Bonjour à tous,
J'ai souhaité m'essayer à une autre relation que le Caskett. Cet écrit est pour l'instant un one shot, qui pourrait devenir two shot. Mon idée de départ était "s'il avait dû se passer quelque chose entre Kate et Espo". Je précise que la temporalité de l'écrit se situe avant la série, peu après l'arrivée d'Espo au 12ème et avant que Castle ne suive Beckett sur ses enquêtes. Je sais parfaitement que la relation Kate/Espo telle qu'on la voit dans la série n'inclut pas ceci, mais c'est un écrit de fiction. J'espère que cela vous plaira. A bientôt peut être pour la suite!
Maintenant petit crochet pour les lecteurs de "Raisons et sentiments", le prochain chapitre est en cours d'écriture et devrait être publié. Je profite de cette autre publication pour vous remercier pour vos messages de reviews et de soutiens (quelque soit la situation) toujours aussi touchants.
Doing the wrong thing
Janvier 2008
Ce soir une nouvelle enquête avait été close et c'est avec un soulagement bien supérieur à celui que je ressentais habituellement que j'avais aidé à préparer les pièces pour le procureur, permettant l'inculpation de notre suspect. C'était bien évidemment toujours un moment important, mais vu l'enquête je m'étais senti particulièrement affecté. L'affaire que nous avions close quelques heures auparavant, m'avait fait replonger dans mes souvenirs lorsque j'étais dans les forces spéciales. Certes, j'en étais sorti indemne mais j'y avais laissé quelques parties de moi. J'avais perdu des compagnons, j'avais entrevu des horreurs, avais été touché aussi bien mentalement que physiquement.
Et alors que je pensais ces évènements bien derrière moi, cette affaire les avait fait ressurgir de pleine force et j'avais enchaîné les cauchemars pendant toute la durée du cas. Etant plutôt pudique lorsque cela concernait mes affects, je n'avais que très peu communiqué avec les autres membres de mon équipe sur mon état de trouble ; mais je me doutais bien qu'ils n'avaient pas été sans remarquer mes comportements. Après tout, ils étaient eux-mêmes des détectives et n'était-ce pas notre job d'avoir des intuitions sur les comportements humains?
Une fois le carton contenant les dossiers à destination du procureur fermé, je saluais mes coéquipiers et prenais la direction de mon domicile. Arrivé à mon appartement je fonçais dans la salle de bains, souhaitant que cette me douche me lave autant l'âme que le corps. La cascade d'eau brûlante avait au moins pour effet de me détendre musculairement mais au sortir de la salle de bains je me rendais bien compte qu'il fallait que je me change les idées. Habillé d'une serviette qui cerclait ma taille j'ouvrais le réfrigérateur et y découvrais une bouteille de bière orpheline. Je n'allais probablement pouvoir me contenter d'une seule bière ce soir et j'avais envie de sortir. Ainsi dans mon placard je prenais un jean, un t-shirt propre et un sweat à capuche et cinq minutes après j'arpentais les rues de New-York.
Je me rendais dans un bar où j'avais mes habitudes, ce n'était pas spécialement ce qu'on appelait un bar à flics mais la présence d'un billard faisait qu'il n'était pas rare que je croise certains de mes collègues. Une fois dans le bar je me dirigeais tout de suite vers le comptoir pour commander une pinte de bière. Pendant que le barman s'occupait de ma commande je balayais des yeux le lieu et fus surpris de voir à l'autre bout du comptoir ma patronne Kate Beckett, assise devant un verre de whisky. Elle semblait totalement dans son univers, ne se souciant apparemment que très peu de l'environnement qui l'entourait.
Cela faisait maintenant plusieurs mois que j'avais été affecté à l'équipe de Beckett au 12ème, c'était la plus jeune femme à devenir lieutenant de police. Ses états de service étaient irréprochables, sur le terrain elle était très affutée, en interrogatoire avec les suspects brillante et avec les familles des victimes savait faire preuve d'une réelle empathie. Quand bien même ma tendance machiste je la considérais tout à fait légitime à ce poste, et l'admirais d'autant plus qu'elle en avait certainement enduré deux fois plus qu'un homme pour en arriver là. Elle avait du et devait encore à l'heure actuelle composer avec les commentaires grivois et déplacés que l'on réserve généralement aux femmes qui s'aventurent dans des milieux très masculins. Mais au lieu de répondre par l'agressivité ou d'être sur la défensive, elle se contentait de faire son boulot. Au bout de quelques mois de collaboration avec elle, je comprenais aisément pourquoi elle avait le meilleur taux de résolution des affaires criminelles de la ville.
