Disclaimer: Les personnages de cette fiction ne m'appartiennent pas, certains personnages par contre ont été inventés pour le bien de l'histoire.

En espérant que ma fanfic vous plaise.

Bonne lecture!

Chapitre 1

L'orphelinat.

Orphelinat St Marc, Londres.

12 juin 1720.

«Trouvez-la ! Ne la laissez pas s'échapper ! »

La voix de Mme Krein résonnait encore à mes oreilles, et son ton dur et froid, tremblant de colère m'était familier. J'entendais toujours le son de ses talons hauts claquer sur le carrelage des couloirs de l'orphelinat, pendant que tous autour d'elle s'affairaient à la contenter. De mes plus lointains souvenirs, elle ne m'avait jamais aimée ; pire, elle semblait me vouer une haine sans pareille. J'étais dans cet orphelinat depuis trop longtemps, le moment de lui faire payer était venu, et me voir m'échapper d'ici était la pire torture que je pouvais lui infliger...

Cachée dans un recoin du couloir menant à son bureau, j'attendis d'entendre que sa voix, ainsi que celles des hommes qu'elle engageait afin de retrouver les fugueuses telles que moi, s'éloigne. Ils n'étaient pas loin, et je me pressai de sortir de ma cachette, pour ouvrir la porte de bois sombre de son bureau. Je ne jetai aucun regard à la décoration de la pièce, je la connaissais pas cœur, pour y avoir souvent passé des heures à être interrogée, et même torturée. J'avais appris en vivant ici, à souffrir bien plus que les enfants de mon âge n'en étaient capables.

Je me dirigeai directement vers son bureau, qui ressemblait fort à celui d'un gouverneur, et m'agenouillai pour être à la hauteur de ce que je cherchais. Là, entre deux tiroirs, une ouverture était dissimulée par une plaque de bois. Sortant un couteau d'une de mes bottes, j'en fis glisser la pointe dans l'interstice de la plaque, et essayai de faire levier, pour la soulever . En deux secondes à peine, la plaque bougea et je la récupérai.
Je plissai les yeux, et glissai ma main dans l'ouverture de la petite cachette que j'avais découverte un jour. En retirant ma main, je ressortis la clé, et mes yeux glissèrent sur les marques de mon poignet...

Cinq jours avant.

J'avais été amenée pour la centième fois dans le bureau de la directrice de l'orphelinat, Mme Krein. Tout cela pour avoir essayé de fuir cet endroit...

Les poings liés à l'arrière de la chaise où j'avais été assise, je m'efforçais d'atteindre le couteau qui se trouvait dans ma poche droite. La sueur perlant sur mon front, les dents serrées, je m'exhortai au calme. Il fallait absolument que je me sorte de là...je ne voulais pas subir encore une autre des punitions de l'affreuse femme au cœur de pierre qui ne tarderait sûrement pas à arriver.

Alors que le bruit de la poignée de la porte d'entrée se fit entendre, je soupirai et m'immobilisai.

«Dommage», pensai-je.

La porte se referma brusquement, et je n'avais pas besoin de tourner la tête pour savoir qui était entré.
Ses talons claquaient contre le carrelage de la pièce, ce qui avait le don de m'énerver.
Elle me fis face, reposant ses grosses fesses sur le bord du bureau, qui me surprit en ne craquant pas sous son poids.
Je soutins son regard froid et colérique, et adoptai mon éternel sourire ironique.

-Vous semblez comme qui dirait... énervée, fis-je remarquer. Un petit séjour au soleil vous ferait le plus grand bien, vous savez.

Elle ne dit rien , à mon grand étonnement, et se détourna, pour saisir dans le premier tiroir de son bureau un objet qui me fit déglutir. Alors cette fois-ci ce serait la chaîne...
Je pris une légère respiration, et ne laissai rien paraître.

-Tu sais, j'ai vraiment tout essayé avec toi, Killian, commença-t-elle. J'ai pourtant été comme une mère au tout début, j'ai essayé de te protéger de tes... défauts. Mais, hélas, on dirait que ta vraie nature t'a rattrapée.

-Chassez le naturel, il revient au galop, murmurai-je avec ironie. Et vous pensez en plus avoir essayé de me protéger? La seule et unique chose qui pourrais mettre ma vie en danger est votre présence plus que désagréable et repoussante... Je comprends pourquoi vous êtes seule !
Une gifle me fit taire. Ses yeux pétillaient de colère, son teint vira au rouge, et sa mâchoire se serra de toutes ses forces.


