Défi n°25 du Poney Fringant sur le thème "Entre la bataille du Pelennor et le départ pour la porte noire".
Il continuait de marcher, il suivait les autres, parce que c'est le principe quand on est dans une troupe. Ses compagnons de fuite ne s'arrêtaient même pas pour se reposer. Pourtant il mourrait de soif. Ils mourraient tous de soif. Mais pas question de s'arrêter, du moins pas pour ceux qui avaient encore un peu d'espoir dans leur cœur. Voilà ce qui les faisait avancer : l'espoir de recevoir des soins, de rentrer chez eux, de revoir leurs familles, à défaut de pouvoir leur offrir un avenir meilleur. Mais ce n'était pas son cas. Lui, il ne savait même pas pourquoi il les suivait. Peut-être pour se convaincre qu'il n'était pas seul. Ça le faisait marrer. Il y avait cru aux grands discours : une grande armée, tous unis derrière un même étendard, celui de la vengeance. Mais désormais il avait tout compris, on a beau être plein, on est jamais qu'un rassemblement d'individus isolés. On est toujours tout seul, du début à la fin.
La victoire serait facile, lui avait-on dit. La grande armée devait dépasser en nombre la faible garde de la cité ennemie, sans compter les renforts venus de la mer. C'est sûr qu'il n'avait pas vu la défaite venir. D'ailleurs, il n'avait pas vu grand chose de la bataille : des cris, un coup de lance, la retraite. Voilà... tout ça pour ça. Des années de marche et de faim, et à peine est-on arrivé sur le champ de bataille qu'il faut déjà battre en retraite, parce qu'ils tombent tous autour de nous, parce que les ennemis sont possédés par une rage incroyable, et que nos soit-disant chefs sont incapables. Cinq ans qu'on le bassinait avec les prétendus pouvoirs du Grand je-sais-plus-quoi. Et alors ? Ils sont où les pouvoirs ?
Parce que lui, il en avait rien à faire de la vengeance, lui il voulait tout simplement voir un peu autre chose que du sable. Juste un peu de verdure, et pas quelques buissons éparpillés ! Il voulait le grand jeu : les plaines légendaires du Gondor, celles dont il rêvait depuis qu'il était gamin... Finalement, ce n'était plus vers le Gondor qu'il marchait, il se dirigeait désormais en direction de la Porte Noire. Et en ce qui concerne les grandes plaines fertiles et verdoyantes, le Mordor, c'est pas vraiment ça...
Il se laissa tomber sur le côté. Marre de marcher pour rien. La blessure n'était pas belle, pas besoin d'être guérisseur pour le voir. Bon, bah c'est foutu... Au moins il ne sera pas mort dans cette saloperie de sable.
