Le prologue se déroule sur l'entièreté des trois mois du séjour, avec des parties courtes, mais marquantes de l'histoire. Les ellipses sont importantes dues au fait que ces trois mois ne doivent absolument pas s'éterniser pour laisser place à la suite de l'histoire.
Enjoy!
Il jeta un regard à son presqu'ami à la chevelure violette à sa droite, puis reporta son attention sur le hall noir de monde de la gare.
« Plus haut Atsushi. » Murmura-t-il laconiquement.
Le violet leva alors avec sa main droite la petite pancarte en carton qu'il tenait, grignotant sa barre chocolatée avec l'autre. Derrière lui, Aomine poussa un long soupir, tandis que Kise embêtait de nouveau Kuroko et Midorima remontait ses lunettes en le priant bien gentiment de mourir. En réalité, il avait seulement convié Atsushi. Les autres s'étaient incrustés, avides de savoir qui était assez fou pour partager son quotidien pendant un trimestre avec le capitaine de la Génération des Miracles. Étouffant un nouveau soupir, Daiki jeta un regard ennuyé à la pancarte que levait Atsushi.
« Alexis Bentley. » Marmonna-t-il en se frottant les cheveux : « comment est-il censé être, ce type ?
- Grand ! » S'exclama Ryouta avec entrain : « comme c'est un meneur de jeu, il doit être super grand et super musclé ! Plus qu'Akashicchi !
- Ne tire pas de conclusions hâtives, tu seras déçu. » Le réprimanda Shintaro.
Le train en provenance de Tokyo entre en gare. Tous les six se redressèrent à l'annonce des haut-parleurs, avide de connaître l'élève étranger que Seijûro avait choisi pour passer un trimestre en sa compagnie. Il y avait eu véritable foule de nom, parmi ces étudiants australiens. Il avait relevé ce profil parce que la fiche de cet élève vantait largement ses capacités en tant que meneur de jeu dans le domaine du basket. Il était désireux de pouvoir évaluer lui-même ce fameux prodige.
« Ça doit être lui ! Murasakibaracchi lève plus haut la pancarte ! »
Tout le monde se tourna avec intérêt dans la direction que Kise désignait. Un grand blond, un simple sac de sport sur l'épaule droite s'avançait dans leur direction, les toisant avec un large sourire. Kise ouvrit la bouche, heureux de voir l'australien avancer dans la direction. Et perdit son sourire lorsque le jeune homme passa à côté de lui, dépassant leur petit groupe sans le moindre regard pour prendre dans ses bras une bonne femme gironde derrière eux.
« Ce n'était pas lui. » Geignit le blond en pleurant sur l'épaule de Shintaro qui l'éloigna prestement.
« Dans ce cas, c'est peut-être cet homme. » Intervint Kuroko qui était resté silencieux depuis un bon moment.
Plein d'espoir, le mannequin se redressa et se tourna dans la direction indiquée. De taille moyenne, un jeune garçon châtain, petit et trapu balayait le hall de la gare du regard. Un instant, son regard s'arrêta sur la pancarte qu'Atsushi brandissait. Puis, son attention se fixa sur un point, plus loin dans la gare et il rejoint un autre groupe d'étudiant qui l'accueillit à coup de grands cris.
« Tu t'es trompé Tetsu ! » Gronda Daiki en lui jetant un regard.
Celui-ci haussa les épaules, en affirmant qu'il ne pouvait pas deviner à quoi ressemblait cet étudiant étranger. Pendant de longues minutes, il y eut plusieurs spéculation infructueuses, jusqu'à ce que le hall de la gare se vide finalement.
« Il n'est pas là. » Fit intelligemment remarquer Shintaro alors que tout le monde l'avait remarqué.
« Excusez-moi. »
Ils se tournèrent tous comme un seul homme. Une adolescente, petite, les cheveux complètement décolorés et striés de mèches bleus, les toisait de ses yeux améthystes, la bouche étirée en une moue dubitative.
« Qu'est-ce que tu veux ? » Aboya le bleuté visiblement de mauvaise humeur.
Les autres lui jetèrent des regards réprobateurs. Pendant une dizaine de seconde, elle le toisa étrangement, puis renversa la tête sur le côté en désignant la pancarte qu'Atsushi tenait encore.
« Je suis Alexis Bentley. »
Toutes les mâchoires se décrochèrent, hormis Akashi qui la toisait les sourcils froncés, et Atsushi qui était trop concentré à grignoter une autre barre de chocolat. Daiki faillit l'attraper par les épaules pour la secouer comme une poupée de chiffon.
