Bonjour
La voici la voilà, ma nouvelle histoire. L'histoire m'a été suggérée par Elyrine qui continue de corriger les chapitres et à me conseiller.
Elle est différente de la dernière. J'espère qu'elle vous plaira. Le découpage est simple. Un chapitre est du point de vue de Dean, un autre du point de vue de Castiel. Celui du point de vue de Dean se déroule après son réveil et celui du point de vue de Castiel est un flash back pour expliquer comment ils en sont arrivés à se marier ...
Je vous laisse découvrir cette histoire avec ce premier chapitre.
Bonne lecture et à jeudi
Sydney8201
Musique du chapitre :
The Lost Boy de Greg Holden
Chapitre 1 : Réveil
« Une vie sans avenir est souvent une vie sans souvenir. »
Hervé Bazin
Dean n'avait aucune idée de l'endroit où il se trouvait ni même du jour ou de l'heure qu'il était. Il était installé confortablement – sur un lit, probablement – et fut soulagé en ouvrant les yeux de constater qu'il n'avait mal nulle part. Il prit quelques secondes pour regarder autour de lui. La lumière au-dessus de sa tête était trop forte et trop brillante, lui brûlant la rétine au passage. Il cligna plusieurs fois des paupières en tentant de se souvenir comment il avait pu arriver là.
Il se força à rester calme avant de tourner la tête sur le côté. Il était sur un lit. Les draps étaient blancs et le contour visiblement en métal. C'était un lit pour une seule personne. Il n'était donc pas chez lui. Et probablement pas chez une de ses récentes conquêtes.
Dean n'aimait pas la façon dont son cerveau avait du mal à faire le point. Il ne parvenait pas à réfléchir ou à se souvenir de ce qu'il avait fait juste avant de s'endormir.
Un bip insistant lui agressait les tympans. Il tenta de lever la main pour se frotter les oreilles et les yeux mais ne parvint pas à bouger. Il ne se sentait pas mal. Peut-être légèrement nauséeux mais c'était quelque chose qu'il ne connaissait que trop bien. Il avait tendance à boire bien trop quand il sortait. Et il se réveillait alors dans le lit d'une femme qu'il connaissait à peine et qui la plupart du temps était plus âgée que lui et probablement mariée. Il était le jouet qu'on utilisait juste pour se souvenir de ce qu'on ressentait quand on avait dix ans de moins.
Mais cette fois, c'était différent. Dean n'avait pas mal à la tête. Et il ne se souvenait même pas d'avoir bu. Il avait probablement été drogué. Ce qui signifiait qu'il devait prendre la fuite dès que possible. Il refusait de devenir l'esclave sexuel d'une femme dérangée. Il allait se battre.
Le bip continuait de résonner autour de lui et Dean aurait tout donné pour qu'il cesse. Il tourna finalement la tête de l'autre côté et sentit son cœur s'accélérer quand il réalisa d'où le son provenait. Une machine était reliée à lui, les fils glissant sous le tissu qui recouvrait son torse. Il observa la machine durant de longues secondes. L'écran montrait une courbe régulière. De toute évidence, elle était là pour mesurer son rythme cardiaque. Ce qui ne pouvait signifier qu'une seule chose. Dean était à l'hôpital.
C'était à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle. Une bonne car cela voulait dire qu'il n'était pas détenu par une psychopathe déterminée à l'utiliser encore et encore, n'avait pas été drogué et n'était pas en danger immédiat. Une mauvaise nouvelle parce qu'il ne se souvenait pas d'avoir eu un quelconque accident. Il songea une seconde à l'Impala et pria pour qu'elle n'ait pas été impliquée. Il était peut-être tombé et s'était cogné la tête. Cela expliquait tout. C'était même sans doute pour cela qu'il ne se rappelait pas de grand chose. Il souffrait probablement d'une commotion cérébrale.
Dean ferma les yeux et prit quelques secondes pour faire le point. Il ne pouvait pas bouger mais il sentait ses bras et ses jambes. Son incapacité à faire le moindre mouvement était sans doute due aux drogues que les médecins lui avaient injectées. Il n'avait aucune raison de s'affoler. Il devait absolument se calmer.
Il se força donc à respirer calmement par le nez tout en faisant le point sur ce dont il se souvenait.
Il s'appelait Dean Winchester, fils de John et Mary, frère de Sam. Sa mère était morte dans l'incendie de leur maison quand il avait quatre ans et son frère tout juste six mois. Son père était un ancien militaire qui les avait élevé comme des soldats plus que comme des enfants. Il avait abandonné les études juste après son diplôme et il le devait en partie à son oncle Bobby. Sam avait obtenu une bourse pour Stanford. Il allait devenir avocat. Il avait une petite amie que Dean adorait. Jessica Moore. Blonde, grande et incroyablement intelligente. Dean se sentit soulagé de parvenir à se souvenir de ces principaux détails. Il ne s'arrêta pas là et continua à lister toutes les choses dont il se rappelait.
Il avait travaillé un temps pour Bobby dans son garage à Sioux Falls avant de venir s'installer cet été en Californie, à Palo Alto, pour rester proche de son frère. Leur père vivait de son côté à Lawrence au Texas. Il buvait trop et était incapable de garder un travail. Ni Sam ni lui n'étaient réellement proches de John.
