Ce matin-là, quand je me suis levée, j'ai eu un bizarre
frisson dans le dos. "Bon encore une journée synonyme d'enfer.
Ça va faire changement!" Dehors, il faisait chaud, on était
en Avril. L'humidité était forte, et n'importe quel imbécile aurait
deviné qu'il allait pleuvoir en fin de journée.
Enfin, à mon réveil, je suis allée m'habiller après avoir pris une douche
et je suis descendue comme chaque matin les trop nombreuses marches
qui me séparaient du rez-de-chaussée, et des enfers. En bas, ce qui
selon mon certificat de naissance était mes parents, et ma jeune soeur
étaient déjà autour de la table. Chacun absorbé par ses propres problèmes.
Pour Papa: la chute des actions. Pour Maman: Aucune idée, enfin elle
s'engueulait avec quelqu'un au téléphone. Et pour ma frangine: "Maman!
MAMAN! J'ai perdu mon mascara bleu! Je ne pourrai pas sortir de la maison
sans mon mascara! Et pis mon noir ne va pas du tout avec mes chaussures!
MAMAN! ÉCOUTE-MOI 2 SECONDES!" Beau portrait!
Moi, je me suis seulement sorti 2 tranches de pain et de la confiture,
pour mon déjeuner. Et des trucs pour me faire un dîner. (Pas que la
bouffe de la café ne soit pas mangeable, mais Brittany a annoncé un
menu "spécial cheerleader" aujourd'hui et je crains le pire).
Au passage, j'ai tout mis dans mon sac et je suis sortie sans prendre
la peine de saluer la famille.
En marchant vers le lycée, qui, selon un écrit de ma soeur, serait notre
prison où l'on tournerait comme des hamsters, je pensai un peu à moi.
Ouais, c'est ennuyant comme sujet, mais j'ai quand même réussi à me
remonter le moral: Aujourd'hui ne pouvait pas être pire qu'hier.
Ouais hier ma mère s'était remise à sa campagne familiale "Famille
UNIE". Oui, U.N.I.E. (Union des névrosés incroyablement énervants)
Alors, tout le monde (sauf Quinn qui avait un rancart) est allé à un
restaurant débile où mes parents se sont racontés de palpitantes aventures
de leur passé... Un lavage de cerveau quoi!
Après une dixaine de minute j'ai atteint mon premier but: Aller à l'école!
Maintenant il ne restait plus qu'à l'endurer... et d'envisager que je
devrais y retourner demain et cela pendant encore plusieurs années...
*soupir*
Donc, rendu à l'école, j'ai cherché Jane. Mais sans succès, elle n'était
nulle part. Elle avait encore pris un congé... J'ai décidé de l'appeller.
J'ai fait bouffer un 25¢ au téléphone public près du local de pasto
puis j'ai composé le numéro de Jane (que je ne divulguerai pas par respect
pour celle-ci) et on me répondit.
"Oui allo?
- Trent? Salut! Déjà levé! Mais il n'est que 8 heures!
- Ouais, qu'est-ce que tu veux, c'est la dure vie de musicien...
- Hum... En tout cas! Je peux parler à Jane?
- Ouais juste deux secondes, elle est couchée...
- Ouais, c'est ça la dure vie d'étudiant." J'ai entendu Trent crier
à travers le combiné. Puis Jane a répondu.
"Daria? Pourquoi tu m'appelles?
- Pour savoir si tu allais bien, tu sais comme je m'inquiète pour toi
quand tu ne m'appelles pas et que je ne te vois pas à l'école! Tu ne
devrais pas me faire ce genre de peur.
- Hum... Super je ne pensais pas avoir un garde du corps!
- Tu sais bien que je blague. Je voulais savoir si tu allais me remettre
mes 20$ aujourd'hui ou si j'allais avoir à attendre à demain.
- Je vais être là demain oui, mais sans ton 20$, désolée... J'ai vraiment
besoin d'un congé, alors... je suis malade."
Cette Jane! Capable de simuler un arrêt cardiaque pour ne pas devoir
venir à l'école!
"Tu as volontairement décidé d'avoir l'air malade pour ne pas
avoir à venir à l'école?
- Exactement génie!
- Alors, je vais éviter de parler à tous ceux qui pourraient me demander
où tu es.
