"How can it be that we can
Say so much without words?"

MadnessIt Must Be Love


Izuru huma l'air nocturne en fermant momentanément les yeux, laissant son esprit se perdre pour ce qui semblait être la millième fois de la journée.

Laisser son esprit se perdre, quelle ironie. Ça ne lui ressemblait pas d'être aussi pensif. Enfin, au fond, qu'est-ce qui lui ressemblait ? Lui même ne savait plus.

"J'ai besoin d'air." avait-il lâché plus tôt en direction de Junko alors que ses pieds l'emmenaient sur la terrasse du chalet.

Celle-ci l'avait fixé pendant quelques secondes, une pointe d'étonnement dans les yeux, avant de se reconcentrer sur sa manucure comme si de rien n'était.

Accoudé contre la rambarde de bois, Izuru poussa un soupir las.

C'était plus une expiration fatiguée par le nez, mais certes.

— Qu'est-ce que tu fiches ?

Junko s'avança lentement jusqu'à lui et s'accouda de la même manière, ses orbes bleus reflétant une préoccupation qu'elle n'admettrait probablement jamais.

— Je réfléchis, répondit-il catégoriquement sans croiser son regard.

Un rire clair s'échappa des lèvres de la blonde, avant que celle-ci n'appuie paresseusement son menton sur sa main.

— Toi, réfléchir ?

Le sourire fier que portait Junko ne fit qu'irriter un peu plus les nerds d'Izuru qui se retint de rouler des yeux et de l'envoyer par-dessus la palissade.

Depuis quand celui-ci peinait-il à maitriser ses émotions ? Lui qui portait continuellement un masque si froid et passif serrait maintenant la mâchoire dans un geste de colère et de frustration.

Une rareté qui n'échappa point à l'oeil aiguisé de Junko, dont le sourire s'effaça comme un dessin dans le sable après le passage des vagues.

— Mais dis-moi tu... tu fais la gueule où... ? bredouilla-t-elle en se redressant légèrement.

Pour la première fois depuis qu'elle l'avait rejoint, Izuru posa son regard transperçant sur Junko, les sourcils froncés.

— Si je suis contrarié ? lâcha-t-il la voix tremblante. Peut être bien que je le suis, oui.

Izuru ne laissa pas le temps à Junko de lui fournir une réponse et fit volte face en direction de la baie-vitrée.

Ses facultés intellectuelles semblaient avoir disparu alors qu'il tentait de réfléchir au meilleur moyen d'ignorer les cinq dernières minutes qui venaient de s'écouler.

"Craquer", c'était un peu ce qui venait de se passer, non ?

Se laisser aller et faire preuve de vulnérabilité ne rimait pas avec Izuru Kamukura. Comment avait-il pu agir ainsi ? Qu'est-ce qui l'avait poussé à faire déborder le vase de ses émotions, lui d'habitude si vide ?

Ce type de comportement contrastait violemment avec son habituel masque antipathique.

C'était risible, il était risible.

Oui, tout à fait. Il était sûr que ce n'était qu'une question de temps avant que Junko n'éclate d'un rire moqueur qui durerait le reste de la nuit. Que son regard soit à jamais teinté d'un éclat de pitié et de mépris en le regardant.

Il était sûr que—

— Izuru.

À l'appel de son nom, les pensées d'Izuru se stoppèrent net dans leur élan, et lui avec.

Une main manucurée agrippa la sienne avant que des bras ainsi qu'un corps ne s'enroulent autour de sa taille. Le contact et la chaleur humaine lui firent étrangement du bien en cette température estivale.

L'odeur familière de Junko l'enveloppa d'un calme apaisant.

— Savoures ce moment parce que les câlins me sont aussi étrangers que les émotions le sont pour toi, souffla-t-elle en frottant légèrement son visage dans sa nuque.

L'action fit frémir Izuru qui ferma à nouveau les yeux, cette fois plus serein qu'auparavant.