Sam venait tout juste de fêter ses dix-huit ans. Dean, de son côté, en avait vingt-deux. Il était serveur dans un café non loin de l'université. Il n'y travaillait que depuis quelques semaines mais avait déjà trouvé une amie parmi les autres employées. Charlie Bradbury était son équivalent féminin. Et si elle n'avait pas été lesbienne, il aurait probablement cherché à l'épouser un jour. Il s'était contenté de faire d'elle sa meilleure amie. Sa seule vraie amie dans son nouvel environnement, d'ailleurs.
Dean soupira. Il se souvenait de l'histoire de sa vie jusque là. C'était une bonne chose. Il était à présent temps de vérifier qu'il se rappelait également des choses plus générales. Il se souvenait de l'année. 2006. C'était facile, jusque-là. Le président était Georges W. Bush. Il se souvenait d'avoir été scandalisé par sa réélection et d'avoir vaguement fait campagne pour John Kerry. Il n'était plus tout à fait sûr du jour et du mois mais il avait déjà fêté son anniversaire et avait commencé à s'interroger sur le cadeau à faire à Sam pour le sien. Cela signifiait qu'ils approchaient du mois de novembre. Parfait. Dean avait les idées un peu plus claires, à présent. Il n'avait pas totalement perdu la mémoire. Il lui manquait juste les souvenirs précis de la veille. Mais cela lui reviendrait dès qu'on lui aurait expliqué ce qui lui était arrivé.
Il ferma les yeux une seconde avant de les rouvrir et de les baisser sur son torse. Il était couvert d'un drap et avait trop chaud. Il aurait aimé que quelqu'un vienne le trouver. Il tenta une nouvelle fois de lever le bras et fut soulagé quand il parvint à le sortir de sous le drap. Il le posa sur son ventre et soupira. Ses yeux se posèrent alors sur l'anneau en argent qui ornait son annulaire gauche. Ce n'était pas la bague qu'il portait jusque-là, l'alliance de sa mère qu'il ne quittait jamais et portait de toute façon à l'annulaire droit. Il devait y avoir une explication. Il était convaincu que tout prendrait sens d'ici peu. Il ne servait à rien de paniquer pour le moment.
Dean attrapa difficilement le bouton pour appeler l'infirmière et appuya plusieurs fois dessus pour être sûr qu'on l'entendrait. Il attendit ensuite quelques secondes. La porte de sa chambre finit par s'ouvrir sur une jolie jeune femme qu'il aurait tenté de séduire avec plaisir s'il n'était pas allongé dans un lit d'hôpital.
Il fut surpris de voir l'infirmière l'observer avec des yeux écarquillés et une main sur la bouche comme pour étouffer un cri de surprise. Il ne pouvait pas voir son visage mais il supposait qu'il devait être dans un sale état pour provoquer une telle réaction.
- Vous êtes… vous êtes… je… désolée… je vais aller chercher le médecin, lança l'infirmière avant de quitter la pièce.
Dean ouvrit la bouche pour lui demander ce qui était aussi surprenant dans le fait qu'il était réveillé mais n'eut pas le temps de le faire avant qu'elle ne parte. Le personnel laissait clairement à désirer dans cet hôpital. Il se promit de le faire remarquer au médecin quand il serait là. Dean baissa à nouveau les yeux sur la bague à son annulaire gauche. Elle était simple et sans rien d'extravagant. Parfaite pour lui s'il avait été du genre à porter une bague autre que celle héritée de sa mère. Il n'avait jamais porté un tel bijou à ce doigt. Cela signifiait bien trop. Et il ne voulait pas que les femmes qu'il croisait puissent penser une seule seconde qu'il était pris. C'était forcément une erreur. On avait pensé à tort que la bague lui appartenait. Peut-être qu'une de ses conquêtes l'avait laissée chez lui. C'était bizarre mais plausible.
Dean ferma les yeux et choisit d'attendre patiemment le médecin. Il ne rouvrit les yeux que lorsqu'il entendit quelqu'un entrer dans la pièce. Quand son regard croisa celui du nouvel arrivant, il sentit son cœur s'arrêter une seconde de battre dans sa poitrine. Ce n'était pas le médecin. C'était Sam. Mais cela ne collait pas avec ce dont Dean se souvenait. Son frère semblait… plus âgé. Fatigué et inquiet mais également surpris. Il avait les cheveux plus longs que dans son souvenir et paraissait bien plus musclé également. Dean l'observa une seconde, persuadé à présent qu'il devait rêver. Cet homme ne pouvait pas être son frère. Du moins pas son frère de dix-huit ans qu'il avait vu encore quelques jours plus tôt. Non. Ce Sam était un homme, probablement approchant la trentaine. Ce qui était ridicule, bien évidemment. Dean ne put s'empêcher d'éclater de rire. Il allait probablement se réveiller d'ici quelques minutes et pourrait ensuite raconter ce rêve étrange à son frère et à Charlie. Cela les ferait certainement beaucoup rire.
- Dean ?
Le jeune homme prit quelques secondes pour retrouver un semblant de calme avant de regarder son frère à nouveau.
- Sammy, tu es différent et franchement… quand je te raconterai ça demain, tu vas beaucoup en rire.
Sam ne semblait pas amusé par ce qu'il entendait. Il semblait au contraire inquiet, à présent. Perdu quant à l'état mental de Dean. Ce dernier devait reconnaître qu'il s'agissait là du rêve le plus étrange qui lui ait été donné de faire. Il espérait s'en souvenir pour pouvoir en rire avec son frère et sa meilleure amie.
