Nda : Bonjour à tous ! Me revoilà avec un two-shot sur mon couple fétiche.

C'est une idée que j'ai eu il y a quelques mois. Le début d'année plutôt déprimant, m'y a fait repenser et j'ai commencé à l'écrire. Une histoire très sombre qui reflète un peu mon ressenti face aux actualités de ces derniers mois même si l'histoire n'a pas vraiment de rapport. Bref, si vous êtes déjà déprimés, ne la lisez pas, c'est un conseil. ;)

Il y aura 2 chapitres à cette histoire.

Résumé : Dans une cellule, quelque part à Fiore, un jeune mage condamné vit ses dernières heures. En attendant son exécution, il se remémore sa vie et ce qui l'a conduit dans cette situation désespérée. Une feuille, un crayon, et les mots se couchent, dernier acte vivant avant l'inéluctable…

Disclaimer : Les personnages et l'univers de Fairy Tail ne m'appartiennent pas, tout est à Hiro Mashima.


« Voilà cinq semaines que j'habite avec cette pensée, toujours seul avec elle, toujours glacé de sa présence, toujours courbé sous son poids ! »

Victor Hugo – Dernier jour d'un condamné


Derniers mots

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Première partie

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An 793, Fiore.

Cela faisait deux ans maintenant que Tartaros, la guilde démoniaque des démons de Zeleph, avait été vaincue par les mages de Fairy Tail. Pourtant, le retour à la paix fut bref et une période de troubles traversa bientôt le royaume de Fiore, ne cessant de s'étendre depuis lors.

Malgré la victoire des guildes officielles, le royaume dut faire face à des dégâts considérables et l'on dénombra de nombreuses victimes innocentes, tombées de la main des démons. Cette tragédie avait fait naître chez les habitants, un sentiment de méfiance accrue envers les mages, qui s'étaient pourtant battus vaillamment pour les protéger, et ce pendant de nombreuses années. Faisant la confusion entre la magie qu'ils connaissaient depuis toujours, et la magie noire des démons responsables de ce désastre.

Depuis, les mages d'Earthland, autrefois adulés par la population, étaient désormais forcés de se cacher, pour éviter les arrestations abusives et les exécutions sommaires.

Traqués sans relâche, ils durent se résoudre à la fuite. Ceux de Fairy Tail les premiers subirent les conséquences de la folie des hommes. Leur guilde détruite peu de temps après sa reconstruction, les mages furent contraints à l'exil.

Dès lors, de nombreuses descentes dans les quartiers où s'étaient réfugiées les victimes de l'incursion, furent organisées dans tous les recoins de la ville. L'objectif proclamé de cette traque était d'arrêter les mages récalcitrants afin de parvenir à l'extinction complète de la magie et de tous ses représentants, comme l'on éradique une espèce animale.

Les femmes, accusées malgré elles d'incitation à la propagation de la magie dans le royaume – tels les réceptacles du plus contagieux des virus – furent les premières victimes de l'injuste hécatombe. On les traquait et les tuait sans la moindre pitié, tandis que les hommes étaient forcés de fuir pour protéger les enfants.

La population magique de Fiore s'amenuisa alors peu à peu, à tel point que certaines des guildes, autrefois les plus populaires, avaient perdu la totalité de leurs représentantes.

Cependant, les mages continuèrent malgré tout à lutter, en dépit de la disparition progressive de leurs proches, tués ou arrêtés par l'oppresseur. Ils résistaient en sacrifiant leur vie ou leur liberté, dans le seul but de pouvoir un jour vivre libre…

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Quelque part, loin de tout ce chaos, dans une prison étroitement gardée, un jeune homme vivait ses dernières heures. Victime comme bien d'autres avant lui, de cette peur irrationnelle qu'inspirait la magie et de tout ce qui y touchait de près ou de loin.

Peut-être était-ce dû à un manque de chance ou de prudence de sa part et du peu d'amis qui lui restait, mais ce jeune homme qui avait tant de fois échappé à la mort, n'en avait jamais été plus proche qu'à ce jour. Parmi son entourage, nul n'avait rien pu faire pour empêcher l'inévitable d'arriver.

Arrêté par les bataillons de chasse spécialisés dans la traque des mages fugitifs, il était depuis, retenu dans une prison de haute sécurité. Il n'était pas seul, il le savait mais il n'avait jamais croisé lors de ses rares sorties, que les mâtons lourdement armés. En y réfléchissant, s'il n'avait pas entendu régulièrement des gémissements plaintifs résonnant entre les murs et semblant venir des profondeurs de l'enfer, il aurait pu douter de la présence d'autres prisonniers, tant la solitude était pesante.

