également, et tout cela était à présent derrière elle… Envolé à tout jamais, soufflé par une brise qu'elle ne pourrait jamais rattraper. Était-elle réellement prête à franchir le pas ? Elle n'en était pas sûr, mais une excitation sourde montait dans sa poitrine rien qu'en regardant les gigantesques murs blancs et les baies vitrées, sans qu'elle puisse mettre un nom sur ce sentiment.

Le soleil tapant dur, elle se recula un peu de nouveau jusqu'à s'accoler au mur du foyer afin de profiter de l'ombre du bâtiment, jetant un rapide coup d'œil à la petite horloge numérique de son téléphone portable, duquel pendait un strap en forme de pomme. Ses amies étaient en retard…

Elles étaient quatre en tout, inséparables depuis deux ans, suite à un voyage en Italie qui les avaient toutes profondément marquées. Elles n'avaient pas encore eu l'occasion de se revoir depuis la fin des épreuves du Brevet -qu'elles avaient toutes remportées haut la main- et Arthémis avait hâte d'être réunie avec ses amies. Au cours des années écoulées, elles avaient eu des différents, s'étaient séparées, réunies, engueulées, pour en sortir, au final, plus fortes et plus unies que jamais. Actuellement, Arthémis les considéraient comme les personnes les plus chères à son cœur. Elle aurait fait n'importe quoi pour elles, et elles savaient que ses amies lui rendaient bien ce sentiment.

Un petit pas léger raisonnant contre le gravier la tira de ses réflexions nostalgiques, et ses lèvres s'étirèrent en un sourire radieux lorsqu'elle reconnu la jeune fille qui se dirigeait vers elle, l'air aussi joyeuse qu'elle.

Lucile Esper était une jeune fille constamment de bonne humeur, rayonnante de fraicheur et d'optimiste. Ses cheveux fins d'un châtain très clair, aujourd'hui maintenus par une pince, était soulignés par ses yeux rieurs, légèrement en amande, lui conférant un air malicieux. C'était cette personnalité pétillante et amicale qu'Arthémis appréciait particulièrement chez Lucile. C'était une fille simple, de plus, à l'inverse de toutes ces cruches qui ne pensaient qu'à s'envoyer en l'air et auxquelles Arthémis dédiaient nombre de regards meurtriers à longueur de journée.

Les deux jeunes filles ne cachèrent rien de leur joie de se retrouver après toutes ces semaines, évoquant les derniers potins avec moult sourires et éclats de rire. Sylvia et Mélanie les rejoignirent peu de temps après, arrivant simultanément, un sourire aussi large qu'Arthémis et Lucile collé sur le visage.

Sylvia Estyl était une petite brunette au look branché et à l'allure sympathique. Elle était toujours la première à rire et à faire la folle quand il le fallait, un trait de caractère qui faisait d'elle quelqu'un d'apprécié de tous. Le soleil lui avait fait du bien depuis le Brevet puisqu'elle arborait désormais un joli bronzage.

Mélanie Lagrange, quant à elle, était une jeune fille aux cheveux d'un noir très profond dont le violet était la couleur prédominante, se retrouvant de sa garde-robe jusqu'à son sac en passant par les chouchous qu'elle utilisait parfois pour s'attacher les cheveux en une queue de cheval toute simple.

Les quatre amies attendirent encore plusieurs minutes ensembles, rigolant et souriant à tout va en évoquant les souvenirs de l'année passée et en parlant de leur avenir en temps que lycéenne -non sans une certaine appréhension- avant d'enfin se décider à braver le soleil pour se diriger vers l'entrée du Foyer. Elles avaient tant attendu qu'une longue queue d'élèves, ancien collégiens comme lycéens, s'était formée devant la porte vitrée grande ouverte, s'étalant jusque dans le parc. Arthémis ne put retenir un juron, tout à ses retrouvailles avec ses amies, elle avait oublié qu'elles s'étaient à l'origine donné rendez-vous vers dix heures pour justement échapper à l'attente !

- C'est pas grave, Arthémis, la rassura Mélanie avec un sourire rassurant tout en prenant place dans la file, bientôt suivie par les trois autres, on n'a qu'à discuter ! Vous avez quelque chose de prévu pour ces vacances ?