- Dean, qu'est-ce que tu racontes ?
- C'est un rêve, c'est évident. Tu n'es pas… tu es mon frère mais pas mon frère de maintenant. Mon Dieu, on se croirait dans ce dessin animé où je ne sais plus qui voit son futur grâce au fantôme de Noël ou quelque chose du même genre. C'était sans doute pour me prévenir de l'horrible coupe de cheveux que tu aurais si je te laissais les faire pousser. C'est un avertissement. Dès que je suis réveillé, je t'emmènes de force chez le coiffeur.
- Un rêve ? Dean, ce n'est pas… tu te souviens pas ? Ce n'est pas un rêve, Dean. Tu viens de te réveiller. Tu étais dans le coma.
Dean éclata de rire à nouveau. Mais cette fois, dans un petit coin de son esprit, une alarme s'était déclenchée. Il l'ignora pour le moment.
- Ah ah, très drôle, Sammy. J'aurais été dans le coma pendant plus de dix ans ? Parce que la dernière fois où je t'ai vu, tu avais dix-huit ans et maintenant, on dirait que tu en as trente.
- Vingt-neuf, pour être précis. Mais… je pense que le médecin serait le mieux placé pour t'expliquer. Tu n'as pas été dans le coma dix ans, Dean… juste… juste quatre mois.
Dean fit un rapide calcul dans sa tête. Si son frère disait vrai – et il ne pouvait pas dire vrai, c'était inconcevable – cela signifiait qu'il avait trente-trois ans. Et qu'il ne se souvenait pas des dernières onze années de son existence. Onze ans. Non. Ce n'était tout simplement pas possible. Sam avança dans la pièce et Dean le suivit des yeux. Son frère semblait réellement épuisé.
- J'ai demandé à ce qu'ils appellent Castiel aussi. Il devrait être là rapidement. Je suis sûr que tu as envie de le voir et… je sais que ça t'aidera à y voir plus clair.
« Castiel ». Ça ne pouvait pas être un vrai prénom. Et Dean ne connaissait personne qui s'appelait ainsi. Il fronça les sourcils.
- Tu appelles le médecin par son prénom ? Et d'ailleurs, c'est quoi ce prénom ?
- Castiel n'est pas… tu ne te souviens pas de Cas ?
Dean secoua la tête. Il continuait de penser qu'il s'agissait d'un rêve. Mais puisqu'il ne semblait pas sur le point de se réveiller, il avait choisi de jouer le jeu. Histoire de voir ce que cette illusion lui réservait comme surprise.
- Non, je ne me souviens ni de Castiel ni de Cas. Je me souviens de Cassie même si je préférerais oublier son existence. Désolé.
- Castiel est… Dean, je ne sais pas si je dois te le dire mais… Castiel est ton mari.
Pendant une seconde, Dean fut incapable de réagir à cette annonce. C'était impossible. Il n'était pas marié. Il n'en avait pas envie. Ou du moins pas avant une bonne dizaine d'années. Et s'il devait se marier, il épouserait une femme. Il n'était même pas gay.
- OK Sammy, c'était très drôle jusque-là mais cette fois, ça devient ridicule. Je ne suis pas marié et je ne suis certainement pas marié avec un autre homme. Je ne suis pas gay.
- C'est ce que tu répètes à longueur de journée depuis que lui et toi êtes ensemble. Tu ajoutes ensuite que tu n'es gay que pour Cas. Tu ne te souviens vraiment pas ?
Dean aurait aimé dire à son frère qu'il s'en souvenait, ou même seulement qu'il acceptait de le croire. Il voyait bien que sa réaction faisait de la peine à Sam. Mais il ne pouvait pas mentir. Pas quand le mensonge était aussi gros et aussi invraisemblable. Dean n'avait même jamais été attiré par un homme. Il ne doutait pas que ce Castiel était un gentil garçon. Il n'imaginait toutefois pas une seconde qu'il ait pu l'épouser. Bien sûr, il y avait cette bague à son doigt. Cet anneau qui ressemblait à une alliance. Une que Dean aurait pu choisir s'il avait voulu se marier. Ce qu'il ne voulait pas et ne voudrait peut-être jamais. Et surtout pas avec un homme.
- C'est une blague, c'est ça ? Tu… tu as monté ce coup avec Charlie comme dans ce film avec Michael Douglas et Sean Penn, c'est ça… The Game, non ? C'est… tu es maquillé pour paraître plus âgé et je suis dans un faux hôpital et dans un faux lit et cette bague est une blague aussi. Et tu as inventé ce Castiel. Sammy, je dois te dire que c'est bien joué mais tu aurais dû inventer une histoire plus plausible. Et maintenant, tu vas me laisser partir et reprendre ma vie là où je l'ai laissée.
- Dean, souffla Sam, visiblement peiné.
Le jeune homme commençait sérieusement à paniquer. Il ne comprenait pas ce qui était en train de se passer. Il ne se souvenait de rien. Il ne pouvait pas avoir trente-trois ans. Il ne pouvait pas avoir oublié onze ans de sa vie et son propre mariage. Il le refusait catégoriquement.
- OK, si tout ceci est vrai, alors dis-moi qui est le président.
Sam grimaça une seconde.
