Résumé : L'amour, détermina Jim tôt dans sa vie, était une bête compliquée qui résistait à toute classification.
Note de l'auteur : Même si cette partie est techniquement l'épilogue de Sins of Our Fathers, elle retrace plus la vie de Jim. J'ai toujours voulu que cette série parle de l'effet que les pères de John et Sherlock ont eu sur eux mais je ne pouvais pas m'arrêter avant de voir quel genre de parents ils devenaient à leur tour.
Note de la traductrice : *agite le drapeau blanc* Je manque d'originalité, mais voilà encore un chapitre qui commence avec des excuses. Je sais que l'attente à vraiment été longue. Pour ceux qui me suivent sur Tumblr vous savez peut-être que je n'ai pas passé le meilleur des étés et depuis mon déménagement en septembre j'ai eu beaucoup de chose à faire. Bref, sorry, sorry, sorry.
Un grand merci à Clélia Kerlais pour sa bêta lecture sans qui cette partie 4 n'aurait peut-être jamais vu le jour. Merci de t'être proposé et merci de prendre un peu de ton temps pour moi !
Sins of Our Fathers partie 4 : The Field Beyond Ideas
Chapitre 1 : 2001
...
L'amour, détermina Jim tôt dans sa vie, était une bête compliquée qui résistait à toute classification. Il n'était pas sûr de l'avoir déjà ressenti lui-même. D'après son dossier psychiatrique (que Sherlock s'était procuré et qu'ils avaient lu ensemble pendant que son père était sorti dans un pub), les enfants qui étaient dans le même cas que lui souffraient souvent d'une sorte de trouble de l'attachement. Il ne devrait pas être capable de ressentir de l'affection pour ses tuteurs. Au lieu de cela, il s'était installé de façon tenace dans cette nouvelle famille, ce qui avait été vu comme un nouveau trouble inconnu que son père qualifiait de Syndrome de Stockholm pour rigoler. La question de savoir s'il aimait ses parents adoptifs était discutable. Il était certain qu'il les appréciait, il leur faisait confiance et avait besoin d'eux pour s'occuper de lui, donc l'amour semblait plutôt hors propos. En tout cas, Jim ne se sentait pas particulièrement traumatisé et à treize ans, il pouvait au moins nommer l'amour quand il le voyait.
Il y avait l'amour parental. Caché dans sa mémoire, il y avait le touché d'une main maternelle sur son front et la voix gentille de son père biologique. Puis leur meurtre, une horreur sanglante et les mains tranchantes de la femme qui l'avait accepté comme un colis encombrant. Amour n'était pas un mot utilisé dans la famille Moriarty.
Mais son père l'aimait. Jim le savait parce qu'il le lui disait au moins deux fois par jour (« Passe une bonne journée avec Anthea, on se voit ce soir, je t'aime » « Tu éteins la lumière à dix heures. Je t'aime. Bonne nuit »). Son père le prenait dans ses bras et lui racontait des histoires improbables quand il se réveillait après un cauchemar. Son père lui racontait sa journée et l'écoutait toujours attentivement. Son père faisait à manger le soir, lui emballait quelque chose pour le déjeuner et contrôlait ses devoirs. Son père l'aimait avec une chaleur stable et imparable.
Sherlock l'aimait. Il ne le disait jamais sauf quand les choses tournaient vraiment mal, (« Et voilà comment on fait un garrot. Je risque de m'évanouir. Je t'aime »), mais il était doué pour le montrer. Même si Sherlock était toujours occupé, il prenait le temps pour construire des trucs, faire des expériences et partir courir à travers les rues juste pour le plaisir. Sherlock ne lui avait jamais demandé de l'appeler père ou papa (« Tu en as déjà eu assez de ceux-là ») et n'avait jamais pris la peine d'installer des règles qu'il savait que Jim allait seulement briser. Sherlock l'aimait de toutes ses forces.