- Sans excepter les professeurs. Et ne rapporte pas de devoirs non plus.
- Super, une chose de moins à faire.
- Ciao!
- Ouais, bye!"
*Soupir* La journée allait être longue! Je me suis dirigée vers ma case
pour prendre un livre puis j'ai attendu que la cloche sonne pour entrer
dans mon cours. J'avais histoire. Passionnant. Non! Mais notre prof
peut être marrant parfois. Ses victimes préférées: les idiots! Ils s'acharnent
sur eux. Dans le fond, c'est parce que ça le démoralise de voir notre
jeunesse aujourd'hui qui préfère mourir que de salir une paire de chaussures.
Hum... qui préfère que sa meilleure amie meurt plutôt que de salir une
paire de chaussures.
Puis ce fut un cours d'économie, avec Mme Benett. On n'a rien appris,
mais j'ai découvert que son schéma sur l'offre et la demande donnait
quelque chose de semblable à un troupeau de chevaaux blancs galopant
dans la prairie. Ou bien, c'est que j'hallucine des chevaux partout.
***
Voilà, c'est l'heure de dîner. Où allais-je manger?
Je me risque au spécial cheerleader de la cafétéria? Jamais de la
vie! Je fais un tour chez Jane? Ça prend à peine 10-15 minutes s'y
rendre, j'aurais le temps... Bah, je ferais peut-être mieux de ne
pas la déranger. Elle est probablement avec Tom... Brrr! Alors il
ne me restait plus qu'un choix: manger mon lunch à l'école.
Après cette discussion existencielle avec moi-même, je me suis rendu
au gymnase, où je me suis assise sur un banc dans les estrades et
j'ai sorti mon lunch que j'ai mangeé le plus rapidement possible.
Ouais! Je voulais quitter la place le plus rapidement possible parce
qu'un énorme match de basketball se disputait à ce moment-là. Et que
je ne voulais pas risquer ma vie (un accident est si vite arrivé avec
les sportifs) pour un simple dîner. Enfin bon, je crois que mes yeux
révélaient mes pensées, parce que tous ceux qui s'approchaient, en
me voyant, changeaient de côté en se "sauvant". C'est génial.
Après tout ça, je me suis rendu à la bibliothèque. D'après moi, c'est
l'endroit le plus confortable qui existe. Bon d'accord les chaises
sont dures et les néons éclairent mal, mais ça nous protège des idiots.
À l'exception de ceux qui se perdent loin de leur troupeau. À ce moment-là,
rien de plus simple que de les raccompagner à un endroit qu'ils connaissent
bien: les vestiaires. Et ils évitent ensuite, pour le reste de leur
vie, de remettre les pieds dans un lieu semblable.
J'ai donc fini un livre sur la psychologie animale. Je l'ai remis
à la bibliothécaire. Et j'ai commencé un autre bouquin. Jusqu'à ce
qu'on entende des cris de filles venant de la cafétéria. Je me suis
mise à sourire "Ouais, j'ai bien fait de pas goûter le spécial".
Puis on a entendu des bruits d'explosion. Des coups de fusils mitraillant
tout.
Ça a pris un bon moment avant qu'on n'entende plus rien. Et j'avais
toujours ce petit sourire collé au visage. "Ça y est. Ils les
ont tous tués, ils sont tous morts." Mon peu de sensibilité a
chassé cette pensée de mon esprit et je me suis sentie un peu honteuse
pour un moment. Apparemment, personne d'ici ne savait ce qui se passait.
Tout le monde était figé, silencieux. Jusqu'à ce que Kévin et Brittany
arrivent en courant, et qu'ils se cachent sous le comptoir de la bibliothécaire.
"Les tueurs vont débarquer ici maintenant qu'ils leur ont montré
le chemin. Cool!" Brittany avec sa voix aigüe et vingt fois plus
stressante que d'habitude nous avertis de nous cacher que "Des
aliéniés sont en train de tirer sur tout le monde, même les plus populaires
alors, je vous conseille tous de vous planquer parce que, parce que,
parceeee hiiii!" et se recache sous son comptoir.