« Tu plaisantes ? C'est censé être un garçon, il s'appelle ALEXIS.
- Oui. Alexis de mon prénom Alexandra. Mais je n'ai jamais écrit dans ma fiche que j'étais un garçon. »
Il y eut une minute de silence, chacun dévisageant celle qui se disait être le fameux extraordinaire meneur de jeu. Une fille. Avec une poitrine moyenne pour quelqu'un de son âge, un peu trop petite pour prétendre avoir une taille dans la moyenne, les cheveux trop décolorés pour prétendre être une fille sage. Alexandra Bentley. Et inconsciente du temps glacial qu'il faisait à l'extérieur, elle portait un short de sport blanc, un débardeur jaune pâle et une veste de sweat-shirt grise. Les cheveux relevés en un chignon grossièrement bâclé grâce à deux baguettes parfaitement mises pour une étrangère qui n'avait jamais utilisé d'accessoires japonais de sa vie. Mais une fille tout de même. Elle se pinça légèrement les lèvres, fronçant les sourcils en inclinant légèrement la tête de côté.
« Le fait que je ne sois pas un homme dérange ? »
Il ouvrit de grands yeux, surpris qu'elle ait posé la question. Et Kise, qui clignait des yeux trop rapidement pour que ce soit naturel se fendit d'un immense sourire.
« Mais pas du tout ! Nous étions simplement surpris c'est… !
- Ce n'est pas la peine de mentir. » Le coupa-t-elle doucement en fermant les yeux.
Elle rabattit sa lourde valise au niveau de sa hanche, peu surprise du fait qu'il ne réplique pas. Après tout, ça se voyait clairement sur leur visage. Comme le nez en plein milieu de la figure. Inutile de discuter un fait avéré. Elle rabattit une mèche de cheveux derrière son oreille, fixant Aomine qui était le plus proche d'elle.
« Allons-nous rester plantés ici encore longtemps ? Je ne connais même pas vos noms. »
Son japonais était étonnamment bon. Son accent à peine prononcé. Sa voix contrastait avec son apparence, étrangement grave pour une fille de son âge. Elle parlait avec lenteur, la voix traînante sur certaines syllabes, ce qui donnait un certain charme à son japonais étrange. Kuroko tira légèrement la manche d'Aomine.
« Tu n'as pas été correct, Aomine-kun.
- Tetsu ! Depuis quand tu es là toi ?
- Il a raison. » Intervint Midorima en remontant ses lunettes : « la gêner alors qu'elle vient à peine de poser les pieds en sol japonais. Tu n'as aucune manière, c'est pitoyable.
- Ao-chin, méchant… » Geignit Murasakibara en enfournant une chips.
Ryouta hocha la tête, tout à fait d'accord. Et Aomine devint rouge de honte, prêt à hurler sur ses amis qui se mettaient à 4 contre lui, ne faisant que l'enfoncer. Akashi l'interrompit avant qu'il n'ait pu émettre le moindre son, avançant d'un pas en lui jetant une œillade qui le dissuada aussitôt de protester. Se plantant devant l'australienne qui les dévisageait tour à tour, il esquissa un demi-sourire.
« Je suis vraiment désolé pour cet accueil. Je suis Seijûro Akashi, ravi de t'accueillir au japon, Alexandra.
- Alexis. » Le reprit-elle doucement en renversant la tête de l'autre côté : « je préfère qu'on m'appelle Alexis. Je te suis très reconnaissante, Akashi-kun. »
Et pourtant, elle étira ses lèvres en une moue étrange qui lui donnait un air enfantin. Rabattant de nouveau une mèche de cheveux rebelle, elle jeta un instant un coup d'œil à Atsushi derrière le jeune homme, puis s'inclina légèrement en reportant son attention sur lui.
« Je suis enchantée de faire ta connaissance. »
Elle pénétra dans l'enceinte du collège, sans la moindre honte, comme si elle avait toujours étudié dans cet établissement. Bien que le fait qu'elle soit une étudiante étrangère se remarque au premier coup d'œil qu'on lui jetait. Ayant sagement revêtue l'uniforme du collège, elle avait ajouté de longs bas qui lui arrivaient jusqu'à mi-cuisse à sa tenue, et usé d'une simple barrette en forme de collerette pour attacher ses cheveux. Malgré ses airs de gentille fille, il était clair que ce n'était qu'une façade. Mais de quelle profondeur était le fossé qui se situait entre ses bonnes manière, son comportement irréprochable et l'attitude contenue qu'elle maintenait en laisse ? Énorme sûrement. Entrant dans un bureau où une jeune femme avec de petites lunettes sur le nez tapait rapidement sur un clavier d'ordinateur, elle se planta devant celle-ci qui releva les yeux en souriant.
