Titre: In Session FR
Auteur: TalksToSelf
Traducteur: NekoJilly
Série: Sherlock et son univers appartiennent à Sir Arthur Conan Doyle, Steven Moffat, Mark Gatiss et la BBC.
In Session
Ce n'était certainement pas la première fois qu'ils se faisaient réprimander de la sorte, mais la perspective d'être appelé dans le bureau de Lestrade n'était jamais agréable. John évitait délibérément le regard de Sherlock en attendant l'Inspecteur et s'était volontairement assis dans un coin, sa jambe le faisant souffrir plus que jamais depuis le retour dramatique du détective deux mois plus tôt. Fait plutôt drôle – étant donné que c'était psychosomatique. Sherlock errait dans la pièce, renversant une des plantes en pot de Lestrade et en examinant la terre tellement il s'ennuyait. John combattit l'envie de lui crier dessus, de lui dire d'arrêter de jouer au con et de s'asseoir pour l'amour du ciel, mais il avait assez crié et juré pour la journée (et il n'était que 11 heures).
Un Lestrade fou de rage débarqua dans la pièce, claquant la porte derrière lui.
"Je viens de passer les vingt dernières minutes à essayer de calmer la femme de la victime à cause de vous deux !" siffla-t-il de colère, s'enfonçant dans son fauteuil en leur jetant un regard noir. "Qu'avez-vous à dire pour votre défense ?"
"Désolé ?" suggéra John, sachant à quel point cette excuse était faible, au mieux. Sherlock se contenta de faire claquer ses dents d'indignation – les parents éplorés n'avaient jamais été son fort.
"Ne t'avises même pas de commencer" l'avertit l'inspecteur d'un ton cassant. "C'est la cinquième fois en cinq semaines ! Sherlock, tu dois des excuses à Mme Larter, au minimum."
"Oh, je suis vraiment désolé que votre amant ait éliminé votre mari" sortit Sherlock d'un ton sarcastique. Mme Larter n'était pas dans la pièce en cet instant mais l'aurait-elle été, le détective se serait montré tout aussi impitoyable. Lestrade poussa un soupir.
"Je vais étudier la question, mais notre jugement initial reste valable pour le moment" dit-il d'un ton ferme. "Elle insiste toujours sur le fait que son amant était avec elle la nuit de la mort de son mari."
"Bien sûr qu'elle lui fournit un alibi, espèce d'andouille…"
"Je maintiens que c'était un suicide" dit doucement John. Sherlock se retourna vers lui.
"Oh pour l'amour du ciel, ça va pas recommencer !" grogna-t-il. "Il a appris que sa femme le trompait, il a perdu son sang-froid, est parti faire un tour et n'est jamais revenu !' lança-t-il avec irritation. Il avait des preuves que le mari était allé trouver l'amant, mais personne n'était intéressé par un poil de chat roux et une tache de thé vert quand un homme gisait sans vie à la morgue. Personne ne l'écoutait ces derniers temps, peu importe à quel point ses déductions étaient justes, même si Scotland Yard avait fait des excuses publiques, que la presse avait rétracté toutes ses déclarations concernant son soi-disant "faux génie" et qu'une action en justice avait été déposée contre le Daily Mail pour diffamation – Sherlock avait perdu le pouvoir qu'il avait un jour détenu. Il n'avait plus aucune influence sur Scotland Yard. Il avait beau avoir blanchi son nom et prouvé qu'il n'était pas un génie du crime, il avait truqué sa propre mort – et cela le rendait indigne de confiance aux yeux du reste du monde.
"Ou il a découvert que sa femme le trompait après vingt ans de mariage et, le cœur brisé, a décidé qu'il était temps d'en finir" rétorqua John.
"Ouais enfin, tu es obsédé par le suicide" répliqua-t-il avec désinvolture. Lestrade et John se figèrent tous deux, et Sherlock sut à leurs têtes qu'il avait dit quelque chose qu'il n'aurait pas dû. La jambe du docteur tremblait légèrement dans son siège.
"Et à qui la faute ?" Le ton de John était doux mais légèrement venimeux. Lestrade fit courir sa main dans ses cheveux.
"Je ne peux plus le supporter, vous deux" dit-il en secouant la tête. "J'ai essayé de le tolérer et Dieu sait que j'ai fermé les yeux sur certaines choses plus de fois que je n'aurais dû mais, non… c'en est assez." John haussa un sourcil, il avait perdu assez de boulots dans sa jeunesse pour reconnaitre le discours du "vous êtes viré" quand il l'entendait, mais techniquement ils n'étaient pas employés à Scotland Yard – ils ne pouvaient donc pas être virés.
"Je ne veux pas faire ça mais… vous vous sautez à la gorge en permanence, et vous ne fonctionnez qu'en équipe. Le prend pas mal mon pote mais tu es vraiment insupportable sans le soutien de John" lui dit le détective. Sherlock haussa négligemment les épaules. "Et John, ton expertise médicale est toujours utile mais sérieusement, vous commencez à devenir une sacré responsabilité tous les deux."
