« Ça ne peut pas être réel. »

Hermione Granger arborait sa meilleure expression, « Mon-Dieu-tu-es-si-intéressante » tandis qu'elle écoutait silencieusement la blonde assise en face d'elle. L'anecdote débile de son meilleur ami était devenue un faible bourdonnement aux oreilles d'Hermione alors qu'elle étudiait les mensurations incalculables en exposition. « C'est un crime contre la nature. Ce n'est pas dans le domaine de la physique qu'un corps aussi petit puisse supporter des seins de cette ampleur ? Comment sa taille peut-elle être si fine ? A-t-elle seulement une cage thoracique ? Et ces yeux, vraiment. Cette nuance de bleu n'existe nul part ailleurs dans le monde entier. Elle ne peut être qu'une Vélane, c'est obligé. Ce serait un crime contre la féminité pour elle de ne pas l'être. »

Hermione fit une pause pour relayer un « C'est pas vrai » et un « Oh ! C'est tellement drôle ! » aux moments appropriés avant de reprendre son lynchage mental de la fille qui se tenait devant elle. « Elle ne se tait donc jamais ? Elle n'a jamais besoin de respirer ? » Hermione méprisa encore sa poitrine, « Je suppose que ces trucs peuvent tenir dans des réserves »; en pensant cela elle eut un sourire narquois secret. Elle s'arrêta pour regarder Ron qui fixait du regard sa dernière conquête avec respect mais avec une pointe de crainte et d'étonnement. Il rejeta sa tête en arrière et fit son sourire malicieux. « Regardez-moi cet idiot qui sourit » pensa-t-elle. « Tu peux être sûr d'avoir choisi la gagnante, hein, Ron ? Elle était, après tout, comme toutes les autres -belle et stupide. Elle était plus que belle pourtant, non… Mince, je voudrais tellement être comme elle. » Hermione secoua la tête à sa dernière pensée. Bien qu 'elle ne voulait pas l'admettre, Maria-Elena était la plus belle femme qu'elle ait jamais vu. Et Ron, son Ron, était fou amoureux d'elle.

Cela faisait maintenant quatre ans qu'ils avaient quitté Poudlard. Quatre ans depuis la fin de Voldemort et de sa tyrannie. Hermione Granger, Ron Weasley et Harry Potter avaient contribué à sa chute. En fait, ils étaient tellement concentrés à sauver le monde sorcier qu'ils n'avaient que très peu de temps pour le reste, même entre eux. Quelque part au fond de son esprit elle avait toujours pensé qu'elle et Ron finiraient ensemble. Après la guerre elle eut besoin de passer du temps seule, alors elle partit à l'Académie Aurellia en France pour finir sa scolarité et avoir son diplôme. Elle garda contact avec les autres autant qu'elle put à l'aide des hiboux mais elle n'avait que très peu de temps pour leur rendre visite car elle était très absorbée par son doctorat qu'elle devait avoir le plus tôt possible. En trois ans elle n'est pas seulement devenue le Dr Hermione Granger, agrégée en Arithmancie avancée, mais elle s'est aussi embarquée dans une carrière couronnée de succès en codant et décodant des équations pour le Ministère de la Magie, et elle fut la plus jeune sorcière de l'histoire à le faire. Elle ne sortait pas beaucoup, encore à cause du fait qu'elle avait toujours supposé qu'elle et Ron seraient ensemble. Il ne lui serait jamais venu à l'esprit qu'il aurait d'autres projets. Il ne lui serait jamais venu à l'esprit qu'il ne ressentirait pas la même chose pour elle.

La vérité est qu'ils n'en avaient jamais vraiment parlé. Elle n'a jamais parlé de ce qu'elle ressentait. Elle supposait qu'il le savait. C'était ces suppositions qui l'avaient mené à rencontrer la quatrième petite amie de Ron cette année dans un restaurant près de son appartement à Londres avec Harry en quatrième roue du carosse. Quand Ron rompit avec elle « Merlin aide-moi -- Amber… », comme qu'Hermione aurait fait allusion à elle, elle pensa qu'ils auraient finalement leur chance. Quand Ron l'appela pour sortir déjeuner, elle était heureuse mais lorsqu'elle vit qu'il n'y avait pas qu'Harry assis à la table, mais aussi un superbe top model collé aux bras de Ron, elle sentit tous ses espoirs se réduirent en miette. La dernière heure fut passée avec Maria-Elena, qui était douloureusement gavée après trois feuilles de salade, expliquant soigneusement pourquoi le rose était sa couleur préférée et comment elle irait chez Gustave pour ses cheveux après que Renaldo l'ait presque convaincu de venir en blonde platine ce qui était complètement opposé à ses reflets dorés naturels. « Naturel, mon cul » pensa Hermione pendant qu'elle mordait très fort sa fourchette. « Laissons-la affronter ça, fillette. Je pense que rien sur son corps ne se décomposerait s'il était enterré pour des milliers d'années. » Curieusement, Hermione aimait le son de cette phrase. Elle sourit jusqu'à ce qu'elle regarde Ron. Il était fasciné par la poupée Barbie anorexique avec le problème de glandes, et Hermione fit tout ce qu'elle put pour garder ses yeux vers le déjeuner.