« Bonjour ! Que puis-je faire pour toi ?
- Je m'appelle Alexis. Je… » Elle hésita un instant sur le terme adéquat à employer : « je suis l'étudiante étrangère. »
Le visage de la jeune femme s'illumina, et elle leva un doigt pour lui demander de patienter. Tapant sur son clavier à toute vitesse, elle se projeta grâce à sa chaise roulante jusqu'à une étagère en fer, s'emparant du dossier qui se trouvait tout en tête de liste. Il était marqué en grosses lettres du nom BENTLEY. Elle le posa sur le bureau entre elles deux et l'ouvrit, révélant une fiche soigneusement remplie par son frère. Il l'avait envoyé trois mois auparavant pour valider son inscription temporaire.
« Alexandra Sovrana Bentley. » Annonça joyeusement la secrétaire en examinant la fiche : « bienvenue au collège Teiko. Je suis la première secrétaire, Adaô Mizuki. Vu que tu es une étudiante étrangère et non transférée, j'ai appelé la présidente du conseil des élèves pour t'aider et t'aiguiller dans notre humble collège. »
Enregistrant toutes les informations, Alexis hocha doctement la tête. La secrétaire esquissa un nouveau sourire plein d'entrain, et se projeta à nouveau sur sa chaise à roulette vers l'armoire en fer. Sortant une feuille d'un des ses tiroirs, elle la posa sur le bureau, entre elles deux.
« Voici les informations relatives qui te seront utiles durant ton séjour. Bien que l'équipe soit exclusivement masculine, vu que tu es jumelée avec Akashi Seijûro-san, tu devras participer aux entraînements du club de basketball. Je m'arrangerais avec le coach pour qu'il ne te donne du travail qu'administratif. Tu seras aussi avec Seijûro-san en classe, si tu as besoin de quoique ce soit, demande-moi. Ou bien à…
- Mizuki-san ! »
La jeune femme releva les yeux, et son sourire déjà énorme réussit à s'agrandir encore. Une adolescente blonde vénitienne s'avança dans leur direction, des dossiers sous le bras. Elle était elle aussi fendue d'un sourire encourageant.
« Alexandra-san, je te présente Akufuku Seiza, la présidente du conseil des élèves. Si tu as besoin de quoique ce soit, tu peux aussi t'adresser à elle.
- Alors, tu es la fameuse étudiante étrangère ? Tu as fait parler de toi, correspondre avec Akashi Seijûro est vraiment courageux. Mais ce n'est pas le sujet, je suis ravie de te rencontrer. »
Elle lui tendit la main avec un sourire étrange, malicieux. Correspondre avec Akashi Seijûro est vraiment courageux. Fronçant légèrement les sourcils, Alexis tendit sa main avec réticence. L'autre, inconsciente – ou faisant semblant d'être inconsciente – de sa méfiance la serra avec ferveur.
« Bienvenue à toi, Alexis Bentley. »
L'australienne tressaillit légèrement en vrillant son regard améthyste dans l'émeraude de sa vis-à-vis. Celle-ci avait toujours son sourire dérangeant aux lèvres. Pourtant, elle n'avait jamais précisé à cette fille qu'elle préférait se faire appeler Alexis.
« Je ne joue plus au basket. » Répéta-t-elle sans se troubler, ignorant les regards ahuris des membres de la génération au miracle.
Kise bégaya un truc incompréhensible, complètement paumée. D'abord, ce super (et il ne mâchait pas ses mots, c'était limite si le mot génial n'était pas inscrit en haut de la fiche) meneur de jeu était une fille. Avec une poitrine, des cheveux longs, un visage rond encore poupin et le reste qui prouvait qu'elle en était une. Et ensuite, elle affirmait avec conviction après qu'Aomine lui ait posé la question, qu'elle ne jouait plus au basket. Elle s'était bien fichue d'eux cette australienne. Mais avant que quelqu'un n'ait pu protester, elle leva la main pour les empêcher de parler.
« Cependant ce n'est pas plus mal, je n'ai jamais joué un match de basket de toute ma vie. »
Bon nombre de mâchoire se décrochèrent, incapable de tenir plus longtemps. Je n'ai jamais joué un match de basket de toute ma vie… Et elle le disait tranquillement, comme si ça n'avait absolument rien de dramatique ! Comment pouvait-elle se prétendre joueuse de basket alors qu'elle n'avait jamais posé un pied sur un terrain ?
