Me revoilà en force, avec un misérable petit bébé d'à peine 500 mots, mais c'est tout ce que j'ai réussi à pondre. À la base j'avais une toute autre idée de scénar en tête, mais c'était trop structuré et je n'arrivais pas à m'y mettre, alors j'ai préféré y aller à l'instinct. Comme toujours, de la drogue, des overdoses, de la défonce parce que j'adore la défonce, un Mycroft épuisé et du angst emo666 d'adolescent vain.
Je précise que ce texte est ma participation au Challenge de Juillet 2016 du Collectif NONAME, à savoir écrire en solo sur l'un des anciens thèmes : j'ai choisi "Faisons semblant".
Pour la petite anecdote, le texte a été écrit à l'envers, j'ai commencé par la fin pour étoffer ensuite le début (ça ne sert à rien de vous le dire mais je veux vous le dire quand même).
Bonne lecture à toutes et à tous !
Avec toutes les peines du monde, Sherlock tente de dissiper la brume étouffante qui envahit ses pensées et de contrôler les spasmes frénétiques qui parcourent son corps. Vite, se concentrer. Maîtriser le flot incessant d'informations qui défilent sous ses paupières.
Des souvenirs lui reviennent par bribes. Il se souvient d'un John. Il y avait un John, avant.
Il se souvient d'un toit, d'un saut, de l'asphalte rugueuse qui lui écorchait la mâchoire lorsqu'il faisait le mort, allongé par terre comme un pantin dont on aurait coupé les fils. Il se souvient d'un John.
Mais le John est parti.
Ce n'est pas grave, Sherlock l'a remplacé. Au moins, avec elle, il est sûr de ne pas souffrir. Avec elle, il peut faire semblant le temps de quelques heures, recouvrir ses yeux humides d'un doux voile d'illusions, prétendre enfin être quelqu'un d'autre, ailleurs, à mille lieues d'ici. Avec elle, il voit du bonheur, du soleil, un gosse, des bras forts qui l'enlacent et des mots d'amour qui le bercent – il voit des John à la pelle, et il y a même une clôture et un chien.
Il a choisi l'héroïne du film de sa vie, doux poison s'infiltrant dans le réseau de veines vertes qui lui strie les bras, et tranche avec sa peau laiteuse. Qu'importe ses joues qui se creusent et ses jambes qui titubent ! C'est un mal pour un bien. Ça comble pour de faux les trous béants qui lui constellent la poitrine.
« Comme tu as mauvaise mine ». La voix nasillarde de son frère lui perce les tympans et le ramène à la réalité. Sherlock fait de son mieux pour paraître impassible, mais il sait. Il décèle le chagrin profond qui se dissimule derrière la remarque cynique – comme quoi, même le gouvernement britannique a ses failles. Le cadet rit, d'un rire venimeux, acerbe, rendu rauque par la bile qui lui tapisse les gencives.
« Et qu'est ce que tu y feras ? » lui réplique-t-il, avec toute l'amertume dont il est capable. L'autre ferme son clapet. Bien fait pour lui.
Sherlock se redresse brutalement sur le canapé, se lève malgré le bourdonnement strident qui lui scie la boîte crânienne. Sa silhouette longiligne chancelle, sa voix de baryton se brise, s'éraille. Mycroft ne dit rien et cède, une fois de plus. Compose le numéro des urgences d'un mouvement agile de l'index, le regard empreint d'une douleur infinie.
Ignorant la sirène assourdissante de l'ambulance déjà en route, Sherlock profite des quelques minutes d'ivresse qui lui reste pour se laisser emporter par les chimères terribles qui dansent devant ses yeux, par la sensation de bien être stérile qui engourdit peu à peu ses membres.
