Fili et la Tornade Rousse
Fanfiction se situant « pendant le Hobbit »
Son résumé : A l'époque, nous étions encore pleins d'espoir et d'illusions sur l'avenir. On était parti reconquérir ce qui nous appartenait. On avait la foi en Mahal et en Thorïn, notre oncle bien aimé. Et puis il y a eu cette rousse incendiaire... C'était il y a longtemps, mais je m'en souviens comme si c'était hier.
Pairing : Fili/Oc
Rating : Interdit aux moins de 13 ans.
Genre : Aventure/Romance.
Relectrice : Les chapitres et bonus sont relus par Lilou Black.
Disclaimer : Les personnages du récit : Le Hobbit ne m'appartiennent absolument pas. Tolkien se retournerait certainement dans sa tombe s'il voyait ce que j'en fais. Cela dit, inventer une romance dans son histoire, ce n'est pas moi qui ai commencé ! La faute en revient (en partie) à Peter Jackson lui-même.
** Cette histoire fait partie des Annexes de La Malédiction d'Erebor
Note de l'auteur : Ce récit reprend certains points de mon autre fic "La Malédiction d'Erebor" mais du point de vue de Fili. Au fur et à mesure du temps et de l'histoire, je me suis beaucoup attachée à ce personnage. Il a toujours eu une place importante à mes yeux et depuis quelques temps il avait, lui aussi, des choses à dire. C'est pourquoi j'ai décidé de le laissé s'exprimer.
Bonne lecture !
Je dédie cette histoire à toutes les amoureuses de Fili !
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3
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Fili et la Tornade Rousse
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Comment Fili s'est brûlé les yeux
Parfois je me dis que si je n'avais pas été si discret, ou si j'avais su me mettre un peu plus en avant, alors certaines histoires auraient pu être toutes autres.
Certains dénouements auraient sans doute pu avoir un goût moins amer, moins pénible à digérer. Regardant le petit garçon courir après sa poule qui caquetait tout en fuyant, je me pris à imaginer qu'il n'était pas simplement mon cousin… si j'avais su voir venir la chose. Pourtant, comment aurais-je pu deviner que l'amour pouvait débuter de bien des manières alors que pour moi cela avait été une évidence dès le départ ?
A ce jour, je m'en mordais encore les doigts. Comment avais-je pu ne rien voir venir ?
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C'était il y a longtemps, à l'époque où nous étions encore pleins d'espoir et d'illusions sur l'avenir. On y croyait fort, on était parti reconquérir ce qui nous appartenait. On avait la foi en Mahal et en notre oncle bien aimé. Et ce n'était pas une bande d'elfes des bois qui allaient nous retenir bien longtemps dans la quête de notre vie ! C'était il y a longtemps, mais je m'en souviens comme si c'était hier.
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Nous avions réussi à nous enfuir grâce au petit maître Cambrioleur qui nous accompagnait depuis la Comté. Un drôle de p'tit bonhomme, celui que nous avions bien eu du mal à sortir de sa jolie maisonnette. Mon oncle n'avait pas confiance en lui et, quand on le regardait — pas mon oncle, hein, mais le hobbit — on ne pouvait que comprendre. Jamais je n'avais vu quelqu'un se plaindre autant, du chaud, du froid, de la pluie et même de rien du tout. Il était fatiguant et pourtant, je n'avais pu m'empêcher d'en être amusé. J'étais bien content qu'il soit avec nous. Si le magicien, Gandalf, disait que c'était le bon, alors qui étions-nous pour remettre sa parole en question ? Même notre oncle n'avait plus insisté pour dire qu'il ne nous servirait à rien sinon nous mettre des bâtons dans les roues.
