Note de l'auteure : Ce premier chapitre comporte pas mal de blabla et il n'y a pas vraiment d'action, mais c'est le plantage de décors, lol. Le prochain chapite est en cours d'écriture et je le posterais dés que possible. Je vais essayer de ne pas mettre trop de temps pour poster entre les chapitres. Je ne promet rien, mais je ferais de mon mieux. J'espère que cela vous plaira !
« Ne dis rien si tu veux
Mais sèche un peu tes yeux
Et ne crois pas surtout
Que tes larmes on s'en fout
Tu sais pleurer ça sert à rien
Laisse un peu, laisse un peu
Dormir ta peine dans un coin »
Daniel Guichard - Faut pas pleurer comme ça
Chapitre 1 = Une vie s'arrête, une autre commence
« L'Éternel est mon berger : je ne manquerai de rien. Il me fait reposer dans de verts pâturages, il me dirige près des eaux paisibles. Il restaure mon âme, il me conduit dans les sentiers de la justice, à cause de son nom. Quand je marche dans la vallée de l'ombre de la mort je ne crains aucun mal, car tu es avec moi ; ta houlette et ton bâton me rassurent. Tu dresses devant moi une table face à mes adversaires ; tu oins d'huile ma tête et ma coupe déborde. Oui, le bonheur et la grâce m'accompagneront tous les jours de ma vie et j'habiterai dans la maison de l'Eternel jusqu'à la fin de mes jours.
Psaume 23 : 4 »
Ce texte je l'ai souvent entendue dans des films ou des séries à la télé, je le trouvais poignant alors. Mais, l'entendre pour un proche, c'est déchirant et cruel ! Tout me semblait tellement irréel, cauchemardesque... j'espérais que cela en était un et que j'allais enfin me réveiller et être soulagée que rien de tout cela ne soit vrai. Mais ce moment ne venait pas et il ne viendrait pas...
Une pluie fine se mit à tomber. Cela accentuait encore un peu plus le côté dramatique de la situation. Tout le monde pleurait, même le ciel... mais pas moi. Ça n'est pas que l'envie me manquait mais, si je commençais, je ne savais pas quand je pourrais m'arrêter. Depuis l'annonce de sa mort, j'avais une boule dans la gorge, vous savez cette boule qui vous donne l'impression de manquer d'air quand on ravale ses larmes. Voilà, celle-là !
Le cercueil fut mis en terre. Les gens s'éparpillèrent, regagnant leurs voitures. Moi, je n'arrivais pas à me retourner, mes yeux fixaient le ciel gorgé de nuages sombres, les gouttes de pluies venant s'écraser sur mon visage. Je cherchais un échappatoire à cet enfer, que va t-il advenir de moi ?
Une main sur mon épaule me sortit de ma torpeur. Judith, une vielle amie de la famille se tenait sous un parapluie, un sourire doux sur les lèvres.
"Viens donc sous le parapluie, tu vas être trempée comme une soupe."
En ce moment, être trempée, n'était pas mon soucis premier.
"Tout le monde s'en va vers la maison, il vaudrait mieux y aller."
Je regardais la tombe encore ouverte, y jetais la rose blanche que je tenais depuis le début de la cérémonie, je soupirais longuement et rejoignit la voiture soutenue par Judith qui avait passé un bras sur mes épaules.
...
Qui donc a décréter que l'on devait s'empiffrer à la suite d'un enterrement ? C'est tellement en contraste avec la mort ! Je ne dis pas qu'il faudrait faire la grève de la faim et se laisser crever la gueule ouverte, mais franchement, ceux qui viennent de perdre un proche n'ont pas envie de voir un troupeau de gloutons, des toasts à la main, faisant des messes basses et croiser des regards de pitié. Enfin, je ne sais pas pour les autres, mais moi je n'aime pas ça !
