01
Par une chaude nuit d'été
Il n'était qu'ombre.
La lune, presque pleine, était haute dans le ciel étoilé. Ses rayons éclairaient faiblement les élégants couloirs de pierre du manoir. Les rideaux, véritables fantômes, se balançaient indolemment dans l'air sec de cette nuit particulièrement chaude. Il n'y avait pas un chat.
Et lui n'était qu'ombre. Juste une ombre de plus. Rien de plus, rien de moins.
Ce travail, simplement un de plus. La récompense était alléchante, la tâche simple. Éliminer les deux renégats et tous ceux qui se dresseraient sur son chemin.
Zero s'accroupit dans l'ombre. Un bruit suspect, un peu plus loin, le fit sursauter. Non, il devait rester calme. Tout irait bien, tant qu'il resterait calme. Une servante passa d'un pas précipité, complètement inconsciente de sa massive présence. Pas évident de passer inaperçu dans ce genre de lieu étroit, surtout pour un Qunari haut de plus de deux mètres ! La servante disparut derrière une nouvelle porte.
Zero se releva, tendit l'oreille. Tout paraissait aussi silencieux qu'avant, mais ces employés savaient se faire discrets. Il fallait redoubler de prudence, s'armer de patience. C'était dans ses cordes. Tout doucement, pas à pas, il s'approcha de sa nouvelle cachette. Il ne pouvait pas se permettre de se précipiter. Ce travail était essentiel, pour deux bonnes raisons. La première était la formidable récompense qui l'accompagnait. La seconde, et non des moindres : les deux renégats étaient sérieusement dangereux.
Une nouvelle porte s'ouvrit, et un couple d'amants en sortie en gloussant. Zero espéra qu'ils passeraient leur chemin, il n'avait pas l'intention de s'attaquer à des innocents. Par chance, ils ne vinrent pas dans sa direction. Parfait.
Sans un bruit, il continua son chemin. La sueur ruisselait sur son front, mais il l'ignora. Rien ne saurait le détourner de sa tâche.
Chaque pas dans ce long couloir lui paraissait durer une éternité. Pas question de trahir sa présence. Il n'avait pas le pied aussi léger qu'un Elfe, et ne possédait certes pas la taille avantageuse d'un Nain pour ce type de travail ! Quand il repensait à cette étrange rencontre avec le messager de son employeur, il se demandait pourquoi il avait été choisi. D'ordinaire, on ne lui confiait pas de travail requérant agilité ou furtivité. Car il n'était clairement pas bâtit pour ça ! Pourquoi lui ? Quel talent avait-il de plus qu'un assassin, même relativement médiocre, pour être choisi ? Ça n'avait aucun sens.
Il passa précautionneusement devant les cuisines, d'où les relents d'un festin montaient jusqu'à ses narines. Il grimaça, mais ne se laissa pas déconcentrer. Il jeta un rapide coup d'œil dans la pièce, éclairée, mais vide, et remarqua une porte au fond. Il entra, fit précautionneusement le tour de la table, évita de se prendre les restes de cornes dans les casseroles qui pendait et ouvrit doucement la porte. Elle abritait un escalier qui descendait. Zero décrocha une torche du mur et emprunta les escaliers.
L'air chaud et humide était étouffant, et Zero se demanda s'il ne préféra pas la sècheresse cruelle de l'étage qui agressait sa gorge à cette impression de suffocation. Qu'importe, il continua son chemin.
Les murs de pierres grises et ternes étaient parfois décorés d'un chandelier particulièrement ouvragé. L'esthétisme de ces objets avait quelque chose de brute, d'ancien. Ce n'était pas de l'art elfique, loin de là. Pourtant, on pouvait y voir un raffinement certain, comme une rencontre incongrue entre le savoir-faire nain et les goûts humains. Le Qunari s'en détourna bien vite. Il n'était pas ici pour réfléchir à l'art, quel qu'il soit.
Il dépassa plusieurs portes en bois, toutes fermées. Soit les occupants avaient soigneusement pensé à s'enfermer à double tour, soit ils étaient absents. Zero espéra qu'il s'agissait de la seconde option, il n'avait guère l'intention de rester plus que nécessaire dans cette bâtisse immense qui pourrait sans aucun problème contenir le marché de la ville basse.