Et là, on peut dire que Gandalf avait eu du nez car sans l'aide du petit maître Cambrioleur, qui sait ce que ces maudits elfes nous auraient fait ? Grâce à lui, on avait pu prendre la fuite. Malheureusement, il avait fallu que ces saletés d'orques de malheur nous tombent dessus à peine la sortie en vue. Quelle plaie ! Encore une fois, les nains avaient montré qu'ils étaient capables du meilleur comme du pire et même si c'était dans le pire que nous étions les meilleurs, nous avions quand même réussis à nous en sortir in extremis. Il ne faut jamais sous-estimer un nain. Mais trêve de plaisanterie, Kili avait été salement touché. Par Mahal, je n'avais pas prévu ça et j'avais été incapable de le protéger. Maman me tuerait quand elle l'apprendrait. Bon, ça n'avait pas l'air si grave que ça, il saignait beaucoup à la cuisse mais on avait réussi à lui faire un bandage de fortune et il semblait pouvoir marcher sans souffrir.
Tandis que nous allions reprendre le chemin nous menant droit vers la plus grande réussite de notre vie, car je ne doutais pas de notre bonne fortune, mon oncle se figea, ses gros sourcils broussailleux se fronçant sous la contrariété.
— Qui que vous soyez, rugit-il aux broussailles qui se trouvaient devant lui, il est grand temps de vous montrer.
Intrigué, je jetai un coup d'œil curieux derrière son épaule puis me tournai vers mon frère qui me regardait, le visage fermé. Nous hochâmes la tête de concert, prêts à couvrir les arrières de notre oncle quoiqu'il arrive. Il était le futur roi d'Erebor et même si pour le moment je restais son principal héritier, nous avions pris l'habitude, mon frère et moi, d'assurer sa protection… Bien qu'il sache très bien se défendre tout seul, c'était un fait. Au moment où nous allions bondir, prêts à en découdre contre le malandrin qui avait eu le toupet de nous suivre, nos mouvements se figèrent.
J'eus même la désagréable sensation que mes yeux s'étaient mis à brûler, éblouis par un soleil rougeoyant d'une telle intensité que je me demandai un instant s'ils n'avaient pas pris feu, mes yeux hein, pas le soleil, et puis il n'y en a qu'un de toute façon… De soleil, pas mes yeux ! Je sentis à peine le coup de coude que Kili m'envoya dans les côtes. J'avais toujours été pragmatique et plutôt terre à terre, à l'inverse de mon frère, véritable rêveur et joli cœur qui tombait sous le charme du premier jupon à barbe qu'il croisait. Ce n'était pas vraiment sa faute mais il avait été trop couvé par notre mère. En face de nous, se tenait bien un jupon mais point de barbe à l'horizon sur le visage amusé de la donzelle qui nous dévisageait comme si nous n'étions rien ou si peu pour elle. Ce qui n'était pas faux non plus. Elle-même n'avait rien de surprenant de prime abord… Sauf peut-être ses cheveux mais ce qui me percuta de plein fouet et me mis franchement mal à l'aise furent ses yeux. Ils étaient beaux, perçants et semblaient avoir atteint un endroit de ma personne que je pensais avoir bien protégé jusque là.
Elle n'était pas vraiment jolie, enfin pas comme un nain l'entend, mais il émanait d'elle quelque chose qui me donna instantanément envie de la protéger… de mon oncle et de Dwalïn qui semblaient proche de vouloir l'étrangler tous les deux.
Tout à mes dérives, je sentis à peine mon frère me donner une rapide claque sur l'épaule. Un peu surpris, je me retournai vers lui et sur le coup, je ne compris pas pourquoi il me souriait ainsi jusqu'à ce que je voie la grimace de lassitude de Dwalïn à notre égard. Je souriais tout autant que mon frère et en cet instant, nous devions avoir l'air de deux parfaits idiots. La fille ne nous accorda, heureusement, aucun regard, bien trop occupée avec notre oncle. Leur joute verbale dura un moment avant que la situation ne s'envenime un peu plus. Cette fois-ci, nous décidâmes, mon frère et moi, d'intervenir. Kili fut le plus rapide.
— Pardonnez-moi, mon oncle, mais peut-être que cette créat… jeune femme, se reprit-il rapidement, sait faire la cuisine ?