Quittant le salon remplis de mes formidables "invités", je rejoignis ma chambre. Chambre où je passais mes derniers instants. Je balayais la pièce du regard, tout aller terriblement me manquer. Les murs, dont la couleur parme datait de mon enfance, mon bureau, mon lit et mes peluches, tout cela je ne pouvais pas l'emmener avec moi.
Mon regard s'arrêta sur la table de chevet où était posé un cadre. Je le pris et me roulais en boule sur mon lit, le tenant contre mon coeur. J'aimais beaucoup cette photo, du temps où j'étais heureuse avec Josh, mon beau-père que je venais d'enterrer, le seul père que j'ai jamais connu. Il m'avait quitté, me laissant seule au monde. Enfin, pas vraiment seule, mais avec personne qui était digne d'intérêt. Où est donc sa mère ? Direz-vous. Ah bonne question ! Je ne le sais pas moi-même. Après une dispute avec Josh, elle a enfourné quelques affaires dans un sac et à claquer la porte, elle n'est toujours pas revenue, c'était il y a un peu plus de deux ans.
On l'a cherché pendant un temps, mais il n'y avait plus aucune trace d'elle, comme si elle n'avait jamais existé. La police à chercher aussi, mais pas longtemps. Vous vous direz surement que les disputes c'est le quotidien d'un couple, il n'y a pas de quoi tout plaquer comme ça. Je ne donne pas d'excuse à ma mère, non mais, disons que notre quotidien n'était pas drôle tout le temps et ça n'a pas été mieux après son départ. Mon beau-père était bipolaire ou maniaco-dépressif si vous préférez. Pour vous expliquer vite fait, cette maladie comporte deux phases. Une phase maniaque, où la personne est joyeuse, euphorique et hyperactive et une phase dépressive, où la personne souffre d'une grande tristesse, a envie de mourir et le danger principal de cette maladie est le suicide. Et c'est exactement ce qui s'est passer il y a quelques jours, il s'est ôter la vie !
Et à moi qu'est-ce qu'il va m'arriver ?
Je roulais à nouveau sur le lit et me levais pour finir mes valises, prenant soin de mettre la photo entre deux jeans.
"Alors, tes bagages sont prêts ?" Me demanda Judith qui se tenait dans l'encablure de la porte ouverte, les bras croisés.
"Je dois seulement rassembler mes affaires de toilettes et ça sera bon."
"Je suis désolée de ne pas pouvoir t'accompagner jusqu'à là-bas, si j'avais pu..."
"Ne t'en fais pas, ça va aller. Je suis une grande fille."
"J'ai l'impression que c'était hier que je te faisais sauter sur mes genoux, tu n'avais pas beaucoup de dents à l'époque."
"On ne va pas faire dans le mélo, hein Judith ?"
"Je vais essayer de ne pas pleurer, ça changera un peu de ces derniers jours. Tu sais ma chérie que tu es la bienvenue chez moi quand tu le désires tu n'as même pas à m'appeler hein, tu...tu..."
Sur ces mots, elle me serra dans ses bras, si fort, que je cru qu'elle allait m'étouffer. Quand elle eu enfin desseré sa prise, elle emprisonna mon visage dans ses mains et posa un baiser sur mon front.
"Bon, je vais dire à tous ces vautours de déguerpir, comme ça tu pourras profiter un peu de ta maison dans la tranquilité et je t'accompagnerais à la gare."
Elle fit quelques pas et se retourna.
"Ah et fait un tour devant le miroir, pomponne toi un peu, tu as une mine affreuse." Me dit elle dans une de ces grimaces habituelles.
Je filais dans la salle de bain pour enfourner mes produits dans une trousse de toilette et m'attardais devant la glace. Judith n'avait pas tort... je faisais peine à voir. Mon teint qui était habituellement halé avait viré au gris, mes yeux bleus étaient vitreux et cernés, ma chevelure noire comme le jais, qui devrait être lisse était une espèce de choses détrempée et emmêlée. Ouais... en gros j'avais une sale gueule ! Bon on efface tout et on recommence. J'ôtais cette hideuse robe noire et me glissais sous l'eau tiède, presque fraîche, parce que malgré la pluie on était quand même au mois de juillet.
