Prologue
Inssaf était allongée sur son lit de paille, dans une grotte cachée aux environs de la ville de Masyaf. Il faisait nuit mais l'aube ne tarderait pas. Inssaf ne trouvait pas le sommeil. Elle réfléchissait. Trop. Était-ce vraiment une bonne idée d'aller voir directement le Maître des Assassins dans son bureau ? Car si il n'acceptait pas sa proposition -ce qui était très probables- il n'hésiterait pas a lui trancher rapidement la gorge pour avoir osée s'introduire dans la ville de la Confrérie. Au mieux ! Au pire, il lui enverrait toute une armada d'Assassins a ses trousses qui se chargeraient de lui offrir une mort lente et douloureuse, si toutes fois elle arrivait a s'échapper. Très risqué en somme. Mais Inssaf n'avait ni famille, ni ami, ni bien,... Elle n'avait rien. Et quand on n'avait rien, on n'avait rien a perdre. C'était une évidence pour elle. Oui, elle. Inssaf était une femme. Et c'était l'un de ses plus gros problèmes. Les femmes n'étaient pas les bienvenues dans ce "métier".
Inssaf soupira. Elle en avait assez de réfléchir. Une fois en face de lui, elle improvisera, voilà tout ! Elle avait déjà assez fait preuve d'intelligence comme ça. Car, vous vous en doutez, Masyaf n'était pas aisée a trouver. Bien au contraire. Elle en avait fait des recherches ! Oh que oui ! Mais jamais aucune trace de la ville secrète. D'ailleurs, elle n'avait su qu'il existait une cachette servant aux Assassins que par la bouche d'un Templier qui discutait avec un des leurs. Mais elle n'était pas arrivée a trouver ne serait-ce que l'ombre de ce lieu caché. Abandonnant les recherches le temps de se reposer, elle était repartie a Jérusalem. C'était alors qu'elle l'avait vu. Un homme encapuchonné, doté d'un habit blanc et grisâtre qui vagabondait rapidement sur les toits de la cité, tel une ombre, en direction de la porte d'entrée ouest. Un Assassin ! Et il s'était apprêté a quitter la ville. Ni une, ni deux, Inssaf l'avait pris en filature, abandonnant complètement l'idée de se détendre. Sur le trajet, elle avait faillit se faire repérer plus d'une fois ! Comment rester invisible devant un roi de l'invisibilité ? Serte, Inssaf était très bonne dans ce domaine. Depuis qu'elle avait tragiquement perdu sa mère -et en passant, sa seule famille- elle errait seule dans les rues, bondées le jour et désertes la nuit, de Jérusalem. Elle avait alors rapidement développé différentes techniques d'approches aussi subtiles que silencieuses pour survivre. Voler quelques fruits et légumes aux marchands, subtiliser des petites pièces aux passants, semer les gardes quand elle se faisait surprendre, mendier dans les rues quand elle était trop fatigué, voilà a quoi s'était résumé l'enfance d'Inssaf.
Donc oui, elle était discrète. Mais pas aussi discrète qu'un Assassin. Les Assassins étaient formés par l'un de ces critères. D'ailleurs, Inssaf s'était douté que l'Assassin l'avait repéré, bien qu'il avait fait semblant du contraire. Elle se doutait que, une fois arrivé a destination, il s'empresserait d'aller en informer son Maître. Aussi, c'était pour cela qu'elle avait établit son camps a proximité de la ville. Le temps que le calme retombe. Et c'était comme cela qu'elle s'était retrouvée au milieu d'un massif montagneux. Elle en avait alors profité pour étudier les environs de la forteresse. Ses points faibles et ses failles, tout comme ses points forts et ses atouts, les horaires des tours de gardes ainsi que leurs changements. Rien n'était laissé au hasard et Inssaf l'avait bien compris.
Et voilà maintenant six jours qu'elle attendait bien sagement le moment opportun. Elle avait décidé qu'elle passerait a l'acte le lendemain, jugeant qu'elle avait assez patienté et qu'elle savait désormais tout ce qu'il y' avait a savoir. Elle aura donc passé une semaine pile dans les montagnes servant de berceau a la forteresse. Inssaf n'était pourtant pas patiente. Elle détestait attendre ! Mais elle avait compris que sans cela, son plan serai lamentablement tombé a l'eau.
La jeune femme s'étira sur son lit de paille avant de se lever en baillant. Elle effectua quelques étirements dans le but d'échauffer ses muscles avant d'aller chercher de quoi se mettre sous la dents.