En tant que lieutenant en chef, elle dirigeait son équipe dont je faisais partie avec autant de fermeté que d'agilité ; une main de fer gantée de velours. Son respect pour ses collaborateurs n'avait d'égal que celui qu'elle suscitait autour d'elle. Pour le moment elle n'avait pas eu de partenaire attitré et jonglais avec les forces disponibles en présence lorsqu'elle était au poste. Mais d'après moi c'était plutôt une question de tempérament, elle n'était pas réellement du genre à avoir un coéquipier. Cette relation demandait en effet un haut degré d'engagement personnel et justement s'il y avait une chose qu'elle n'était pas c'était personnelle. Néanmoins la voyant seule ainsi au comptoir, j'osais m'avancer vers elle pour aller la saluer.
Je m'emparais de ma bière et m'approchais de sa place, je vis qu'elle jouait avec une chaîne en argent, sur laquelle elle faisait tournoyer une bague. Il me semblait reconnaître la maille de la chaîne qu'elle portait traditionnellement autour du cou, mais c'est la première fois que je voyais la bague.
- Yo Beckett, fis-je pour attirer son attention.
Elle releva la tête vers moi, enfermant la bague dans la paume de sa main et sembla surprise de me voir par ici.
- Espo qu'est-ce que tu fiches là?
- Tout comme toi je bois un verre.
- Assieds-toi, me dit-elle me désignant le tabouret haut à ses côtés.
- Tu es sûre? Je ne veux pas te déranger.
- Si je ne voulais pas être dérangée je serai restée chez moi pour boire un verre. Et je te le propose, alors assieds-toi.
- Ok boss.
Elle me lança un regard légèrement réprobateur au fait que je l'appelle boss, mais nous n'échangeâmes pas là dessus. J'étais plutôt étonné qu'elle se montre si sociable envers moi. Sans être une sauvageonne, elle ne participait que très rarement aux activités extraprofessionnelles de la brigade, trouvant le plus souvent une excuse pour rentrer chez elle lorsque nous allions boire un verre. Alors que j'avais pris place à ses côtés, un petit flottement s'installa, certainement parce que ni l'un ni l'autre n'avions trop l'habitude de nous voir dans un autre contexte. Il n'était pas rare lorsque deux personnes se rencontraient pour la première fois ou se retrouvaient dans un autre environnement, il y ait ce moment de flottement, d'ajustement. Elle le géra très habilement en trinquant avec moi au nom d'une nouvelle affaire résolue.
- Hard case, me dit-elle d'un air entendu.
C'était une affirmation et non une question. Elle était plutôt du genre directe, à ne pas passer par quatre chemins et semblait avoir clairement mis les mots sur les raisons de ma présence ici ce soir. Ainsi, je ne répondais pas verbalement et me contentais d'un hochement de tête, préférant étouffer dans ma mousse la vague d'émotion que ce simple constat factuel avait sollicité.
- Espo je ne te regarderai pas différemment tu sais, me dit-elle de but en blanc.
- Comment ça? répondis-je.
Elle esquissa un léger sourire avant de boire son verre d'une traite et de l'index faire un signe au barman de lui resservir l'équivalent avant de me dire.
- Cette affaire t'a particulièrement agitée, on vient de craquer le cas. Certaines enquêtes sont plus émotionnelles que d'autres, c'est normal.
Intérieurement je me dis qu'elle n'avait pas laissé sa perspicacité habituelle au vestiaire en venant ici.
- C'était si évident? finis-je par demander, validant par la même son intuition.
- Disons que je suis flic...donc oui.
L'alcool, la fatigue accumulée jouant probablement contre mon self-control je buvais une nouvelle gorgée de bière et m'ouvrais quelque peu.
- On pense que rentrer au pays, quitter les forces suffit pour tourner la page ; mais c'est faux. C'est quelque chose qui ne te quitte pas, que tu as à vie en toi.
- Tu ne dois pas voir cela comme une faiblesse. Au contraire, sers t'en comme une force et tu deviendras un bon flic.
- Et toi c'est parce que tu es blessée que tu es une super flic?
- Shut up, me répondit-elle avant de liquider le contenu de son verre me faisant comprendre qu'elle n'était pas disposée à parler d'elle.
Je n'insistais pas plus, même s'il n'était pas utile de s'appeler Sigmund Freud pour comprendre que cette fille était une écorchée vive. En une gorgée je finis le contenu de ma bière et l'interrogeant du regard je lui demandais implicitement si elle souhaitait un autre verre. Devant son accord tacite, je commandais deux whisky au barman. Durant les minutes qui suivirent nous continuâmes à échanger tout en buvant nos verres. Cette fille avait une résistance impressionnante à l'alcool. Pour ma part, je commençais à manifester des premiers signes de faiblesse, mes yeux se plissant légèrement à cause de l'accumulation de fatigue et de tension. Cela n'échappa pas à Beckett qui me dit :
- Allez, je te ramène chez toi.
J'appréciais avec plaisir sa proposition. Nous payâmes nos consommations avant de quitter l'établissement. Elle avait garé sa Crown Victoria dans une rue adjacente au bar. Une fois installée au volant, je lui donnais les indications pour aller chez moi. Le trajet ne fut pas long, mais ne pas avoir à le faire à pieds me réjouissais. Je lui indiquais mon bâtiment à un bloc, elle se stationna donc sur le bas-côté, mettant le frein à mains.