Puis il y avait l'amour d'un frère ou d'une sœur, mais Jim n'avait aucun moyen d'en faire l'expérience. Il regardait Oncle Mycroft intervenir pour régler un désastre, puis disparaître à nouveau comme un magicien. Oncle Mycroft aimait de loin par ses actes et son infatigable dévouement. Il regardait Tante Harry, qui venait et repartait comme un ouragan avec ses opinions tranchées. Elle remplissait tout l'espace autour d'elle et passait ses problèmes à Papa pour qu'il les résolve. Ils parlaient alors ensemble jusqu'à tard le soir, leurs têtes d'un blond sale penchées l'une vers l'autre avec occasionnellement des éclats de rire résonnant dans l'appartement. Tante Harry aimait avec ses besoins et ses espoirs.
Pour faire encore plus compliqué, il y avait l'amour romantique. Son seul modèle pour ça était Sherlock et Papa qui étaient incontestablement liés ensemble. C'était un amour qui transpirait de tous leurs pores. C'était un bruit de fond chez Jim, imprégnant sa vie. Certaines personnes (Mme. Hudson, Sarah) disaient que c'était 'mignon' ou 'romantique' alors que d'autres (l'ex-thérapeute de Jim) murmuraient des choses comme 'co-dépendant' et 'malsain'.
Jim était aussi témoin d'amour non réciproque. Il y avait Greg qui aimait Oncle Mycroft, patiemment, respectueusement sans rien attendre en retour. C'était clair dans chaque geste et remarque tendre, de la façon dont il redressait la cravate de Mycroft jusque dans les moments où il le taquinait gentiment. Il y avait Molly qui désirait tellement Sherlock que Jim trouvait ça embarrassant quand il était présent.
Voilà l'amour qui emplissait la vie de Jim: plein d'égoïsme, de chaleur, d'avidité, d'affection, de désir et de tendresse. C'était ce qu'il avait comme comparaison.
« Je crois », dit-il à son père pendant qu'ils faisaient à manger un dimanche après-midi quand il avait treize ans, « que je suis amoureux.
- Vraiment ? » Papa pressa un sandwich au fromage fondu sous sa spatule. « De qui ?
- Une fille de mon cours de natation. » Il mit du fromage entre deux bouts de pain avec une tranche de tomate pour le sandwich de Sherlock. « Je l'ai rencontré le mois dernier.
- Comment est-elle ?
- Elle est très intelligente. » Jim ferma les yeux pour l'imaginer, essayant de penser à des choses qui seraient importantes pour son père. « Et elle nage très bien le papillon. Elle va plus vite que tout le monde.
- Et elle a un nom ?
- Irène Adler. » Jim aimait la façon dont le nom roulait sur sa langue. « Elle est Américaine et vient d'avoir quatorze ans.
- Une femme plus âgée, excellent choix. » Son père avait un grand sourire. « Donc, quand as-tu décidé que tu étais amoureux d'elle ?»
Quand elle s'était assise à côté de lui le mois dernier à l'entraînement. Jim s'asseyait d'habitude avec les autres garçons de son âge. Il n'avait pas vraiment d'amis. Sherlock lui avait appris à se fondre dans la masse (« Agis comme John ») et comment éviter de se faire frapper (« Arrête de faire semblant, le regard noir devrait suffire »). Ça marchait assez bien et on le laissait tranquille. Il était solitaire mais en sécurité. Quand Irène s'était assise à côté de lui, il avait ressenti un frisson inhabituel de plaisir face à cette nouveauté.
« Salut », avait-elle dit comme si elle ne savait pas que tous les yeux masculins de la pièce étaient sur elle. « Tu étais dans la ligne d'eau numéro 3 aujourd'hui, non ?
- Oui. » Il n'était pas nerveux parce qu'il ne devenait pas nerveux. La nervosité était pour les gens qui n'étaient pas des Watson.
« Tu nages très bien la brasse. Dommage que les relais ne soient pas mixtes. Je parie que si on était dans la même équipe, on gagnerait tout le temps.
