1. Annonce et rencontre
- Un enfant !
Drago Malefoy se raidit contre le dossier du confortable fauteuil de cuir où il était assis, comme s'il espérait qu'il allait l'engloutir.
- Tu me dis qu'il faut que j'aie un enfant ? reprit-il affolé.
Calmement, le Médicomage Hermione Weasley croisa les bras sur son bureau en acajou.
- Cela ne fait pas partie de tes projets d'avenir ?
- Si, bien sûr, mais…
- Dans ce cas, il n'y a pas de problème… Et mieux vaut que ce soit le plus vite possible. Sans cela, je crains que tu ne doives renoncer à tes pouvoirs.
Bouche bée, Drago demeura muet, atterré à l'idée qu'une implacable horloge biologique fonctionnait à son insu et que tel un coup de tonnerre, le compte à rebours venait de se mettre en marche. Machinalement, il regarda par la fenêtre et reprit conscience de l'orage qui s'abattait sur Londres. Cela le rassura un peu. Oui, il avait réellement entendu un coup de tonnerre. Non, il n'était pas fou. Seul le choc de la nouvelle qu'il venait d'apprendre avait pu lui faire oublier les trombes d'eau déversées par les nuages noirs qui l'avaient trempé de la tête aux pieds quelques instant plus tôt.
Hermione sachant combien Drago était soucieux au sujet des analyses qu'elle lui avait ordonnées quelque jour auparavant avait accepté de le recevoir malgré l'heure tardive.
- Ton état n'ira pas en s'améliorant, Drago. Au contraire.
Cette franchise était l'une des qualités que le jeune homme appréciait chez son médicomage à peine plus âgée que lui mais mariée et déjà mère de trois enfants. Une petite lueur d'espoir subsistait encore cependant…
- Tu ne peux pas me prescrire des potions ou un sort ? Tu comprends, je m'attendais à ce que tu me donne un remède pas un ultimatum.
- Bien sûr, tu suivras un traitement. Il supprimera la douleur et les fluctuations de ta magie mais je ne garantis rien d'autre. Dans ton cas le meilleur des remèdes, c'est la grossesse. Penses-y sérieusement. Tu auras l'héritier que tu souhaites et ton problème de perte de magie serait réglé par la même occasion.
- Voilà une ordonnance plus facile à dicter qu'à exécuter ! protesta Drago. Je ne suis pas marié et je n'ai même pas de petit ami en ce moment.
- Personne en vue ?
- Non, répondit le jeune homme en secouant la tête tristement.
- Dans ce cas, il y a toujours la potion de grossesse…
Drago sursauta.
- Mais chaque essai coute très cher ! Et puis…je vois d'ici la réaction de mes parents si jamais je leur annonçais que j'attends un enfant sans être marié ! Dans leur fureur, ils seraient capables de faire exploser tous chaudrons à leur porté pour sauver l'honneur de la famille… Tu t'en rends compte ?
Hermione eut un sourire amusé.
- Voilà qui te laisse face à une grave décision…
« A mon ami et associé Harry James Potter, je lègue ma maison de Londres, mes propriétés du Devonshire et de France ainsi que mon domaine la 'Casa Sul Mare' et tous les bénéfices de mes investissements actuels… »
Les mots prononcés par le notaire atteignirent Harry en plein cœur. Ainsi, c'était lui le nouveau propriétaire de la 'Casa Sul Mare' ! L'homme de loi continua son ronron mais Harry n'écoutait plus, la suite du testament étant la réplique exacte du sien. En un instant, sa fortune venait de doubler mais cela ne l'intéressait pas. Non, ce qui le plongeait dans une émotion extrême, c'est que Blaise lui avait légué sa propriété de famille à laquelle il tenait plus que tout au monde.
Ses yeux se portèrent vers la fenêtre de ce sixième étage comme si à travers la pluie qui inondait Londres à cette heure tardive, il voulait essayer d'apercevoir le domaine situé pourtant à des milliers de kilomètres de là. Et en fait il le voyait… Aussi bien que si vigne et bâtiments s'étendaient juste au bas de l'immeuble.