Harry la regarda avec compassion en se demandant comment elle réussissait à ne pas se casser les dents en mâchant sa nourriture avec cette force, comme si elle mordait dans de l'acier et qu'elle le broyait avec ses incisives. Elle semblait souffrir après chaque bouchée de pâtes. Il la comprenait, probablement plus qu'Hermione n'aurait voulu bien le croire. Il savait ce que ces deux personnes ressentaient l'une pour l'autre avant même qu'ils le savent. Ni l'un ni l'autre ne voudrait l'admettre haut et fort, bien qu'il le voulait lorsqu'ils étaient plus jeunes ; maintenant, ça ne faisait que le rendre triste.

Se souvenir de ces jours était toujours difficile pour Harry à cause de beaucoup de raisons. Bien qu'il essayait de le nier, il avait besoin que ses amis soient là pour lui - sa survie en dépendait. Il détestait l'idée qu'ils s'aiment d'une façon l'excluant totalement. Rien ne l'effrayait plus que la pensée d'être seul. Maintenant en tant qu'adulte, il réalise ô combien c'était égoïste. Il se sentit aussi un peu coupable en sachant qu'il aurait pu les aider, mais non. Maintenant il regardait son meilleur ami sortir avec des filles les unes après les autres cherchant quelque chose qu'il ne trouverai jamais pendant que l'autre n'irait jamais voir ailleurs, espérant quelque chose qu'elle n'aurait peut-être jamais. Ces deux-là étaient faits l'un pour l'autre ; c'est juste qu'ils ne le savaient pas encore.

Maria-Elena annonça qu'elle avait besoin d'aller au « petit coin » ; elle remua son nez sur Ron et gloussa avant de partir. Il rayonnait.

Retirant finalement ses yeux de la silhouette de son amour, il se tourna vers ses meilleurs amis avec un regard de ravissement.
- N'est-elle pas étonnante ?
- Elle a quelque chose.
Hermione essayait de la complimenter, mais il sortit un son étranglé, comme si elle combattait l'incontinence.
- Elle a un certain charme dit Harry en essayant à son tour de lui trouver des qualités.
- On s'est rencontrés au Ministère. C'est une amie de la copine de Seamus. Il nous a présenté, on s'est tout de suite bien entendu. Je lui dois beaucoup.
- Moi aussi marmonna Hermione dans un souffle. Elle commençait juste à apprécier le moment calme dans le sillage des Hurricane hooters (NdlT : désolé mais je n'ai pas réussi à traduire ce petit bout !) quand la fille aux lèvres diaboliques revint, tenant un portable. « Est-ce qu'elle sait seulement qu'elle est une sorcière ? »

- Ronnie, je dois m'en aller. Je viens d'avoir un appel du bureau et ils ont besoin de moi. Tu me raccompagnes ?
Les mots semblaient laisser croire qu'il serait dûment récompenser pour ses efforts. Elle se tourna vers ses amis et dit d'une voix mielleuse, battant des cils à la vitesse de la lumière.
- C'était un plaisir de vous rencontrer. Harry. Toi aussi… Hermania, c'est ça ?
Elle leur adressa un sourire de toutes ses dents.
Hermione rivalisa sa pâle blancheur pour une plus pâle blancheur.
- Hermione, en fait. Désolé que tu doives partir. J'espère te revoir très bientôt. dit-elle doucement. « De préférence empallée sur quelque chose de dentelé et rouillé. » ajouta-t-elle mentalement.