Peut-être la cellule à côté de la sienne abritait-elle celle d'un ancien allié ? Lui et ses compagnons avaient perdu la trace de nombre d'entre eux depuis des mois, sans savoir s'ils avaient été arrêtés ou tués, ou bien s'ils avaient réussi à fuir.

Le jeune homme se caressa machinalement le pectoral d'une main tremblante. Cette marque, en partie effacée sur sa peau boursoufflée, avait toujours été sa fierté. Aujourd'hui, il devait la porter comme on porte un fardeau. Elle faisait de lui un pestiféré aux yeux des autres hommes, ceux qui étaient nés « normaux » comme ils leur disaient avec mépris. Lui et les siens n'étaient plus considérés comme des humains mais comme des erreurs de la nature, des monstres.

Le prisonnier poussa un profond soupir. C'étaient ses dernières heures à vivre, hors de question pour lui de sombrer dans la mélancolie. Il ne devait avoir aucun regret. Partir en se disant qu'il avait fait de son mieux.

Debout contre le mur gris et froid, il se dirigea d'un pas lent et traînant vers la petite paillasse qui faisait office de lit. Cette absence de confort ne le dérangeait pas. Après tout, depuis qu'il était fugitif, lui et ses amis dormaient comme ils pouvaient, avec ce qu'ils trouvaient. C'était peut-être même un luxe que d'avoir cette couche l'isolant du sol.

Il s'assit lentement sur sa paillasse en esquissant une petite grimace de douleur, puis se frotta énergiquement les cheveux. Ces mêmes douleurs qui avaient rendues son quotidien si difficile, faisaient désormais partie de lui et quelque part, lui rappelaient avec ironie qu'il était toujours en vie. Ou à demi.

Dans l'attente de son exécution, le mage avait réussi à obtenir quelques feuilles et un crayon. C'était peu, mais au moins aurait-il la chance de coucher sur le papier, tout ce qu'il n'avait pas réussi à dire de son vivant. Tout ce qu'il n'avait pas eu le temps de lui dire…

Tout en caressant machinalement la surface lisse de la feuille, il se plongea dans ses pensées, retardant encore un peu l'échéance de ses aveux, si difficiles à révéler, même par écrit.

Depuis quand était-il ici…? Un jour, une semaine, un mois ? Peut-être plus.

Il compta une fois de plus, les étranges signes gravés sur le mur, seuls ornements de sa cellule qui lui permettaient de garder un lien avec le passage du temps.

— Ah oui, je me rappelle maintenant : neuf semaines et dix-sept jours, murmura-t-il comme s'il avait peur de réveiller une quelconque âme endormie.

Les minutes et les heures n'existaient plus. La notion du temps disparaissait dans l'humidité de sa geôle, si bien que ces traces constituaient son seul lien avec le réel. Seule son âme demeurait encore, mais pour combien de temps ?

Le mage entendit un claquement de fer brutal, la petite trappe derrière la grille de la porte de sa cellule venait tout juste de s'ouvrir. Le jeune homme tourna mécaniquement la tête pour ne voir que la bouche édentée du gardien de son couloir, l'une des seules présences humaines qui l'entourait depuis qu'il était enfermé là.

— Tu seras exécuté demain à l'aube ! annonça le gardien.

La voix de l'homme résonna quelques secondes dans sa boîte crânienne. Cela faisait des jours qu'il n'avait plus entendu la voix d'un être humain… Ses bourreaux s'étaient sans doute lassés de le torturer à l'approche de son exécution et l'avaient laissé vivre ses derniers jours dans le silence de sa cellule.

— Profite de tes derniers instants, démon ! ajouta l'homme d'une voix méprisante, avant de claquer la petite porte.

— Douze heures… peut-être moins. C'est donc le temps qu'il me reste, comprit le jeune homme en ignorant l'insulte.

Il avait pris l'habitude qu'on l'affuble de ce qualificatif de démon depuis son arrestation. Pendant les longues séances de torture, il avait essayé de leur expliquer à maintes reprises, la différence entre un mage et une créature démoniaque, mais rien n'y avait fait. De plus, la nouvelle de la présence de son père parmi Tartaros, n'avait fait qu'empirer la haine que le jeune mage inspirait à ses bourreaux, lesquels s'étaient faits un malin plaisir de lui faire endurer mille morts. Le jeune homme frôla doucement le bandage qu'il portait sur son œil… Le corps épuisé et las de se battre contre des moulins à vent, il avait fini par capituler, les laissant salir la mémoire de son père et la sienne par la même occasion.