Très vite, la jeune fille aux boucles brunes ne pensa plus du tout à l'attente et se contenta de profiter de la conversation avec ses amies, de la caresse de la brise matinale sur sa peau brûlée par le soleil, et des vacances qui s'annonçaient. C'était ces petits moments simples qui lui plaisaient plus que tout, et elle ne les aurait échangés pour rien au monde !

Brusquement, au beau milieu d'une fascinante conversation sur les futurs garçons qu'elles allaient pouvoir mater dés leur entrée au lycée, le regard de Sylvia fut attiré par quelque chose de l'autre côté du bâtiment dédié à la Bourse des Livres.

- Vous avez vu ce type ? Commenta-t-elle en attirant à leur tour l'attention de ses amies sur le jeune homme qui s'avançait vers le Foyer d'une démarche hésitante, il a l'air un peu perdu non… ?

Arthémis tourna les yeux vers l'adolescent, un sourcil haussé dans une attitude curieuse. Effectivement, le jeune homme avait l'air complètement désorienté, jetant de rapides coups d'œil autours de lui, un sac gris chargé sur l'épaule, comme s'il était à la recherche de quelque chose. Il arborait d'épaisses lunettes sur lesquelles se réverbéraient les rayons du soleil, empêchant à la jeune fille de distinguer ses yeux, et son large front était couvert par une mèche de cheveux châtains impeccablement coiffée, lui conférant une allure un peu décalé au milieu des lycéens branchés. La jeune fille le détailla du regard. Il était plus pâle encore qu'elle et avait une démarche un peu gauche qui lui conférait un air un peu pataud.

« Probablement un de ces mecs renfermés sans amis » ne put-elle s'empêcher de penser, sans animosité. Il n'avait pas l'air méchant néanmoins et semblait déployer des efforts inconcevables pour passer inaperçu ce qui, bien entendu, produisait l'effet inverse. Arthémis se surprit à lancer un de ses fameux regards assassins à un groupe de filles en train de glousser devant elles, en pointant du doigt le jeune homme avec des sourires moqueurs.

- Eh ! L'interpella Mélanie le faisant sursauter, si c'est la Bourse des Livres que tu cherches c'est bien ici !

A cet instant précis, Arthémis croisa le regard du nouvel arrivant. L'échange ne dura qu'une fraction de seconde, pourtant un flash lumineux envahit soudain sa vision manquant de lui arracher un cri ! Elle cligna des yeux et l'instant d'après il s'était évanoui et le jeune homme avait détourné la tête, se dirigeant avec empressement vers la file en marmonna un « merci » à peine audible en direction de la jeune fille aux cheveux noirs. Arthémis le suivit du regard jusqu'à ce qu'il ne disparaisse derrière un groupe d'élèves de Terminale, mais le phénomène ne se répéta pas : aucun flash blanc ne vint troubler sa vision.

- Pas très bavard celui-là, commentait la voix de Mélanie, lointaine à ses oreilles, vous l'aviez déjà vu dans le coin ?

- Non, répondit la voix de Lucile de son habituel ton enjoué, ça doit être un nouveau… Arthémis, tu vas bien ?

La réflexion ramena brutalement la jeune fille à la réalité. Elle se rendit soudain compte que ses trois amies la dévisageaient avec inquiétude. Elle devait avoir l'air encore plus pâle que d'habitude.

- …Oui ! Lâcha-t-elle enfin, tentant un sourire rassurant qui resta néanmoins un peu crispé, je me disais juste qu'il n'avait pas l'air très sociable comme mec !

Ses amies froncèrent les sourcils, dubitatives, et Lucile tenta une blague présupposant que le jeune homme lui avait taper dans l'œil mais, devant le peu de réaction de la jeune fille, elles lâchèrent l'affaire et se replongèrent dans leur conversation. Arthémis jeta un dernier coup d'œil derrière elle. L'espace d'un instant, elle avait été submergée par un sentiment de malaise qui commençait à peine à s'estomper, simplement en croisant le regard de ce jeune homme, comme si quelque chose de terrible s'apprêtait à se passer sans qu'elle ne puisse dire quoi.

