Cette histoire se situe entre Joy (5X06) et Last Resort (5X09)
Je l'ai commencée avant de savoir pour la prise d'otages mais comme vous le verrez, à part le nom, les deux situations n'ont rien à voir l'une avec l'autre.
Je suis absolument nulle pour les trucs médicaux.... Et j'espère ne pas avoir écrit trop de bêtises en ce qui concerne le Japon et la culture nipponne. Si c'est le cas, que les connaisseurs veuillent bien me pardonner...
Novembre 2008.
- Vous tenez le coup ?
- Je vais très bien. Ce n'est pas de moi qu'il faut s'inquiéter.
La réponse, sèche, avait jailli automatiquement. Wilson lâcha un petit soupir, maudissant sa maladresse. Mais il était lui-même désemparé.
Il se laissa tomber sur le siège, en face de Cuddy. Ne put s'empêcher d'admirer son cran. Il fallait bien la connaître pour déceler la femme inquiète derrière l'impeccable Directrice du Plainsboro Hospital. Son maquillage dissimulait habilement ses yeux cernés et ses traits tirés. Son dos, très droit, ne s'appuyait pas contre sa chaise. Seuls les doigts de sa main gauche, crispés sur un objet invisible, trahissaient son état émotionnel. Il passa une main lasse sur sa nuque. Et contrôla sa voix autant qu'il le put.
- Des nouvelles ?
Lisa Cuddy braqua son regard sur le visage défait de l'oncologue. Regretta une fraction de seconde sa dureté. Mais elle ne pouvait absolument pas se permettre la moindre faiblesse. Son estomac se noua. Non ! Ne pas penser à ce qu'"ils" pourraient leur faire. Lui faire. Sur un ton neutre, presque clinique, elle entreprit d'expliquer la situation.
- Elle est très déterminée. Elle est dangereuse. Désespérée. Une sorte de Bonnie qui truciderait la moitié de l'hôpital pour sauver son Clyde, selon House.
Sa voix n'avait pas flanché sur le nom du diagnosticien, retenu de force par une jeune femme armée et résolue à sauver son complice, blessé par balle. Un bref sourire éclaira même son visage. Quel soulagement d'avoir, même pour un court instant, entendu la voix ironique et familière. Elle avait imaginé ses yeux perçants, pour une fois sérieux, et ce petit pli vertical entre ses sourcils, alors qu'il détaillait les exigences de la preneuse d'otages.
- Elle est prête à tout. Elle fera n'importe quoi pour sauver ce type. Elle se prend pour Bonnie. C'est son Clyde. Vous comprenez Cuddy ? Une tigresse. Elle est tout à fait ... comme vous. Version bridée. Alors que vous c'est plutôt version débridée. Mais je m'égare...
Elle avait deviné son sourire mi-ironique, mi-attendri dans le phrasé précis et soudain chaleureux. Et bien failli craquer. Mais sa propre voix était restée ferme. Il avait raison. Elle ferait tout ce qu'il faudrait pour les sortir de là.
- Ne faîtes pas le con, House. Même les chats n'ont que neuf vies.
Il avait ri. Oui, mait'esse. Elle avait raccroché après lui, brutalement. Et s'était détournée, cachant son visage au policier qui se tenait près d'elle.
Elle est tout à fait comme vous.
Alors elle avait serré les poings, ri à son tour. Avait fait face à l'inspecteur Curtis, admiratif. Et le policier s'était surpris à penser qu'il n'aimerait pas l'avoir comme adversaire. Et qu'il allait être périlleux de la manipuler.
- Madame, laissez-nous nous occuper de ça, d'accord ? Nous avons l'habitude des situa...
- Inspecteur ! C'est mon hôpital, ce sont mes employés... Et croyez-moi, vous n'avez jamais jamais eu à gérer quelqu'un comme le Docteur House !
- Vous pensez qu'il pourrait créer des problèmes ?
Non, en réalité, elle pensait qu'il se montrerait d'un sang-froid à toute épreuve. Mais qui savait ce que son esprit brillant, caustique et tordu, pourrait bien inventer ? Et surtout, elle ne voulait pas être mise à l'écart. Elle croisa le regard compréhensif du flic. Lâcha un peu du lest.
- Si quelqu'un peut se sortir de là, c'est bien lui. Et il ne fera rien de stupide. S'il était seul en cause... Mais il ne risquera pas le vie du Dr Hadley.
Le léger coup à la porte interrompit le récit de Cuddy. Alors que Curtis entrait, elle sourit à Wilson. L'objet qu'elle tenait jusque-là étroitement serré entre ses doigts tinta sur le plateau de verre. L'oncologue reconnut une balle de pistolet. LA balle. Celle que Lisa Cuddy avait elle-même retirée de l'abdomen de House, deux ans plus tôt.
Il frissonna. C'était ses amis. Tous les deux.
Et ils étaient cinglés.