Le couloir tournait brusquement vers la droite, un peu plus loin. Et sous l'avant dernière porte filtrait de la lumière. Cette chambre-ci était occupée, quant à savoir par qui… Il n'avait aucun moyen réel de le savoir sans se trahir. Il s'en approcha tout de même, surveillant chacun de ses pas lourds. Une seule erreur, et sa petite mission pourrait très mal se terminer.
Avec la plus grande des précautions, il s'accroupit, de sorte à mieux maîtriser ses mouvements. Il plaqua son oreille contre la porte – qui semblait faite de bois de hêtre – et perçut des voix. Un couple, d'après l'intonation des deux interlocuteurs. Ils bavardaient de choses et d'autres, des choses sans grande importance, ni grand intérêt. Ils échangeaient à voix basse, très tranquillement. Humains, tous les deux. Ces informations ressemblaient fort à ses cibles. Mais comment en être sûr ?
Zero tenta de regarder par le trou de la serrure, mais ne vit rien de concluant. La pièce était divisé en au moins deux espaces par une cloison, et il n'était pas en mesure d'apercevoir ne serait-ce que la main de l'un ou l'autre des occupants. Il s'assit, croisa les bras. Il était doté d'une patience presque à toute épreuve, il attendrait le temps qu'il faudrait.
Il s'efforça de repérer les endroits susceptibles de lui servir de cachette à la moindre alerte. Il y avait un angle mort au niveau du virage, derrière une arcade. Zero se savait suffisamment rapide pour se dérober à la vue des potentiels visiteurs, il resta donc bien sagement assit contre le mur, le dos voûté et détendu. Il prit une grande inspiration, et tendit l'oreille. Son ouïe ne faisait pas partie des meilleurs de tous les peuplades de Thédas, mais ses années d'errance loin des siens l'avaient rendue bien supérieur à la moyenne de son peuple.
Les chandeliers projetaient une lumière tamisée et vacillante, aussi décida-t-il d'éteindre son flambeau. Cette lueur-ci paraîtrait suspecte. Ce n'était certes pas grand-chose, mais il avait vu des Elfes travailler ici, et les Elfes, il les connaissait assez mal. En réalité, tout ce qu'il en savait, étaient des rumeurs affirmant qu'ils voyaient mieux et entendaient mieux que la totalité des peuples. Et cette nuit-là, il n'avait aucune intention de les vérifier.
Le temps semblait avoir suspendu son vol. Zero n'avait toujours rien entendu, toujours rien vu. Il paraissait de plus en plus évident qu'il était seul dans le couloir. Son séant devenu trop douloureux, il se releva et fit quelques pas, quand il s'aperçut que plus aucune lumière ne diffusait sous la porte. Le moment était venu.
Avec la plus grande des délicatesses, il actionna la poignée. La porte s'ouvrit, avec un tout léger clic. Tout était sombre à l'intérieur, Zero prit le risque de laisser ses yeux s'habituer à l'obscurité. Bientôt, il fut capable de distinguer grossièrement les obstacles sur son chemin. Il referma la porte et s'aventura enfin dans la pièce. Aurait-il de la chance ? Ses cibles étaient-elles bien ici ?
Pas après pas, il continuait à tendre l'oreille. Un bruit régulier lui parvenait, le souffle d'un dormeur inconscient de la menace qu'il représentait. Tant mieux. Ce serait plus facile ainsi.
Contrairement à ce qu'il avait suspecté, cette pièce était divisée en trois, et non pas en deux. Peu importe. Il se dirigea naturellement vers la source de ce bruit régulier. Puis il s'arrêta soudainement. Quelque chose…
Il fit un grand pas sur le côté pour esquiver la lame cruelle d'une épée particulièrement acérée. Zero fit volte face et se retrouva nez à nez avec un homme en chemise de nuit, l'air tout à fait éveillé. Large d'épaule, haute taille, il avait une prestance qui lui rappelait quelques valeureux soldats. Derrière lui, une femme d'apparence frêle, également peu vêtue. Et elle ne pouvait pas cacher, à lui, né Saarebas, la mage qu'elle était !
Il fit une rapide roulade sur le côté, anticipant une décharge électrique qui se perdit dans le vide. Zero esquissa un sourire fataliste. Elles étaient là, ses cibles. Méthodiquement, il observa le couple et dégaina la paire de dague qui pendait à sa ceinture.
−Qui vous envoie ? siffla l'homme.
−Êtes-vous le templier Anton Livier ? répondit simplement le Qunari.