Adossée au carrelage froid, j'essayais de ne pas penser à se qu'il aller ce passer pour moi quand j'aurais franchi le pas de ma maison pour la dernière fois. Judith me héla à travers la porte, coupant court à mes pensées.
"Chris ! Ça fait si longtemps que tu es sous l'eau que ta peau va se détacher. Et ton car est dans trois quarts d'heures."
Moins d'une heure à passer ici... J'enfilais un jean et un t-shirt, n'insistais pas avec mes cheveux qui ne seraient pas coopératifs aujourd'hui et m'attelais à descendre mes trois énormes valises. Judith m'attendis dans la voiture quand je fis un dernier tour dans la maison. J'arpentais chaque pièce, respirant à fond pour imprimer l'odeur et la caser dans un coin de ma tête. C'est ici que j'avais vécue depuis toujours, je ne connaissais que cette maison, que cette ville. Je soufflais un bon coup pour refouler mes larmes, j'avais pratiqué cet exercice tant de fois depuis ces trois derniers jours que ça devenait de plus en plus facile. Je me demandais néanmoins quand ma carapace aller ce fandiller... ça ne serait pas joli joli à voir.
J'entrais dans la chambre de Josh, fouillais dans son armoire et en sortis un t-shirt que j'emporterais avec moi. Je pris aussi une photo de nous trois, il me semble que c'était il y a une éternité et ces moments-là, je n'y aurais plus jamais droit.
Judith klaxonna et je dus, à contre-coeur fermer la maison, ma maison qui serait bientôt habitée par des inconnus.
Judith attendit avec moi jusqu'à la dernière minute. Je la serrais fort dans mes bras et m'engouffrais dans le bus. Il démarra et la boule que j'avais dans la gorge s'étendit jusqu'à mon estomac, je posais la tête contre la vitre et fermais les yeux.
Je vais quand même me présenter dans les formes :
Je m'appelle Christy Ryan, j'ai 17 ans, vivant à Astoria dans l'état de l'Oregon jusqu'à il y a encore quelques minutes, roulant vers ma nouvelle vie dans la réserve de la Push...
...
Après un peu plus de deux heures de trajet, le bus s'arrêta à Seattle près d'une station service. Le chauffeur et une grande majorité des voyageurs, s'empressèrent de sortir pour fumer, moi j'allais faire un tour dans la boutique de la station. Ne cherchant rien en particulier, je déambulais entre les rayons. Mon regard fut attiré par une petite fille d'environ quatre ans qui se trouvait derrière la caisse, sur les genoux de sa mère surement, celle-ci lui donner de petits baisers dans le cou, ce qui l'a chatouiller, elle riait aux éclats tout en ce tortillant, je l'enviais beaucoup. Je me sentais perdue, abandonnée, sans repères... toutes les choses qui me rendait heureuse, avaient foutues le camp ! Je baissais la tête et sortie rejoindre le bus, m'installais à ma place et attendis que tous ces drogués de la clope aient enfin une dose de nicotine assez élevée pour que l'on puisse reprendre la route. Non que je me languissais d'arriver à destination, mais le fait d'être bloqué dans cet habitacle avec des crampes dans les jambes et dans les fesses m'irritait quelque peu.
Vous devez certainement vous demander chez qui ce bus m'emmène. J'y viens. J'ai encore environ deux heures de trajet à écoper, j'ai le temps de vous faire un résumé. Pour cela il faut faire un retour de 18 ans et des poussières en arrière...