« Je jouais dans une équipe de garçon, ils refusaient de me laisser jouer. »
Une vague de compréhension traversa Kise. A leur place, il aurait sans doute fait de même. En voyant la stature de l'adolescente, on ne pouvait qu'en faire de même.
« Je me contentais d'élaborer les stratégies, dans les moindres détails et restais assise sur le banc. Mon équipe n'a jamais encaissé un seul panier durant tout le temps où j'en ai fait parti. »
Blanc. Un ange passa. Un second passa. Son frère passa. Sa mère passa aussi. La grand-mère mit un peu plus de temps, provoquant de la circulation sur l'autoroute des anges. Et toute la famille suivit.
« J'établis tous les scénarios possibles dans un match. » Reprit-elle sans se troubler : « chaque action est importante. Je reproduis virtuellement l'action probable et favorable de la situation et l'associe à un changement de rythme qui détermine si elle est favorable ou non, dans le cas présent. Aucune action ne m'échappe. Je sais déjà comment va se dérouler le match avant qu'il commence et je l'explique à mes équipiers. Ils adaptent leur défense, leur offensive. Et comme la situation déterminée n'est jamais jouable à 100% de ses chances, je détermine un cas dans lequel les chances de réussite atteindront les 100, ou bien je change le rythme de la situation pour la déterminer sous un angle différent et ainsi trouver le meilleur cas favorable lorsqu'elle est définie, mais pas incontournable. Il me suffit de déterminer le nombre de cas maximal d'une situation pour déterminer la favorabilité de ce cas, la changer rythmiquement pour en évaluer tous les risques, et étudier toutes les probabilités que cette situation soit modifiée, avant de mettre en place une stratégie qui sera en mesure de contrer toutes les possibilités. Ainsi, je n'ai pas besoin d'être sur le terrain pour coordonner les actions de mes équipiers. »
Elle referma la bouche. Et Kise, qu'on avait perdu depuis le début de son explication, cligna des yeux d'un air ahuri en la dévisageant, imaginant presque les rouages de son cerveau qui se succédaient dans sa tête. Il fallait être complètement dingue pour être capable de faire une chose pareille ! Et pourtant, elle le faisait ! Elle… Elle… elle était…
« Intelligente ! » S'écrièrent Daiki et Ryouta en même temps.
Elle fit mine de ne pas avoir entendu. Satsuki la toisait avec un petit sourire sournois, songeant que ses prédictions s'allieraient parfaitement à cette fille. Atsushi clignait des yeux comme si une poussière y avait élu domicile. Seuls Tetsuya, Shintaro et Seijûro ne semblaient pas du tout perdus face à son discours.
« Qu'est-ce que tu entends par changement de rythme ? » S'enquit le joueur fantôme.
Elle tressaillit en posant les yeux sur lui, ne l'ayant absolument pas remarqué, alors qu'il était là depuis le début. Le dévisageant un instant avec une insistance trop forte pour que ce soit simplement de la surprise, elle renversa légèrement sa tête sur le côté.
« Il y a deux choses que l'œil humain ne peut pas voir. Les choses trop rapides et les choses qui passent d'un état lent à un état rapide trop brusquement. Lorsque je me projette dans une action, j'imagine que ces deux choses peuvent se produire. Cependant, l'effet ne sera pas le même. Dans ces deux cas donnés, je m'efforce de déterminer lequel aurait le plus d'impact, et j'impose le rythme adapté à mon équipe. »
Elle sembla chercher ses mots un instant, puis reprit.
« Tu utilises la misidirection. C'est un changement de rythme en soi. Le fait de passer d'un état présent à un état absent sans que le joueur le remarque, puis de revenir au premier état tout aussi subtilement. L'œil n'est pas capable de suivre ce mouvement, ainsi la probabilité de réussite est largement plus élevée. »
Kuroko la fixa un instant. Puis il hocha lentement la tête, comprenant parfaitement là où elle voulait en venir. Ce qui n'était pas le cas de – Aomine, Kise et Murasakibara – tout le monde. Elle secoua légèrement la tête.
« Ainsi, pour en revenir au sujet présent, je n'ai jamais joué un match de basket dans la réalité. Seuls mes essais virtuels comptent. »
Momoi esquissa un large sourire et lui tapota légèrement l'épaule pour attirer son attention. Celle-ci se tourna vers la manager avec surprise.