Pour toute réponse, l'homme chargea. Cela valait bien une réponse par l'affirmative. Zero se déplaça, et riposta. L'homme était bien entraîné, il para immédiatement. L'acier cracha des étincelles. Le Qunari était toutefois plus fort que l'Humain. Rapidement, il parvint à repousser le templier, et parvint se mettre à couvert juste à temps pour éviter une boule de feu qui s'écrasa contre le sol, exactement là où il se trouvait quelques secondes plus tôt. Ces deux là ne seraient pas faciles à anéantir ensemble, mais séparément, ils seraient comme des enfants face à lui…
S'il était Anton, elle, elle devait être Tara… Une mage qui s'est enfuie du cercle avec la complicité de ce templier. Était-ce à cause de la passion, ou d'une obscure promesse, Zero n'aurait su le dire, mais ils paraissaient finalement moins dangereux que le contrat laissait entendre. De l'argent facilement gagné.
Peu disposé à laisser cet affrontement s'éterniser, pour de nombreuses raisons, Zero lança une attaque rapide sur la femme. C'était sans compter sur l'impressionnante vivacité du templier. L'épée vint lui mordre le bras, du sang s'écoula sur sa peau grise. Zero grimaça et tenta une nouvelle manœuvre. Il s'acharna alors sur Anton, ignorant la douleur et gardant Tara dans son champs de vision. Elle préparait un nouveau tour…
Très rapidement, Zero fit corps avec les ombres pour mieux frapper son adversaire dans le dos. C'était lâche, mais l'enjeu était trop important. Une coquette somme d'argent et la certitude d'avoir préservé la ville de ces dangereux personnages.
Anton s'effondra dans un râle. Troublée, Tara ne réagit pas assez vite, et fut transpercée par deux dague rompue à l'art de prodiguer la mort. Elle fixa le Qunari dans les yeux, une profonde expression d'effroi sur son visage.
−Pas… Mirie…
Une larme de sang coula à la commissure de ses lèvres, alors que l'air refusait d'entrer dans ses poumons perforés. Délicatement, Zero délogea ses armes du corps de sa victime, et l'allongea près du templier. Quelque chose n'allait pas… Mirie ? Qu'avait-elle voulu dire ? Et pourquoi, par une quelconque divinité, ne s'étaient-ils pas mieux défendus, s'ils étaient si dangereux que cela ?
Il se raidit tout à coût. Un souffle… le même souffle que précédemment ! Une troisième personne, dans cette pièce ! Zero prit une profonde respiration, et rechercha la source de ce souffle. Dans la troisième partie de la pièce se trouvait un lit. Dans ce lit, se trouvait une silhouette. Cette silhouette…
Zero fut prit d'une sévère révulsion. Il était… un véritable assassin ! Il venait… d'assassiner les parents d'une petite fille ! Pratiquement sous ses yeux ! Et tout cela, pour un motif aussi trivial que l'argent !
L'enfant dormait encore. Ses cheveux blancs encadraient un visage angélique, loin de toute préoccupation immédiate. C'était impossible… On avait abusé de lui ! Une vague de colère s'éleva en lui, comme en pleine marée haute. Il ignorait le nom de son employeur, mais il jura qu'il vengerait la petite.
Mais tout d'abord, il fallait décider quoi faire d'elle. La laisser seule, dans la rue, et la livrer par la force des choses à la mendicité, la prostitution ou la pègre ? Non, il n'aurait plus jamais l'esprit tranquille. Zero serra la mâchoire, soupesa ses dagues. Il n'aimait pas cela, oh que non. Mais, avait-il vraiment le choix ? Ce serait lui épargner bien des souffrances à venir.
Alors qu'il prenait doucement sa décision, la porte s'ouvrit, de nombreux bruit de pas lui indiquèrent qu'il venait d'être retrouvé. Il empoigna fermement ses armes et tourna la tête vers ces intrus.
Un homme dans une luxueuse tunique pourpre et or s'avançait sans crainte, les mains dans le dos. Sa tête soutenait un étrange couvre-chef, une sorte de cube de velours noir avec un petit voile de soie blanche. Zero ne reconnaissait pas l'origine de cet étrange accoutrement, et son attitude nonchalante et sûre l'inquiétait. Il était suivit par six autres personnes, toutes vêtues de la même manière : vêtement sombre et bas du visage masqué.
−Bien ! s'écria l'étranger. Vous vous en êtes bien occupé !
