- Chapitre 1 - Sang froid -
Mes paupières sont lourdes, elles pèsent une tonne. Je n'arrive même pas à les entrouvrir. Je m'encourage intérieurement, mais trouve mon action inutile. Même si j'entrevois légèrement mon environnement, il est bien trop obscure pour que je puisse savoir où je me situe. La seule chose que je sais, c'est que je ne suis pas dans mon lit douillé. Si mes yeux restent clos et ne me permettent pas d'exploiter ma vision de simple humain, mon corps, lui, exploite à merveille le toucher. Il se plaint. Il a mal et il a froid. Qu'importe, je somnole et je suis certain que je vais m'endormir de nouveau sous peu. Je dors où je veux, où je peux plutôt. La surface me gèle les os, mais dans mon sang circule une substance anesthésiante. Je le sais parce que je ne suis pas loin de retourner dans mes rêves. J'en suis presque impatient, parce que c'est là, seulement, que je suis avec ma Lydia.
Bien que je me sentes faible, j'ai retrouvé les fonctions de mon corps. Il a du passer quelques heures. La notion du temps m'est inconnu ici. Si, en temps normal, je n'ai pas la force d'un loup garou, je suppose qu'à ce moment, je n'ai même pas celle d'un petit chaton. J'ai les yeux grands ouverts sur le monde qui m'entoure et j'avoue que je ne comprends rien, absolument rien. C'est sombre, c'est caverneux, une odeur de moisis me chatouille les narines aux points d'en éternuer. Je crois que si je ne fréquentais pas Scott McCall, je serai déjà entrain de tambouriner à la porte comme un dératé. Au lieu de ça, je tourne en rond dans cette pièce de vingt mètres carré, à vu d'œil. Moi, Stiles Stilinski, l'hyperactif, qui ne tient pas en place, me montre des plus détendus. J'ai les deux index joints sur mes lèvres et je cherche à me rappeler comment j'ai atterri ici. Ici ? c'est où ici ? Pourquoi ? Comment ? Quelle heure est-il ? Je n'ai plus qu'à supposer, à me faire des films.
Il y a ces murs composés de pierres taillés. Je m'approche et les touche, elles sont si froides que mon corps est parcouru d'un frisson. Je suis probablement dans une cave. A en voir la porte en bois et la grille qui permet de voir ce qu'il y a dans le couloir, il s'agit plus des sous-sol de la famille Adams que celui d'un sain d'esprit, entreposant ses bouteilles de vins pour les garder à bonnes températures. Qu'est ce qui m'arrive de réfléchir autant ? Habituellement, j'agis avant de me poser des questions ! Je fonce la tête la première ! Je me mords la lèvre inférieure avant d'hésiter à me rendre à la fenêtre de cette porte pour hurler. Ça ne présage rien de bon. Je sais qu'hurler ne me fera pas sortir de cette prison. Mais une personne viendra peut-être me dire de la fermer et je pourrais entretenir un dialogue afin d'en savoir un peu plus. Je me dirige lentement vers l'ouverture. Ma première initiative et de tourner la poignée afin de vérifier que je suis bien enfermé. Ça bloque, elle est bien verrouillée. Vu l'épaisseur du bois, il est inutile de songer à la défoncer à l'aide de mon épaule. En tout état de conscience, je pense que mon épaule sera bien plus abîmé et avec le peau que je me tape, j'imagine m'évanouir sous la douleur. Je passe mes doigts entre les deux barreaux et je hurle :
« A l'aide ! A l'aiiide ! Oooh, y'a quelqu'un ? »
Je m'égosille la gorge pendant deux bonnes longues minutes avant qu'un affreux jojo, lassé par mes plaintes, ne se présente devant moi. J'ai un geste de recule. Courageux, mais pas téméraire. Quoi que courageux..., même pas.
« Ferme là ! Me dit-on d'une voix rauque. »
Je le contemple. Il n'a pas l'air très cathodique et aborde une expression inhospitalière. J'ai l'air de déranger. Alors pourquoi me garde-t-on en captivité ? Bon, j'imagine que j'en ai une vague idée. C'est pour cela que je ne le demande pas directement. Je préfère jouer l'astuce en lui demandant :
On se connait, non ?