- Donald Trump, répondit-il finalement.
- Ah, tu vois, ça ne peut être qu'une blague. Les Américains ne peuvent pas être suffisamment stupides pour élire ce type. Soyons réalistes une seconde.
- C'est ce que tu as dit le soir de son élection, confia Sam.
Dean secoua à nouveau la tête. Il aurait aimé être capable de se lever de son lit et de quitter sa chambre mais il se sentait trop faible pour tenter sa chance. Il se résigna donc à rester allongé mais il détourna les yeux, refusant de regarder son frère plus longtemps. Il pouvait sentir les yeux de Sam sur lui et il s'apprêtait à lui dire d'arrêter quand la prote s'ouvrit sur le docteur.
Il avait visiblement une petite trentaine d'année et les yeux bleus. Il ne portait pas de blouse, ce qui était une nouvelle preuve du manque de rigueur au sein de cet hôpital. Bien sûr, s'il s'agissait d'une mise en scène, c'était excusable. Dean le regarda approcher de son lit, les cheveux en désordre et des cernes sous les yeux. Il était pâle et avait les joues couvertes de barbe. Dean aperçut une bague à son annulaire gauche. Une bague semblable à la sienne. Il déglutit avec peine.
- Dean ?
Le jeune homme sentit la panique le gagner à nouveau. Quelque chose clochait dans cette histoire. Il ne connaissait pas cet homme. Ne l'avait jamais vu de sa vie. Et pourtant, il se comportait comme s'ils étaient proches.
- Depuis quand les médecins appellent leurs patients par leurs prénoms ? Demanda-t-il alors.
- Je… quoi? Demanda le médecin, visiblement surpris.
- Dean, ce n'est pas le médecin… c'est… c'est Castiel.
OK. Cette fois, Dean avait des difficultés à respirer. La machine à côté de lui commença à s'emballer et il dut fermer les yeux pour ne pas céder complètement à l'angoisse qui le gagnait. Il devait rester lucide et comprendre ce qui était en train de se passer. Mais c'était difficile pour lui de se concentrer sur autre chose que sur les battements frénétiques de son cœur. Ce n'était pas un rêve. C'était un cauchemar.
- Il ne se souvient pas de toi… Cas… il… il croit avoir vingt-deux ans. Il ne se souvient plus de tout le reste et… il croit que nous sommes toujours en 2006, énonça Sam.
Dean n'aimait pas entendre son frère résumer ainsi la situation comme si tout cela avait le moindre sens. Il rouvrit donc les yeux pour intervenir à son tour mais fut interrompu par l'arrivée d'un autre homme, cette fois vêtu d'une blouse. Le médecin, très certainement.
- Monsieur Winchester ?
Dean ignora son prétendu mari et son frère et se concentra uniquement sur le médecin qui approchait.
- Dites-moi que tout ceci est un rêve et que je vais me réveiller. Parce que c'était amusant au début mais je commence à légèrement paniquert, là.
- Dean, je te l'ai dit. Ce n'est pas un rêve, protesta Sam.
Dean leva la main dans sa direction pour le faire taire. Il ne voulait plus l'entendre. Il voulait que le médecin lui explique. Parce qu'il y avait forcément une explication logique à toute cette mascarade.
- En quelle année sommes nous ? Demanda-t-il alors.
Le médecin sembla surpris par sa question. Il jeta un coup d'œil à Sam puis à Castiel avant de reporter son attention sur Dean.
- Monsieur Winchester, nous sommes le 23 juin 2017.
- Non, c'est impossible… je… non, je n'ai pas trente-trois ans… je ne suis pas marié et je… je ne me souviens pas. Je… la dernière chose dont je me souviens c'est d'un dîner avec Charlie et Sam et… j'avais vingt-deux ans. Je… qu'est-ce qu'il se passe ?
Le médecin semblait inquiet mais professionnel. Dean resta donc entièrement concentré sur lui pour ne pas risquer de paniquer plus encore. Il avait toujours le cœur qui battait trop vite et trop fort. Il avait du mal à garder un semblant de calme.
- Il y a quatre mois, vous avez eu un accident de voiture. Un homme a grillé le feu rouge et percuté votre véhicule à pleine vitesse. Il a été tué sur le coup mais a propulsé votre voiture dans un fossé. Vous avez fait plusieurs tonneaux et votre tête à heurté le volant et la portière, causant un saignement à l'intérieur de votre crâne. Vous êtes dans le coma depuis ce jour. Nous ne pensions pas que vous finiriez par vous réveiller.
- Un accident de voiture ? Je ne m'en souviens pas. Je… est-ce qu'il est possible que j'ai oublié les onze dernières années de ma vie simplement parce que j'ai pris un coup sur la tête ?
Dean commença à se demander si son frère n'avait finalement pas dit vrai. Cela semblait réel. Et si c'était effectivement le cas, c'était pire que tout. Il avait perdu onze années. Un tiers de sa vie. Il n'avait aucune idée de ce qu'il était advenu des gens qu'il aimait durant cette période. Il n'avait aucune idée de ce qu'il avait fait de sa vie. Il ne se souvenait même pas de s'être marié. A un homme, de surcroît. Si c'était vrai, il n'avait aucune idée de ce qu'il devait faire maintenant.