Mais très vite, l'incident s'effaça de l'esprit de la jeune fille et elle se remit à rire de bon cœur avec ses amies, se concentrant uniquement sur l'instant présent et ne pensant plus au mystérieux jeune homme.


La journée sembla s'écouler en une fraction de seconde. Après le passage au foyer pour la Bourse des Livres, les quatre amies avaient profitées du fait que le soleil soit à son zénith pour se rendre toutes deux au Kebab du coin, où elle commandèrent chacune une énorme barquette de frites qu'elles dégustèrent en ville, tout en profitant de ce moment entre elles. Très vite, le soleil déclina et les jeunes filles durent retourner devant les grilles du lycée où leurs bus scolaire respectifs les attendaient.

Non sans un certain déchirement au cœur, Arthémis dit au revoir aux trois autres avant de monter à bord de son propre bus, jetant au passage un dernier coup d'œil eu collège-lycée. Elle avait l'impression de laisser une vie derrière elle pour plonger en plein cœur d'une autre. A la rentrée, plus rien ne serait comme avant : elle en avait conscience et appréhendait ce moment comme elle l'attendait avec impatience. Le sac rempli de ses nouveaux bouquins de Seconde, elle s'assit sur son siège habituel et colla son front contre la vitre, le contact rafraichissant du plexiglas lui vidant l'esprit.

Elle somnola tout le long du trajet et ne fit pas plus attention lorsque le bus s'arrêta enfin à l'arrêt, à quelques centaines de mètres de chez elle, où l'énorme 4X4 de sa mère l'attendait, facilement reconnaissable à ses bordures d'un orange vif. D'un point de vue extérieur, les deux jeunes femmes se ressemblaient beaucoup, autant physiquement que mentalement, bien que chacune des deux aurait préféré se damner plutôt que de le reconnaitre ! Arthémis monta à l'avant après avoir balancé son sac plein sur la banquette arrière, et claqua la portière.

Elle ne prit pas plus garde au trajet en voiture qu'à celui qui venait de s'écouler en bus, le soleil à l'horizon disparaissant peu à peu derrière les montagnes, nimbant le ciel de nuances or et rose dans lesquelles elle perdit son regard. Elle ressentait une étrange nostalgie au creux de son ventre. Les choses seraient peut-être à tout jamais différente avec son entrée au lycée ? Elle n'avait peur que d'une chose, perdre cette si précieuse amitié qui les liait, Sylvia, Lucile, Mélanie et elle.

La voiture amorça un virage sur le petit virage menant à chez elle, dont l'entrée était marquée par une statue de sanglier qui avait du être belle dans le passé mais qu'un groupe de gamins s'était amusé à taguer depuis, et bientôt, à travers les arbres, sa maison se dégagea.

Ou du moins, le début de maison. En effet, il y avait de cela quelques années, ses parents avaient tout laissé tomber pour venir s'installer en pleine campagne et entreprendre d'y bâtir leur propre habitation, qui peinait à s'élever, briques par briques. Entre-temps, eux, Arthémis et son frère ainé vivaient dans un petit mobile-home, en attendant que les interminables travaux s'achèvent enfin. Un mode de vie qui n'était pas pour déplaire à la jeune fille, que les grandes villes agaçaient particulièrement !

Ses trois énormes chiens se précipitèrent vers elle à peine quelques secondes après qu'elle soit sortie de la voiture et fêtèrent son retour avec enthousiasme et moult câlins, aboiements et coups de langue, lui vidant momentanément l'esprit. Elle n'avait aucune raison d'appréhender après tout… Sa vie n'était peut-être pas toujours comme elle le souhaitait mais c'était dans ces moments là qu'elle se rendait compte qu'elle l'appréciait vraiment, et que pour rien au monde elle n'en aurait changé. Alors ce n'était pas un stupide passage au lycée qui allait l'ébranler !

La soirée avança vite. Son frère ainé rentra un peu plus tard que son père, au moment précis où ils allaient passer à table. C'était un solide jeune homme qui passait le plus clair de son temps avec sa petite amie ce qui avait le don de taper sur les nerfs de sa sœur. Néanmoins, n'importe qui aurait pu dire qu'ils étaient très proches rien qu'au premier coup d'œil. Il y avait entre eux cette complicité que, une fois passés les premiers élans de rivalités, certains frères et sœurs parvenaient à acquérir.