Merci, mon frère ! Bien joué, tu as l'impression que cette créature, comme tu allais si bien le dire, accepterait de nous préparer à manger ? Elle avait tout d'une enchanteresse mais je me serais bien gardé de le dire à voix haute. Au lieu de cela…
— Kili a raison, dis-je à mon tour sans savoir ce qui me passait par la tête, ça nous enlèverait une sacrée épine du pied si on pouvait avoir des repas un peu plus élaborés que ceux de Bombur. Non que les tiens ne soient pas bons, rétorquais-je vivement à l'intention du nain le plus imposant de notre groupe.
Et oui, je n'étais pas plus doué que mon frère mais à la tête que firent mon oncle et Dwalïn, je sus que nous avions peut-être visé juste. Quant à la fille, elle ne semblait pas très heureuse… Outrée même. Un malaise me gagna. Savait-elle cuisiner, au moins ?
— Très bien, elle nous accompagne, mais au moindre retard ou au plus petit problème dont elle serait responsable, elle s'en va, décida enfin Thorïn.
A cette nouvelle, mon cœur fit un bond dans ma poitrine. C'était absurde mais je me sentais ravi et, vu la tête que mon frère faisait, lui aussi semblait l'être. Ça, ça me plaisait moins, par contre, mais je n'en montrai rien. Comme à notre habitude, mon frère et moi nous nous tournâmes à l'unisson vers elle pour lui souhaiter la bienvenue parmi nous, avec le plus beau sourire que nous ayons en rayon. Notre politesse fut récompensée car elle nous le renvoya, bien plus lumineux, et bien plus chaleureux que je ne l'aurais imaginé. Elle n'avait pas de barbe me rappelai-je, et pourtant, je ne la trouvais pas laide, loin de là et cette idée me perturba encore plus.
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Le trajet fut presque irréel. Mon frère me parlait mais je ne pouvais pas empêcher mes yeux de se poser sur cette rousse incendiaire. Pourtant, j'en avais connu, des rousses incendiaires, dans ma vie. Toutes avec des barbes magnifiques, véritable attribut de séduction qui savait m'émoustiller plus que tout.
— Tu as entendu ce que je viens de te dire, Fili ? grogna Kili, me regardant de ses yeux sombres.
Je tentais vainement de retrouver la conversation, alors on parlait des elfes et d'une rousse incendiaire… heu non, ça c'était mes pensés, mais… Si Kili me parlait aussi d'une rousse.
— Tauriel est vraiment différente des autres elfes, me souffla-t-il au visage, la mine incrédule. J'espère qu'il ne lui est rien arrivé durant l'attaque.
A ma grande honte, je me souvenais à peine du visage de cette elfe. Pour moi, ils se ressemblaient tous et c'était impossible de différencier les mâles des femelles.
— Heu, Kili, tu es sûr qu'il ne s'agissait pas encore d'un mâle ?
Il nous avait déjà fait le coup trois fois à Fondcombe, confondant les mâles et les trouvant plus à son goût que les femelles. Ça nous avait bien fait rire, d'ailleurs. Pauvre Kili, c'était un bourreau des cœurs mais parfois, en fait bien souvent, il se montrait un peu trop crédule et naïf. Ça, c'était ma faute, je le protégeais trop.
— Mais non, c'est une fille, oui elle n'a pas de barbe, mais je te jure, elle a quelque chose et…
— Elle te dépasse d'au moins trois têtes, arguais-je, un rictus moqueur sur les lèvres. En plus, elle est aussi plate qu'un de leurs mâles.
A mon sens, une femelle me dépassant d'autant de tête et sans aucune forme, c'était juste rédhibitoire. Elle n'aurait jamais aucune chance que je m'intéresse à elle.
Jetant un coup d'œil à la fille qui avançait devant nous, je vis qu'elle n'était pas plus grande que notre oncle. Ils devaient faire à peu près la même taille, d'ailleurs. Elle était plutôt ronde pour une humaine et carrément énorme pour un elfe. Ces attributs me plaisaient pourtant bien. Déjà, elle n'avait pas d'oreilles pointues, et c'était un plus indéniable. Kili, pendant ce temps, continua à me parler inlassablement de cette Tauriel qui semblait avoir réussi l'inacceptable : capturer le cœur d'un nain. Peuh ! Si maman l'apprenait, c'est encore moi qui en prendrais pleins la tronche. Non mais vraiment, parfois ça craignait d'être l'aîné !
