Disclaimer : Tous les personnages appartiennent à Anthony Horowitz.

Spoilers : Pour ceux et celles qui n'ont vu que le film Alex Rider ou qui n'ont pas lu le 4eme tome ou les autres, je révèle plusieurs éléments de l'intrigue !

Note : Pour des raisons de cohérence du récit, dans cette fiction Yassen Gregorovitch a 33 ans, "la jeune fille" dont vous saurez le nom plus tard a 17ans et demi et il en va de même pour notre Alex Rider.

L'histoire se situe après le 4eme tome d'Alex Rider Jeu de tueur.

Mon amitié en remède contre ta solitude

Chapitre I : Dans un autre pays, dans un autre temps.

La ville s'engouffrait dans un brouhaha matinal aspiré lui-même dans un doux parfum de fraîcheur.

L'hiver avait commencé et Yassen Gregorovitch avait fini de meubler son logement. Il avait au départ opté pour une décoration sobre et stricte mais il s'était ravisé en songeant que parmi toutes les résidences qu'il possédait dans le monde, c'était dans celle-ci qu'il allait passer le plus de temps.

Il voulait s'établir dans ce pays dont son défunt ami lui avait tant parlé.

Il ne regrettait pas Saint-Pétersbourg: la Russie lui avait laissé le goût amer de l'amertume, une nostalgie trop grise pour pouvoir profiter de sa retraite largement anticipée.

A trente- trois ans le Russe avait pris la décision de quitter le milieu criminel auquel il s'était lié depuis son adolescence. La vie d'un tueur à gages s'écourtait plus vite que celle des autres, l'avait prévenu son mentor.

A présent qu'il était parvenu à s'enrichir considérablement, et ce malgré l'échec de sa dernière mission, il tardait à Yassen de profiter du temps qui lui restait à vivre.

Ce changement de mode de vie débutait dans cette maison.

Il l'avait achetée sur un coup de coeur, c'était une demeure colossale pour un seul homme, elle était dotée de trois chambres dont chacune avait sa salle de bain privée et son propre dressing, un salon, un bureau, une cuisine ouverte sur la salle à manger, une cave à vin, un grenier et un garage qui pouvait contenir deux voitures.

Il lui restait à décider de ce qu'il allait faire des deux chambres restantes. S'il avait l'espoir de recevoir des invités, il les aurait laissées comme telles pour en faire des chambres d'amis; mais un tueur professionnel comptait plus de victimes que d'amis.

Le Russe vivait bien sa solitude. Il s'y était préparé depuis qu'il avait perdu ses parents. John Rider était parvenu à tracer un chemin dans son coeur avec peine mais à sa mort, Yassen s'était résolu à ne plus jamais créer de nouveaux liens avec quiconque.

Finalement, il décida que rien ne le pressait d'encombrer les deux dernières pièces qui restaient disponibles.

Il avait le choix pour en faire une salle de sport ou une salle de cinéma mais ces idées le dérangeaient, malgré son désir de solitude, Yassen voulait éviter que toutes ses activités se déroulent au sein de son logement. Il avait besoin de sortir prendre l'air de temps en temps et non pas de se terrer chez lui, prisonnier de ses propres habitudes. Il avait assez été coupé du monde au cours de sa vie.

Après avoir fini de ranger emballages. Il jeta un rapide coup d'oeil à la décoration de chaque pièce; il s'y sentait bien. C'était confortable et même chaleureux. Il en était satisfait. Il prit une douche, s'habilla chaudement et sortit faire un tour en ville.

Il avait renoncé à prendre sa voiture et prenait plaisir à marcher sans savoir précisément où il voulait se rendre malgré le froid.

Il marchait depuis plus d'une demi-heure lorsqu'un événement inattendu l'arrêta.

Il s'apprêtait à traverser le trottoir quand il entendit une voix l'interpeller. Il n'y fit pas attention dans un premier temps, après tout il ne connaissait personne dans cette ville. Mais son instinct, qui ne le trompait jamais, lui disait que c'était son attention qui était sollicitée. Il tourna juste la tête dans un premier temps.

Il ne vit personne derrière lui à part une jeune fille, apparemment sans abris. Il se dit qu'il s'était peut-être trompé après tout. Ce fut alors qu'il entendit :

-Je vous trouve bien méprisant pour un ancien sans abris.

Cette fois-ci il se retourna pour de bon.

Comment pouvait-elle savoir qu'il avait été dans la même situation qu'elle il y a de cela des années? Aujourd'hui il portait des vêtements luxueux, il vivait dans un autre pays et tous ceux qui avaient récemment entendu parlé de lui le croyaient soit mort ou du moins porté disparu. Les autres le craignaient et n'auraient jamais osé s'adresser à lui de la sorte.