- Merci. » Il regarda l'eau au lieu de ses yeux foncés. « C'est vraiment dommage. Tu es meilleure que n'importe quel mec ici.
- Je sais. » Elle sourit et son cœur commença à battre la chamade. « Si je m'en souciais plus, je commencerais une protestation contre ça, mais nager n'est pas ma première passion.
- Et c'est quoi ta première passion ?
- Je suis une chanteuse. » Elle le poussa de l'épaule. « Et toi ? Nager c'est ton truc ?
- Non, non pas vraiment. Je conçois des ordinateurs et j'aime la chimie. »
Il s'attendit à des commentaires sournois mais elle ne lui posa que des questions, et des intéressantes en plus de cela. Depuis, à chaque entraînement, elle venait et s'asseyait à côté de lui une fois qu'ils étaient tous les deux sortis de l'eau. Et puis hier, elle s'était penchée et l'avait embrassé sur la joue avant de courir à la rencontre de sa mère. Le baiser avait fait picoter sa peau et son cerveau tournait à plein régime.
Mais il ne dit rien de tout ça à son père.
« Je ne sais pas. Ça s'est juste produit. » Jim déposa le sandwich de Sherlock dans la poêle. « D'un coup.
- Ouais, l'amour peut arriver comme ça, dit son père doucement. Mais fait attention avec ton cœur. Et tu devrais probablement lui proposer un rendez-vous avant de lui dire.
- Je ne comptais pas lui dire !
- Pardon ! » Son père rit. « Bien sûr, j'aurais dû savoir. Mais tu peux l'inviter à la maison si tu veux.
- Ça va pas ? Elle va jeter un coup d'œil à cet endroit et repartir en courant dans l'autre sens.
- Tu penses ? » Son père jeta un coup d'œil à l'appartement comme s'il le voyait pour la première fois. Les projets de Sherlock et Jim occupaient chaque espace, une explosion de débris autour desquels John avait appris à nettoyer au lieu de les ramasser. « Je ne sais pas. N'importe quelle fille que tu apprécies aimera sûrement.
- Aimer quoi ? » Sherlock arriva dans la cuisine, enroulant un bras autour de la taille de John et embrassa sa nuque. « Je meurs de faim.
- Alors arrête d'interrompre Papa. » Jim leva les yeux au ciel. « Tu aurais dû manger hier soir.
- Je n'avais pas faim. » Sherlock se décolla du dos de John et dévisagea rapidement Jim. « Tu lui parlais de cette sournoise américaine de ton cours de natation.
- Arrête de déduire tout ce que je fais. » Jim plissa le nez en signe d'irritation, prit son sandwich et marcha d'un pas lourd jusque dans sa chambre.
Vingt minutes plus tard, Sherlock frappa à sa porte et entra.
« Si on frappe c'est pour que je puisse décider si la personne de l'autre côté a le droit de rentrer », souligna Jim, croisant les bras sur sa poitrine. Il avait mangé puis s'était calé contre les oreillers de son lit avec une copie usée des contes de Grimm sur ses genoux.
« Vraiment ? Fascinant. » Sherlock s'assit au bout du lit une jambe repliée sous lui. « Je suppose que j'ai offensé ta délicate sensibilité. Je ne suis pas sûr de savoir comment.
- Tu as demandé à Papa ?
- Il m'a dit d'aller te parler.
- Elle n'est pas du tout sournoise. Elle est intelligente et drôle et je suis amoureux d'elle », débita-il parce que les conseils de son père étaient bons, mais Sherlock comprenait ce qui était impossible pour John.
« Vraiment ? » Sherlock le dévisagea à nouveau. « Il semblerait, oui.
- Papa pense que je devrais l'inviter pour un rendez-vous, mais je pense que c'est cinglé. C'est fou, non ?
- Je trouve que c'est normal. » Sherlock prononçait toujours le mot normal comme d'autres gens disaient 'herpès'. « La plupart des gens ont des rendez-vous.
