Blanche Gardénia.

Mademoiselle Parker l'avait trouvée sur son lit, avec le livre de Botanique. Une fleur de Gardénia blanche. Soigneusement enrubannée, d'un ruban rouge sang. Pas de doute quant à sa provenance. Jarod avait encore fait des siennes. Un sourire triste étira ses lèvres, lorsqu'elle lut le mot accompagnant son cadeau. « La vie n'est pas toujours ce chemin noir. Regarde devant toi ». Comme toujours le sens de cette subtile métaphore lui échappait. Quoiqu'il en soit, si Jarod avait choisi cette date pour la lui offrir, le hasard n'était pas de mise. Parker saisit délicatement la fleur entre ses doigts. Se délectant du parfum suave et rassurant qui s'en dégageait. Son parfum. Ce parfum. Celui qu'elle portait le jour où on lui aurait ôté la vie, vingt ans plus tôt. Presque jour pour jour, aujourd'hui. Elle effleura les fragiles pétales, d'une beauté si parfaite à ses yeux, un peu pareil à sa beauté à elle, rien d'étonnant à ce que ce fut sa fleur préférée. Parker caressa du regard, l'onctuosité du blanc profond de cette fleur. Admirant sa pureté, elle cueillit une larme orpheline au coin de ses yeux. Cette fleur symbolisait tant pour la jeune femme. Les souvenirs immuables des ses jeunes années, heureuses, en sa présence.

Ces chaudes vacances d'été où, elles disposaient ensemble des bouquets de gardénias dans toute la maison, qu'elles égaillaient de leurs senteurs sucrées, de leurs éclatantes blancheurs. Bonheur éphémère. Elles fanaient immanquablement. Tout avait une fin.

Elle en avait eu la preuve, vingt ans plus tôt. Des mensonges, un ascenseur, une détonation, une vie qui chavire. Restaient les souvenirs. Elle en avait eu la preuve trois ans plus tôt. Des projets d'avenirs communs, des fiançailles, un contrat, un coup de feu, un coeur en éclats de verres. Restaient les souvenirs. Inaltérables, douloureux, éphémères, merveilleux, obscurs même parfois, incrustés à jamais en tout cas. Devant, elle ne voyait qu'un chemin noir, tracé en direction des portes de l'Enfer.

Mais une lueur d'espoir ravivait la flamme. Un génie au coeur pur, aux gestes sincères et doux... Mademoiselle Parker leva les yeux et aperçu son reflet dans un miroir, accompagné de deux silhouettes familières. Sa mère au regard rieur, et son fiancé au sourire réconfortant. Elle cligna des paupières. Parker était de nouveau seule. Elle huma encore cet enivrant parfum à la fraîcheur explosive, c'était sûrement cela l'amour. Blanche Gardénia.