La Casa Sul Mare, cinq générations de Zabini y avait été élevé jusqu'à la mort de la grand-mère de Blaise deux ans plus tôt. Blaise avait voulu réhabilité le nom des Zabini mis à mal par sa mère et l'affiliation de son nom aux mangemorts avant de reprendre le domaine. A l'évocation de ces souvenirs, Harry passa une main dans ses cheveux et soupira. «Rupture d'anévrisme »avait dit le médicomage. A quoi bon être un sorcier si on pouvait mourir des mêmes affections qu'un simple moldu ? Une fois de plus Blaise était parti avec sa dernière conquête pour un de ses weekends fou dont il avait le secret. Il avait dû faire la fête, une fête effrénée, jusqu'à ce que mort s'ensuive…sans avertissement. Sans lui laisser la moindre chance de mettre un peu d'ordre dans sa vie. Sans lui accorder le temps de fonder la famille qui aurait permis à la Casa Sul Mare de rester au nom des Zabini.
Harry devait préparer les obsèques. La liste assez courte ne contenait que des amis et leur famille mais Harry était prêt à parier que les vautours ne se gêneraient pas pour venir se repaitre. Un violent coup de tonnerre éclata peu après qu'un éclair fulgurant eut zébré le ciel. Blaise et lui avaient été si occupé à reconstruire ce monde d'après-guerre, à réparer les injustices, qu'ils avaient complètement oublié ce pourquoi ils s'étaient lancé dans les affaires. Sans en avoir véritablement conscience, ils étaient devenus très puissants dans le monde magique alors que leur but premier était de donner un monde plus sûr à leur famille. Famille qu'il n'avait jamais pris le temps de fonder.
Drago appela l'ascenseur et appuya son front douloureux contre le mur de marbre. Le bâtiment ou Hermione avait son cabinet était luxueux car il abritait des corps de métiers nobles. Avocats, notaires, médecins, étaient les seuls qui pouvaient s'offrir des locaux pareils. Il était si tard qu'il était certainement seul dans l'immeuble. Tout le monde était déjà rentré chez soi à cette heure-ci. En tout cas, il n'y avait personne au troisième étage…
Quelle journée horrible ! Epouvantable… D'abord sa magie qui devient tellement faible qu'il n'avait pu transplaner, se retrouvant obligé de marcher sous la pluie. Puis la sentence qui venait de s'abattre sur lui. Quel choc !
Bien sûr, il souhaitait avoir un enfant. De tout son cœur. Si seulement la vie s'était déroulée selon ses plans… A l'heure actuelle, il aurait hérité des entreprises et biens Malefoy et Black, vivrait avec le mari de ses rêves et aurait deux adorables bambins, puisque c'était le programme qu'il s'était fixé pour ses trente ans. Or, il allait en avoir vingt-huit et la guerre était passée par là. Le dépouillant lui et sa famille de leur bien les laissant avec juste de quoi vivre, leur plus petite propriété pour ses parents, un cottage dans le Sussex, et l'héritage de sa mère. Tout le reste avait été saisit et utilisé pour réparer ce monde d'après-guerre et pour panser les plaies de ceux qui avait tout perdu.
L'ancien Drago aurait été dégouté de voir sa fortune distribué au sang de bourbe et au traitre à leur sang, mais Drago avait vécu la guerre. Il avait subi la présence du plus grand mage noir sous son toit pendant près de deux années. Il avait connu les doloris et les cachots après son échec à la fin de sa sixième année. Il avait connu la peur et l'angoisse de ne pas voir le lendemain, de ne plus pouvoir serrer sa mère contre lui, de ne plus jamais croiser cet éclair de fierté dans les yeux de son père. Oui, l'ancien Drago Lucius Malefoy était mort pendant la guerre.
Le nouveau Drago ne voulait pas de ce manoir remplit de cri et de fantôme. Il ne voulait pas de cet argent sali par les malversations d'un gouvernement pourri jusqu'à la moelle. Le nouveau Drago voulait juste pouvoir aller travailler le matin et rentrer le soir chez lui dans la chaleur d'un foyer où un mari et des enfants aimants l'attendaient. Il voulait être reconnu pour son labeur et non pour son nom. Il voulait être aimé pour lui pas pour ces galions. La guerre lui avait apporté cette chance et voilà que maintenant il pouvait tout perdre. Sans sa magie, il n'était qu'un cracmol. Et même dans ce monde plus juste, les cracmols avaient de réelles difficultés à s'intégrer, à trouver du travail…
Drago aimait son travail actuel, il avait toujours aimé les chiffres. Les affaires étaient dans le sang chez les Malefoy. Avant la guerre et la disgrâce, il aurait pu travailler dans un grand cabinet mais il avait découvert qu'il aimait travailler à échelle humaine, d'avoir pour client des gens de chairs et d'os plutôt que d'anonymes sociétés. Ses camarades de travail l'avaient accepté pour ce qu'il était et non rejeté à cause de son nom ou de son passé. L'ambiance y était détendue et bonne enfant. S'il avait envie d'aller travailler en jean, cela ne posait aucun problème. Combien de comptables dans une grande entreprise pouvaient en dire autant ?