- Pas toi. » Jim connaissait déjà cette histoire. Ou plutôt les bouts qu'il était autorisé à connaître. Et quelques-uns qu'il ne devrait pas grâce à son Oncle Mycroft.
« Non. J'ai décidé il y a longtemps que John était la bonne personne et je n'ai jamais eu assez de raison pour douter de cette décision. Aller à des rendez-vous aurait été redondant. Ce n'est peut-être pas pareil pour toi.
- Et si ça l'était ? Et si Irène était la bonne pour moi ?
- Alors tu vas devoir faire de ton mieux pour la garder et le seul conseil que je peux te donner est que tu dois apprendre à t'excuser et changer quand c'est nécessaire.
- Tu me dis toujours de ne pas m'excuser.
- Tu ne dois jamais t'excuser quand tu as raison. Cependant, je trouve souvent que dans des relations plus proches, on peut parfois avoir tort regardant l'intelligence de l'autre, observa Sherlock. Par exemple, tu avais tort de t'énerver parce que je te posais une simple question et j'avais tort de te l'avoir posée de cette façon.
- Je suis désolé », testa Jim. Il n'arrivait pas à se rappeler s'il avait déjà dit ces mots à Sherlock avant. Ils semblaient assez vides. Peut-être parce qu'il ne se sentait pas le moins du monde désolé.
« Moi aussi. » Répéta Sherlock sur le même ton.
Ils se regardèrent dans un silence complice.
« Elle est vraiment intelligente », dit Jim et Sherlock hocha la tête, un léger sourire sur les lèvres.
À l'entraînement le lendemain matin, Irène portait un nouveau maillot de bain rouge foncé qui s'accordait avec ses ongles de pied. Ceux de ses mains étaient rongés, mordus, mais ceux de ses pieds étaient parfaitement ronds et écarlates. Elle les agita avec plaisir quand il le mentionna.
« Maman pense que je suis trop jeune pour mettre du vernis, mais elle suppose que presque personne ne verra mes pieds en dehors de la piscine, dit-elle.
- Papa dit que je suis trop jeune pour faire du saut à l'élastique, répondit-il en retour.
- J'adorerais faire ça ! Je parie que c'est comme sauter du plus haut plongeoir.
- Eh bien tu vas devoir venir avec moi alors, quand j'aurai seize ans.
- C'est dans longtemps. » Elle cala son genou sous son menton. « Qu'est-ce qu'on va faire jusqu'à là ?
- Tu pourrais venir. » Les mots sortirent de sa bouche avant qu'il n'y ait proprement réfléchi. « Chez moi.
- Ouais ?
- C'est le chaos et tu ne peux pas ouvrir le frigo, mais il y a beaucoup de choses à faire. Si on s'ennuie, Sherlock cherche généralement des cobayes.
- Ça à l'air amusant, je vais devoir demander à ma mère. C'est bon pour samedi ?
- Oui, bien sûr. » Jim ne savait pas du tout si c'était bon, mais il ne s'en souciait pas du tout.
Quand Sherlock arriva pour le chercher, il eut à nouveau le droit de se faire dévisager avec un sourcil levé.
« Irène vient à la maison samedi, dit-il doucement.
- Hm. On va devoir nettoyer un peu, non ? »
Au grand étonnement de Jim, le commentaire de Sherlock fut vraiment suivi d'un rangement de l'appartement. Après quelques minutes bouche bée, John était sorti de sa torpeur et avait appelé Mme. Hudson pour qu'elle participe au miracle. Jim était en charge de ses propres projets, les triant et les rangeant dans les bacs en plastique que son père avait acheté il y a longtemps déjà.
Une fois le ménage fait, l'appartement n'était pas vraiment ordonné, mais on pouvait y marcher pieds nus sans danger pour la première fois. Mme. Hudson avait même fait des biscuits pour dissimuler toute odeur persistante. Les faibles odeurs de décomposition et de formaldéhyde manquaient à Jim mais ça en valait la peine quand Irène arriva cet après-midi avec sa mère.