- C'est un peu plus compliqué qu'un simple coup sur la tête, Monsieur Winchester. L'hémorragie cérébrale qui a découlé de votre accident était sérieuse et votre amnésie en découle probablement.
- C'est temporaire, n'est-ce-pas ? Demanda alors Sam d'une toute petite voix.
C'était la question que Dean aurait dû poser en premier. Peut-être avait-il juste besoin de quelques heures de repos pour se souvenir de tout. Si sa situation était définitive, il ne saurait pas quoi faire. Il ne pouvait pas rester marié avec un homme qu'il ne connaissait pas. Il ne pouvait pas vivre sa vie dans le mensonge.
- Je ne peux pas vous le garantir. C'est possible, oui. Mais il est également possible que cela soit définitif. Seul l'avenir nous le dira.
- Seul… attendez une seconde… vous ne savez pas ? Vous êtes médecin, non ? Vous devriez pouvoir nous donner une réponse un peu plus précise que cela. Vous vous rendez compte une seconde de ce que cela signifie pour moi ? J'ai perdu les onze dernières années de ma vie. Je ne me souviens pas d'être marié. Je ne connais même pas cet homme qui prétend être mon mari et… je ne sais pas quel métier j'exerce ni où. C'est… c'est un cauchemar.
Dean pouvait cette fois sentir la panique le gagner pour de bon. Il allait faire une crise d'angoisse. C'était quelque chose qui ne lui était plus arrivé depuis son adolescence. Depuis le jour où Sam avait fui le motel où leur père leur avait demandé de rester pendant que Dean était parti se changer les idées quelques minutes. John lui avait alors reproché d'avoir manqué à ses responsabilités, à la seule chose qu'il lui avait demandé de faire. Dean avait fini par retrouver Sam. Son frère s'était confondu en excuses inutiles. Dean n'était pas en colère contre Sammy. Il était en colère contre lui-même. Les jours suivants, il avait multiplié les crises d'angoisse à chaque fois que son frère était loin de lui. John ne l'avait plus regardé de la même manière ensuite. John. Dean n'était pas surpris de ne pas le voir dans sa chambre. Il doutait que son père fasse le déplacement pour le voir à l'hôpital. Ou cela pouvait signifier qu'il… onze années. C'était une longue période et Dean ne pouvait pas être sûr que son père était toujours en vie. Il préférait ne pas y penser pour le moment. Pas plus qu'il ne voulait prendre le risque de poser la question.
Il devait avant tout réussir à garder sa respiration sous contrôle. Ce n'était pas chose aisée. Il ferma les yeux alors que sa tête tournait. Il sentit finalement une main se poser sur la sienne. Celle où l'alliance reposait sans qu'il ait le moindre souvenir qu'on la lui ait passée à un moment. Il rouvrit aussitôt les yeux, persuadé qu'il s'agissait de son frère. A sa grande surprise, ses yeux se posèrent sur Castiel. Son mari. L'homme qu'il avait épousé mais qu'il ne connaissait pas. Ou qu'il ne connaissait plus. Il semblait savoir comment l'aider à gérer sa crise. Ce qui laissait sous-entendre qu'il en avait eues durant leur période ensemble. Dean résista à l'envie d'échapper à ce contact. Il ne pouvait pas être en colère contre Castiel. Il n'était responsable de rien.
- Dean, respire calmement. Compte jusqu'à cent dans ta tête. Tout va bien se passer, souffla Castiel d'une voix rauque.
Dean aurait voulu pouvoir suivre son conseil mais sa proximité ne faisait qu'alimenter sa panique. Cet homme avait posé ses mains sur lui. Ils avaient fait l'amour ensemble, s'étaient mariés et avaient choisi de finir leurs vies côte à côte. Et pour Dean, il était un parfait étranger. Il représentait tout ce que le jeune homme avait oublié. Il avait envie de lui demander de partir. Mais une nouvelle fois, ce n'était pas juste envers lui. Il se retint donc et se força à faire ce que Castiel lui demandait.
Après quelques longues minutes, il finit par reprendre le contrôle sur sa respiration. Il agita alors ses doigts sous ceux de Castiel et ce dernier retira aussitôt sa main de la sienne.
- Merci, murmura-t-il alors parce qu'il voulait se montrer poli.
Castiel sourit avant de reculer d'un pas. Dean tourna alors le visage à nouveau vers le médecin.
- Qu'est-ce qui va se passer maintenant pour moi ?
Il avait besoin de savoir ce que les prochains jours lui réservaient. Il n'avait aucune idée de la façon dont il allait reprendre sa vie en main. Comment pouvait-il retourner à son quotidien alors qu'il n'avait aucune idée de ce en quoi il consistait ? Il avait tellement de questions et il ne savait pas qui serait capable de lui apporter les réponses.
- Je veux vous garder ici pour quelques jours. Nous avons des examens à faire et vous aurez besoin de suivre une rééducation. Vos muscles ont en partie fondu depuis que vous êtes alité. Une fois que nous aurons les résultats, vous pourrez rentrer chez vous avec votre mari. Vous reviendrez pour votre rééducation mais je ne vois pas pourquoi nous vous garderions plus longtemps que nécessaire. Je suis sûr que vous avez hâte de quitter les lieux. Je vous encourage également à consulter un psychologue pour votre amnésie. L'hypnose est une méthode qui a déjà prouvé son efficacité dans des situations comme la vôtre.