Il y avait une ombre au tableau cependant. Il ne gagnait pas beaucoup d'argent. Jusqu'à présent cela ne l'avait jamais contrarié. Il avait assez pour vivre bien mais maintenant ! Comment réussirait-il à économiser suffisamment pour avoir recours à la potion de grossesse ?
Un coup de tonnerre plus fort que les autres, le sorti de ses sombre pensées. Une voix annonça l'arrivée de l'ascenseur. Sur sa lancée, Drago continua à faire le bilan de sa vie. D'accord, sa façon de travailler lui avait donné bien des satisfactions jusqu'à aujourd'hui mais il fallait que cela change. Complètement, totalement, absolument.
Il n'avait pas le choix s'il voulait rester dans le monde magique. La proposition d'Hermione l'avait un peu choqué au premier abord mais y avait-il une autre possibilité ? Non. A moins d'épouser un de ceux que ces parents lui présentaient régulièrement et qui courrait après son titre maintenant que le nom des Malefoy n'était plus vraiment en disgrâce. Or, de cela, il n'était pas question !
Quant à la perspective de descendre dans une boite pour repérer un homme avec qui il ne passerait qu'une nuit sans lendemain, merci bien ! Il n'avait jamais rencontré quelqu'un avec qui il avait envie d'aller aussi loin et le moment était mal choisi pour se jeter dans les bras du premier venu.
D'autre part, renoncer au monde magique était impossible. Il aimait la magie, il avait grandi entouré de magie. Même s'il connaissait un peu mieux le monde moldu, il ne voulait pas vivre là-bas. Sa place était dans le monde magique. Ses amis étaient dans le monde magique.
Donc, puisqu'il était encore temps, il fallait qu'il s'emploie à être enceint, par tous les moyens possibles. Tous. Le bébé-potion paraissait bien être la moins mauvaise solution. Tant pis pour ce que ces parents diraient, avec leurs préjugés ridicules et leurs idées d'un autre temps. Drago haussa les épaules, l'enjeu était trop important pour qu'il prenne en considération des paramètres aussi obsolètes !
En fait, le seul problème réel était l'argent. Il n'avait pas la première noise nécessaire pour la potion. Dès demain, il fallait donc qu'il se mette en quête d'un poste bien payé qui lui permettrait en six mois de faire assez d'économies pour effectuer une première tentative. Car il était de notoriété publique que sans la magie d'un deuxième père l'échec était souvent de mise.
L'idée de quitter son travail le contrariait beaucoup mais c'était une condition incontournable. La gravité de la situation ne lui permettait pas d'états d'âme. Avec une sonnerie métallique, l'ascenseur s'arrêta et Drago s'avança pour y pénétrer. Lorsque les portes s'ouvrirent, ses yeux s'écarquillèrent de surprise en voyant qui se trouvait à l'intérieur.
- Potter, le salua-t-il.
Harry releva les yeux sur un Drago Malefoy aux cheveux collés sur le front et la nuque, une robe de sorcier dégoulinante de pluie ouverte sur un jean et une chemise dans le même état.
- Bonsoir Drago, répondit-il. Tu descends ?
Drago hocha la tête et alla s'appuyer au fond de la cabine. Cela faisait un moment qu'il n'avait pas vu Harry en personne. Environs six ans. Il avait de ces nouvelles par Blaise qui était son associé dans leur cabinet d'avocats-comptables ou par Ginny qui avait épousé Théodore Nott. En fait, lui et Potter avait le même cercle d'ami mais ne se voyait jamais. Il détailla l'homme qu'était devenu le Survivant. Sa carrure n'avait plus rien à voir avec l'adolescent qu'il avait connu et son aura semblait remplir tout l'espace de la cabine. Potter se tourna vers lui et Drago pu voir la tristesse et la lassitude sur son visage.
- Zone de transplanage ? demanda-t-il.
- Euh… Non, le hall d'entrée, s'il te plait. Comment va Blaise ? Cela fait un moment que je ne l'ai pas vu ?
Harry se tendit et prit une grande inspiration tout en appuyant sur le bouton du hall. Il se tourna vers Drago et lâcha d'une traite.
