Auteur : Andarta

Disclaimer : Les personnages de Saint Seiya appartiennent à Mr Kurumada.

Genre : romance, OS

Notes :

1. L'action se déroule avant la première Bataille du Sanctuaire, alors que Saga est Grand Pope et que les Saints d'or reviennent pour garder le Zodiaque.

2. Allez, une petite pause avant quelques vacances et la reprise de Déicide …

3. Merci à Nyannette, ma fidèle bêta-lectrice. Gros poutoux à toi ! ! !

Qui es-tu ?

Il venait de quitter le chef de la garde après avoir écouté son rapport et donné ses instructions, selon les ordres du Grand Pope. Il devait veiller à la sécurité du Sanctuaire en ce jour et il prenait son rôle très au sérieux, passant de poste en poste, surveillant l'horizon de son regard perçant, l'air sévère. Mieux valait ne pas déplaire au représentant d'Athéna en ce moment si on voulait rester en vie. Il en savait quelque chose puisqu'il avait été envoyé éliminer le Chevalier de Céphée sur l'île d'Andromède. Un homme de valeur, mais un traître quand même…

Son armure impeccable scintillait de mille feux sous le soleil printanier mais déjà chaud de la Grèce. Il savait qu'il était très impressionnant. Le mouvement de recul des Chevaliers de grade inférieur, la déférence de la soldatesque et la terreur des apprentis le satisfaisaient amplement en lui donnant l'impression d'être très important. Et ne l'était-il pas après tout, puisqu'il était l'un des Chevaliers d'or ? Sa réputation de sang chaud et sa fonction particulière dans l'ordre lui assuraient une certaine impunité et la certitude d'avoir la paix.

Sa cape blanche ondulait mollement sous le souffle d'une brise marine de plus en plus marquée au fur et à mesure qu'il s'approchait de la côte. Il contourna une paroi abrupte et friable et vit se dessiner enfin le ponton déjà cent fois reconstruit où s'amarrait le canot du passeur du Sanctuaire. Si ce dernier venait régulièrement avec un messager pour le Grand Pope, ces derniers temps, il avait plutôt tendance à ramener les Chevaliers d'or jusqu'alors à l'extérieur ou partis en mission…

Il se mit à sourire, amusé…

L'attitude que prenait le passager dans l'embarcation était très révélatrice de son caractère… Certains restaient assis, impassibles, admirant simplement la vue, l'eau clapotant contre la coque, attendant calmement que la traversée s'achève, comme Mu de Jamir… Il y en avait qui, tel l'Indien Shaka, en profitait pour méditer ou réfléchir, histoire de ne pas perdre un temps précieux… Parfois un passager, incapable de rester en place, s'agitait toutes les trente secondes, risquant de passer par-dessus bord à force de remuer, et c'était le cas d'Aiolia ou de lui-même… Puis il y avait les râleurs, ceux qui n'étaient jamais satisfaits : le banc était inconfortable, le canot trop lent, le soleil trop éblouissant, le vent trop frais ou même l'eau trop mouillée… Deathmask faisait partie de ceux-là… Enfin, il s'en trouvait qui avait le mal de mer et passait leur traversée la tête par-dessus le bastingage, le teint allant du cireux au verdâtre… C'était une spécialité d'Aldébaran… et d'Aphrodite, dernièrement.

Le soleil se reflétait en myriade d'éclats éblouissants sur les ondes indociles, bousculées par un vent moyen venant du continent. Immobilisé au pied du ponton, à demi aveuglé, le Saint porta une main en visière au-dessus de son regard perçant et commença son tour d'horizon réglementaire. Son sourire s'accentua : un point dansait au loin, se détachant de la ligne de terre formant la côte déchiquetée près d'Athènes. Il était sûr et certain qu'il s'agissait du passeur. Il alla effleurer de son cosmos l'embarcation et il sentit l'impatience le gagner pour de bon. Il venait de reconnaître la puissance de l'un de ses pairs… Le seul de sa génération qu'il n'ait encore jamais vu jusqu'à ce jour… Dans quelle catégorie allait se ranger ce dernier ? Il avait hâte de savoir…

Le point grandissait lentement, au rythme de l'avancée du frêle canot. Il reconnut peu à peu la coque, qui rejetait de chaque côté de sa proue des gerbes d'écume, la couleur terreuse du bastingage minimaliste, et même le petit mat, qui n'avait pas dû voir une voile depuis l'installation du moteur asthmatique propulsant l'ensemble par miracle. Mais devant ce dernier, là où le passager aurait dû être assis, il n'y avait personne. En fait le voyageur se tenait à l'avant, fièrement campé sur ses jambes, nullement incommodé par le léger roulis de l'embarcation, sa silhouette fine et élancée semblant défier Poséidon lui-même de lui faire perdre l'équilibre. Une longue chevelure flottait dans son dos, soulevée par un vent capricieux, mais ne se hasardant jamais à passer devant son visage…