"Si tu ne veux pas de notre aide, nous serons ravis de trouver un autre divertissement…" commença Sherlock d'un ton cinglant.
"Tais-toi Sherlock" grogna John – en partie parce que ce n'était pas un divertissement mais un travail – et un travail important avec ça (John savait que Sherlock en était conscient, il faisait juste l'imbécile pour le plaisir) – et en partie parce que merde, même lui savait la fermer quand il se faisait sévèrement réprimander.
"Nous VOULONS votre aide – à tous les deux. Ensemble. Mais vous ne travaillez plus 'ensemble' et franchement vous exercez une pression sur toute l'équipe." Lestrade croisa ses doigts sous ses lèvres, manie qu'il avait récupéré de Sherlock des années auparavant, tout en les observant tous les deux. John ayant l'air penaud et Sherlock faisant rouler une boule de poussière entre son pouce et son index.
"Ecoutez, je vais être aussi franc que possible: vous avez des problèmes."
"Ce bâtard a simulé sa propre mort – bien sûr que nous avons des problèmes" dit vivement John.
"Je t'ai déjà dit un nombre incalculable de fois pourquoi j'ai fait ce que j'ai fait, ce n'est guère de ma faute si tu ne sais pas accepter des excuses" répondit le détective, un soupçon de colère dans sa voix d'habitude si imperturbable.
"Tu ne t'excuses pas cela dit, tu expliques, tu rationalises et tu essayes de le justifier !"
"ASSEZ !" hurla Lestrade, cognant le bureau et récupérant l'attention des deux querelleurs. "Le fait est que si vous voulez tous les deux continuer à travailler en collaboration avec nous, nous allons devoir intervenir, avant que l'un d'entre vous ne tue l'autre ou, que Dieu nous vienne en aide, quelqu'un d'autre."
"S'il te plait, que ce soit Anderson" dit Sherlock.
"Je suis sérieux !" répliqua Lestrade avec exaspération.
"Tout comme moi !" soutint le brun.
"Je vais vous adresser à l'équipe des relations de travail de Scotland Yard" déclara Lestrade d'un ton sinistre.
"Non" dit rapidement Sherlock, avant que John n'ait le temps de répondre. "Pas de psychanalyse. Certainement pas. Je refuse."
"Sherlock…"
"J'ai dit non" grogna Sherlock.
"Dans ce cas vous ne me laissez pas le choix" déclara l'inspecteur dans un soupir. "Vous êtes tous les deux suspendus de tout travail en lien avec la police au Royaume-Uni jusqu'à ce que vous ayez complété cette thérapie."
"C'est du chantage !" dit le brun d'une voix rauque. "Tu ne peux pas…"
"Je peux et je vais le faire Sherlock. Hors de question de vous voir continuer à foutre en l'air toutes mes investigations. C'est moi qui risque ma peau à chaque fois et je suis déjà enfoncé jusqu'au cou dans le scandale que tu as laissé derrière toi." John ne pouvait qu'apprécier le ton de Lestrade, très peu de gens comprenaient que traiter avec Sherlock était souvent comme traiter avec un enfant gâté.
"Tu changeras d'avis" dit Sherlock tout à coup, un brin de suffisance faisant son apparition. "Tu vas te retrouver coincer. Tu auras besoin de moi. Comme toujours." Il sourit. "Tu vas tomber sur quelque chose d'inhabituel ou quelque chose que tu ne comprends pas et tu me demanderas de revenir."
"Sherlock" répondit Lestrade, les yeux désormais aussi acérés que des lames de rasoir. "Tu es parti trois ans, et sais-tu ce que nous avons fait ? Nous avons continué à vivre. Nous avons fait notre boulot. Nous avons attrapé les meurtriers, les trafiquants, les agresseurs et les petits délinquants. Alors oui, ça nous a pris probablement deux fois plus de temps qu'il n'en aurait fallu si tu avais été à portée de main, mais le fait est que tu n'es pas indispensable." John osa jeter un coup d'œil à Sherlock, et ne fut pas surpris de voir de la fureur dans ses yeux, du feu, du venin et une touche de peur. Les gens ne parlaient pas à Sherlock comme ça. Quelque part à l'intérieur de la coquille robotique et du cœur de glace, Sherlock était de toute évidence blessé par cette pensée. Qu'il n'était pas nécessaire, qu'il n'était pas permanent, que les gens pouvaient et allaient continuer leur vie sans lui. Comme avec tous les enfants, lorsqu'ils avaient besoin d'être réprimandés il fallait le faire fermement, sans ça ils ne le prenaient pas au sérieux.
"L'équipe est très douée, ils ont des thérapeutes qui s'occupent de toutes sortes de choses qui arrivent au sein de l'unité…" Lestrade continua comme s'il ne venait pas de blesser profondément Sherlock. "Ils vous fourniront quelqu'un à qui vous pourrez parler, pour voir si vous ne pouvez pas régler vos problèmes, ok ?" Il semblait presque sympathique.