- Blaise est mort hier soir. Une poche de sang qui a éclaté dans son cerveau. Il est mort sur le coup, il n'a pas souffert.
Blaise était mort. L'information arriva doucement au cerveau mis à mal de Drago. Le chagrin monta brusquement. Son meilleur ami était mort et Potter lui annonçait ça comme ça. S'en était trop. Tout à coup, sans prévenir, il explosa.
- Espèce de veracrasse pas fini ! Mon ami est mort et tu m'annonce ça comme ça, sans complaisance, sans aucune once de douceur ! Tu es exactement comme mes parents ! Insensible, dépourvu de sentiments ! A cause de vous, je vais devoir quitter ce monde, renoncer à tous ce que j'ai toujours connus et me retrouver entouré de moldus ! Un pauvre cracmol sans famille ! Mais qu'est-ce que ça peut bien te faire, hein ? Le grand Harry Potter, reconnu et adulé par tout le monde sorcier et riche comme crésus…
- Mais qu'est-ce que tu racontes ?
Drago ne criait pas mais il parlait très vite, d'une voix hachée, basse, pleine de colère rentrée. Il n'y avait pas de doute, pensa Harry, il disait n'importe quoi. Ses nerfs avaient craqué. Il comprenait la douleur de Drago pour expérimenter la même mais il n'avait jamais vu le blond dans cet état. L'annonce de la mort de Blaise ne pouvait être seule responsable. Restait à savoir ce qu'il y avait d'autre. Mais pour l'instant, mieux valait le laissé vider son sac.
- Oui, continuait-il, en perdant de plus en plus le contrôle de lui-même. Ça t'es bien égal que je n'arrive plus à transplaner, que j'ai été trempé de la tête au pied et que je n'ai pas réussi à lancer ne serait-ce qu'un petit sort de séchage ! Un putain de sort de séchage ! Et bientôt, je n'aurais plus de magie ! Alors qu'il me faut ma magie pour travailler ! Sans travail jamais je ne pourrais être enceint ! Il me faut des milliers de gallions, sans cela, adieu la magie.
- Drago…
- Essaye donc de vivre sans magie !
- Mais…
- Et mes parents ? Ça t'est bien égal qu'il essaie dix fois par jour de me marier à quelque coureur de nom de leurs amis !
Un hoquet violent lui coupa le souffle, l'empêchant de continuer. Puis un frisson le secoua des pieds à la tête, il cligna des yeux comme s'il revenait à la réalité. Alors, il sortit de sa transe et complètement horrifié dévisagea son interlocuteur.
Harry ne comprit pas pourquoi cette crise s'arrêtait soudain, pas plus d'ailleurs qu'il n'avait compris pourquoi elle avait commencé… Toujours est-il qu'il se trouvait coincé dans un ascenseur avec un Drago Malefoy qui à cet instant n'avait plus rien du Drago Malefoy qu'il connaissait.
- Je suis désolé. Vraiment désolé. Jamais, je n'ai à ce point perdu le contrôle de moi-même. C'est que … Je… J'ai eu une journée abominable. Et Blaise… Mais tu n'y es pour rien alors, Potter, accepte mes excuses.
Harry dévisagea son voisin avec stupéfaction. Drago Malefoy s'excusait ? C'était bien ma première fois qu'il le voyait s'excuser !
- Je prends bonne note de tes excuses, déclara-t-il en s'appuyant contre la cloison face à Drago.
Harry ressentit alors une curiosité inattendue pour le jeune homme qui paraissait si triste et si décourager malgré sa silhouette sportive et dynamique. Il entreprit de l'examiner avec plus d'attention. Drago n'avait pas beaucoup changé depuis la fin de leurs études. Il avait un peu grandit et sa carrure était légèrement plus large mais ses cheveux, plus long qu'à Poudlard, était toujours de ce blond presque blanc, son visage était toujours parfait. Il paraissait plus pale qu'à l'accoutumée et serrait fortement ses lèvres pulpeuses l'une contre l'autre. Qu'avait-il pu bien lui arriver ?
- Tu m'as traité de veracrasse n'est-ce pas… et après ?
- Veracrasse pas fini… Heu… C'est ainsi que j'insulte mentalement mes parents et amis. Excuse-moi, tu m'as fait penser à eux !
- Ce n'est pas grave.
- En temps ordinaire je suis quelqu'un de calme et de posé.