« Bonjour, Mme. Adler. Je suis John. » Son père l'accueillit à la porte. « Je vous en prie, entrez. Je peux vous offrir une tasse de thé ?
- Merci mais non. » Mme Adler sourit légèrement. « Je voulais seulement me présenter avant de vous laisser 'Rène.
- Salut, Jim. » Irène attrapa sa main. « Tu me fais visiter ?
- Bien sûr. » Il laissa son père et Mme. Adler parler sur le pas de la porte.
« Ton père a des livres super. » Elle passa un doigt sur l'étagère de la bibliothèque et il fut soudain profondément reconnaissant pour le dépoussiérage qui y avait été fait. « Qu'est-ce qu'il fait ?
- Il est médecin. Il travaille dans une clinique quelques heures par semaine et est consultant pour Scotland Yard le reste du temps. Mais la plupart des livres sont à Sherlock. Il est inspecteur au département des Affaires Classées.
- Et toi alors ? Où sont tes livres ?
- En-haut dans ma chambre. »
Il laissa la porte de sa chambre ouverte, la laissant parcourir ses étagères pendant qu'il tripotait paresseusement une carte mère hors-service. Elle lui posa des questions sur certains livres puis s'assit sur le bord de son lit.
« Qu'est-ce que c'est ?
- Alistair, un collègue de Sherlock, m'apporte des trucs pour faire des expériences. » Il posa la carte mère de côté puis fouilla dans son bac en plastique nouvellement rempli. « Ça c'est mieux. »
Il étendit les entrailles d'un téléphone portable abandonné sur son lit.
« Je ne crois pas avoir déjà vu l'intérieur d'un téléphone. » Elle passa un doigt sur le minuscule haut-parleur. « C'est magnifique. »
C'est à ce moment-là qu'il décida qu'il allait l'épouser. Peut-être pendant un saut à l'élastique.
« Je vais en fabriquer un moi-même. » Il sortit les plans sur lesquels il était en train de travailler.
« Tu peux faire ça ? » Elle se pencha sur ses plans et ses notes en patte de mouche.
Il lui prouva qu'il pouvait réassembler le téléphone pendant qu'elle lui parlait de ses leçons de chant, des différentes faiblesses de l'équipe de natation et d'à quel point elle aimait Londres. Il l'écouta religieusement comme si elle allait l'interroger après.
« Il y a du thé et des biscuits faits par Mme. Hudson en bas si tu veux », annonça son père passant la tête dans l'encadrement de la porte.
« Merci, Docteur Watson, avec plaisir. » Irène sauta sur ses pieds et Jim la suivit comme s'il était attaché à elle.
Et ce fut vraiment sympa. Son père ne lui posa pas de questions bizarres et ne dit rien de trop embarrassant. Après quelques minutes de bavardage, il sortit de la pièce et retourna à son ordinateur.
« Qui est Mme. Hudson ?», demanda Irène en même temps qu'elle prit un autre biscuit.
« C'est notre logeuse, mais c'est aussi une amie. » Il essuya méticuleusement ses doigts sur sa serviette.
« Ça doit être bien. Notre propriétaire n'est jamais là. Maman doit l'appeler une douzaine de fois pour que quelque chose soit fait. Elle se plaint de lui tout le temps. » Elle cassa le biscuit en deux. « Et on n'a pas beaucoup d'amis.
- Pourquoi pas ? Je veux dire, tout le monde semble t'aimer à la natation.
- Oh. » Elle rit, mais ça ne sonnait pas aussi vrai que d'habitude. « Ce ne sont pas mes amis. Les garçons ne font que me mater et les filles pensent que je suis bizarre. Je n'ai pas les mêmes centres d'intérêt qu'elles. C'est pour ça que j'ai tout de suite su qu'on pouvait être amis.
- Vraiment ?
- Bien sûr. Tu me regardes dans les yeux et tu me parles comme si j'avais un cerveau.
- Evidemment. » Il fronça les sourcils. « Pourquoi je te parlerais autrement ?