Ma mère, Abigail qui était amérindienne, vivait avec ses parents à la réserve de la Push dans l'état de Washington. Elle était tout juste majeure et rêvait d'autres horizons. Elle fit la rencontre d'un jeune homme d'environ vingt-cinq ans qui s'appelait Wayne Miller, elle le fréquenta à l'insu de tous et s'enfuit avec lui sans se retourner, en ne laissant qu'une courte lettre à ses parents, sans indiquer bien sûr l'endroit où elle allait. Elle est tombée enceinte très rapidement et elle se fit larguer aussi très rapidement. Elle se retrouvait donc enceinte, seule et dans une ville inconnue. Mon géniteur lui, était parti se l'a coulé douce à Honolulu à ce qu'il se disait. Ma mère, désespérée, voulut rentrer à la Push mais, son père qui était un homme assez dur lui interdisant d'y remettre les pieds, cela fendit le coeur de sa mère mais, celle-ci n'osait pas s'interposer. Ma mère trouva alors un travail de serveuse dans un petit restaurant qui s'appelait l'Astoria et me mis au monde quelques mois plus tard. La patronne de ce restaurant qui n'était autre que Judith, pris ma mère sous son aile et l'aida à se faire une situation. Dix ans après, ma mère travaillait toujours à l'Astoria, mais était également l'associé de Judith dans cette affaire. C'est là que Josh entre en scène, il venait manger là tous les midis et c'est comme ça qu'ils se sont rencontrés, aimer, marier et il m'a adopté. A part ma mère, Josh et Judith, je n'avais aucune autre famille. Je savais que j'avais des grands-parents maternels mais, je ne l'ai avait jamais vus. C'est donc pour cela que je suis tombé des nu quand j'ai su après la mort de Josh que j'allais être expédié chez mon grand-père (ma grand-mère est décédée il y a quatre ans si je me rappelle bien). Sur ce coup, je ne comprends pas le choix de ma mère qui était de faire de cet homme que je ne connais absolument pas, mon tuteur légal... je n'étais pas assez mortifiée de tout ce qui me tombait dessus, il fallait bien en rajouter une couche.
Donc, voilà où ce bus m'emmène. A la réserve de la Push, chez mon grand-père !
Rien que d'y penser, je m'enfonçais encore plus dans mon siège et j'en avais mal au ventre. Le stress me filait des brûlures d'estomac.
...
Vers dix-huit heures trente, j'arrivais à Forks. Le bus n'allant pas jusqu'à la réserve, il m'arrêta au terminal. Je remontais sur ma tête la capuche du sweat que j'avais intelligemment prévus, car bien entendu il pleuvait comme vache qui pisse. Je vous ai dit que la pluie était une des particularités de ce coin des Etats-Unis ? Ah vous êtes au courant ? Vous en savez des choses ! Pour en revenir à moi, la pluie ne me gêne pas du tout, j'adore ça même mais, j'aime encore plus quand je suis à l'abri, bien au sec. Le chauffeur m'aida gentiment à sortir mes trois grosses valises et les mettre à l'abri sous un pré-haut. Je m'asseyais sur un petit muret et regardais le bus s'en aller, me laissant dans ce que j'appellerais "la galère". Surtout que je ne savais strictement pas à quoi ressemblait mon grand-père, il devait être vieux... mais ce critère ne me serait pas d'une grande utilité dans ce genre d'endroit. Cela devait regorger de personnes âgées !
Quelques minutes plus tard, un 4X4 Ford Explorer bleu-vert s'arrêta devant moi, j'hésitais à me lever. Un homme s'extirpa de derrière le volant et vint à ma rencontre, je me levais un peu mal à l'aise. Il se planta devant moi et me regarda pendant quelques instants. Il était comme je me l'étais imaginer. Grand, imposant, intimidant... il me tendit une poignée de main, que je pris et serra.
"Va te mettre au sec dans la voiture, je m'occupe de tes affaires."
Sa voix était grave et ferme.