-Tes paroles de pauvre orpheline ne m'atteignent pas, cracha-t-elle. Tes parents ne voulaient pas de toi, et rien de cela ne changera. Tu crois pouvoir te débrouiller toute seule à l'extérieur, vivre comme bon te semble... être libre. Mais tu ne sais rien du monde autour de toi. Personne ne t'attend dehors, et le monde peut très bien continuer de tourner sans toi. Tu ne manqueras à personne.

-Tout comme vous ne me manquerez pas une fois que je serai partie d'ici ! lui dis-je avec force.
-Si toute fois tu en as la force, souffla-t-elle en remuant la chaîne entre ses mains.
-Je préfère souffrir milles morts que de rester dans cet orphelinat, crachai-je.
-C'est la réponse que j'attendais de ta part, murmura-t-elle en s'approchant de moi.

Aussitôt que la chaîne s'enroula autour de mon poignet, je la sentis se resserrer... jusqu'au point de non retour.

J'eus un frisson en me rappelant cette scène. Des marques bleues et noires parsemaient ma peau en une ligne qui tournait tout autour de mon poignet. Je me souvenais avoir retenu mes larmes, mes cris, et d'avoir ressenti jusqu'au plus profond de moi-même la chaîne s'enfoncer dans ma chair, jusqu'à ce que mon sang se mette à couler.

Derrière la porte, des bruits se firent entendre, et je courus jusqu'au placard dont j'avais tant rêvé ouvrir la porte, munie de la clé qui allait enfin m'en offrir l'opportunité. Je me glissai à l'intérieur du placard, où étaient entassés les dossiers des orphelins qui avaient été placés ici.

-Je veux qu'elle soit dans mon bureau dans une heure ! Si vous ne l'avez pas trouvée d'ici là, je me verrai dans l'obligation de faire un rapport complet à votre supérieur sur vos non-capacités à attraper une jeune fille de quinze ans! Est-ce clair? disait-elle à un garde qui suivait ses pas.
-Limpide, Madame, nous l'aurons trouvée dans très peu de temps, dit-il avant de repartir et de fermer la porte derrière lui.
-Je l'espère pour vous, souffla-t-elle même s'il ne l'entendait plus.

Je l'entendis tirer sa chaise de bureau, et je serrai la clé contre moi, ainsi que mon couteau. Deux possibilités s'offraient à moi : la première consistait à emprunter le passage secret de ce placard qui menait à l'un des couloirs de l'établissement après avoir trouvé mon dossier, et de partir pour toujours; la deuxième était de m'assurer que cette femme ne ferait plus jamais aucun

mal à des enfants, et qu'elle irait payer ses atrocités en enfer.
Je soupirai, puis au fur et à mesure que mon esprit travaillait, mes lèvres s'étirèrent en un grand sourire.

Pourquoi ne pas combiner les deux options ?

Sans attendre, j'entrepris de rechercher mon dossier dans cette pagaille. Il y en avait tellement que je désespérais de le trouver. Tout était sans dessus dessous dans ce placard, et je soupirai. Alors que l'espoir de connaître l'identité des gens qui m'avaient abandonnée ici disparaissait lentement, je détournai les yeux une seconde pour les poser sur une pile qui semblait avoir été déplacée récemment, si j'en jugeais pas la marque rectangulaire qui n'étais pas salie à côté. Je m'accroupis, et cherchai dans la pile avec empressement.

Soudain, mon cœur eut un raté alors que je posais les yeux sur un dossier à la couverture noire. Mon nom était inscrit dessus.

Killian Smith*.

Sans attendre davantage, je pris le dossier, le mis à l'intérieur de ma veste et me tournai vers le passage secret. Devant moi, un épais mur de pierres humides se dressait. Positionnant mes mains de chaque côté de l'ouverture du passage, je poussai de toutes mes forces. Les pierres bougèrent, et j'espérai ne pas avoir fait trop de bruit.

Me glissant à l'intérieur, je descendis d'étroits escaliers, qui finalement aboutissaient à une grille en fer facilement déplaçable. Elle menait au couloir du premier étage, là où se trouvaient toutes les chambres. Je regardai à travers la grille pour voir s'il y avait quelqu'un, puis d'un geste rapide, je l'enlevai et la poussai sur le côté. Passant à travers le trou, je me glissai à l'extérieur du passage.

Je me retrouvai dans le grand et long corridor que j'avais si souvent traversé en courant, des gardes et Mme Krein à ma poursuite. J'avais tant fait de bêtises ici, que les murs de l'orphelinat s'en souvenaient encore. Avant que j'ai pu me relever, les cris des gardes de l'établissement se firent entendre à l'autre bout du couloir.