Yassen affronta la jeune fille du regard.

Elle n'avait pas peur de lui. Elle lui souriait. elle le regardait comme s'il s'étaient déjà rencontrés. Pire, comme s'il avait été un ami qu'elle avait perdu de vue depuis longtemps.

Un souvenir qu'il avait longtemps refoulé vint le percuter de plein fouet.

Il avait dix-huit ans. Depuis cinq ans il voyageait par ses propres moyens, autrement dit illégalement, à travers tout le pays. On lui avait dit de retrouver une organisation du nom de Scorpia mais il ne pouvait tout de suite se présenter à eux.

Il fallait qu'il se présente sous un meilleur état: il était malade et souffrait de malnutrition. Il n'avait plus la force de travailler.

Ses anciens employeurs étaient sûrs qu'il allait finir par mourir de faim et de froid. Il était épuisé tant mentalement que physiquement. Alors il s'était résigné.

Durant toute sa période de détresse Yassen Gregorovitch s'était refusé à demander l'aumône. Il considérait ce geste comme une humiliation ultime. Ça signifiait dépendre de la charité des autres et c'était abandonner son sort à autrui.

Il n'avait plus le choix, il ne lui restait plus aucune force pour effectuer même le travail le plus simple.

Il s'assit dans un coin à peu près sec et se couvrit avec le peu de vêtement qu'il avait dans son sac à dos. Plusieurs passants défilèrent, certains le regardaient avec pitié sans rien lui donner, d'autres l'insultaient et rares étaient ceux qui déposaient une petite pièce près de lui.

Le Russe décida qu'il devait opter pour une stratégie plus agressive s'il voulait avoir les moyens de s'acheter de la nourriture. Il interpellait les passants qui étaient les plus susceptibles de lui venir en aide.

Puis il vit une femme. Elle avait tout d'une dame de la bourgeoisie, elle portait avec fierté des bijoux et des vêtements que seules les personnes d'une certaine caste pouvaient s'offrir dans ce pays.

Yassen l'avait vu sortir de chez le traiteur, ranger son argent dans son sac. Il devait l'interpeller. Elle avançait d'un pas rapide mais semblait être ralentie par quelque chose qui la retenait. Quand elle s'approcha, il vit qu'elle traînait par la main une fillette d'à peine trois ans.

La femme le toisa en passant devant lui, Yassen eut à peine le temps d'ouvrir la bouche qu'il l'entendit répliquer :

-Je n'ai rien pour vous.

Il sourit pour lui-même. Qu'espérait-il après tout? Ses pensées furent interrompues par des cris et des larmes: la petite fille s'était retrouvée projetée sur le sol dur lorsque sa mère avait voulu accélérer la cadence.

Yassen se précipita pour l'aider à se relever. Il la porta et la posa sur ses deux jambes. Elle n'avait rien mis à part quelques égratignures.

La fillette tenait une sucette dans sa main, elle n'était plus intéressée par sa sucrerie ni par ses blessures, ses grands yeux étaient captivés par le visage de Yassen.

La mère mit fin à cette rêverie enfantine en arrachant violement la fillette des mains du Russe.

-Dépêche -toi donc ! lui Cria t-elle.

A la grande surprise du Russe, la petite fille se débattit et se retourna vers lui. Elle eût alors un geste adorable: elle lui tendit sa petite sucette déjà entamée.

-Prends si t'en veux? lui proposa t-elle.

C'était l'attention la plus sympathique qu'on lui avait témoignée depuis qu'il vivait dans la rue.

Yassen hocha la tête en souriant. La petite demoiselle fondit en larmes lorsque sa mère la porta pour l'éloigner de lui.

Parmi tout ce qu'il aurait pu s'imaginer dans sa vie, jamais il n'aurait pensé qu'il retrouverait cette enfant, seize ans plus tard. Il était encore loin de se douter que cette même jeune fille se retrouverait dans la situation misérable dont il avait réussi à se sortir.

Mais depuis cette époque, le coeur du Russe s'était endurci. Il ne lui témoigna aucun signe d'amitié, il garda son visage impénétrable.

Toutefois, comme il n'aimait pas avoir de dette envers quelqu'un, Yassen plongea la main dans la poche de son manteau et en retira une liasse de billet.

-Prends-toi une chambre d'hôtel ou rentre chez toi, la vie dans la rue n'est pas une aventure pour toi, conseilla le Russe en déposant les billets près d'elle.

Loin de se vexer, l'adolescente lui répondit :

-Un bonbon m'aurait suffi.

Le Russe continua son chemin tandis que la jeune femme le regardait disparaître dans la foule. Elle sentait qu'ils seraient amenés à se revoir plus rapidement qu'elle l'avait prévu.