- Tu vois, c'est exactement ce que je veux dire. » Elle fit un geste vers lui avec son biscuit cassé. « Tu n'as jamais pensé que je n'en avais pas.
- Juste parce qu'une fille est belle ne veut pas dire qu'elle n'est pas aussi intelligente. » Il haussa les épaules.
« Tu penses que je suis belle ? », demanda-t-elle avec un sourire moqueur qui illumina le coin de ses lèvres.
- Oui. » Il la regarda dans les yeux, soudain plein de confiance. « Et intelligente et peut-être très dangereuse. Mais c'est bien. On aime tout ce qui est dangereux dans cette famille.
- Dangereuse ? » Maintenant elle rit de son rire vrai, heureux. « Qu'est-ce qui pourrait bien être dangereux chez moi ?
- C'est la question que poserait une personne dangereuse. » Sherlock entra dans la cuisine, volant un biscuit du plateau.
« Bonjour M. Watson, dit Irène poliment. Comment allez-vous ?
- Sherlock », corrigea-t-il, enfournant une grande partie du biscuit dans sa bouche avant de continuer vers le salon. « John ! Où est mon violon ?
- Oh non. » Jim cacha sa tête dans ses mains. « Fuis tant que tu le peux encore. »
Sherlock apparut, son archet en main telle une épée pointée vers Irène.
« J'ai entendu que tu chantais.
- Oui monsieur. » Elle jeta un coup d'œil à Jim qui grogna en retour.
« Viens. J'ai besoin d'un accompagnement vocal pour ce morceau et la voix de Jim se brise trop pour faire un soprano crédible.
- Revanche », siffla Jim entre ses dents à destination de Sherlock quand ils sortirent vers le salon. « Ça sera une revanche douloureuse, sanglante.
- Tu me remercieras plus tard », répondit Sherlock sereinement puis prit son instrument. Il se tourna ensuite vers Irène, débitant des titres de chanson telle une mitrailleuse jusqu'à ce qu'elle hoche la tête.
La performance qui suivi scotcha Jim au canapé. Il était habitué aux chants plaintifs ou aux hurlements de protestation du violon de Sherlock en fonction de l'humeur de son propriétaire. Il y était maintenant immunisé. Mais la voix d'Irène était entièrement nouvelle. Après un début tendu, ses épaules se relâchèrent et de magnifiques notes sortirent de sa bouche pour accompagner la mélodie virevoltante de Sherlock. Jim écouta avec tout son corps. Pour la première fois de sa vie il fut parfaitement éveillé, parfaitement conscient. Ses sentiments en lambeaux renaissaient comme des plantes au soleil après un long hiver. Il s'était trompé. Il avait cru avant ce jour qu'il était amoureux. Mais ça ! Ça c'était vraiment être amoureux.
« Bravo ! » Son père applaudit bruyamment quand ils eurent fini. Stupéfait, Jim le rejoignit quelques secondes plus tard, mais il pouvait dire au regard du grand sourire d'Irène qu'elle comprenait.
« Tu es vraiment très douée », lui dit-il quand Sherlock recommença à jouer, cette fois-ci pour John, qui rit à une blague qu'eux deux seuls comprenaient.
« Merci. » Elle replaça une mèche de cheveux derrière son oreille comme si elle était soudainement gênée.
Ils se fixèrent, le rouge leur montant aux joues, quand la sonnette retentit. Mme. Adler attendit avec une expression affligée pendant qu'Irène remettait ses chaussures et rassembla ses affaires.
« J'ai passé une bonne journée », dit Irène doucement, capturant la main de Jim et la serrant légèrement.
« Ouais, moi aussi. »
Puis elle disparut et Jim mit ses mains sur son cœur et se laissa tomber de manière dramatique sur le canapé. Son père et Sherlock rirent et il les rejoignit, même s'il était mortellement sérieux au fond de lui. Il décida qu'il comprenait ce qu'était l'amour. C'était assez simple quand on rencontrait la bonne personne.
A mercredi prochain pour le chapitre 2. Si si, vraiment !
