NIGHT OF FATE

I. The most beautiful woman

PDV Emma.

Deux ans, c'est le temps depuis lequel je suis secrètement attirée par ma professeure de sciences. Dès les premières heures de cours, il m'a été impossible de penser à d'autres choses qu'à elle, femme sublime dont la pensée rétrécissait chaque semaine mes nuits un peu plus. J'étais seulement attirée, intriguée, mais la douleur qui surgissait dès que je n'étais pas en sa présence m'était inconnue, et j'ai simplement pensé que tout s'estomperait. Malgré ce désir de ne plus jamais penser à elle, je continuais à passer le plus de temps possible dans ces cours, proche de sa salle, et je ne parvenais à faire comme si tout allait bien qu'en sa présence, bien que son absence me fut plus néfaste encore que si jamais je ne l'avais rencontrée. Alors le dernier jour de l'année, j'ai décidé de ne pas aller la voir pour la remercier de m'avoir aidée, et suis partie avec un simple sourire, malgré le remord qui déjà prenait place en moi. Je savais parfaitement que l'été serait insupportable, mais je la reverrais l'année suivante, ou du moins était-ce ce que je pensais.

Pour cause de problèmes divers et variés, les psychiatres et assistantes sociales qui me suivaient ont conseillé à ma famille de m'inscrire dans un nouveau lycée, pour voir si un environnement plus sain me permettrait de retrouver une certaine vigueur, mais le vide qui me pesait depuis de longues années n'a fait que croître encore plus, creusant mon esprit pessimiste à grands coups d'espoirs vains. Et pendant cette année, alors qu'à tout instant son image surgissait devant mes yeux vides, je n'ai pu lui demander de ses nouvelles qu'une seule fois, par l'intermédiaire d'une amie, puisque mes horaires ne me permettaient pas de me rendre dans son lycée. Seulement, à la fin d'année, tout en travaillant dur pour mes examens, j'ai réalisé que des études m'attendaient l'année suivante et que je ne pourrais me pardonner de n'être pas une seule fois venue la voir, alors j'ai décidé de me rendre dans son établissement un soir. C'est avec son habituel sourire qu'elle m'a accueillie, mais ni elle ni moi n'avions le temps de s'éterniser, alors elle m'a proposé de passer chez elle à la fin des épreuves du baccalauréat, ce qui, au lieu de me calmer suite à la confirmation que je la reverrai, n'a fait que me faire bouillir d'impatience à l'idée d'en finir avec les pires années de mon existence qu'avait représenté le lycée.

C'est ainsi que je me suis retrouvée à la porte de Madame Mills, excitée et stressée à la fois, à l'idée qu'encore une fois je ressortirais d'ici mal en point, vidée de toute énergie par la stupidité dont j'avais fait preuve en croyant que lui dire au revoir me permettrait de définitivement tirer un trait sur cette étrange attirance. Seulement, ce n'est pas exactement ce qu'il s'est passé en cette fin d'après-midi…

En effet, malgré la gêne apparente due au fait de se retrouver assise sur le canapé de son ancienne professeure, nous avions entamé une discussion qui n'avait rien à voir avec elle ou moi, et qui pourtant nous a occupées des heures durant, si bien que nous n'avons pas vu survenir la tempête pluviale et les rafales de vents qui arrachaient sauvagement les branches et feuilles d'arbres, et qui recouvraient la ville entière d'une épaisse couche d'eau, qui se transformait en brume à cause du vent, formant un brouillard blanc impénétrable. Aussi, lorsque nous avons regardé par la fenêtre, j'ai dit qu'il était temps que je rentre chez moi avant que la gare ne bloque la totalité des trains. Seulement, au moment de prendre la direction du hall d'entrée, j'ai senti la main ferme de Regina m'empoigner le bras, m'invitant à passer la nuit ici, par précaution. À ce simple contact, une décharge électrique m'a traversée et, n'ayant aucunement envie de me retrouver seule dans le logement qui m'avait été attribué par mon foyer d'accueil, j'ai accepté, m'asseyant de nouveau sur le minuscule canapé de velours dans lequel nous avions passé l'après-midi. Pendant tout ce temps, j'avais lutté de toutes mes forces pour ne pas me trahir, essayant de ne plus la fixer comme si j'étais folle de sa beauté, mais avec la nuit tombante et la chaleur de la pièce, mes yeux s'étaient remis à fixer ce visage angélique, mon esprit ne prêtant plus attention à ses paroles.