Je m'exécutais et m'assis du côté passager. Il me rejoignit et démarra la voiture. A peu près douze kilomètres séparaient Forks de la Push, ça n'est pas grand-chose mais, qu'est-ce que ça peut être long quand il y a un gros blanc. Je remerciais intérieurement celui qui avait inventé le poste radio. Je ne vis pas grand-chose de ce qu'était la Push à cause du rideau de pluie qui s'abattait sur nous. Je supposais qu'avec toute cette pluie, ça devait être verdoyant !
La voiture s'arrêta enfin, il coupa le moteur.
"Va te mettre à l'abri pendant que je rentre les valises."
"Je vais t'aider, cela ira plus vite."
"Bien."
Je tirais une valise jusque sous le porche pendant qu'il s'occupait des deux autres. Il ouvrit la porte qu'il n'avait apparemment pas fermé à clefs. Je pensais alors que ce n'était pas le genre de coin où il devait se passer grand-chose. C'était une petite maison de bois rouge, construite sur un étage, cela se voyait qu'elle ne datait pas d'hier mais, elle était bien entretenue. Il me fit signe d'entrer et me seconda, rentrant les valises derrière nous. Je parcourais les lieux du regard. L'entrée donnait directement sur le salon où était encastré une belle cheminée, juste devant étaient disposés deux bons gros fauteuils qui devaient être plus vieux que moi, mais semblaient très confortables, dans cette pièce il y avait également un sofa et une télé, ainsi qu'une petite table près d'une fenêtre où trônait un échiquier et tout près, une petite bibliothèque. Je reportais mon attention sur mon grand-père qui me regardait également.
"Je te fais faire le tour du propriétaire."
Il s'engagea dans un petit couloir à la gauche du salon où il y avait quatre portes.
"La première porte à gauche c'est les toilettes, la suivante c'est ma chambre. La première porte à droite c'est la salle de bain et la dernière à droite, c'est ta chambre."
J'acquiesçais à tout ce qu'il venait de me dire. Il ouvrit la porte de ma chambre, resta dans le couloir, me laissant entrer dans la pièce. Les murs étaient blancs et la chambre était meublée d'un lit deux places, d'une grande armoire, d'une commode et d'un bureau juste au-dessous de la fenêtre. C'était la chambre que devait occuper maman.
"Bien, je te laisse t'installer, je vais aller préparer le diner."
J'acquiesçais, il partit et je me retrouvais seule dans ma nouvelle chambre, mon nouvel univers. Je ne savais pas trop par où commencer... je me passais de l'eau fraîche sur le visage pour me réveiller. L'image que me renvoyais le mirroir n'était pas très flatteuse, les heures passer dans le bus n'avait pas arrangé les choses. J'installais mon ordinateur portable sur le bureau, posais des cadres photos sur les tables de chevets qui encadraient le lit, punaisais l'attrape rêve de ma mère au-dessus de la tête de lit et rangeais mes habits dans l'armoire. Voilà, j'étais installé... dire qu'il y a quelques heures j'étais encore dans ma maison, dans ma chambre, là où étaient tous mes repères. J'allais devoir tout recommencer ici mais, tout aller aussi tellement vite. Je n'osais pas aller à la cuisine, je ne savais pas trop quoi faire.
Mon grand-père m'appela quelques instants plus tard pour manger. Je rentrais dans la petite cuisine à la peinture beige où il s'affairait à couper un poulet rôti.
"Je peux t'aider ? Mettre la table ou je sais pas..."
"Oui je veux bien, les assiettes et les verres sont dans ce placard et les couverts dans ce tiroir."
Je m'exécutais et mis la table pendant qu'il écrasait des pommes de terres pour en faire de la purée. Je m'asseyais sur une chaise, jouant avec mes mains pour m'occuper et cacher ma nervosité. Il me servi et nous commençâmes alors à manger, dans le silence total. Je le détaillais discrètement. Ses cheveux longs poivre et sel étaient réunis en une tresse, sa peau brune était tannée et ridée. Son visage était large et ovale, son nez droit et légèrement épaté, ses yeux grands et noirs. Il était plutôt bien conservé pour son âge, il devait bien approcher des soixante-dix ans.