Le Chevalier sentit son cœur s'emballer. Le petit bateau n'était plus bien loin et il commençait à distinguer les traits du nouveau venu. Encadré par des cheveux d'un bleu aussi profond que l'océan, un visage d'un délicat teint de lait aux traits finement dessinés, mais indéniablement masculins, faisait face à l'île du Sanctuaire, le port noble et altier. Son corps entier était aussi droit qu'une pique sans en avoir la raideur et lorsqu'il levait une main pour remettre une mèche indisciplinée en arrière, c'était avec la grâce naturelle d'un prince, loin des manières affectées du Chevalier du douzième signe.

Puis, quelques instants plus tard, il découvrit ses yeux… Une véritable arme meurtrière à eux tout seuls… Deux orbes magnifiques aux couleurs des lacs purs et profonds des maars volcaniques… Deux gemmes incroyables plus glacées que les deux pôles réunis, plus insondables que le plus profond des abysses et plus fascinantes que tout ce qu'il avait connu jusque-là… Il s'arracha à ces mystères envoûtants, descendit le long d'un nez fin et droit et son regard s'arrêta sur des lèvres délicatement ourlées, n'attendant que d'être embrassées…

Le malheureux guerrier comprit qu'il venait d'être vaincu… sans même avoir livré combat. Il s'était inconsciemment avancé jusqu'à l'extrémité du ponton et, le cœur battant, attendit que le canot soit enfin arrivé. L'étranger le regarda un bref instant mais ne sembla guère s'intéresser davantage à lui. Le passeur éteignit le moteur, manœuvra afin d'amener l'embarcation contre les pilotis de bois et enroula enfin une corde épaisse à la bitte d'amarrage en bois renforcé, située sur le bord du ponton.

Le passager prit son modeste bagage et s'apprêtait à mettre pied à terre lorsqu'il vit la main du Saint se tendre pour l'aider à grimper. Sans un mot, ni même un regard, le voyageur dédaigna cette offre et bondit légèrement, aussi agile, souple et élégant qu'un félin. L'inconnu remercia d'un signe de tête le passeur, puis tourna délibérément le dos au Chevalier abasourdi et se mit en marche avec la dignité d'un souverain foulant le sol de son royaume.

Il fallut quelques infimes secondes pour que le Saint se reprenne et il se précipita à la suite de l'inconnu, quelque peu vexé d'avoir été ignoré de la sorte. Il parvint à sa hauteur et même s'il se sentit écrasé par l'incroyable froideur et le charisme que dégageait le nouveau venu, il ne se laissa pas démonter :

– Hé ! Bonjour ! ! Tu ne m'as pas vu ou quoi ? Comment t'appelles-tu ?

Un coup d'œil à geler un volcan fut sa réponse, mais l'ardent combattant insista :

– Tu es un Chevalier d'or ? Moi aussi ! Milo, Chevalier d'or du Scorpion !

L'inconnu haussa l'un de ses sourcils, qu'il avait étrangement fourchus, mais garda un silence obstiné.

– Je ne t'avais jamais vu auparavant. C'est la première fois que tu viens ici ? Tu étais en mission ? Tu n'es pas Grec ? Ta peau est si pâle…

Cette fois, le regard saphir s'illumina brièvement et une voix douce, à l'accent indéniablement étranger s'éleva :

– Tu es un bavard qui parle pour ne rien dire, Milo du Scorpion.

– Moi ? Toujours ! Surtout si on ne me répond pas. Alors, qui es-tu ? Tu as bien un nom, quand même ? s'exclama le Saint, tout sourire, ravi d'être parvenu à tirer une phrase de son mystère vivant.

Ce dernier ne lui répondit pas et, tout en observant le paysage, il se dirigea vers le Zodiaque. Milo l'accompagna un moment, jusqu'à son propre temple, babillant tout seul, tentant de lui extorquer quelques mots, en vain. Ce ne fut qu'une fois au pied de la volée de marches menant au temple du Sagittaire que l'inconnu se retourna un court instant vers celui qui s'était immobilisé, et lui dit, avant de disparaître derrière un repli de la falaise :

– Je suis Camus, Chevalier d'or du Verseau…