- Merci de m'avoir raccompagné.
- Pas de quoi.
- Tu veux monter pour un dernier verre?
Je me surprenais moi-même de ma proposition. Une fois de plus nous sortions totalement de nos rapports conventionnels et habituels. Ceci dit elle ne sembla pas outrée et accepta. C'est ainsi que cinq minutes plus tard nous rentrions dans mon appartement. Je me débarrassais de manière négligée de ma veste, avant d'aller vers le coin cuisine où d'un placard je sortais deux verres ainsi qu'une bouteille de whisky. Pendant ce temps là Beckett avait pris place sur le canapé, sa veste en cuir déposée sur le rebord, elle était à présent en chemise blanche. La rejoignant, je posais les verres sur la table basse en face de moi et nous servais un nouveau verre. Elle me remercia et nous trinquâmes une nouvelle fois ce soir.
Je l'avais remarqué déjà pour les autres verres, elle avait tendance à fermer les yeux en buvant comme si cela l'aidait à chasser des images qu'elle ne saurait voir. J'avais tenté un peu plus tôt dans la soirée, de savoir ce qu'elle cachait mais je m'étais fait refroidir. Mais objectivement il y avait forcément une histoire pour cette fille. Ce genre de nana d'ordinaire ne finissait pas flic à la brigade criminelle. Elle était issue d'une famille privilégiée de Manhattan, avait reçu une bonne éducation, avait de solides connaissances en droit étant capable, j'avais pu l'observer par moi-même, de tenir la conversation avec des hommes de loi. Et il y avait quelque chose qui expliquait sa trajectoire sociale. Le métier de flic nous apprenait cela aussi, que les parcours des individus n'étaient pas totalement libres. Nous étions tous un peu pré-déterminés par notre origine sociale, ethnique, sexuelle. Sans m'en rendre compte je souriais tentant de deviner quels éléments avaient pu jouer dans sa vie qui expliquaient qu'elle en était là.
- Qu'y a-t-il de si risible Espo? me demanda-t-elle interrompant mes pensées.
- Je repensais à ma première réaction lorsque j'ai appris que tu serais ma patronne.
- Et? fit-elle arquant les sourcils de manière interrogative m'engageant à développer mon propos.
- Venant des forces spéciales, on va dire que me faire diriger par une femme, de surcroît plus jeune que moi ne m'est pas apparu comme très naturel.
- Quoi? "pour toi il faut des couilles pour diriger des hommes? Moi je suis comme les grenouilles, je ne développe que ce dont j'ai besoin".
Je m'étouffais dans mon verre, totalement surpris par les mots de ma patronne. Je savais qu'elle avait de sacrés répliques, était plutôt du genre sarcastique ; mais je n'avais jamais été un témoin aussi direct d'un de ses sarcasmes. Ainsi, elle me surprit en venant vers moi pour me taper dans le dos. Mais ne m'attendais pas à un geste si spontané, alors je fis un mouvement en avant et le contenu de mon verre se projeta directement sur son chemisier. Nous éclatâmes tous deux de rire à la situation, visiblement suffisamment épris de boisson pour en rire. Je me fondis en excuses pendant que Beckett s'était levée devant moi et déboutonnais sa chemise, faisant jour sur un débardeur qui épousait ses formes. Le whisky s'était répandu et le tissu de son débardeur était plus transparent au niveau de son ventre, dessinant ses abdominaux.
- Qu'est-ce que tu fous Beckett? m'enquis-je.
- Ca me paraît évident non? Ma chemise est détrempée.
- Tu es une femme, je suis un homme ; dis-je banalement.
Seulement ce n'était pas une banalité. A mes yeux Beckett était un peu une entité que j'avais rendue asexuée ; elle était ma supérieure hiérarchique et nos relations ne m'avaient jamais amenées à la considérer autrement. Mais l'alcool désinhibant, je percevais ce soir la femme et mon corps d'homme réagissait fortement à l'image devant moi.
- Merci, une autre évidence Captain Obvious? fit-elle railleuse.
Mais pris par une pulsion totalement irrationnelle je me levais, me jetant avidement sur ses lèvres. Cependant elle ne m'accorda pas le baiser, usant de ses mains sur mon torse pour m'écarter d'elle avant de me demander :
- Espo qu'est-ce qu'il te prend?
- Je suis désolé fis-je. J'ai juste pensé que vu la soirée, on en avait tous les deux besoin. Juste une nuit et demain on en reparle plus. Je suis désolé Beckett.
Mais alors que je tentais de me sortir de cette situation quelque peu embarrassante, j'entendis vaguement "et puis merde" et je sentis mon corps projeté en arrière sur le canapé. Quelques secondes après elle était à califourchon sur moi, m'embrassant à pleine bouche.