Le diner terminé, je me levais pour faire la vaisselle mais, mon grand-père m'arrêta.
"Tu as eu une dure et longue journée, tu as besoin de repos. Je m'occupe de la vaisselle."
Je n'insistais pas et rejoignis ma chambre. Je me souvenais alors que j'avais promis à Judith de l'appeler quand je serais arrivé à bon port.
"Alors, comment est le célèbre Daniel Nayati ?" Demanda Judith.
"Il est... je ne sais pas trop. On a échangé que quelques mots. Il n'est pas très loquace et j'avoue que je ne sais pas comment engager la conversation."
"Ca va venir, il vous faut du temps à tous les deux, pour apprendre à vous apprivoiser."
Je soupirais.
"Comment tu te sens ma chérie ?"
"Paumée, seule et abandonnée."
"Tu sais que je serais toujours là pour toi."
"Josh aussi disait ça..."
"Il t'aimait énormément, tu étais son petit soleil. Et comme je te l'ai dit le suicide est..."
"Une pulsion. Oui je sais."
Je ne sais pas si vous êtes au courant mais, le suicide est une pulsion qui dure à peu près quinze minutes. Pendant ce laps de temps, vous ne pensez plus à rien ni personne. Vous ne pensez pas à la douleur que vous allez infliger à vos proches. Vous ne pensez qu'à une seule chose, mourir. Josh avait essayé plusieurs fois déjà de mettre fin à ses jours mais, il avait peur de souffrir et avait appelé à l'aide au dernier moment. Mais cette fois là, il n'a pas appelé au secours, il s'en est allé. Me laissant seule dans le désarroi et la culpabilité. Puisque le suicide laisse en plus de la douleur, une grande culpabilité à l'entourage, une culpabilité écrasante, qui vous ronge jour après jour...
"Je sais que tu passes par de sales moments mais, je sais aussi que tu es forte et mature. Tu auras toujours cette immense perte en toi mais, tu avanceras quand même. Repose toi bien pendant ce dernier mois de vacances et à la rentrée il faut que tu sois reboostée. D'accord ?"
"Oui, je vais essayer. C'est promis !"
"Bien, c'est ça que je veux entendre. Bon, je vais te laisser te reposer. Tu m'appelles quand tu veux, de jour comme de nuit, tu n'hésites pas.
"D'accord !"
"Je t'embrasse ma chérie ! A bientôt."
"Au revoir."
Je m'asseyais sur le rebord du lit quand mon grand-père vint m'apporter des draps propres.
"Tu as besoin d'aide pour faire le lit ?"
"Non je m'en sortirais."
"Bien, si tu as besoin de quelque chose, je suis au salon."
"Daccord, merci."
Il était encore tôt, même pas vingt et une heure, mais cette journée avait été horrible et interminable. Je sentais un mal de crane pointé le bout de son nez et mes yeux me tiraient. J'allais au salon et trouvais mon grand-père assis dans un fauteuil, ses lunettes sur le nez et un livre à la main.
"Grand-père, je vais me coucher. Je tombe de fatigue."
"Bien, bonne nuit."
"Bonne nuit."
Je retournais dans ma chambre, enfilais un débardeur et un short et rentrais dans les draps frais qui sentaient bon la lessive. Je m'installais sur le dos, fixant le plafond, remettant de l'ordre dans mes pensées. Les larmes me montèrent une nouvelle fois et la boule qui s'était installé dans la gorge se fit plus oppressante encore. Ravalant une fois encore mes larmes, je roulais sur le côté, face à la fenêtre où la pluie venait s'écraser et j'essayais de toutes mes forces de penser à quelque chose de pas trop lugubre. Dans mes vains efforts, je m'endormis...