Mais il ne l'écoutait plus. Brusquement, il lança :
- Blaise est mort…
Le visage de Drago se teinta d'une tristesse intense et il regretta aussitôt sa brutalité. D'autant plus amèrement qu'il en souffrait aussi. Son ami, son associé était mort, bel et bien mort, il venait de se le rappeler par la même occasion. Mentalement, il s'efforça de s'envelopper dans la carapace d'indifférence qu'il s'était forgé au cours des ans, mais dans le moment, elle ne paraissait pas très efficace. Drago avait l'air si ému qu'il se sentit obligé de donner un peu plus de détails.
- Il est mort à Aspen hier soir.
- Un accident de ski ?
- Pas du tout. Une rupture d'anévrisme, une poche de sang dans le cerveau. Il s'est levé au milieu de la nuit et est tombe raide mort à côté de son lit.
- Je suis vraiment désolé Potter. Je sais que vous étiez proche.
Ces mots Harry les avaient entendus maintes et maintes fois depuis trois heures ce matin. Mais pour la première fois, ils le touchaient. La détresse du blond, si sincère, touchait chez lui une corde que personne d'autre n'avait réussi à faire vibrer. Bizarrement, ce sentiment le réconforta. En face de lui Drago frissonna. Harry sortit sa baguette et arrêta son geste lorsque Drago se plaqua contre la paroi.
- Puis-je te lancer un sort de séchage ? demanda doucement Harry surprit par la réaction du blond.
Drago hocha la tête. Harry le sécha et rangeait sa baguette au moment où une voix féminine annonçait le hall. Drago se décolla de la cabine et s'avança vers la porte. Il avait encore froid même s'il n'était plus mouillé et frissonna. La porte s'ouvrit avec un bruit métallique et il sortit suivi d'Harry. Drago se dirigea vers les cheminées.
- L'enterrement aura lieu demain à quinze heures, lança Harry.
Drago se retourna et le visage torturé d'Harry le choqua. Il semblait totalement perdu et triste.
- Je ne sais même pas comment organiser des obsèques dignes de lui. Je n'ai qu'une liste de personnes. Il n'a rien laissé pas de directive, rien.
- Blaise te faisait confiance, dit Drago en se rapprochant. S'il ne ta pas donné de directive, c'est qu'il te fait confiance.
Harry hocha la tête mais son regard vert était éteint. Drago ne l'avait jamais vu comme ça même au plus dur de la guerre.
- Je connais bien les coutumes sorcière et notamment celles des sangs purs. Je peux t'aider si tu veux ?
Harry chercha le piège mais le visage de Drago était sincère. Il sourit et acquiesça.
- Je t'en serai reconnaissant Drago.
- Bien ou à lieu la cérémonie ?
- Heu je ne sais pas encore. Je pensais à sa propriété de Kingsbridge. Sa mère et son père sont enterré là-bas.
- Je ne pense pas que Blaise soit en paix prés de sa mère, fit remarquer le blond.
- Il y a bien le domaine d'Italie…
- Celui de sa grand-mère ? Il adorait cet endroit. Il m'y a emmené une fois pendant les vacances de troisième année. C'est un endroit merveilleux. Blaise adorerait être là-bas.
- Mais c'est en Italie ! Comment feront les invités pour assister à l'enterrement ?
- Qu'elle heure est-il ?
- Vingt heure trente-cinq, pourquoi ?
- Le service des voyages et transport magique ne ferme qu'a onze heure. Tu vas y aller et demander… combien de personne il y a-t-il sur sa liste ?
- Une trentaine.
- Donc tu vas y aller et demander une trentaine de portoloin pour le domaine en Italie ensuite tu vas à la gazette pour mettre un encart dans la rubrique nécrologique et enfin tu vas au 'Hibou rapide' pour envoyer les invitations. Voilà, je te laisse. A demain Potter.
- Attends Drago !
- Viens avec moi s'il te plait, demanda Harry.
Drago frissonna, il mourrait de froid mais il ne pouvait pas laisser Harry seul alors qu'il avait l'air si déboussolé. Un autre frisson le tira de ses réflexions. Plus vite il l'aiderait, plus vite il pourrait rentrer prendre un bon bain chaud. Une odeur musquée l'envahi soudain, en même temps qu'une douce chaleur. Il releva la tête pour voir Harry refermer son manteau sur lui.
- Tu as froid, dit-il pour se justifier.
- Merci, murmura Drago.
- Allons-y.