Son désormais unique orbe bleu se perdit à travers la minuscule fenêtre qui le séparait du monde extérieur. Petite ouverture qui l'isolait surtout de la liberté et de sa vie, de l'autre côté de ces murs. Malgré la hauteur de la lucarne, il réussit à apercevoir la lune. C'était rare et l'émotion qu'il en ressentit, eut un parfum de nostalgie. La beauté ronde était presque pleine et ses creux lui rappelèrent sa courte existence.

Le creux du bas, incarnait son enfance entourée de l'amour de ses parents. Celui juste au-dessus, les quelques années passées avec Ul et Lyon et celui du milieu sa vie à Fairy Tail. Tout en haut, le creux distordu représentait les années de fuite avec ses camarades jusqu'à son arrestation quelques mois plus tôt. Et ce dernier, si petit qu'il était difficile de le distinguer à l'œil nu, représentait les moments de bonheur passés à ses côtés. Ce creux était le plus petit mais le plus parfait de tous. Le jeune homme l'observa un instant, se sentant subitement atteint par une vague de nostalgie puis de tristesse.

Le lendemain cette même vie, ne lui appartiendrait plus, et il ne le reverrait plus. Une larme perla le long de sa joue creuse, traçant un sillon sur son visage blafard.

Le mage ferma les yeux un instant et se revit quelques années plus tôt à la guilde. Entouré de ses amis. Sa famille. Ils se battaient comme à l'accoutumée – jeunes mages, insouciants de l'avenir qui les attendait. Les images étaient un peu floues et les sons ténus, mais il s'y accrochait de toutes ses forces. Son visage lui revint alors en mémoire et sans qu'il ne s'en rende compte, les larmes coulèrent machinalement. Son sourire, sa joie de vivre… Tout avait disparu du jour au lendemain et ses rêves avec. Mais quelque part dehors, il était là. Peut-être même pensait-il à lui, à ce même instant ?

— Natsu… murmura-t-il d'une voix étouffée.

Il se saisit enfin de la feuille et de son crayon qui reposaient sur sa paillasse, attendant patiemment le moment où il serait prêt à se livrer.

Malgré la difficulté de poser les premières lettres, les mots s'accrochèrent au papier, comme on s'accroche à la vie, retentissant des derniers espoirs de leur propriétaire.

« Natsu, pourquoi en sommes-nous arrivés là, alors que nous étions des mages respectés, pourquoi la population s'est-elle mise à nous haïr si subitement ? Qu'avons-nous fait de plus ou de moins pour être condamnés aussi injustement ? Vivre comme des criminels, nous cacher, fuir… Voilà à quoi nous étions réduits, dans quel but ? »

C'était étrange pour lui de débuter son récit de cette façon mais c'était bien là le début de tout. Le début de cette longue cavale, pendant laquelle il avait vu ses amis tomber, les uns après les autres.

« Te souviens-tu Natsu des premières rafles qui nous ont obligés de fuir Magnolia ? Peu de temps après notre retour, alors que la ville se reconstruisait tout juste, les regards sur nous ont commencé à changer. Méfiance, peur, dégoût se lisaient sur leurs visages. Nous n'avons même pas eu le temps de pleurer nos morts. Nous qui avions tous deux perdu un père, avons été obligés de mettre de côté nos larmes et notre colère pour protéger les nôtres.

Après avoir emmené les plus vulnérables de notre guilde, ils ont détruit notre base que nous venions de reconstruire, nous obligeant à nous enfuir et à trouver refuge ailleurs. »

En repensant à ces premiers mois de chaos, le jeune homme ne put s'empêcher de revoir avec tristesse les visages de ses premiers camarades tués injustement. Kinana, Droy, Laki, Roméo et même Evergreen, aucun d'entre eux n'avait mérité un tel châtiment.

D'autres avaient rapidement suivi. A l'image de Macao qui était mort de chagrin après la mort de son fils unique. Leur vieux maître Makarov n'avait pas mis longtemps à le rejoindre, affaibli par l'âge et la maladie que les soucis avaient précipités. Avec lui, c'était toute leur enfance qui s'était envolée, tous ces moments de bonheur passés à la guilde avec leur famille d'adoption, n'étaient plus qu'un tas de cendres.

