Qui on est ?
A vrai dire, j'en sais rien. Il n'existe que très peu de certitude dans ma vie. Et là, en ce jour, ou plutôt en cette nuit, nous sommes seuls.
N'est ce pas cela qui compte plus que le reste ? La solitude de l'âme ? Du corps et de l'esprit ?
Deux âmes brisées qui se déchirent doucement, presque avec délectation. Et c'est cela qui nous fais vivre. N'est ce pas Scorpius ? Et ça, tu l'as su bien avant moi. J'aurais pu ouvrir les yeux. J'aurais du. Mais je crois qu'au fond de moi, je voulais rester une enfant. Ne pas grandir tout de suite. Ça aussi, tu l'as compris avant que je ne le sache moi-même.
Tu vois, en cette nuit, assise la où je suis, sur la rambarde de la tour d'astronomie, j'ai l'impression que la vie vaut pas grand-chose. Après tout, si je le voulais, je pourrais me laisser tomber dans le vide. Seulement, je crois que je n'en ai pas le courage. Gryffondor… Tu parles. Qu'est ce que je fous ici ? Ah ! Oui… Mes cheveux roux. Et toi Scorpius. Qu'est ce que tu fous là-bas ? Ah ! Oui… Tes cheveux blonds… Mais ça se résume pas qu'à une histoire capillaire, je présume ?
C'est marrant, comme on se rend compte que la vie nous est dictée. Est-ce que t'as déjà fait un choix par toi-même ? Non ? C'est bien ce que je pensais. Je pense que personne n'a fait un choix pour sa propre vie. Mais tout le monde a dicté la vie d'un autre. Toi, tu dictes la vie du premier année, à qui tu fais peur. Tu le forces à faire le choix d'avoir peur de toi. Et tu ne t'en rends même pas compte. Mais j'ai rien à dire. J'dois faire pareil. En fait, notre vie, pour nous elle représente pas grand-chose. Ce ne sont que des jours qui s'enfilent comme les perles d'un collier. C'est long, insipide, et chiant. Et puis il y a d'autres vies qui sont compliquées. Comme des colliers à plusieurs rangées. Mais ça fait toujours chier. Et puis à la fin, c'est beau. Mais tu t'es tellement emmerdé à le faire, que ça veux plus rien dire. Et puis, ils y en a qui décident de voir le bon coté. Mais ceux-là je ne les comprends pas. En fait, je pense qu'ils ferment les yeux plus qu'autre chose. Moi ? Pessimiste et défaitiste ? Ouais. Tu dois avoir raison. Mais j'en ai rien à foutre. J'ai pas choisi, en fin de compte. Si on résonne comme ça, c'est pas ma faute. Et c'est pas non plus la tienne. Alors pourquoi je t'en veux ? Je devrais en vouloir à ton père, au mien. A ta mère, à la mienne. A la guerre, à ceux d'avant. Pourtant, c'est à toi que j'ai envie de foutre une baffe. Mais toi, en fin de compte, t'es la victime. T'es comme moi. Toi, t'as juste reçu la lettre. Comme moi. Sauf que moi, tu vois, la lettre je l'ai déchiré et j'ai choisi de dire aux autres d'aller se faire foutre. Parce que par rapport à toi, les autres, c'était pas grand-chose. C'était mon père, ma mère, mon oncle, ma tante, mes cousins, mes cousines, mon frère. Ma famille. C'était tout. Mais toi, t'étais plus. Toi, Scorpius, t'étais mon bonheur et ma liberté. Et t'as tout gâché. Je crois que c'est pour ça que je t'en veux. Pour la première fois que tu pouvais faire un choix, t'as fait le mauvais. Et j'y peux quoi ? Rien. T'as tout compris. Je crois que finalement, j'vais sauter. C'est plus du courage maintenant, qu'il me faut, c'était juste une claque que je viens d'avoir. Tu ne m'aimais pas vraiment. Ca me suffit. On se retrouvera plus tard Scorp'. Au ciel. Ou peut-être en enfer. Je sais pas. Pour l'instant, la seule certitude, c'est que ce putain de sort d'anti-suicide m'empêche de m'écraser en bas. Je fais quoi maintenant ? Je prends la main que tu me tends par-dessus la barrière et je te fusille du regard pour que tu enlèves ce sourire narquois qui te va si bien.
Finalement, peut-être que tu m'aimais un peu plus que ça pour réussir à comprendre mon choix.
J'ai une deuxième certitude. On finira notre vie ensemble quoi que disent les autres.