Dean avait envie de rire. Il n'en revenait pas de ce que le médecin était en train de lui dire. Comment pouvai-il penser sincèrement qu'il avait envie de rentrer chez lui ? Il ne savait même plus où il habitait. Il refusait de retourner dans un endroit qu'il ne connaissait pas avec un homme dont il ne savait rien. Peu importait qu'il s'agisse de son mari. Pour Dean, c'était avant tout un étranger.
- Vous avez besoin avant tout de repos. Je vous encourage à dormir maintenant. Votre mari et votre frère peuvent rester encore un instant mais je préférerais qu'ils vous laissent récupérer ensuite. Je reviendrai vous voir ce soir pour commencer les examens.
Sur ces mots, le médecin quitta la pièce en silence. Dean le regarda sortir. Il avait encore des dizaines de questions à lui poser mais il n'était pas en état d'écouter les réponses. Il avait effectivement besoin de repos. Avec un peu de chance, il se réveillerait en 2006 et se rendrait alors compte que tout ceci n'était qu'un affreux cauchemar.
- Dean, je suis désolé, déclara alors Castiel.
Le jeune homme posa les yeux sur lui, surpris qu'il s'excuse.
- Pourquoi ? Demanda-t-il, perdu.
- Eh bien parce qu'il est évident que tu ne me reconnais plus et que ma présence est en partie ce qui a déclenché ta crise d'angoisse. Je peux partir, si tu le souhaites. Je comprendrais que tu préfères ne pas me voir pendant quelques jours. Sam me donnera des nouvelles.
Dean ne voulait pas le faire fuir. Il ne voulait pas se montrer cruel envers lui. Il avait dû l'aimer durant ces onze années pour l'épouser. Il lui devait bien de se montrer poli et aimable avec lui. La situation ne devait pas être beaucoup plus simple pour Castiel. Il avait perdu son mari et personne ne pouvait lui garantir qu'il finirait par le retrouver un jour.
- Je ne veux pas que tu partes. Je… je ne suis pas en colère contre toi non plus. Je suis juste... je suis perdu. Je ne te connais pas. Et je sais que c'est probablement une chose horrible à entendre mais… tout ceci ressemble à un cauchemar pour moi. Pas le fait qu'on soit mariés… je veux dire… je devais sans doute t'aimer pour accepter ta proposition.
- C'est toi qui m'a proposé de t'épouser, corrigea Castiel visiblement malgré lui.
- Oh…
Dean n'en revenait pas. Cela ne lui ressemblait pas. Qu'avait-il vécu durant ces onze années pour changer ainsi du tout au tout ? Il ne se reconnaissait pas.
- Depuis… ça fait combien de temps ? Qu'on est mariés, je veux dire.
Castiel sourit, visiblement nostalgique. Dean lui laissa le temps de répondre.
- Sept ans et deux mois maintenant. Mais on se connaît depuis dix et on est ensemble depuis neuf.
C'était une très longue période. Dean n'avait jamais eu de relation qui avait duré plus de quelques mois. La plus longue avait été avec Cassie. Et elle ne s'était franchement pas bien terminée.
- Excuse-moi une nouvelle fois si ce que je m'apprête à dire n'est pas agréable à entendre mais… enfin, je ne suis pas gay. Ou du moins je ne l'étais pas avant. Et je veux bien croire que tu es quelqu'un de génial mais je me vois mal virer ma cuti juste pour être avec toi.
Il sut qu'il avait blessé Castiel à la façon que ce dernier eut de détourner aussitôt le regard. Il s'excuserait plus tard. Pour le moment, il avait besoin de comprendre. Il n'avait jamais été attiré par un homme. Et à cet instant précis, même s'il était parfaitement capable de reconnaître qu'il trouvait Castiel séduisant, il ne ressentait aucun désir physique pour lui.
- Tu n'étais pas gay quand je t'ai rencontré. Moi si. Ça a été le coup de foudre… pour moi, bien sûr. Toi, tu voulais juste qu'on devienne amis. Ce que j'ai accepté… parce que je voulais juste passer du temps avec toi. Je ne saurais pas te dire ce qui t'a fait changé d'avis mais un jour tu… tu m'as simplement dit que tu avais besoin de moi. Que j'étais ton seul repère et que tes sentiments avaient évolués. Ça s'est fait naturellement même si ça n'a pas toujours été simple.
Dean fit un rapide calcul dans sa tête. Il avait rencontré Castiel l'année de ses vingt-trois ans. Il travaillait encore probablement au café. Castiel était peut-être étudiant à l'époque. Il semblait plus âgé que Dean, mais pas de beaucoup.
- Où est-ce qu'on s'est connu ? Comment et… j'ai tellement de questions. Je ne sais même pas quel métier j'exerce aujourd'hui. Je ne sais pas où on vit.
- Peut-être que ce n'est pas le moment de poser toutes ces questions, Dean. Tu as besoin de te reposer, rappela Sam.
Dean le foudroya alors du regard. Il se fichait de ce que le médecin avait pu en dire. Il ne trouverait jamais le sommeil sans en savoir un peu plus sur l'homme qu'il était devenu. Sam sembla le comprendre puisqu'il leva les mains devant lui en signe d'apaisement avant de se laisser tomber lourdement sur une chaise. Castiel, quant à lui, prit place sur le rebord du lit.