«Attrapez-la !» cria un homme, que je reconnus par sa voix grave comme étant le garde qui était quelques minutes avant dans le bureau de la directrice.
Sans attendre, je me dirigeai en toute hâte vers l'autre côté du long corridor, les hommes à mes trousses.
Heureusement pour moi, j'étais endurante, et plus rapide qu'eux.

Arrivée à la porte du fond, j'appuyai de toutes mes forces sur la poignée, en espérant qu'elle s'ouvre.
Elle ne bougea pas.

«Pas de chance !» murmurai-je.

Puis, en regardant autour de moi, pendant que les hommes arrivaient à grands pas, je vis ce qui me sauva indéniablement. Une sorte de trappe était ouverte au plafond, et sur le côté, une échelle en bois était appuyée contre le mur. C'était ma dernière chance. Je saisis l'échelle, la plaçai devant la trappe, et montai le plus vite possible.

«Ne la laissez pas s'échapper !»

J'accélérai en entendant la voix si proche, et quand j'allais enfin passer par la trappe, une poigne ferme me saisit le pied. Je tentai de toute mes forces de me dégager, et je donnai un coup violent dans le visage du garde. Il gronda, mais j'eus le temps de partir et de refermer la trappe avant qu'il ne revienne à la charge.

C'était moins une.

Déplaçant une malle qui traînait contre le mur en face de moi, je la mis sur l'ouverture de la trappe, qui sous les assauts des gardes aurait finit par s'ouvrir. Reprenant mon souffle, je m'assis sur celle-ci, et regardai autour de moi. J'étais sûrement dans ce qu'appelaient les autres orphelins "l'antre de Mme Krein", plus communément appelé "Dragon" ou "Sorcière", voire parfois même "Démon sortant de l'enfer" - j'avouais y être pour quelque chose dans ce surnom.

Recouvrant le sol, un long tapis au vert terne et plutôt repoussant traversait la pièce, et mon regard s'arrêta sur le bureau recouvert de paperasse à première vue ennuyeuse. Des objets de toute sortes étaient posés sur le rebord, et je jouai pendant quelques instants avec une montre en or, qui finirait certainement par se faire une place dans ma poche, parmi tous les autres objets volés.

Me retournant, j'eus la bonne surprise de tomber nez à nez avec une corde à l'apparence assez robuste.

Je souris. Pour une fois, la chance était de mon côté.
Prenant la corde, je la mis sur mon épaule et cherchai la fenêtre, qui ne laissait filtrer aucune lumière à cause des épais rideaux de velours vert qui la cachaient.

Soudain, alors que je venais d'ouvrir la fenêtre qui donnait directement sur l'autre façade d'une maison, la porte d'entrée s'ouvrit avec fracas, dévoilant une Mme Krein plus que remontée, les cheveux s'échappant de son chignon habituellement relevé de façon stricte. Elle ressemblait à une folle, ou du moins encore plus que d'habitude.

Je grimaçai, et souris de façon désinvolte.
-Un souci ? demandai-je avec mon sourire ironique qui lui fit prendre une couleur rouge.
Elle gronda.
-Apparemment oui, continuai-je, nullement apeurée. Vous devriez vraiment prendre des vacances vous savez.
-Les seules vacances que je pourrai prendre se feront après ton isolement dans la cave ! s'époumona-t-elle inutilement.
Je soupirai.
-Écoutez, fis-je avec sérieux. Je ne vous aime pas, et vous ne semblez pas énormément m'apprécier (elle trembla de rage pour confirmer mes paroles), alors pourquoi me retenir ici? Laissez-moi partir et vous aurez une vie douce et paisible...
-Gardes, cria-t-elle en se retournant.
-Incompréhensible, cette femme, me dis-je.

Avec rapidité, je fis un nœud sur l'extrémité de la corde, que je lançai ensuite en visant le toit de la façade en face, en espérant qu'elle s'accroche à la cheminée visible.

Avec adresse le nœud entoura l'épaisse cheminée, et je ne perdis pas une minute avant de sauter, laissant derrière moi Mme Krein pousser des cris de rage incontrôlables.
Derrière moi, mon ancienne vie s'effaçait, et je souris sans me retourner, faisant voile vers les monts inconnus de la liberté...

*Killian Smith: Smith étant un nom très courant en Angleterre, et les orphelins n'en ayant pas, il est ajouté à leur prénom dès leur placement à l'orphelinat.