Il marqua une pause, le temps d'observer la pièce et de pousser du bout du pied le corps sans vie du templier. Zero se crispa. Pour qui se prenait-il ? N'avait-il donc aucun respect pour les morts ?
−Vous devriez prendre soin de cette blessure au plus vite, ou vous courrez au devant de sérieuses complications.
Il jeta une très belle bourse à ses pieds, qui tinta très agréablement en touchant le sol. Zero commença alors à se détendre. Il observa ce visiteur d'un œil neuf. Élégant, mais sobre, il devait être de haute naissance. Il transpirait la confiance en soi, et un sourire chaleureux égayait un visage à hautes pommettes. Ses yeux clairs ne laissaient transparaître qu'une lueur de sympathie, que Zero ne partageait pas.
−Allons, Qunari ! Ceci vous revient de plein droit !
−Je…
Zero soupira et rengaina ses dagues. Puis il se baissa pour prendre la bourse. Elle pesait bien lourd, jamais il n'avait tenu autant de pièces dans une main. Il l'ouvrit et plongea la main à l'intérieur. Il n'y avait que des pièces, rien qui aurait pu servir de poids pour gonfler la taille de la bourse, et tricher ainsi sur la quantité d'or réelle qu'on lui attribuait. Et leur éclat lui fit tourner la tête.
−Écoutez, continua Zero, ne m'appelez pas Qunari. Je suis un Kossith devenu Tal-Vashoff.
−Pardonnez mon ignorance, je n'entendais vous blesser d'aucune façon.
Zero ne répondit rien. Sa voix était calme et reposante, parfaitement maîtrisée. Elle parvenait même à apaiser ses propres méfiances.
−Bien, poursuivit l'élégant inconnu, maintenant, j'apprécierai que vous nous laissiez seuls avec la fillette.
−La fillette ? Elle vient de perdre ses parents, laissez-la tranquille.
Le sourire de l'inconnu mua. Zero commença à se sentir mal à l'aise.
−Vous devriez savoir que la curiosité est un vilain défaut, dans les sociétés humaines. Vous nous avez bien servi, prenez cet or et allez vous en, comme si vous n'aviez rien vu, rien entendu.
L'inconnu avait raison. Son travail était fait, il n'avait plus d'autre raison de rester ici. Comment dépenserait-il cette coquette somme d'argent ? Il y avait cette auberge dans la haute ville, et elle proposait de sacrées beautés, à la peau douce et parfumée, disait-on, provenant de toutes les régions ! Il y en avait pour tous les goûts. Les boissons comptaient parmi les meilleurs du pays, et la nourriture y était divine. Le tout servi dans le plus beau des cadres, avec musique et ambiance feutrée.
Ah ! Son ventre grondait déjà à la pensée de ce copieux repas ! Son corps entier vibrait de désir à la perspective de toucher ces corps prêts à s'offrir à lui. La soirée s'annonçait sous les meilleurs hospices !
Zero esquissa un pas vers la sortie lorsqu'il entendit un bruit derrière lui. La petite fille venait de se réveiller. Que… Qu'avait-il l'intention de faire ? Il avait l'impression de s'éveiller en sursaut d'un trop long rêve. Son corps réagissait étrangement, et il n'avait plus la moindre idée des pensées qui venaient de le traverser. Il sentit ses joues s'enflammer. Quel idiot !
L'un des hommes en sombre s'avança vers la petite, menaçant. Zero laissa la rage déferler dans ses veines. Il ne comprenait pas ce qu'il venait de se passer, mais une chose était sûre : il avait été trompé. Ce couple, bien que contre nature, ne représentait aucune menace, pour personne. Cette enfant venait de perdre ses parents par sa faute, presque sous ses yeux. Le Tal-Vashoff sauta sur l'homme et le repoussa violemment. Il ne les laisserait pas toucher un seul cheveu de la petite !
−C'est fort dommage, soupira l'inconnu. Mes amis, occupez-vous de lui.
Alors que les hommes en sombre se déployèrent autour de lui, l'inconnu s'en alla d'un pas presque sautillant, le petit voile accroché à son étrange chapeau voletant derrière lui. Sans attendre plus longtemps, Zero attrapa l'enfant, dégaina une de ses dagues et croisa le fer avec le premier de ses adversaire. Inutile d'essayer de le défaire ici, il devait absolument mettre la petite en sécurité. Et tant pis pour la bourse, quoi qu'il eût envie d'en faire tout à l'heure !