La main du jeune prisonnier tremblait mais il fallait que tout ce qu'il porte sur le cœur, sorte enfin. Natsu était le seul auquel il pouvait s'ouvrir ainsi, sans honte ni aucune retenue.

« Quand ils ont commencé à viser les femmes, tout s'est accéléré. Nous avons vu nos amies si chères défendre leur vie jusqu'à la mort. Et quand la plus invulnérable de toutes est tombée elle-aussi, j'ai pensé que tout était fini, qu'il était désormais inutile de nous battre. Je n'avais plus la force… Erza disparue, j'avais abandonné tout espoir en l'avenir. »

— Merde, jura-t-il en s'essuyant rageusement le visage ruisselant.

Il s'était pourtant promis de ne pas pleurer mais sa faiblesse le trahissait encore une fois.

La gorge nouée, il songeait à Erza, leur pilier à tous. Cette amie qu'il avait toujours considérée comme une sœur. Même après la mort de Lucy, elle avait continué à se battre et à les pousser à ne pas abandonner. Leur répétant sans relâche qu'il restait un espoir dans l'humanité. Il savait qu'elle avait toujours pris sur elle pour ne pas flancher devant eux. Erza était dotée d'une force exceptionnelle mais elle n'en restait pas moins un être humain elle-aussi. Jusqu'au jour où ce dernier pilier s'était lui aussi effondré. Détruisant un à un ses rêves de liberté et de bonheur.

Remettant ses idées en ordre, il poursuivit sa lettre, ressentant un besoin vital de vider enfin son cœur.

« Mais toi Natsu, tu m'as redonné cet espoir, armé de ton seul sourire. Si tu n'avais pas été là pour me maintenir la tête hors de l'eau, j'aurais sombré moi aussi. C'était devenu trop dur pour moi de lutter, je n'en avais plus la force. Et puis, un jour où je m'étais isolé une nouvelle fois, ruminant ma mauvaise fortune aux esprits de la rivière qui courait devant moi, tu t'es avancé de cette nonchalance qui te caractérise tant et tu m'as dit : "Tant qu'on est en vie, il reste de l'espoir." J'ai failli t'en coller une ce soir-là, tu m'y as même encouragé, jusqu'à ce que je m'effondre, totalement épuisé, me vidant de ma peine dans le creux de tes bras. Tu n'imagines pas à quel point je me sentais honteux de me montrer aussi faible face à toi. Mais toi, au lieu de me railler, tu m'as consolé sans mot dire, m'offrant simplement ta chaleur bienfaisante. »

Sa main se remit à trembler en repensant à ce jour où lui et Natsu s'étaient rapprochés à un point qu'il n'aurait jamais cru possible. Bien sûr, depuis la disparition progressive des femmes de la guilde, certains hommes s'étaient liés jusqu'à devenir pour certains, des couples soudés. Luxus et Fried en étaient le parfait exemple – même si le mage runique était conscient que le cœur du dragon de la foudre serait à jamais attaché à Mirajane, son grand amour. Mais au moins était-il auprès de l'homme qu'il aimait.

Pour lui et Natsu, tout s'était passé différemment. Cette rivalité qui avait toujours opposée ces deux hommes aux caractères diamétralement différents, leur avait permis, paradoxalement, de se rapprocher l'un de l'autre naturellement dans l'adversité.

Natsu l'avait toujours respecté et considéré comme son égal. Toutefois, le prisonnier était bien conscient qu'il n'en était rien. Ils avaient tous deux évolué différemment et maintenant, le jeune mage se sentait à des années lumières de lui. Natsu était comme une étoile qui avait atteint le firmament, tandis que lui n'était encore qu'un vulgaire caillou coincé dans la froideur de l'atmosphère. Mais malgré cela, son ami ne lui avait jamais fait ressentir sa supériorité. Quand ils se battaient tous les deux, c'était uniquement avec leurs poings. Seuls moments où le jeune homme pouvait espérer le battre.

Mais après la mort d'Erza, les deux hommes avaient ressenti un autre besoin. Celui de la chaleur de l'autre, simplement pour oublier la souffrance du quotidien. Tout d'abord une simple étreinte fraternelle qui s'était mue en un désir charnel et vital.