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Tandis que nous continuions à avancer, je me pris à imaginer notre nouvelle compagne avec de jolies tresses sur son visage. Cette vision faillit me couper le souffle mais heureusement que je pouvais compter sur Kili pour me faire reprendre mes esprits. Il venait de me donner une violente claque sur la tête ! Saleté de frère ! J'aurais du le noyer à la naissance. En fait non, par Mahal, je ne le pensais pas vraiment.
— Je sais à quoi tu penses mais n'essaie même pas ! râla Kili.
Il était bien placé pour parler, lui qui venait de me prendre la tête avec sa Tauriel par ci, Tauriel par là.
— N'importe quoi, marmonnai-je, de toute façon, elle n'est pas de notre peuple et il lui manque un attribut important.
Ce qui n'était pas faux, tout comme l'elfe d'ailleurs.
— Sans oublier que notre oncle n'avait pas l'air de la porter en très grande estime, soupirai-je avec fatalité, et ça ce n'était pas prêt de s'améliorer.
La journée toucha à sa fin, laissant place à la nuit tandis que notre oncle nous ordonnait de nous arrêter pour dresser notre campement. Comme d'habitude cela se fit dans une atmosphère plutôt détendue et bientôt, on sonna l'heure du repas. Un peu plus tôt, mon frère et moi étions partis chasser de quoi nous sustenter pour le soir et c'est très fiers que nous avions donné tout le gibier récolté à notre nouvelle compagne de voyage.
— Tenez, Dame Aria, avait dit Kili, voilà de quoi nous mitonner un bon repas bien copieux.
Pour ma part, je m'étais contenté d'acquiescer, le sourire aux lèvres, me retenant de la dévorer une nouvelle fois des yeux. Elle était différente mais c'était cette différence qui la rendait si attrayante. Aria…
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Une heure plus tard, nous étions tous réunis autour du feu pour manger notre délicieuse pitance.
— C'est très bon mademoiselle Aria, fit doucement remarquer Bilbo, notre maître Cambrioleur. Vous êtes très douée, assura-t-il.
Avisant la fille, Aria, du coin de l'œil, je vis qu'elle avait l'air plus déconfite que jamais, voire dégoutée. Il faut dire que nous nous étions tous précipités sur son repas sans même un remerciement à son égard, dévorant à qui mieux-mieux tels des ogres mal éduqués. Maman n'aurait pas été fière de nous si elle nous avait vu.
Soupirant devant mon manque évident de savoir vivre, je la rejoignis en quelques enjambés et m'assis à ses côtés. Je reçus un nouveau choc. Elle sentait délicieusement bon, vraiment ! Il émanait d'elle une odeur de violette et de quelque chose de plus sucré que je n'aurais su définir mais je m'en fichais, c'était la première fois que je m'approchais d'elle d'aussi près. Je pouvais bien délirer un peu sur son odeur, sans doute était-ce du au fruit de mon imagination, ou aux fruits tout court qu'il y avait dans l'une de mes poches de pantalon.
— Tenez, jeune damoiselle, commençai-je d'une voix que je voulais neutre. Vous devriez vous sustenter, vous aussi, la route de demain sera longue et vous risquez de ne pas supporter le voyage sinon.
Ce qui était vrai. Bien sûr, elle aurait de quoi faire avec les réserves qu'elle avait sur elle, mais il était quand même important qu'elle se nourrisse un peu aussi.
— Merci, répondit-elle simplement en plissant les yeux.
Je ne savais pas si elle allait m'envoyer paître ou m'ignorer mais je sentis, non sans peine, qu'elle me jaugeait. J'avais envie de lui dire que je n'étais pas comme mon oncle et qu'au contraire, j'étais vraiment ravi de l'avoir avec nous mais ma gorge se bloqua et je fus incapable de dire quoique ce soit d'autre.