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House regardait le téléphone, pensif. Ça ne servait à rien de se faire du mouron pour Cuddy. Elle allait maîtriser la situation. Contrôler les angoisses de WIlson, ou pire, ses élans de sympathie. Elle négocierait avec les criminels et mènerait les flics par le bout du nez. Mais il haïssait la peur qu'il avait senti sous son assurance de surface. Il détestait la sentir fragile. Parce que... cela le rendait vulnérable aussi. Depuis ce fichu baiser et bien qu'ils aient décidé de faire presque comme si rien n'était arrivé, ils étaient ... connectés. S'il y réfléchissait, cela existait entre eux depuis bien plus longtemps. Il secoua la tête. Et merde ! Le moment était mal choisi pour l'introspection. Une chose à la fois. Numéro Treize d'abord. La jeune femme, bien que pâle et un peu nerveuse, se maîtrisait de manière satisfaisante. Elle examinait la plaie au thorax du blessé. Il savait déjà à quoi s'en tenir. Le gars n'allait pas probablement pas s'en sortir. Mais leur propre survie dépendait du temps qu'il lui restait. Et de sa capacité à manipuler la fille.
- Hé, vous ! Ray se sent plus mal. Faites quelque chose !
Ne jamais contrarier un individu armé. Claudiquant péniblement, il passa près de l'Asiatique. Enregistra le mouvement de recul réprimé. Classa l'information comme intéressante.
- Allons, Numéro Treize, laissez-moi voir le mort en sursis.
Sa collaboratrice, pourtant habituée à ses débordements verbaux, haussa un sourcil étonné. Mais les yeux bleus du diagnosticien étaient étrangement rassurants. Il savait ce qu'il faisait. Comme d'habitude, personne ne comprendrait jusqu'à ce que tout devienne lumineux et qu'ils se sentent tous très idiots.
Il ne sursauta pas quand l'arme s'enfonça durement dans ses côtes.
- S'il meurt, vous mourrez. Tout les deux.
- Alors, laissez-nous l'emmener au bloc. Il a une balle dans le ventre, une autre près du poumon. Je suis assez bon. Mais je ne fais pas de miracles. Et je ne suis même pas chirurgien. Il me faut une équipe, du matériel. Il a besoin d'un scanner. Je ne sais même pas où sont les balles.
- Vous le soignez ici. maintenant. Où bien je la descends.
- C'est ça ! Butez-la. Et qui m'assistera ? Vous ? Le flingue dans une main, les écarteurs dans l'autre ?
Son ton était dangereusement moqueur. L'arme s'enfonça un peu plus.
- Vous allez...
- Keiko.
Le gémissement interrompit le grondement de colère. Le blessé s'agitait, balbutiant des phrases incohérentes, son pistolet tremblant dans sa main fébrile. La sueur brillait sur son visage exsangue. Soudain, il se dressa, les yeux fous, une main comprimant son abdomen. Les réflexes des deux médecins jouèrent instantanément. House le saisit aux épaules alors que Numéro Treize plaquait ses jambes sur la table d'examen. L'arme tomba. La complice, vive comme l'éclair, la ramassa sans cesser de menacer les deux médecins.
- Qu'est-ce que vous faites ? Lâchez-le.
- On essaie juste d'éviter qu'il répande ses tripes partout. C'est dégueulasse et les femmes de ménage rechignent toujours à ramasser les viscères. Numéro Treize, une seringue de Propofol . Vite.
La jeune femme fut stoppée dans son élan par le pistolet brandi sous son nez. House se débattait toujours avec le blessé qui faiblissait à vue d'oeil.
- Bon sang, Numéro Treize, vous le distillez ou quoi cet anesthésique ?
- Pas d'anesthésique, juste un calmant, articula péniblement le truand.
- Ce n'est pas une bonne idée.
- Ça vous ... arrangerait que je sois dans les vapes, hein, toubib ? Ne le laisse pas faire, Keiko. Vérifie...
- Tu ne me fais pas confiance ?
La voix était froide. L'homme venait de commettre une erreur tactique. Deuxième indice pertinent : la jeune femme était fière. Le pli vertical s'accentua sur le front du médecin. La durée de vie du patient venait de diminuer un peu plus. Enfin, si ce crétin ne voulait pas dormir...
- 150 mg de Diazepam, Numéro Treize.
Il fit la piqûre sans trop de douceur, défiant le type du regard. C'était risqué. Mais il lui fallait savoir à qui il avait à faire. Pas de réponse violente. Pas de réponse du tout. Il était hors jeu. Quand il fut suffisamment détendu par le Valium, il l'examina et s'attaqua au plus urgent. Ce fût vite réglé. Les balles n'étaient pas resorties. Et l'hémorragie abdominale interne était importante. Trop. Même un laparotomie d'urgence ne le sauverait pas.
- Vous auriez dû prendre le Docteur Cameron en otage. Elle est urgentiste. Elle adore faire de la couture. Moi, je ne suis pas doué pour les travaux d'aiguille. Elle est beaucoup plus serviable que moi... Mais je suis moins curieux.