« Qu'es-tu capable de faire sur un terrain ?
- Malheureusement, je n'ai pas le talent de la génération des miracles. Je peux cependant affirmer que quelqu'un d'approximativement doué au basket ne serait pas capable de me prendre la balle. Pour le faire, il faudrait que l'œil soit habitué ou capable de suivre un changement trop brutal pour un être humain. Mais je ne suis plus capable de jouer au basket physiquement. Je n'ai pas la carrure d'un homme, ces changements de rythme tirent les muscles à tel point que pour une personne aussi frêle que moi, c'est dangereux. Je suis interdite de jouer au basketball jusqu'à la fin de ma vie. »
La manager du club de basket de Teiko se pinça les lèvres, gênée d'avoir posé la question. L'autre lui rendit un regard neutre.
« Étant incapable de pratiquer un sport, j'ai commencé à étudier la médecine sportive. Aussi, je pourrais vous être utile en cas de blessure ou de douleur quelconque. »
Inclinant légèrement la tête de côté, Momoi plissa légèrement les yeux, avant de se jeter à l'eau, posant la question qui la taraudait depuis tout ce temps.
« Alex-chan tu n'as jamais pensé à faire un test de QI ?
- J'en ai fait plusieurs. J'ai un QI de 170, paraîtrait-il. »
Momoi Satsuki ouvrit de grands yeux. L'expression « sur le cul » n'aurait même pas été adapté dans une telle situation. Puis, brisant le silence qui avait été établi avec un sourire en coin, Akashi s'avança légèrement d'un pas en toisant celle – décidément pleine de surprise – qui vivait pour le moment chez-lui.
« J'aimerais beaucoup prendre connaissance de ces scénarios de match que tu mets en place. Crées-en un pour moi, pendant l'entraînement… s'il-te plaît. »
Tout le monde hormis l'étrangère sursauta. Parce que jamais, au grand jamais, Seijûro Akashi n'avait dit s'il-te plaît à n'importe lequel des joueurs du club. Inconsciente de cette menace qui planait, elle hocha vivement la tête. Son visage se fendit d'un large sourire à l'idée qu'il puisse reconnaître ses capacités. Mais es-tu réellement sûre que ce n'est que ça ? Chuchota une petite voix dans sa tête.
Serrant son oreiller contre sa robe de chambre en coton, elle leva le bras pour frapper à la porte, frissonnant à cause du froid de la nuit.
« Akashi-kun ? » Chuchota-t-elle en poussant la porte.
Malgré l'heure avancée de la nuit, le jeune homme était assis en tailleur sur sa chaise d'ordinateur, tapant à toute vitesse sur son ordinateur portable. Il s'interrompit en la voyant entrer et se tourna vers elle, légèrement surpris. Mal à l'aise, elle serra un peu plus son oreiller contre elle.
« Est-ce que je peux entrer ? »
Il arqua légèrement un sourcil, ne s'attendant visiblement pas à cela. Puis il hocha légèrement la tête, la conviant d'un geste vague du poignet à pénétrer dans son antre. Alors qu'elle refermait la porte derrière elle, il reporta son attention sur son ordinateur, l'ignorant. Avec un maigre sourire, elle contourna le bureau pour se glisser entre ses draps. Rabattant la couverture sur sa tête, elle huma profondément le parfum qui se dégageait de la literie. Celui de Seijûro. Poussant un profond soupir, elle ferma les yeux, enfouissant son nez dans les draps encore imprégnés de son odeur. Stupide. Lui souffla une petite voix dans sa tête. Oui, elle l'était. Stupide. De s'être autant attaché à lui. Si déraisonnablement. Elle avait passé tellement de temps à ses côtés, tellement de temps avec lui. Et à présent, maintenant que l'idée de départ était si présente en elle, comment serait-elle capable de lutter contre ce qui la rattachait dans cet endroit. Poussant un nouveau soupir de défaitisme, elle se recroquevilla sur elle-même. Malgré tous les efforts qu'elle avait fait pour s'enfermer dans sa bulle, il l'avait sortie de son cocon. Il l'avait extirpé de sa chrysalide, sans même lui demander son avis. Aho. Songea-t-elle intérieurement en souriant légèrement. Et alors qu'elle finissait par s'abandonner au sommeil, le capitaine de la Génération des Miracles jeta un œil par-dessus son épaule pour l'observer, juste un instant. Et il reporta son attention sur l'écran de son ordinateur.