Finalement, elle esquissa l'ombre d'un sourire à mon attention avant de commencer à manger. Cela suffit à me rassurer et je décidai de la laisser un peu tranquille. J'aurais tout le temps de lui parler une autre fois.
Un peu plus tard, Bilbo brisa le silence en posant une première question à Aria. Aria, quand j'y repensais, quel drôle de prénom. Toutefois, ça lui allait quand même bien, à cette petite femelle dont la chevelure était aussi rouge que les colères de mon oncle.
— Alors mademoiselle Aria, d'où venez-vous exactement ? lui demanda notre maître Cambrioleur.
Jetant un coup d'œil à mon oncle, je vis qu'il ne l'avait pas quittée des yeux tandis que le hobbit formulait sa question. Il avait sorti sa pipe et s'amusait à faire d'énormes ronds de fumée avec après l'avoir allumée. Cela me donna envie à mon tour et je sortis la mienne en poussant un petit soupir de satisfaction. Le repas avait été très bon.
— C'est vrai, cela, souffla-t-il, vous étiez prisonnière des elfes, c'est que vous aviez sans doute une quelconque importance à leurs yeux.
— Peut-être pourriez-vous nous éclairer, surenchérit Oïn qui s'était rapproché d'eux, lui aussi.
A croire qu'ils se liguaient tous contre elle. Ravalant mon envie de la secourir, j'aspirais une grande quantité de fumée avant d'expirer doucement.
— Je suis une simple femme, une humaine qui a quelques pouvoirs bien utiles, souffla-t-elle quelques minutes plus tard.
Elle avait baissé les yeux mais j'eus le temps de voir son agacement à l'égard de mon oncle. Elle ne semblait vraiment pas l'aimer et c'était sans doute bien réciproque.
Elle releva alors les yeux et rencontra ceux, méprisants, de ce dernier. Ils se jaugèrent un instant avant qu'il ne reprenne, plus venimeux que jamais :
— Vraiment, jeta-t-il sur un ton méfiant. Vous m'aviez l'air bien plus sûre de vous dans les geôles de ces traitres d'Elfes. Vous êtes étrange, Aria, simple femme. Etrange et encombrante. Il inspira fortement sur sa pipe avant de souffler de nouvelles volutes de fumée blanche.
Je sentis l'atmosphère s'alourdir de seconde en seconde. A voir la tête qu'elle faisait, j'avais peur qu'elle ne tente le diable en attaquant Thorïn. Heureusement, elle reprit vite contenance et répliqua à son tour :
— Je suis une humaine, si cela vous plait de le savoir… ou pas, je m'en fiche, lui jeta-t-elle au visage, l'air revêche. Je ne sais pas pourquoi les Elfes m'ont capturée mais cela dit, je leur dois une fière chandelle car les araignées sont coriaces dans cette forêt. Je me rendais vers les terres sauvages en direction de la montagne solitaire. Il y a un petit bourg que l'on appelle Lacville ou Bourg du Lac, cela dépend des régions. Je me rends là-bas, c'est très important pour moi.
Elle avait prononcé les derniers mots comme s'ils lui brûlaient la langue. Je me demandais toutefois ce qu'elle voulait aller faire là bas. Avait-elle de la famille ? Un mari ? Un fiancé peut-être ?
— Heureusement que la providence vous a mis sur notre chemin, alors, termina mon frère qui la dévisageait avec un grand sourire qui ne laissait rien présager de bon. Allons donc, fallait-il qu'il la séduise, elle aussi ? Agacé je soupirai bruyamment, ce qui me valut le regard peu amène de Dwalïn. Je haussais alors un sourcil. Bien quoi ? Comprenant que la conversation était terminée, chacun se leva pour vaquer à ses occupations et je vis Aria s'occuper de la vaisselle. J'allais l'aider quand mon oncle me devança et se mit à lui parler tout bas.