Ron la raccompagna jusqu'à la porte. Hermione retourna à ses pâtes, piquant quelques morceaux avec sa fourchette de la mort et les mit dans sa bouche qu'elle mâchait très fort. Harry la regarda et secoua la tête.
- Qu'est-ce que tu fais là ?
Elle n'était pas d'humeur à écouter ses sermons ou voir sa tête se secouer.
- Pourquoi tu ne lui dis tout simplement pas ce que tu ressens ?
Elle feignit l'ignorance.
- De quoi tu parles ?
Il soupira de frustration.
- C'est parti pour durer des années. Je sais ce que tu ressens pour lui. Pour quoi tu ne veux pas admettre…pour lui et toi ?
- Il n'y a rien admettre.
Harry baissa les épaules en signe de résignation. Elle posa sa fourchette, mit ses mains sur ses tempes et commença à se masser en faisant de petits cercles.
- De toute façon, si tu laisses entendres ce que je pense que tu laisses entendre, donc je crois que nous serons d'accord tous les deux sur le fait que ça ne mènerait à rien. C'est évident ce qu'il veut, et je peux t'assurer que ce n'est pas moi.
Reprenant sa fourchette, elle commença à jouer avec la nourriture, espérant qu'Harry aurait compris le message.
- Qu'est-ce que tu en sais ?
Bon, tant pis.
- Aucun de vous deux n'en a jamais parlé.
- Laisse tomber, Harry.
En vérité, elle ne voulait pas qu'il laisse tomber, mais son insistence lui faisait encore plus de mal. Hermione savait bien qu'elle n'était pas le genre de femmes avec qui Ron choisirait de sortir. Elle n'était pas belle ; elle n'était pas sexy ; elle n'était pas sans cervelle. Ok, peut-être que la dernière partie n'était pas méritée. Même Maria-Elena avait un bon boulot chez un éditeur et n'était intéressée que par sa petite personne. Hermione savait que pour obtenir ce qu'elle voulait elle devait changer qui elle était, mais elle n'était pas sûre de pouvoir le faire. Décidant qu'elle ne serait pas la seule à s'apitoyer sur son sort cet après-midi, elle tourna toute son attention vers son ami assis en face d'elle.
- Tu sais, tu n'es pas bien placé pour parler d'admettre des sentimens.
Harry leva les yeux vers elle brusquement.
- Qu'est-ce que c'est sensé vouloir dire ?
- Ça veut dire que dans trois mois nous assisterons à un mariage qui ne devrait pas avoir lieu.
Cela frappa d'un peu trop près. C'était au tour d'Harry de soupirer, baisser les épaules et de faire des petits cercles au niveau de ses tempes. Bien qu'il détestait l'admettre, elle avait raison.

Harry passa beaucoup de son temps et de son énergie à oublier ses batailles avec le Lord Noir, qu'il avait laissé filer quelque chose entre ses doigts. L'année suivant la bataille finale passsa à ne rien faire, en se demandant ce que serait sa vie maintenant que l'unique chose qui l'avait envahi était partie. Il avait été paralysé pendant si longtemps qu'il lui avait été difficile de recommencer sa vie à zéro. Ce n'est que récemment qu'il obtint son diplôme en Défence contre les Forces du Mal Avancées et qu'il eut un but dans la vie. Quand finalement il sortit du brouillard, il s'aperçut que Ginny Weasley était fiancée à Colin Crivey. C'est seulement quand Ron lui dit que la cérémonie était pour très bientôt que cela frappa Harry. Ginny Weasley, la fille qui gloussait à chaque fois qu'il entrait dans une pièce ; Ginny Weasley, cette ombre si près de lui pendant toutes ces années à Poudlard ; Ginny Weasley, la tête rousse timide qui rougissait ardemment à la seule mention de son nom, avait changé.
- Pathétique, hein ?
Hermione acquiesca.
- Comment on en est arrivé là, Harry ? Comment a-t-on réussi à tout gâcher ?
À ce moment là Ron revint à la table, ses lèvres gonflées et ses cheveux décoiffés.
- Désolé d'avoir mis autant de temps dit-il, essouflé.
Hermione et Harry échangèrent un regard entendu. Les deux doutaient fort qu'il soit réellement désolé.
- Ok, dites la vérité maintenant. Que pensez-vous d'elle réellement ?
Il semblait nerveux alors qu'il attendait la réponse.
Hermione espérait qu'Harry répondrait en premier, mais ils savaient tous les deux quelle opinion Ron cherchait à connaître.
- Es-tu heureux ? demanda-t-elle. « S'îl-te-plaît dis non » pensa-t-elle.
- Absolument fut la réponse.
- Alors c'est tout ce qui compte, non ?
Il haussa un sourcil et elle se calma.
- Elle est gentille.
C'était ce qu'il semblait attendre et il reprit son sandwich auparavant abandonné et commença à manger.

Hermione perdit soudain l'appétit.