Il reconnu les prémices d'une effroyable magie, et décida qu'il était grand temps de fuir. Il heurta de plein fouet un autre, l'envoya à l'autre bout de la pièce où il s'écrasa contre le mur. Si la petite fille cria, il ne l'entendit jamais. Zero sauta lestement au dessus des corps inanimés du templier et de sa mage d'épouse, et fondit vers la sortie. Une boule de feu passa juste au dessus de sa tête, roussissant ses cheveux. Il ne perdit pas une seconde de plus et fila à travers le couloir, grimpa les escaliers quatre par quatre, courut dans les cuisine, fit irruption dans un nouveau couloir, se rapprocha de la fenêtre et sauta !
Dans la rue déserte, le Tal-Vashoff continua sa folle course sous les assauts magiques de ses poursuivants, la petite fille sous le bras. Elle n'avait pas dit un mot, pas pousser un seul cri, ou alors il n'y avait pas fait attention. Une flèche de glace se logea dans son épaule gauche, une autre dans son mollet droit. Poussant un râle, il tomba, protégeant l'enfant dans sa chute. Maudite magie !
Des pas précipités résonnèrent sur le pavé gris, les hommes se rapprochaient inexorablement. Le Tal-Vashoff jeta un rapide regard sur la petite. Elle était en larme, mais ne disait rien. Elle semblait effrayée et perdue, et Zero ne pouvait pas croire qu'elle n'avait pas comprit ce qui s'était passé dans la chambre. Ayant déjà vu des Humains faire cela avec leur progéniture, il lui donna un rapide baiser sur le front, puis entreprit de retirer la flèche glacée de son mollet.
Il se retourna, trop tard pour riposter. L'un des hommes en sombre était sur lui, un bâton terminé par une lame en forme d'éclair. Il y eut un sifflement, un craquement sec, et l'homme tomba. Un nouveau sifflement, une nouvelle victime. Il ne restait plus que trois mages autour de lui, Zero leva la tête vers les toits dans l'espoir d'apercevoir son mystérieux sauveur.
Les mages l'imitèrent et se mirent à abreuver une cible de magie. Le Tal-Vashoff remarqua une silhouette gracile se déplacer sur l'un des toits, évitant en toute aisance les tirs de feu et de glace alors qu'il encochait une nouvelle flèche. Un homme s'effondra, plus que deux. Zero se releva, dissimula l'enfant dans l'ombre et bondit sur le mage le plus proche. Ses lames le poignardèrent sauvagement, tandis que son compagnon perdit la vie dans un sinistre gargouillis. Des six hommes, cinq gisaient dans la rue. Le sixième, celui qu'il avait propulsé au fond de la pièce, avait dû se briser le cou.
Zero essuya le sang poisseux sur le vêtement de sa dernière victime et lui retira son masque. Un Elfe. Il entendit le mystérieux archer sauter du toit pour atterrir souplement à quelques pas de lui. Il récupéra ses flèches, en chantonnant un air guilleret.
−Je ne sais pas ce que vous avez fait pour les irriter ainsi, mais vous avez eut de la chance que je passais dans le coin, tous les deux, lança-t-il d'une voix mélodieuse.
−Je ne le vous fais pas dire, merci.
Il rencontra alors ses yeux, deux perles rouge sang. Sa peau sombre, ses oreilles pointues et ses longs cheveux blancs ne laissèrent aucun doute quant à sa race. Il s'agissait d'un Elfe noir. Très rare, à la surface. Évidemment, Zero était au courant de la terrible réputation de ces êtres nocturnes, mais n'était-il pas lui-même un paria ?
−Vous avez une idée de qui ils étaient ? demanda le Tal-Vashoff.
−J'en ai une petite idée, et j'espère que vous n'aurez plus l'occasion de les rencontrer. Bien, si vous voulez bien m'excuser…
Sur ce, l'archer s'éloigna à grand pas et disparut au bout de la rue. Étrange personnage… Repoussant ses questions, il récupéra la fillette recroquevillée dans un coin. Il ne fallait pas rester ici, une patrouille pourrait surgir d'une minute à l'autre, et il ne voulait certes pas perdre la tête pour ces… ces assassins !
−Tu t'appelles Mirie, n'est-ce pas ?
La fillette hocha doucement la tête.
−Très bien, Mirie, à partir de maintenant, tu vas venir avec moi. Je prendrai soin de toi.
Il prit la fillette dans ses bras et prit la direction des bas-quartiers. Là où il avait élu domicile.