Elle sortit de la petite grotte en se saisissant de sa petite gourde d'eau vide et contempla le merveilleux spectacle qui se dressait devant elle. L'aube. Le soleil levant et la douce fraîcheur matinale donnaient une petite touche de rose a la ligne d'horizon. Inspirant profondément l'air frais, la jeune femme s'élança. Elle marchait dans une direction qu'elle connaissait bien maintenant. Arrivée a destination, elle contempla le magnifique dattier qui se dressait devant elle. Elle l'avait trouvé un jour après son arrivée, en essayant de compter le nombre de gardes entourant la muraille de Masyaf toute en veillant a conserver une distance raisonnable de celle-ci. Depuis, elle y allait chaque matin, faisait le plein de provisions, et revenait les déposer dans sa grotte. Elle se nourrissait exclusivement de dattes donc. Les dattes sont excellentes pour la santé et sont une bonne source de fibre alimentaire pour un Homme. Pour le plus grand bonheur d'Inssaf.
Comme un rituel matinal, elle grimpa habilement au palmier et fit tomber une bonne trentaine de délicieux fruits. Une fois cela fait, elle redescendit de l'arbre tout aussi agilement et ramassa son butin. Elle les stocka dans la poche de son long habit et prit un chemin diffèrent de celui de l'aller. Sur le chemin, Inssaf grignota quelques uns de ses fruits tout en prenant soin d'enlever le noyau. L'air se refroidit et elle rabattit sa longue capuche sur sa chevelure attachée, profitant au maximum de sa chaleur.
Après une trentaine de minutes de marche, ses pas la menèrent enfin devant une magnifique rivière d'eau potable. La jeune fille allait la bas à l'aube, l'heure où l'eau était la plus fraiche. Elle y remplit sa gourde et fit enfin le chemin inverse, retournant tranquillement en direction de sa grotte toute en observant l'imposante forteresse de loin. Touts les détails étaient bon à prendre. Et c'est comme cela qu'elle remarqua un Assassin somnolant calmement contre un des murs au pied la forteresse.
Inssaf stoppa sa marche et le fixa, sceptique. N'était-il pas sensé surveillez les alentours ? Preuve que les Assassin n'était pas aussi parfait que cela. Ou peut-être que ce n'était qu'un novice ? Dans tout les cas, Inssaf en était sur, si il se faisait prendre, il allait le payer cher. Elle haussa les épaules. Dommage pour lui. La jeune fille fit quelques pas en mangeant une datte avant de s'arrêter et de faire demi-tour. Elle se saisit du noyau du fruit et s'approcha d'un tas de foin, assez éloigné de la muraille. Elle posa un genou à terre, visa ledit Assassin un œil fermé, et bloqua sa respiration. Comptant jusqu'à trois, elle propulsa maladroitement le noyau d'un geste moue et lent en direction de l'homme. Le projectile n'atteins pas sa cible. Il claqua contre le mur à environ un mètre de l'Assassin, mais le bruit du choque eu l'effet de le réveiller en sursaut. Inssaf eut un sourire satisfait. Même si elle était complétement lamentable niveau précision, elle venait de le sauver d'un savon non ? Ni une, ni deux, la jeune femme sauta dans le tas de foin avant que l'homme ne la remarque. Elle jeta un coup d'œil discret vers l'Assassin et le vit reprendre son poste, droit comme un i. Bien. Mais maintenant, comme allait-elle sortir ? Elle soupira d'exaspération. Quel idiote. Elle se mouva aussi silencieuse qu'un chat et pris position, prête à bondir.
Au moment où l'Assassin tourna légèrement sa tête encapuchonnée, Inssaf se jeta littéralement sur l'occasion et s'enfonça entre la végétation montagneuse.
Arrivée dans sa petite grotte, la jeune fille soupira et se laissa mollement tomber sur son lit de paille. Elle passa toute la journée à passer en revu son plan, encore et toujours. Aucune faute ne lui serait permise, et elle le savait. Le soleil était maintenant à son couché. Inssaf finissait d'aiguiser son couteau avec une pierre pointue. Elle s'étira en baillant, mangea les quelques dattes qui lui restaient et but quelques gorgés d'eau fraiche. Elle rangea son couteau dans sa botte avant de se coucher confortablement sur la paille et de s'endormir. Demain serait un nouveau jour.