La barquette de frites de midi et la journée chargée d'Arthémis l'avaient vidée de son énergie, aussi ne tarda-t-elle pas, après une douche rapide, à s'éclipser dans sa chambre, un des rares coins habitables de la maison que ses parents s'éreintaient à construire depuis des années, masqué à la vue par un épais rideau et dans lequel s'entassaient toutes ses affaires : livre, matériel à dessin et films côtoyant ses vieilles peluches et les photos de famille aux cadres poussiéreux. Elle aimait bien ce désordre en un sens, elle s'y sentait à l'aise, en sécurité…

Épuisée, elle ferma les volets avant de s'affaler sur son large lit moelleux après en avoir chassé une araignée qui semblait y avoir élu domicile. Elle étendit le bras pour atteindre l'interrupteur de sa petite lampe de chevet et éteignit la lumière, se blottissant paresseusement sous les couvertures.

Le sommeil ne fut pas long à venir et, bien vite, son esprit s'embruma et ses membres s'engourdirent, la plongeant dans cet état second qu'elle appréciait tant. Elle s'endormit sans s'en rendre compte, bercée par le bruit du vent contre les carreaux à l'extérieur, et par ses pensées toutes portées sur le lycée. Cependant, juste avant que Morphée ne la happe pour de bon dans le pays des rêves, une dernière image s'imposa à son esprit, lui faisant froncer les sourcils dans son demi-sommeil. Celle de ce jeune garçon maladroit et aux lunettes opaques aperçu un peu plus tôt le matin, à l'occasion de la Bourse des livres.


Très rapidement, le souvenir se changea en rêve. Elle était dans la même file que le matin même, mais tout semblait flou autours d'elle. Seul ce garçon qui s'éloignait lui apparaissait nettement, comme s'il avait été bel et bien réel. Indistinctement, Arthémis commença à éprouver un sentiment de malaise. Elle n'aurait pas du être ici. Quelque chose clochait. Elle était en train de parler avec ses amies, pourtant celles-ci ne semblaient que des ombres, sans visage ni consistance. Elle aurait voulu se concentrer sur leur conversation mes leurs paroles ne parvenaient pas à ses oreilles. Elle était comme entourée d'un murmure diffus et constant qui ajoutait à son malaise grandissant. Elle lutta quelque seconde avant de tourner de nouveau lentement, mécaniquement, la tête vers l'endroit au bout de la file où le jeune homme avait disparu. Cependant, cette fois-ci, il ne s'était pas éclipsé, bien au contraire. Un frisson glacé lui parcouru l'échine lorsqu'elle se rendit compte qu'il s'était arrêté à quelques mètres des Terminale derrière lesquels il aurait déjà du se placer, semblant hésiter. Arthémis aurait voulu se détourner de lui mais elle en était incapable, comme totalement tétaniser. Son cœur s'emballa dans sa poitrine. Elle aurait du s'enfuir, elle le sentait jusqu'à l'intérieur de ses os, pourtant son corps refusait d'obéir.

Pourquoi portait-elle une robe noire ? En lieu et place de son T-shirt couvert de Cupcakes et de son minishort ? Quelque chose n'allait pas mais quoi… ?

Brusquement, le jeune homme se retourna et son cœur fit un bond dans sa poitrine. Son regard était clairement visible désormais, bleu électrique, la fixait clairement, comme s'il venait de prendre conscience de sa présence. Elle n'aurait pas du se trouver là.

Brusquement, le décor incertain autours d'eux s'effaça et tout s'assombrit. Elle était désormais dans une pièce entièrement noire du sol au plafond. Le garçon avait disparu lui aussi et elle avait retrouvé le contrôle de son corps. Le cœur menaçant de s'échapper de sa poitrine, elle fit volte-face, reculant avant de heurter un mur totalement lisse, comme s'il était fait d'ombre. Soudain, une lumière semblable à celle d'un projecteur surgit de nulle part, éclairant un coin de la pièce avec férocité, bientôt suivi par un second, puis un troisième, et enfin un dernier éclat lumineux. Eblouie dans un premier temps, elle plissa les paupières et ne tarda pas à distinguer une forme sombre et mouvante au milieu de chacun des ronds de lumière, situés chacun sur l'un des cinq coins qui constituaient la pièce -elle-même se dressant au centre précis du cinquième coin. Tout à coup, à sa grande surprise, elle reconnu l'une des silhouettes baignée de lumière.