Merde ! Le "non" est de trop ! Je lui offre une réponse toute trouvée. Au lieu de la saisir, il me reluque sans pudeur, comme si j'étais un simple bout de viande. Mon crane s'enfonce en arrière et j'aborde un air incrédule. Je ne veux pas lui montrer que je suis effrayé. Je lui dirais bien que je ne fais pas dans le racolage, mais la provocation me semble malvenue. Je voix sa langue parcourir ses fines lèvres. Son regard brun ne s'arrête pas sur ce que je cache inconsciemment, mais plutôt sur mes avant bras dénudé, sur ma chair. C'est ainsi que je comprends, mais je ne dis rien, il offre la réponse à ma place :
« Si tu avais pas certaines relations, j'connaitrais jusqu'à ton goût. Mais par chance pour toi, tu es précieux pour l'patron. »
Le patron ? Qui est ce patron ? Je me sens stupide de tenter de le deviner. Ce n'est pas parce que je fréquente Scott que je connais forcément tout le répertoire des Alpha des environs. Quoi qu'il en soit, je ne panique pas devant cette réplique. Premièrement parce qu'il vient de m'annoncer que j'allais rester en vie et ensuite parce que je sais qu'on est déjà à ma recherche...je crois. Mon père ne me laisserait pas ainsi, disparu sans laisser de trace. Ce n'est pas le titre d'une série ça ? Je secoue la tête et me permet de répondre, avec un air amusé :
« Un bêta. Vous êtes un simple bêta. Un bon gros bêta. »
Je ne m'en rends pas compte lorsque je suis provoquant. La plupart du temps, je le suis envers mon père, gentiment. Sinon, il m'arrive de l'être lorsque je sens qu'on me prend pour un imbécile et que je suis bien entouré. Je suis plus du genre à prendre la fuite si les choses tournent mal. Je ne suis qu'un lycéen et un humain, simple humain. L'homme en face de moi a compris le jeu de mot. Étonnant, d'habitude, ils tombent toujours à l'eau. Mais il n'est pas d'humeur à rire apparemment.
« On m'a donné l'ordre de n'pas te tuer, mais j'peux toujours t'cogner. Tu veux ? »
J'avale ma salive, fais un pas en arrière. Okay, ce n'était pas malin. Mon regard rassuré change pour l'incertitude. Dois-je hurler avant qu'il n'ouvre la porte pour s'autoriser cette liberté ? Je secoues la tête pour lui faire comprendre que je ne serais plus aussi insolent. Des promesses en l'air, bien entendu. Je ne sais pas me contrôler. Les mots traversent ma bouche comme une source se fraie un chemin entre les rochers. Il va s'en aller, je le vois partir en pensant que je le laisserai tranquille, à présent. Mais je ne peux pas rester dans cette position. Je ne sais toujours rien, à part qu'un alpha m'a inclue dans un plan miteux.
« Hey ! Scott ne tombera jamais dans ce piège ! »
Je lance ça comme si j'étais invincible. Je ne crois pas un mot de ce que j'avance, mais je l'espère secrètement. Pendant ce temps, l'ouverture de la porte donne, à nouveau, sur le mur du couloir, il a disparu. Je ne pense pas qu'il reviendra. Je fais quelque pas, la dégaine frimeuse, mais je suis rattrapé par mes propre réflexion. Si Scott ne tombe pas dans le piège, qui viendra me sauver ?
Soudain, l'œil menaçant refait son apparition dans le cadre, avec une rapidité qui me surprend. Je sursaute. Je ne voulais montrer aucune faille, mais il a eu ce qu'il souhaitait. Il me regarde, insistant et je découvre son sourire, pervers. J'ai l'impression de découvrir des canines. Mais il ne s'agit que de mon imagination. Je fronce les sourcils en me demandant pourquoi cet air. Et puis, il me dit avec sournoiserie :
« Ce n'est pas Scott que le patron vise. »
Je ne sais pas pourquoi, mais, malgré toute l'amitié que j'ai pour Scott, mon monde s'écroule face à l'incompréhension. Là, je suis effrayé.