Quelques secondes et tout le monde était rendu sous les tables. Bravo!
maintenant faut que je m'y mette moi aussi si je ne veux pas qu'on
me remarque au premier coup d'oeil. Pas que je ne veuille pas crever
noblement en me faisant tirer par un plus détraqué que moi, mais je
voulais voir de quoi ça aurait l'air à la fin du massacre. Lorsque
nous avons entendu des bruits de pas approcher, la plupart des gens
avait déjà cessé de respirer. (Les tueurs n'auraient pas tant de travail
à faire s'ils crevaient tous par manque d'oxygène!!) Ce qui me fit
réfléchir sur ceci : Les gens prennent la vie au sérieux, mais encore
plus la mort. C'est drole comme manière de penser.
La plupart des gens autour de moi tremblaient de peur
et/ou pleuraient. Ils (et elles surtout) "exprimaient à fond
leur sentiments" et "se montraient désireux de
les partager avec nous" Comme dirait un certain prof de
littérature dont le nom commence par O' et finit par Neill, pour ne
pas divulger son identité. Tant qu'à moi, j'attendais avec impatience
la suite des évènements.
Un garçon et une fille sont entrés dans la bibliothèque. Ils n'arboraient
pas les couleurs de l'équipe de football eux, ils étaient en imperméable
noir. Ils me faisaient un peu penser à un bon ami à moi: Dracula.
Et pis eux aussi faisaient saigner leurs victimes. j'ai souri un moment:
"Jane va me maudire de ne pas avoir pu être là. Et encore
plus si je ne lui rapporte pas un souvenir." Pour ce qui
est des deux tueurs, ils restaient plantés près de l'entrée de la
porte, à observer leur cibles. On entendait maintenant les bruits
et les grincements de pas de course des survivants des autres pièces,
qui se précipitaient vers la sortie.
Bien que je ne puisse m'en réjouir sans sentir de la honte, c'est
seulement pour le quart-arrière qu'ils étaient venus ici. Et, étant
donné sa cachette improvisée, ils n'ont pas eu de problème à le trouver.
Le garçon l'a aggrippé par un bras en lui parlant doucement, Kévin,
lui était affolé! Puis il l'a descendu d'une simple balle dans la
tête. (Mais où est le spectacle?)
Pendant ce temps, une fille avait "subtilement" essayé de
se sauver en se précipitant vers la porte. Mais la fille qui n'était
pas occupée avec Kevin, l'a attrappée. "Où crois-tu aller
comme ça?" La pauvre fille ne réussissait qu'à gémir quelques
incohérences, interrompues par la voix de l'autre. "Peu importe,
je crois que tu te trompais de chemin." Elle resta silencieuse
pendant un moment, puis tourna la tête vers sa proie et lui demanda
"Est-ce que tu crois en Dieu?"
Brook (c'était son nom) branla la tête positivement en ne lâchant
pas la fille de ses yeux globuleux. Ce qui lui vallut une balle dans
la tête. Mais je crois que si elle avait dit non, sa récompense aurait
été la même. À part qu'elle serait plus probablement allée en enfer
au lieu d'aller au paradis...
Puis, les deux malades mentaux se suicidèrent. Les résidents de la
ville n'auraient même pas pu les faire souffrir à leur tour.
Brittany est venue se coller sur son Kevin. Elle lui a donné un court
baiser en faisant bien attention de ne pas salir ses cheveux blonds
ou ses vêtements de sang. Puis elle s'est levée et a botté un des
corps inertes des tueurs. "Tiens mon salaud, tiens! tiens!
tiens! Ça t'apprendras à toucher à mon Kévin!" Et ses yeux
se sont attardés quelques secondes sur un des fusils. J'ai tout de
suite compris le sens de cet attardement. Alors je me suis approchée
d'elle tranquillement. Lorsque d'un coup elle a saisi le flingue et
qu'elle l'a pointé sur sa tempe, j'étais rendue derrière elle. Avec
le plus d'habileté que je pouvais démontrer, je le lui ai enlevé des
mains. Pendant ce temp,s deux autres personnes n'ayant pas été transformées
en zombis éloignèrent du bout des pieds les deux carabines restées
sur le parquet.
***
À l'extérieur de l'école, une foule de parents et
de chaînes médiatiques attendait la venue de nouveaux renseignements.