- Lucile… Murmura-t-elle en un souffle.

Malgré son regard apeuré tranchant avec son traditionnel optimisme et ses cheveux en bataille, comme si elle avait couru, c'était bien Lucile qui lui faisait face ! Elle aussi était vêtue d'une longue robe noire aux plis épais, semblable à la sienne. Et elle n'était pas la seule. Sylvia et Mélanie étaient également présentes dans leur rond de lumière respectif, elles aussi habillées de la même robe noire et l'air aussi effrayées que Lucile. Elle-même se sentait curieusement oppressée, comme si l'obscurité ambiante allait soudain l'engloutir ! L'ultime silhouette se releva et Arthémis put enfin la distinguer pleinement dans la lumière blanche et aveuglante. C'était le jeune homme qu'elles avaient toutes les quatre remarqué le jour même ! Cependant, il n'incarnait plus cette terreur sourde qui l'avait envahie quelques secondes plus tôt, avant qu'elle ne soit précipitée dans cette mystérieuse salle. Il avait en fait l'air aussi apeuré qu'elles quatre, si ce n'était plus encore ! Arthémis ne se demanda même pas pourquoi lui aussi arborait une robe noire. Leurs regards se croisèrent pour la seconde fois. Il ouvrit la bouche lorsque soudain….

- AAAAAAAAAAAAAH !

Arthémis ouvrit les yeux en sursaut, se redressant violemment sur son lit. Elle mit quelques secondes avant de retrouver ses repères. Tout allait bien, elle était en sécurité dans sa chambre, ce n'était qu'un rêve ! Tremblante, elle se rendu soudain compte que les draps qu'elle serrait nerveusement entre ses doigts pâles étaient trempés de sueur. Son cœur battait encore la chamade. Jamais un cauchemar ne lui avait semblé aussi réel, aussi vivace jusqu'à présent ! A bien y réfléchir, jamais un rêve ne l'avait effrayé au point de pousser un cri en pleine nuit non plus ! Elle était trop loin du mobile-home où dormaient ses parents et de la chambre à l'étage qu'occupait son frère pour avoir réveillé qui que ce soit dans la maison, si elle excluait son chat qui avait fait un bon en l'entendant et s'était précipité derrière le rideau avec des feulement affolé.

C'est à ce moment ci qu'elle le vit.

Éclairé par les rayons de la lune filtrant à travers ses volets, à quelques mètres de son lit à peine, elle était là. Une de ces peluches –un adorable éléphant que son grand frère lui avait offert à l'occasion de son dernier anniversaire- flottait littéralement plusieurs pieds au dessus du sol, semblant la fixé de ses deux billes luisantes servant d'œil avec insistance. Cela ne dura qu'un instant et, brusquement, la peluche retomba sur le sol avec un bruit mat. Tétanisée, Arthémis fixa son regard sur le jouet, s'attendant à tout instant qu'il lui saute subitement à la gorge, le cœur battant à une vitesse telle qu'elle se sentait prête à perdre connaissance. Son débit sanguin ne redescendit qu'au bout de plusieurs longues minutes, mais la panique persista. Elle n'était même pas sûre de ce qu'elle venait de voir ! D'abord ce rêve étrange, et maintenant une peluche qui flottait ! Elle devenait dingue !

Elle ignorait que, à des kilomètres de là quatre autres jeunes adolescents s'éveillaient en sursaut, dans un état de panique à peu prêt aussi important que le sien. Tous quatre avaient fait exactement le même rêve qui leur avait laissé la même impression d'oppression angoissante : celui d'une pièce à cinq coins, entièrement noire, dans laquelle se tenaient, éclairés par des ronds de lumière, quatre autres adolescents vêtus de robe noire.

Elle ne se doutait pas non plus une seule seconde que, suite à cet événement extraordinaire, sa vie s'apprêtait à basculer d'une façon irréversible. A partir de ce simple rêve, elle s'apprêtait à être changée à jamais !