Secouant la tête, je rebroussai chemin pour m'enquérir des autres nains et de Kili. Depuis qu'il avait été blessé, il n'avait rien dit à ce sujet mais je savais qu'il souffrait encore. Son teint avait blanchi et ses yeux larmoyaient étrangement. J'espérais de tout mon cœur qu'il aille mieux. C'était mon seul frère et je me sentais responsable de lui. N'avais-je pas promis à notre mère que nous reviendrions couronnés d'or tous les deux ? Lorsqu'il fut temps de dormir, je m'aperçus qu'Aria avait établi son lit de fortune à l'écart du groupe. Fronçant les sourcils, je la rejoignis sans hésiter.
— Dame Aria, je ne crois pas qu'il soit très judicieux de dormir loin de nous.
Je la sentis frémir au son de ma voix. Elle était de dos et, quand elle se retourna, je crus qu'elle allait m'arracher les yeux.
— Je dors où bon me semble…
— Fili, répondis-je, voyant bien qu'elle cherchait mon prénom. Et oui, je sais bien que vous pouvez dormir où bon vous semble mais croyez-moi si on s'entasse tous les uns à côté des autres ce n'est pas par plaisir. Entre Dwalïn qui ronfle comme un gobelin qui chante et Bombur qui lâche des c… Je me retins à temps. Allais-je vraiment dire que Bombur pétaradait toute la nuit ?
Je fus surpris d'entendre un doux rire émanant d'elle et, quand je relevai la tête pour la regarder, je vis que sa mauvaise humeur à mon encontre s'était volatilisée. Tant mieux.
— Je suis navrée Fili mais votre oncle a le don de me mettre de mauvaise humeur et je n'aurais pas du vous parler aussi vertement.
— Je ne vous en tiens pas rigueur, répondis-je rapidement.
Sans attendre, je pris son paquetage de fortune et ramenai sa paillasse à côté de la mienne. Si jamais nous étions attaqués durant la nuit, je voulais pouvoir assurer sa défense. Si je ne le faisais pas, je savais bien qu'aucun autre nain ne l'aurait fait à ma place. Elle me suivit sans rien dire, son regard s'adoucissant de seconde en seconde et je ne pus empêcher mon cœur de battre plus vite.
Pris d'un instinct protecteur presque irrationnel, je refis sa couche et l'invitai à s'y étendre. J'allais faire de même quand j'entendis quelqu'un s'asseoir à côté de nous. C'était Kili.
— Fili a bien fait de vous ramener près de nous, commença-t-il tout en s'étendant à côté d'Aria.
— Qu'est-ce que tu fiches Kili ? grognai-je en Khuzdul pour qu'elle ne me comprenne pas. Mon frère me regarda bizarrement avec une lueur dans les yeux que je ne reconnaissais que trop bien.
— Ne t'inquiète pas, je ne vais pas tenter quoique ce soit mais je pense qu'entourée de nous deux elle risquera moins si nous sommes attaqués.
C'était une bonne idée. Aria nous gratifia tous les deux d'un doux sourire avant de nous souhaiter une bonne nuit.
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Bien des heures plus tard, je ne dormais toujours pas. Qu'est-ce qui venait de se passer aujourd'hui exactement ? Pourquoi me sentais-je aussi bizarre face à cette fille, une humaine, qui hormis ses alléchants appâts n'avait rien pour me séduire ? Elle n'était pas de mon peuple et n'avait aucune barbe. Cela n'avait aucun sens… Alors pourquoi avais-je cette sourde envie qu'elle me sourie à nouveau ? Pourquoi voulais-je la protéger envers et contre tous ?
Seuls les ronflements intempestifs de mes compagnons me répondirent.
Au fond, je le savais, je m'en doutais inconsciemment, mais je ne voulais pas nommer ce qui m'arrivait. C'était bien trop fort, bien trop puissant et surtout bien trop rapide pour que cela ne m'assomme pas totalement.
J'étais heureux mais j'avais peur aussi. Oui, très peur… Et dire que le voyage n'était pas encore terminé !
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Toutefois et bien des années plus tard, si j'avais su ce qui allait se passer, sans doute aurais-je agi par la suite de façon bien différente.
Act I - Fin