« Je me souviens de ton premier baiser, brûlant et maladroit. Je ressens encore la morsure de tes crocs au coin de mes lèvres… Et pourtant, malgré la douleur, j'en voulais plus. Cette douleur me rappelait que j'étais encore en vie. Ta chaleur m'a montré que j'avais envie de vivre et que j'avais la meilleure raison du monde de le faire : toi. »

Le condamné essuya une nouvelle larme qui roulait sur sa joue. Il sentait la fatigue le gagner, pourtant, il se forçait à garder les yeux ouverts. Bientôt, il s'endormirait d'un sommeil éternel, il voulait passer ses dernières heures à mémoriser les plus belles choses qu'il avait connues. Sa famille, ses amis et surtout lui. A la simple pensée qu'il ne reverrait plus jamais son visage, son cœur se déchirait en un millier de morceaux. Il voulait emporter le souvenir de son plus grand bonheur avec lui.

« J'ai sommeil mais je ne veux pas dormir. Je ne peux pas passer mes dernières heures les yeux fermés alors qu'après ça, ils le seront à tout jamais. Non, ces dernières heures, je veux les passer à penser à toi. Me remémorant les traits de ton visage qui essayent de s'effacer malgré moi. Me souvenir de la tonalité chantante de ta voix. Et puis surtout, me souvenir de la chaleur de tes bras et celle de ton corps qui m'a tant de fois embrasée de l'intérieur, d'un feu magnifique et vivifiant. »

La première fois qu'il avait fait l'amour avec Natsu, la lune était pleine et semblait les observer avec bienveillance. Son amant était si fougueux et impatient, qu'il lui avait laissé de nombreuses marques sur tout le corps, révélant ainsi involontairement à leurs compagnons, la nature nouvelle de leur relation.

Pourtant, leur lien désormais charnel, n'avait pas modifié leur comportement vis-à-vis de l'autre. Ils restaient assez discrets en compagnie de leurs amis et continuaient joyeusement leurs joutes, permettant ainsi de décompresser de la pression du quotidien. Mais une fois seul à seul, la nature de leur amour reprenait ses droits.

Le jeune homme se moqua de lui-même en songeant à ses mots. Il était loin d'être un homme romantique pourtant, et en songeant à la réaction qu'aurait Natsu en lisant cette lettre, il se dit qu'il allait se tordre de rire…

— Je t'entends d'ici… murmura-t-il en souriant. Mais j'en prends le risque.

Pourtant, le condamné se rembrunit subitement. Malgré la beauté de la relation qui s'était construite entre lui et Natsu, il avait un regret et pas des moindres. Et à la seule pensée que son compagnon ne sache jamais ce qu'il ressentait réellement pour lui, son cœur le fit souffrir davantage, comme si une lame acérée le lui transperçait. Il n'était même pas sûr que cette lettre lui parvienne un jour… Ça ne lui ressemblait pas de se livrer à ce point, mais il n'avait plus le choix, cet acharnement qu'il avait eu toute sa vie à cacher ses sentiments les plus profonds, ne l'avaient pas protégé de la souffrance, au contraire. Il n'était plus temps de se laisser freiner par cette pudeur stérile qui n'avait fait que le tenir éloigné des personnes qu'il aimait. Il avait déjà fait cette erreur avec Ul, il ne la ferait pas avec Natsu.

Une fois de plus, sa main trembla, mais peut-être était-ce tout simplement la conséquence de l'une des nombreuses tortures qu'il avait subies. Désormais, la douleur physique se mêlait à celle de son cœur, si bien qu'il ne réussissait plus à les dissocier l'une de l'autre.

Le jeune homme respira profondément et réussit, au bout de longues secondes, à faire cesser le mouvement incessant de sa main. Il remit ses mots en ordre et enfin, il put lui dire.

« Natsu, je ne t'ai jamais véritablement révélé ce que je ressentais pour toi. Nous étions bien comme ça, pas besoin de se dire Je t'aime à tout va comme les couples hétéros, débordants d'un romantisme dégoulinant. C'est ce que je pensais alors… Mais je le regrette aujourd'hui. Je regrette de ne pas t'avoir dit ces mots pourtant si simples, quand j'en avais encore l'occasion. Même si pour toi, te rapprocher de moi était le simple résultat de la disparition des femmes de notre guilde, de celle de Lucy peut-être… moi j'ai toujours su que ce que je ressentais pour toi allait au-delà de l'amitié innocente. Je ne voulais simplement pas admettre que je t'aimais d'une façon moins avouable. Aujourd'hui, je te le dis, même si jamais je ne verrais ta réaction : des larmes, des rires moqueurs ou de la colère, peu importe. Je t'aime Natsu et je t'ai toujours aimé. »

Il dut s'interrompre pour ne pas tremper la feuille de ses larmes. Il ne voulait pas que Natsu sache qu'il avait passé ses derniers instants à pleurer comme une fillette. Encore une fois, il le voyait d'ici le railler…

Le temps s'écoula lentement. Le mage avait le regard plongé sur le petit carré de liberté d'où brillaient les étoiles. La Lune avait disparu mais à la place, une étoile plus brillante que les autres, semblait lui envoyer des signaux.