- Tu étais serveur au café juste à côté de l'université où je terminais mon doctorat. Comme je te l'ai déjà dit, pour moi, ça a été le coup de foudre. C'était la première fois que cela m'arrivait mais tu m'as vite fait comprendre que tu n'étais pas gay et nous sommes devenus amis. Quand j'ai eu mon diplôme, j'ai trouvé un poste dans la même université, comme professeur, et j'ai continué à venir te voir régulièrement. Et puis ta colocataire a déménagé pour aller vivre avec sa petite amie et je t'ai proposé de venir habiter avec moi. On est restés dans l'appartement durant trois ans avant de trouver une maison. Puis on s'est mariés et… tu as arrêté de travailler dans le café. J'ai réussi à te convaincre de reprendre tes études. Tes dessins… je les trouvais bouleversants. Magnifiques. Je n'étais pas le seul. Aujourd'hui, tu exposes et tu vis de ton art. Tu t'es fait un nom.
Dean prit quelques secondes pour absorber ce qu'il venait d'entendre. Il ne se souvenait pas d'avoir demandé à Charlie de devenir sa colocataire. Il ne se souvenait pas non plus qu'elle soit partie. Il se rappelait toutefois du vieux carnet dans lequel il lui arrivait de dessiner. Mais il n'avait jamais imaginé pouvoir en vivre un jour.
- C'est complètement dingue. Je… je ne me souviens de rien de tout ça. Je me souviens du café et de mon appartement mais… pas de ce que tu viens de me dire. C'est comme si tu me parlais de quelqu'un d'autre. Ce n'est pas moi. Du moins pas le moi qui est allongé dans ce lit. Ce Dean a visiblement réussi alors que moi, je… je suis juste serveur et je suis insouciant et stupide et… je ne suis pas stable.
- Tu n'as jamais été insouciant, Dean, intervint Sam.
Son frère avait peut-être raison sur ce point mais ça n'avait pas grande importance.
- J'aimerais pouvoir vous dire à tous les deux qu'entendre l'histoire de ma vie a suffi à me redonner mes souvenirs mais… non, désolé.
Castiel hocha alors la tête. Il semblait résigné. Dean pouvait le comprendre. Il avait face à lui l'homme avec lequel il avait vécu neuf années de sa vie et il était le seul à s'en souvenir. C'était comme une rupture. Une contre laquelle il ne pouvait rien faire. Dean avait de la peine pour lui.
- Les choses finiront peut-être par rentrer dans l'ordre avec le temps, tenta Sam.
- Et si ce n'est pas le cas ? Répliqua aussitôt Dean.
Car c'était là la véritable question. S'il retrouvait ses souvenirs, tout pourrait rentrer dans l'ordre. Mais si rien ne se passait, il allait devoir prendre des décisions et il ferait du mal à Castiel. Il n'en avait pas envie.
- Chaque chose en son temps, conclut Castiel.
Il semblait être quelqu'un de calme et de posé. Quelqu'un de totalement différent de Dean. Le jeune homme se demandait vraiment comment ils avaient pu finir ensemble. Au-delà du fait qu'il ne se souvenait pas d'être gay, il ne s'était jamais imaginé avec quelqu'un d'aussi différent de lui. Il avait toujours eu des petites amies qui lui ressemblaient. Avec le recul, c'était sans doute en partie pour cela que les choses n'avaient jamais fonctionné.
- Et toi, Sam ? Quoi de neuf dans ta vie ? Il y a tellement de choses qui ont dû changer pour toi aussi, lança Dean pour changer de sujet.
Il en avait assez de parler de lui. Il avait besoin d'entendre autre chose. D'en apprendre plus sur la vie de son frère et sur ce qu'il était devenu.
- Je suis avocat dans un cabinet en ville. Je suis marié avec Jess depuis cinq ans et elle attend notre premier enfant. Je suis heureux, Dean.
- Tu es marié ? Demanda le jeune homme.
Il n'était pas surpris par la nouvelle. Il avait toujours su que son frère et Jess étaient fait l'un pour l'autre. Et il allait devenir oncle. C'était une super nouvelle. Dean adorait les enfants. Il avait toujours été plus à l'aise avec eux qu'avec les adultes. Ils étaient plus francs. Plus facile à comprendre.
- Tu étais mon témoin, résuma Sam en le regardant dans les yeux.
C'était encore une chose dont Dean ne se souvenait pas. C'était comme avoir manqué l'événement le plus important de la vie de son petit frère. C'était horrible.
- Oh, bien sûr, je… je ne m'en souviens pas. Mais je vais devenir oncle et… c'est génial, non ? Je suis sûr que je serai un super oncle. Ton fils ou ta fille me trouvera bien plus cool que toi.
Castiel et Sam se regardèrent alors une seconde avant que ce dernier ne secoue la tête et ne reporte son attention sur son frère.
- J'en suis convaincu, oui.
Dean était persuadé que les deux hommes lui cachaient quelque chose mais il n'était pas sûr d'être prêt à l'entendre. Il avait déjà beaucoup d'informations à assimiler et il était trop fatigué pour en apprendre plus.
- Est-ce que je suis toujours aussi beau, au moins ? Je veux dire… je sais que j'étais plutôt canon à vingt-deux ans mais… qu'est-ce qu'il en est à trente-trois ? Demanda-t-il pour détendre l'atmosphère.
