Rapport épidémiologique de crise n°3

Avis à la population : Le terme de « zombie » est assurément très mal choisi pour qualifier ce phénomène. En effet, nous sommes très loin de ces morts-vivants se relevant de leurs tombes comme un message annonciateur de fin du monde. Le congrès réunissant les plus grands scientifiques de notre monde qui s'est tenu pendant toute la semaine dernière a finalement conclu que ces soi-disant « zombies » étaient des personnes normales, mais atteintes de troubles psychologiques et pathologiques graves, dont une nette tendance à l'agressivité. Néanmoins il n'existe aucune preuve que le virus ou le parasite responsable de cette maladie puisse se transmettre à d'autres êtres humains. Il n'y a donc aucune raison de paniquer.

« Bientôt on va se demander à quoi on sert, dit Léon en jetant ce qu'il appelait un « ramassis d'inepties » à la poubelle. »

«Sergent ! Tout n'est pas à jeter là-dedans, fit remarquer Riku un sourire aux lèvres. Il leur reconnait au moins une nette tendance à l'agressivité ! C'est déjà ça… »

« Je serais bien curieuse de parler avec eux quand même, dit Larxène en arrivant. »

« Tu as tout entendu depuis le couloir, s'étonna le jeune homme aux cheveux argentés. »

« Sache mon petit qu'écouter aux portes est une de mes spécialités ! Si le virus n'est pas transmissible, pourquoi l'épidémie s'étend-elle selon eux ? »

« Peut-être un fléau divin, suggéra Tidus, avachi au bout de la table. »

« Ne commettez pas l'erreur de sous-estimer et nos scientifiques et nos gouvernements, dit une voix posée. »

Tous se levèrent d'un même élan.

« Général Diz, commença Léon, comprenez mes hommes ! Ils mettent chaque jour leur vie est en danger, et les autorités agissent comme si de rien était… »

«Nous ne faisons ça ni pour la gloire, ni pour la reconnaissance ! Qui plus est, il s'agit là du communiqué pour l'opinion publique… Nos consignes n'ont pas changé d'un iota : pas d'hésitation, pas de pitié, pas d'erreur. Tâchez de ne pas l'oublier ! Les gens sont ignorants du danger qu'ils courent, il faut donc redoubler d'attention pour les empêcher de tomber dedans…Sergent Léonheart, j'ai à vous parler. »

« Bien général, dit Léon en lui emboîtant le pas dans le couloir. »

Comme à chacune des interventions du général, un silence de mort était tombé sur la pièce. Plus une mouche ne volait, comme si même les mouches savaient qu'il aurait été stupide de l'interrompre par un bourdonnement déplacé. Diz détestait ce qui était déplacé.

Riku finit par se lever, saisit une assiette sur laquelle restaient quelques petits gâteaux et se dirigea vers la porte.

« Tu vas où, lui demanda Tidus. Tu m'avais promis qu'on s'entraînerait au tir ensemble ! »

« Je n'ai qu'une parole, mais il faut bien que Sora mange aussi ! »

La porte s'ouvrit à tout volée alors qu'il arrivait devant. D'un pas de côté in extremis, il évita aux petits gâteaux de se déverser sur le sol et par là même se sauva la vie. Larxène était de corvée de nettoyage, et il ne valait mieux pas lui donner une occasion d'exercer son sadisme.

Il laissa échapper une exclamation de surprise. Cloud entra, lui jeta un long regard et dit :

« Ne te laisse jamais surprendre, ne baisse jamais ta garde. Ca pourrait te coûter la vie. »

« Oui, Capitaine Strife, répondit-il en partant. »

Alors qu'il avançait dans les couloirs, il fut effrayé de voir à quel pont les lumières artificielles de ce complexe souterrain le faisait paraître cadavérique…Dire qu'il ne voyait la lumière du jour que lors des missions de sauvetage…Même pas celles de reconnaissance et d'intervention qui se déroulaient la nuit ! Comme quoi ils méritaient bien leur nom de guerriers de l'ombre… Nul ne les voyait et nul ne connaissait leur existence…C'était parfois assez frustrant d'ailleurs…Comme toujours pour se rendre à l'infirmerie, il faisait le grand tour, mais pour rien au monde il ne serait passé devant l'antre de Vexen. Il ne savait pas pourquoi mais cet homme lui glaçait le sang encore plus sûrement que les créatures qu'il avait à combattre à la surface…Il ne comprenait pas pourquoi ils devaient supporter ce savant fou ! Mais les volontés du général Diz étaient indiscutables… D'ailleurs il plaignait Léon : se retrouver convoqué dans son bureau était la pire crainte de tout le groupe, loin devant les morts douloureuses et affreuses qui risquaient de les cueillir à chaque fois qu'ils remontaient.

Son cœur se serrait toujours un petit peu quand il passait devant ces rangées de lits blancs dont l'écrasante majorité était (heureusement) vides.