Les journalistes, assoiffés d'information, se bousculaient à la recherche
de jeunes filles prêtes à dire n'importe quelles niaiseries à la caméra,
du moment qu'elles soient en train de pleurer.
À mon plus grand désespoir, j'ai aperçu papa, maman et soeurette un
peu plus loin. Quinn pleurait toutes les larmes de son corps. Hélène
attendait le plus calmement possible en regardant sa montre à toutes
les trente secondes. Tant qu'à Jake, un policier avait du mal à le
retenir de ne pas courir dans l'école pour venir me secourir. Ils
attendaient mon retour. Premièrement, j'ai eu envie de partir sans
leur parler, pour faire monter l'angoisse qui les tenaillait. Deuxièmement,
je me suis mise à l'acte. J'irais chez Jane, et en rentrant plus tard
dans la journée, je les retrouverais les yeux rougis par les larmes.
Malheureusement, ma mère a eu le temps de m'apercevoir. Elle et Jake
ont couru jusqu'à moi pour m'embrasser, m'enlacer et me bombarder
de question sur mon état. Vous voyez le genre.
Quand les scènes de "famille UNIE" ont été finies, nous
sommes retournés à la maison. Quinn pleurait encore ses chaussures
qui avaient été affreusement tachées de sang. Puis elle pensait à
son mascara qui non seulement n'était pas de la bonne couleur mais
devait avoir tout coulé. Et alors, elle repartait à chialer de plus
belle. Longue, longue vie, pourquoi m'as-tu retenue à toi?
***
"J'arrive pas à croire que tu m'aies laissée
chez moi. Une vraie amie m'aurait empêchée de manquer une journée
d'école." dit Jane, vraiment consternée.
Les deux filles étaient dans la chambre de Jane. Daria
sur le lit, Jane près de son chevalet. Les bras croisés sur sa poitrine
tenant encore un pinceau taché de peinture, Jane avait
arrêté de peinturer, et s'était tournée vers Daria.
"Écoute, ça ne me fait pas plaisir de dire
ça, mais ça aurait pû être pire. Pire encore: une de nous deux aurait
pu crever.
- Je vois ce que tu veux dire: Mourir sans jamais avoir embrassé mon
frère.
- Pas du tout, je veux dire: Mourir. Mourir comme être morte. Je ne
veux pas être sentimentale mais je n'aurais pas-
- ...été capable de mourir sans avoir dit à Trent mes sentiments pour
lui.
- Non! "
Trent s'était arrêté près de la porte.
"J'ai entendu mon nom.
- C'est confidentiel frérot.
- Mon nom se retrouve dans vos discussions confidentielles! Je suis
flaté.
- On parlait de Daria qui...
- Aimerait bien rentrer chez elle après cette journée de fortes émotions.
- Très bien, alors, Trent va te raccompagner chez toi en voiture.
N'est-ce pas?
- Bien sûr, on part dans 10 minutes. D'accord Daria?
- Ouais, c'est ok."
Trent est parti vers sa chambre. J'ai remué mes lèvres en direction
de Jane. "Je te hais" et elle a répondu "Moi
aussi" en souriant. Quand Trent fut hors de portée, j'ai
donné à Jane une photo que j'avais pu prendre d'un des assassins.
"Tiens! Fais-en une peinture. C'est un bon modèle.
- Un cadavre! Ouah cool! Merci!
***
"Je suis hyper content que t'aies rien...
Je veux dire après ce massacre à ton école... Je sais pas ce que j'aurais
fait si tu avais été tuée toi aussi. Jane non plus s'en serait pas
remise.
- Ouais je suis chanceuse de n'avoir rien, j'imagine. Mais c'est trop
bête. Je suis peut-être aliénée, mais ce ne serait pas une raison
pour tirer sur tout le monde. Je fais comme si, mais Kévin et tous
ceux qui sont mort... ils vont me manquer même si, pour la plupart,
c'était des idiots de première.
- Jane a choisi le bon jour pour prendre congé.
- Pour ça je suis d'accord!
- Oups! Il commence à pleuvoir...
- *Sourire*
- T'as bien fait d'embarquer avec moi, sinon tu te serais fait tout
mouiller.
- Oui, merci pour la ballade"
-Daria
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