Que faisait Natsu à cette heure ? Pensait-il à lui ? Le cherchait-il ?

Le jeune homme soupira. Il était sans doute en train d'élaborer un plan pour le libérer. Pourvu qu'il ne se fasse pas attraper… L'ancien mage savait très bien de quoi était capable son dragon survolté. Il savait à quel point il pouvait se montrer impulsif et d'une imprudence désarmante lorsqu'il s'agissait de sauver l'un des siens. C'était d'ailleurs l'une des raisons qui l'avait poussé à tant l'aimer. Mais aujourd'hui, il voulait que pour une fois, son bouillonnant amant ne laisse pas cette impulsivité lui faire commettre l'irréparable.

— Comment réagiras-tu lorsque tu apprendras ma mort ? murmura-t-il.

A cet instant, il ressentit une peur sans nom. Il voulait que Natsu ait une chance, un avenir, et qu'il continue à croire que le salut les attendait, mais tel qu'il le connaissait, il était certain que c'était tout le contraire qui se produirait. Natsu foncerait dans le tas, tuerait un maximum de personnes par pure rage et se ferait tuer à son tour. Le jeune homme ne pouvait accepter une telle fatalité. Mais est-ce que les mots seraient suffisants pour lui faire entendre raison avant l'inévitable ?

Pourtant, il les juxtaposa sur le papier tout en souhaitant de tout son cœur qu'ils lui parviennent et qu'il les écoute.

Le mage vit les premiers rayons du soleil caresser un morceau de mur gris de sa cellule.

— Il est bientôt l'heure… souffla-t-il.

Un dernier point, un dernier mot et il posa son crayon.

Ses geôliers viendraient sous peu le chercher pour le conduire à la potence. Il reverrait alors l'extérieur une dernière fois, et emplirait ses poumons de l'air pur dont il n'aurait bientôt plus besoin.

Il relut une fois sa lettre, tout en faisant une prière silencieuse pour qu'elle parvienne à son destinataire. S'il ne devait faire qu'un seul vœu avant de mourir, c'était bien celui d'offrir un avenir à Natsu. C'était tout ce qu'il souhaitait. Le jeune homme plia le précieux papier avant de le ranger dans sa poche arrière.

Un bruit de loquet le sortit de ses dernières pensées, le replongeant impitoyablement dans la réalité.

— Gray Fullbuster ! Il est l'heure pour toi, démon !

Le jeune homme se leva lentement et se tourna face au mur, attendant que le gardien ne fixe ses poignets de menottes. Il avait l'habitude de ce rituel, et si pendant longtemps, il avait essayé de s'enfuir dans ces moments-là, il avait dorénavant compris que son acharnement ne servait à rien. Privé de magie et à présent de ses forces physiques, il ne pouvait que supporter l'idée d'être réduit à un vulgaire criminel condamné à mort. Il avait accepté ce sort mais ne pouvait s'empêcher de ressentir de la tristesse. Il pensait pourtant se libérer de ses tourments à l'approche de sa mort, mais le fait de laisser Natsu derrière lui ne lui permettait pas d'être apaisé totalement par cette issue.

Le gardien entrava ses poignets, se délectant du léger gémissement de douleur que le prisonnier laissa échapper. Son épaule le faisait souffrir tout comme la majorité des os de son corps que ses bourreaux s'étaient plu à malmener. Il pouvait s'estimer heureux de pouvoir encore tenir sur ses jambes même si sa démarche demeurait chancelante.

L'ancien mage de glace de Fairy Tail fut conduit dans les couloirs sombres de la prison, entendant des gémissements lointains sur son passage, jusqu'à arriver dans la cour intérieur du bâtiment. Là, des soldats lourdement armés le regardaient d'un œil mauvais, offrant juste un passage qui menait en son centre, là où était installée la potence.

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Nda : J'espère que cette première partie vous aura plu. N'hésitez pas à laisser un petit commentaire ;)

Je posterai la dernière partie demain ou dimanche :)