Il trouva Sora endormi sur une chaise à côté de l'un d'eux. Il le réveilla en le secouant doucement :

« Tu sais que les visites ne doivent pas excéder 2 heures… »

« Je sais, dit-il en baillant à s'en décrocher la mâchoire. Mais ça ne fait pas longtemps que je suis là… »

« Ca va faire bientôt 10 heures…Va te reposer, va manger et reviens après… »

« Mais... Mais je ne vais pas la laisser toute seule ! »

Riku jeta un coup d'œil à l'occupante du lit.

« Ne t'inquiète pas. Elle dort et quand elle se réveillera, je serai là. Je te jure que tant que tu n'es pas revenu, je ne la laisserai pas toute seule… Mais épuisé comme tu es, tu seras un poids et un danger si on doit faire une montée ! »

« Non, je vais très bien ! »

Sora se leva et commença à chanceler.

« Regarde, tu ne tiens même pas sur tes jambes ! Vas-y, je veille sur elle… »

« D'accord… »

Sora partit. La main sur la poignée de la porte, il se retourna et dit :

« Merci, Riku, tu es vraiment un ami… »

« Je sais ! »

Riku regarda son ami partir. Il s'épuisait la santé pour rien… Il n'y avait plus rien à faire pour Kairi… Bien que ça fasse déjà trois jours qu'elle avait été mordue par ce zombie, le sang continuait à suinter de la blessure. D'abord rouge, il avait rapidement tourné au brun… C'était désormais un liquide totalement noir qui coulait dans les veines de son amie. Soudain, elle ouvrit les yeux et lui prit la main. Il ne put s'empêcher se sursauter.

« Tu ne dormais pas, lui demanda-t-il. »

« Non, je t'ai entendu arriver… »

« Ah… »

« C'est gentil de t'occuper comme ça de Sora ! »

« Il n'et pas capable de s'occuper de lui tout seul alors il faut bien que quelqu'un le fasse...Et puis comme tu n'es plus en état… »

« Mais si je vais mieux, je t'assure ! »

« Non, n'essaie pas de te lever ! »

« Je veux te prouver que je vais bien ! »

« Je te crois ! »

« Non, tu ne me crois pas, cria-t-elle. »

« Calme-toi, je t'en supplie ! Calme-toi… »

« Mais je ne suis pas énervée, dit-elle en le regardant avec les yeux les plus doux qu'il lui ait jamais vus. D'ailleurs, je vais beaucoup mieux ! »

Elle se leva. Aussi bizarre que ça puisse paraître, elle semblait en bien meilleure forme que Sora. Mais dans un sens, c'était effrayant de logique…

« Tu vois, je vais bien mieux, lui dit-elle. Je pense que je pourrais partir avec vous pour la prochaine remontée. »

« Je ne pense pas que ce soit très prudent… »

Il fallait toujours marcher sur des œufs avec les « en devenirs ». On ne savait jamais quand ils allaient passer de l'autre côté…

« Si, je t'assure…Ca ne me rend vraiment pas service de rester enfermée ici tout le temps ! Je viendrai… »

« Si tu veux, soupira-t-il, même s'il savait au fond de lui que jamais le capitaine Cloud ne la laisserait partir dans cet état. »

« Riku, commença-t-elle. »

« Quoi ? »

« Tu…Tu ne crois pas que je puisse m'en tirer, c'est ça ? Sois honnête ! »

Elle avait les yeux remplis de larmes.

« La transformation n'a rien à voir avec ta force de caractère ou les circonstances…Tu connais aussi bien que moi les conditions et je crois qu'elles sont toutes réunies… »

« Je me demande si je ne préférerais pas être morte, dit-elle en pleurant.»

« Ne dis pas ça… »

Il la prit dans ses bras pour la consoler.

« Je veux que tu me fasses une promesse, dit-elle. »

« Tout ce que tu veux… »

« Si...Quand je deviendrai l'une des leurs…N'hésite pas, tue-moi ! Je ne veux pas risquer de vous mettre en danger, ni de vous faire du mal… »

« Tu ne peux pas me demander ça… »

« Tu m'as dit tout ce que je veux ! »

« Je te le promets ! »

« Je sais que Sora prendra très mal que j'envisage cette éventualité...Alors ne lui dis rien, d'accord ? Et quand je ne serai plus là, prends soin de lui… »

« Je te le promets… »

Un long moment de silence suivit.

Soudain, le bruit de l'alarme résonna.

Assaut de zombies à Traverse, annonça la voix désincarnée qui précédait chacune des remontées.

« Et bien ! Je crois qu'il va falloir y aller, dit Riku. »

« Je vous rejoins tout de suite ! »

« Kairi...C'est loin d'être prudent ! »

«Je suis condamnée de toute façon, alors qu'est-ce que ça peut me faire d'être imprudente… »

Ils partirent tous les deux pour rejoindre le groupe. C'était la dernière fois que Kairi empruntait ces couloirs, et ils le savaient tous les deux.