Je voyais sa bouche pulpeuse bouger, dévoilant une lignée de dents impeccablement blanches et éblouissantes, et la cicatrice qui ornait sa lèvre supérieure ne la rendait que plus séduisante. Son visage fin était doté d'une peau pâle, et ses yeux marrons aux reflets sombres étaient si profonds que j'aurais pu me perdre à jamais dans l'infini puits qu'étaient ceux-ci. Ses longs cils noirs battaient lentement, et son regard vif m'a fait penser qu'elle semblait ignorer à quel point elle était belle, et à quel point une étudiante comme moi pouvait être attirée par elle. À cet instant, j'aurais voulu le lui dire, lui avouer toute l'ampleur de mes sentiments à son égard, mais je n'avais pas le droit de m'immiscer ainsi dans la vie de quelqu'un qui ne se souciait guère de moi. Tristement, mes yeux ont donc quitté les siens, s'égarant dans sa longue chevelure ébène qui encadrait son visage, cavalant sur ses épaules et retombant en une cascade de boucles noires jusqu'à son ventre, déferlant sur sa poitrine. Une mèche masquait une partie de son visage, et ma main n'avait qu'une envie, que je me rapproche pour que mes doigts puissent s'insérer entre ses cheveux, afin de replacer cette mèche rebelle derrière son oreille. Mais encore une fois, je me suis retenue, me reconnectant à ses paroles lorsqu'elle m'a appelée, ce que j'ai mis un moment à comprendre. En fait elle voulait juste savoir si je désirais manger quelque chose, mais puisqu'il était plus de 22 heures, nous avons décidé d'aller directement se coucher. Bien que gênée par sa question, elle m'a demandé, essayant de conserver le ton le plus neutre possible, si je désirais qu'elle installe un matelas dans le salon ou si cela ne me dérangeait pas de dormir dans son lit, qui était remarquablement grand pour une femme qui vivait toute seule. Suite à cette question, elle est devenue toute rouge, voyant à quel point je paraissais surprise par cette demande. Son regard était fuyant, et elle faisait mine d'être réellement occupée, lorsque j'ai finalement accepté, ne voulant pas passer plus de temps debout à installer matelas et couvertures.

Ne sachant trop que faire, j'ai demandé où se trouvait la salle de bain, et m'y suis enfermée afin de reprendre mes esprits. Je peinais à respirer, bien que mon visage était resté tout aussi neutre que d'habitude, et je voulais simplement me raisonner et me rappeler que j'étais la seule à éprouver ces sentiments. Aussi, après avoir souffler, je suis sortie de la salle de bain, marchant le plus lentement et dignement possible, persuadée que je n'aurais qu'à passer une nuit allongée à ses côtés, et que je pouvais amplement surmonter cela. Seulement, lorsque je suis arrivée dans sa chambre, elle était debout, dos à moi, et rangeait ses bijoux dans son armoire, sans s'être aperçue que je me trouvais derrière elle. Tous mes espoirs de rester sereine se sont alors envolés, au moment où j'ai remarqué que ses cheveux détachés plongeaient jusqu'au bas de son dos, et que son pull avait été remplacé par un débardeur noir, en dessous duquel aucune bretelle de soutien-gorge n'était visible. Mais le pire a été lorsque mes yeux sont descendus plus bas, et que j'ai remarqué qu'elle avait ôté son pantalon, montrant deux fines jambes élancées. À cette vue, j'ai malgré moi pleuré intérieurement, me voyant perdre tous mes moyens, et je n'ai réussi à détourner le regard qu'un instant, avant que mes yeux ne se fixent à ses fesses rebondies, à ses hanches parfaites et à son buste fin. Mes joues s'étaient empourprées, et une étrange sensation me parcourait, mon corps se réchauffant instantanément. Ma gorge était serrée plus que jamais, et je tentais difficilement de souffler pour ne pas mourir littéralement subjuguée par l'élégance des formes de Regina. Mon cerveau me hurlait de cesser de la regarder, mais corps s'est lié contre celui-ci et refusait obstinément de faire le moindre mouvement, et ce qui devait arriver arriva.

Alors que je me haïssais d'avoir accepté de dormir avec elle, ce qui me détruirait encore un peu plus si telle chose était possible, Regina s'est sentie observée et s'est retournée brusquement, me forçant à relever les yeux et croiser son regard. En une seconde, je me suis sentie fondre et, extrêmement gênée qu'elle m'ait prise sur le fait, j'ai détourné le regard au moment ou elle a haussé un sourcil d'incompréhension, me raclant la gorge pour faire comme si je n'avais pas passé cinq longues minutes debout, les yeux rivés sur son corps. Mais elle n'a pas fait le moindre commentaire, semblant ne pas prendre conscience du fait qu'elle soit si attirante. À ce moment précis, j'ai relâché ma haine dans mon esprit, plus en colère que jamais que personne dans cette société n'ait pu être assez courageux pour dire à cette femme à quel point elle était magnifique, car si elle avait eu conscience de ce que provoquait son corps moulé en d'harmonieuses formes chez les autres, jamais elle ne se serait affichée dans une telle tenue, surtout devant l'une de ses élèves. Alors j'ai tenté de me promettre que je lui dirais combien elle était belle et séduisante, afin qu'elle réserve son corps à l'être qu'elle aimerait réellement, et ne laisse pas de faux espoirs aux autres…