"Je… pense que ce serait une bonne chose pour nous" dit éventuellement John. "Lestrade a raison… ça ne marche plus entre nous, peut être qu'une thérapie pourrait aider ? Ça vaut certainement le coup d'essayer…" Il s'interrompit maladroitement, parce que par expérience, admettre que vous aviez besoin d'aide était parfois le stade le plus dur – mais faire en sorte que Sherlock s'assoie et parle de sentiments n'allait vraiment pas être une partie de plaisir.
"Qu'en dis-tu Sherlock ?" demanda Lestrade.
"Eh bien, ce n'est pas comme si j'avais réellement le choix, pas vrai ?" répliqua Sherlock, irrité.
"Je vais leur envoyer un mail et leur faire savoir que vous allez participer, ils vous renverront une lettre avec l'heure et la date de votre premier rendez-vous" dit Lestrade en démarrant l'ordinateur. Sherlock avait toujours un air renfrogné.
"Assure-toi qu'ils envoient la mienne au domicile de mon frère" marmonna-t-il sombrement.
"Vous ne vivez toujours pas ensemble ?" Lestrade voulait juste faire la conversation, mais il avait touché une corde sensible.
"De toute évidence non" grogna le détective – c'était un point sensible pour lui. Sherlock ne s'était pas attendu à une fanfare ou un défilé le jour de son retour, il savait que John serait en colère, blessé, empli de chagrin et choqué, mais il ne s'était certainement pas attendu à ce que son meilleur ami lui interdise l'accès à leur appartement. Et peu importe à quel point Sherlock le harcelait, John restait catégorique sur ce point. Pour le moment tout du moins, le 221b était hors limites pour Sherlock, ce n'était plus chez lui désormais et il ne pouvait rentrer comme si rien ne s'était passé. Bien sûr, ça et le fait qu'il avait dû atterrir dans une des nombreuses chambres d'ami de Mycroft n'arrangeait en rien l'humeur du détective ces derniers temps. John ne flanchait pas devant les ronchonnements de son ancien meilleur ami, il restait sur ses positions sur ce coup.
"Tu sais, nous n'aurions pas besoin d'aller faire une thérapie si tu m'avais déjà pardonné" se plaint Sherlock alors que les deux se glissaient hors du bureau, laissant Lestrade taper leur mail.
"Ce n'est pas si facile et tu le sais." John fourra ses mains dans ses poches alors qu'il boitait sur sa jambe qui menaçait de lâcher à tout moment.
"Ça ne l'est jamais avec toi" murmura Sherlock, relevant son col. Il fit quelques pas en avant puis se retourna rapidement pour regarder John droit dans les yeux. L'ancien militaire avait effectué un sacrément bon travail à éviter ce regard, il n'allait pas se laisser manipuler par les yeux d'un homme mort – Sherlock avait une façon presque hypnotisante de regarder les gens et John savait que la meilleure façon de battre Sherlock à son propre jeu était tout simplement de ne pas jouer, mais il avait été pris au dépourvu et pour toute la durée de la phrase suivante de Sherlock, leurs yeux furent connectés.
"Puis-je rentrer à la maison John ?" supplia-t-il, ayant presque – presque – l'air désolé. John fit la grimace, pas seulement une petite moue du coin des lèvres, tout son visage était froncé, créant des rides qui lui donnaient l'air douloureusement plus vieux qu'il ne l'était réellement. John voulait revenir à ce qu'ils avaient autrefois, l'amitié la plus forte qu'il ait jamais connue, mais Sherlock était dangereux – John avait toujours su que Sherlock était dangereux, mais avant, à l'époque où il lui faisait confiance, le danger avait semblé nouveau et excitant, une aventure exaltante. Sans ce sentiment de confiance, l'aura menaçante qui émanait du détective semblait trop dangereuse, trop douloureuse, s'impliquer serait insensé. Le docteur ne pouvait laisser Sherlock revenir habiter dans leur appartement. Il avait envie de le voir bouder sur le canapé, ou découper les doigts d'un pauvre homme au nom de la science – mais il ne pouvait pas, en toute bonne conscience, inviter cet homme à revenir. Il y avait trop de douleur, trop de tragédie. John ne pouvait regarder Sherlock sans voir ses yeux sans vie, son sang sur le pavé.
Tout ceci se produisit durant la fraction de seconde où leurs yeux furent connectés. John détourna le regard, regardant le sol avant de dire doucement.
"Non, Sherlock." Le brun tourna les talons et s'éloigna, laissant John fixer son dos.
Et me voilà de retour après une trèèèèèès longue absence ^^
Cette histoire sera en 10 chapitres, j'essayerai de poster assez rapidement mais je suis pas mal occupée donc ne vous attendez pas à en avoir un tous les 3 jours xD
Bonne journée à tous et merci d'avoir lu :D