Poussant un nouveau soupir à moitié étranglé, elle se mordit la lèvre inférieure tout en serrant sa robe de chambre entre ses doigts. Son nez reposait à quelques centimètre seulement du menton du rouquin en face d'elle. Quelques centimètres à peine. Si près, que même dans le noir, elle pouvait être en mesure de voir tous les détails de son visage. Si près, qu'elle pouvait sentir son souffle sur son visage. Avec un tressaillement nerveux, elle referma les yeux, tentant vainement de retrouver le sommeil. Comme si c'était possible. Elle pouvait presque ressentir la chaleur qui émanait de son corps, tellement il se trouvait près d'elle. Akashi-kun, tu es d'une cruauté sans borne. Elle sentit ses ongles percer le tissu en coton de sa robe de chambre, et baissa la tête, s'intimant de rester calme. Ce n'est rien, je ne ressens absolument rien. Elle se mordit la lèvre inférieure si fort, que des gouttes de sang perlèrent sur celles-ci. Endormi ainsi, il semblait si humain, si… vulnérable. Tu ne me fais absolument rien, espèce de tentateur. Elle serra les dents, pinçant les lèvres tout en le fusillant du regard. Si elle avait su, elle serait restée dans sa chambre, aurait dormi dans sa chambre et dans son lit. Poussant un nouveau soupir de frustration de le savoir si près qu'elle pouvait l'effleurer, mais incapable de le toucher, elle ferma rageusement les yeux. Prit une profonde inspiration. Les rouvrit. Et tressaillit en constatant que les yeux grands ouverts, il la regardait droit dans les yeux. Déglutissant avec peine, elle enfonça son visage dans la couette, jusqu'à ce que seuls ses yeux dépassent. Il avait l'air vaguement amusé qu'elle soit gênée d'être prise en faute. Mais elle glissa tout de même ses bras sous le drap, coinçant le pyjama du jeune homme entre ses pouces avant de se coller contre lui, glissant son nez au niveau de son cou. Elle le sentit se raidir, mais ne moufta pas, fermant les yeux. Maintenant, elle était bien. Elle tressaillit lorsqu'il posa une main sur son menton, mais releva tout de même la tête vers lui, comme son mouvement le lui ordonnait. Elle ferma les yeux, réagissant à peine lorsqu'il déposa ses lèvres sur les siennes.
Elle poussa un long soupir en tirant sa lourde valise, et jeta un regard derrière elle. Satsuki, les larmes aux yeux malgré le grand sourire qu'elle arborait lui faisait de grands signes de bras. Seule. Personne d'autre n'était venu. Après l'entraînement de basket, la veille, Seiza était venue pour la saluer, avec un sourire triste. Personne d'autre ne l'avait fait.
« Reviens quand tu veux ! » S'exclama la manager du club de basket de Teiko d'une voix parfaitement maîtrisée.
Trois mois. Cela lui avait paru si court, si rapide qu'elle avait l'impression d'être arrivé hier. Et pourtant, le temps était écoulé. Avec un dernier sourire dans la direction de la manager, elle passa les portes d'embarquement sans le moindre regret. Il n'était pas du genre à lui courir après, elle le savait. Et de toute façon… Ils lui avaient tous plus ou moins fait leurs adieux à leur manière, non ? Dans son sac, elle portait le rouleau de strapping que lui avait dédaigneusement tendu Midorima en la conviant à sa façon de couvrir ses doigts immondes. Le serre-poignet que Kuroko lui avait offert avec les petits sourires dont il était maître. La barre chocolatée que Murasakibara lui avait gentiment tendu au cas où elle aurait un petit creux. Le bouquin que Satsuki avait obligé en lui tirant l'oreille, Daiki à lui offrir. 1001 tactique pour tromper son adversaire au basket. Et les mini-figurines en forme de Kise que ce dernier avait réussi à lui dénicher. Il en avait pris deux et lui en avait offert une, en gage d'amitié éternel. Elle en souriait encore, à cause de l'air gamin qu'il arborait à cet instant. Quant à Akashi… Machinalement, elle posa une main au niveau de sa cuisse droite, devinant encore la morsure de l'encre sous le vêtement, sur sa peau. Ce n'était pas quelque chose qui se montrait. Mais elle en était consciente, et lui aussi. C'était sûrement le plus important. Et elle quitta le Japon, ressassant ces souvenirs, ce qui s'était passé ces trois derniers mois avec un sourire encourageant. Et à l'encre indélébile, les initiales A.S écrites sur sa cuisse droite.