Ils se dirigèrent vers les cheminées et disparurent dans des flammes vertes. Harry suivit Drago dans plusieurs services du ministère vide à cette heure avancée puis à la Gazette du Sorcier. Quand ils en sortirent, il était dix heures passé. Drago avait faim et était fatigué.
- Voilà Potter, dit-il en passant une main lasse dans ses cheveux. Tout est fait. Il ne reste plus qu'à préparer la maison et trouver un mage pour la cérémonie.
- Merci beaucoup Drago, pour tout. Je n'y serai pas arrivé sans toi.
- Je t'en prie. Je l'ai fait aussi pour Blaise.
- Je t'accompagne aux cheminées… Tu habites Londres ?
- Oui, j'habite la périphérie Londres mais je n'ai pas de cheminée. J'habite du côté moldu.
- En zone de transplanage, alors.
- Non, Harry. Je te remercie, je vais marcher, dit Drago avant de s'éloigner.
- Drago, attends, s'écria Harry en le retenant par le bras. Je… Heu… Ce que tu as dit dans l'ascenseur. C'est vrai ?
- De quoi tu parles ? demanda Drago en libérant son bras.
- De ta magie.
- Je t'ai parlé de ça, s'étonna Drago.
- Je vais te raccompagner.
- Non, ne te dérange pas. Je vais marcher ou mieux prendre le magicobus.
- Pas question !
Aussitôt Drago releva le menton, d'une manière qu'au cours des années Harry avait appris à interpréter. Il allait certainement lui dire quelque chose de désagréable…Autant éviter cela ! Il désigna donc l'extérieur d'un geste du menton et ajouta :
- Il pleut encore très fort. Un gentleman n'abandonne pas un jeune homme par un temps pareil !
Drago leva le menton un peu plus haut avant de répondre d'un ton acide :
- Je n'ai nul besoin d'un chevalier servant. J'ai deux bras, deux jambes et un cerveau, exactement comme toi, compris ?
Cette insolence le fit sourire, ce qui irrita Drago au plus haut point, mais le réjouit beaucoup. Comme il s'amusait ! Drago n'avait cure de le mettre en colère… A vrai dire, il le traitait exactement comme n'importe qui. Ou plutôt comme quelqu'un qui ne serait pas à la tête d'une fortune colossale et qu'on ménageait afin de s'assurer ses bonnes grâces. Bref, il avait le comportement spontané que plus personnes n'osait avoir avec lui. Harry eut soudain une conscience aigüe de l'hypocrisie au milieu de laquelle il évoluait, comme si elle était devenue son élément naturel.
- Ecoute… Je te raccompagne parce que je peux transplaner et toi non. Point final !
- Et moi, je suis sûr que tu veux jouer au protecteur de service . Apprends que ça fait neuf ans que je me débrouille seul et la grande méchante chimère ne m'a pas encore mangé !
Pendant qu'il parlait, Harry les avait de nouveau amenés à la zone de transplanage.
- Viens avec moi. Personne ne doit se promener seul dans Londres la nuit. Même pas super-Drago.
Sur ce, il l'attrapa par le bras et Drago ne se dégagea pas soudain calmé.
- Excuse-moi. Je ne sais pas pourquoi je me comporte ainsi avec toi. On dirait que tu as un don spécial pour me mettre en colère. Exactement comme à Poudlard.
Harry sourit sans mot dire, assez amusé par cet aveux, mais peu désireux de le lui faire savoir. Il posa sa main sur la taille du jeune homme et lui demanda :
- Ton adresse s'il te plait.
- 301 Fitzroy Park.
Harry resserra sa prise sur les hanches de Drago et transplana. Ils atterrirent devant une petite maison blanche entourée d'arbre. Drago recula, se libérant de la prise du brun et s'avança vers le porche d'entrée. Il sortit ses clés et se retourna vers Harry.
- On se voit demain. Veux-tu que j'arrive un peu plus tôt pour t'aider ?
- Ce serait gentil.
- Ouais… Bonne nuit Potter.
Il enfila la clé dans la serrure, puis comme pris de remord, se retourna vers lui.
- Merci de m'avoir raccompagné.
Harry se pencha vers lui.
- Cela m'a fait plaisir.
Vite, il recula, puis ferma la porte. Il avait bien cru qu'il allait essayer de l'embrasser… Tout seul sous l'auvent, Harry passa sa langue sur ses lèvres. Qu'est-ce qu'il venait de se passer ? Il avait vraiment eu envie d'embrasser Drago.