Sam sourit en secouant la tête alors que Castiel riait doucement. Ce fut finalement son mari qui répondit.
- Tu es toujours aussi beau, oui. Mais je suppose que je ne suis pas objectif. Tu devras poser la question à quelqu'un d'autre.
Dean haussa les épaules. A vrai dire, il s'en fichait. Ce n'était certainement pas le plus important. Il était juste soulagé d'avoir détendu les deux autres hommes. Il n'était de toute façon pas impatient de se voir dans la glace. Il n'était pas sûr d'être prêt à voir son reflet, à constater les changements. Il devait avoir des rides à présent, et les observer ne ferait que rendre la situation trop réelle à son goût. Il n'était toujours pas convaincu qu'il ne s'agissait pas seulement d'un cauchemar.
- J'espère juste que les années ont été plus clémentes avec moi qu'avec Sammy. Parce que franchement, est-ce qu'on peut parler de tes cheveux à présent ou est-ce que c'est un sujet tabou ?
Castiel rit une nouvelle fois, visiblement habitué à entendre les deux frères se charrier de la sorte. Dean était toujours angoissé et inquiet mais il avait appris à masquer ses émotions au fil des années. Il ne voulait surtout pas les laisser prendre le contrôle. Il préférait de loin continuer à penser qu'il allait se réveiller dans son lit, onze années plus tôt.
Il n'écouta pas vraiment la réponse de Sam à sa remarque. Il pouvait sentir ses yeux se fermer. Il était grand temps pour lui de dormir.
- Repose-toi, mon cœur. Sam et moi serons là à ton réveil.
C'était Castiel. Et en entendant le surnom qu'il avait employé pour s'adresser à lui, Dean sentit son cœur s'accélérer. C'était à la fois étrange et agréable. Il n'avait jamais vraiment aimé qu'on lui donne des surnoms. Mais dans la bouche de Castiel, cela ne semblait pas dégradant. Bien au contraire. Il était évident que le jeune homme l'aimait sincèrement. Malheureusement pour lui, ses sentiments n'étaient plus réciproques.
- Vous pouvez partir. Je suis un grand garçon, vous savez, protesta-t-il par réflexes.
A vrai dire, il préférait être seul. S'il venait à se réveiller dans ce lit d'hôpital, il ne voulait pas avoir de témoins. Il savait qu'en se rendant compte pour de bon qu'il ne cauchemardait pas, il craquerait. Et il ne voulait pas le faire devant son frère et son mari.
- Hors de question qu'on te laisse seul. Tu auras des questions à ton réveil et tu auras besoin de quelqu'un pour y répondre, assura Sam.
- Sauf s'il s'agit juste d'un mauvais rêve, murmura Dean sans pouvoir s'en empêcher.
Si tout ceci était réel, il aurait des excuses à présenter. Mais pour le moment, il s'en fichait. Il voulait juste dormir et oublier l'espace de quelques heures tout ce qu'il avait vécu depuis son réveil.
Il sentit qu'on le recouvrait correctement et il était prêt à parier qu'il s'agissait de Castiel. Il ne rouvrit pas les yeux pour le vérifier. Il n'avait plus la force de regarder le visage de l'homme qu'il avait épousé. Dean n'avait plus la force de rien.
- Fais de beaux rêves, mon amour, murmura Castiel.
Dean était presque sûr que c'était quelque chose qu'il lui avait déjà dit à plusieurs reprises. Les mots semblaient familiers. La façon de les murmurer aussi. Mais il ne se souvenait toujours pas, et c'était incroyablement frustrant. Il espérait sincèrement que tout serait réglé à son réveil. Qu'il aurait soit retrouvé sa mémoire soit eu la preuve qu'il s'agissait d'un cauchemar. Parce qu'il n'avait aucune idée de la façon dont il gérerait les choses si ce n'était pas le cas. Il ne savait pas comment il pourrait continuer à vivre sans se souvenir d'événements aussi importants que son mariage ou celui de son frère. Il réalisa alors qu'il n'avait pas demandé comment allaient Charlie et John. Il se promit de poser la question à son réveil si rien n'avait changé. Il espérait que la réponse serait positive. Qu'il n'y aurait pas de mauvaises nouvelles les concernant.
A mesure qu'il sombrait dans le sommeil, il finit par ne plus entendre les voix de Castiel et Sam qui discutaient calmement dans la chambre. Il crut entendre un prénom qui lui était vaguement familier mais il n'aurait pas pu le jurer. Il tenta de le mémoriser pour pouvoir poser la question à son réveil mais il lui échappa avant qu'il n'en ai le temps. Ce serait pour plus tard. Si tout ceci était réel, il allait avoir besoin d'en apprendre plus sur lui et sur sa vie actuelle. Sam et Castiel ne pourraient rien lui cacher, cette fois. Mais puisqu'il voulait croire qu'il se réveillerait onze ans plus tôt, il était inutile de faire plus d'efforts. Il se laissa donc emporter par le sommeil en emportant avec lui la voix rauque de Castiel et le nouveau visage de Sam. Il eut alors la sensation qu'il manquait quelqu'un à ce tableau. Qu'il y aurait dû avoir une personne de plus dans la pièce avec eux. Mais l'idée lui échappa quand il s'endormit pour de bon. Peu importait en fin de compte. Tout finirait par rentrer dans l'ordre à son réveil. Il ne pouvait pas en être autrement.
