Seul le personnage de Suki m'appartient, les autres et l'univers de One Piece appartiennent à l'auteur du manga, Eiichiro Oda.


Chapitre 1 Perdue

Il me détaille de la tête aux pieds. Moi, petite et mince, âgée d'à peine treize ans. Mes cheveux blonds aux reflets or, lorsqu'ils sont détachés comme en ce moment, me frôlent tout juste les épaules. J'ai les yeux bleu-vert, soulignés par d'immenses cernes qui se détachent parfaitement sur ma peau blanche et translucide.

Je me tiens droite malgré qu'il m'écrase de toute sa hauteur. Six mètres pour un humain, c'est pas concevable tant qu'on les a pas en face de soi... Je lutte contre l'épuisement. Depuis combien de temps n'ais-je pas dormi ? Je tremble de fatigue, j'ai peine à garder les yeux ouverts, de grosses gouttes de transpirations coulent le long de mon visage et de mes membres. Sa question me ramène à la réalité :

- Comment t'appelle-tu, petite ?

- Je ne suis pas petite ! hurlé-je en serrant les poings.

Il rit.

- Très bien. Mais dis-moi ton nom.

Je me calme, de toute façon affaiblie par la fièvre. Rhaaa, et ce soleil qui me martèle le sommet du crâne ! Je réponds d'une voix que j'essaye de garder ferme :

- Suki.

- Joli nom.

- La… ferme !

Ça y est, je ne tiens plus. Tout devient noir. Je me sens basculer et rencontre une surface dure, me blesse le visage, les mains et les genoux sur des pierres coupantes. Un goût de poussière m'envahit la bouche avant que je sombre définitivement dans l'inconscience.

Lorsque j'émerge de ma torpeur, dans un lit confortable. Je reconnais la sensation d'une aiguille dans mon coude, de quelques pansements et de bandages sur mon corps. Ma main gauche me lance. Qu'est-ce qui s'est passé ? J'ouvre les yeux… et les referme immédiatement, aveuglée par une vive lumière blanche. Une voix parvient à mes oreilles :

- Ça y est Ace, elle s'est en fin réveillée ! Va prévenir le Paternel !

Ace ? Est-ce que… Non, c'est impossible !

- J'y vais !

J'entends le bruit une porte qui s'ouvre et se referme, puis celui d'une chaise qu'on tire. Je sens un poids sur le matelas, à ma droite. Je ferme les yeux plus fort. Oui, je sais, bonjour la discrétion…

- Tu n'as pas à avoir peur Suki, nous ne te voulons aucun mal. Ouvre les yeux s'il te plaît.

Comment connait-il mon nom ? La voix est la même que tout à l'heure, chaude et rassurante. Irrésistible à mes oreilles de félin. Oui, j'ai mangé le fruit du félin ! Z'êtes contents maintenant ?! Mais revenons à nos moutons. Je rouvre prudemment les yeux. Un homme blond avec une coupe qui ressemble à un ananas est penché sur moi, assis au bord d'un lit d'infirmerie. Sa chemise mauve ouverte laisse voir le tatouage qui lui couvre la poitrine : une croix surmontée d'un croissant de lune à l'horizontal, comme un sourire. Une petite minute… C'est l'emblème de Barbe-Blanche ! Marco ! C'est Marco le Phœnix ! Je me redresse vivement et recule jusqu'à percuter un mur.

- Holà ! Tout doux…, s'amuse-t-il.

Sa voix m'apaise aussitôt. Saleté de chat ! Il avance une main. Je suis coincée. Noooonnn… pas ça ! Elle se pose sur ma tête, il me caresse les cheveux. Je me mords la lèvre. Il fronce les sourcils alors que je sens une perle de sang couler sur mon menton.

- Eh… Arrête ! Calme-toi, je te dis que tu n'as rien à craindre.

Il accentue la caresse… et je ronronne ! Surprit, il écarquille les yeux avant de sourire.

- Je vois… Je crois que j'ai trouvé le moyen de t'amadouer, petite chatte.

- Je… suis… pas… petite ! articulé-je sans parvenir à être méchante.

Il rit doucement :

- D'accord !

C'est alors que la porte s'ouvre sur… Barbe-Blanche et… Ace aux poings ardents ! Le Phœnix retire sa main. Je m'ébroue et retrouve mon esprit combatif. Je bondi hors du lit, arrachant la perfusion de mon bras. Un rapide coup d'œil dans la pièce me permet de confirmer deux choses : premièrement je suis bien dans une infirmerie et deuxièmement mes armes m'ont été subtilisées. Je n'ai plus que mon short vert sapin et mon T-shirt orange flashy portant l'inscription : « WARRIOR ». Un sourire carnassier apparaît sur mes lèvres. Qu'est-ce qu'ils croyaient ? Je n'ai pas besoin de mes armes, même si je les aime. Je suis une arme. Une question cependant : pourquoi ne bougent-ils pas ? Oseraient-ils me sous-estimer ? Si c'est le cas, ça risque de leur coûter cher… Je m'accroupis, paumes au sol, bras entre mes jambes. Ma musculature fine saille sous ma peau. Ils me regardent me transformer avec un mélange d'intérêt et de stupéfaction. Je ne peux pas me voir mais je sais ce qu'ils voient : des yeux qui deviennent jaunes, des pupilles qui s'allongent à la verticale, des ongles qui deviennent des griffes et des crocs luisants jaillissant sous des lèvres comme une promesse de mort. Je ne vais pas plus loin. Je gronde :

- Que me voulez-vous ?

Barbe-Blanche ne m'impressionne plus, je me suis accoutumée à sa taille. Il s'accroupit à son tour. Les commandants n'ont pas encore esquissé le moindre geste. Apparemment ils ne me veulent pas de mal mais je reste méfiante. Je plante sans une once de peur mon regard dans celui de l'homme qu'on dit le plus fort du monde.

- Deviens ma fille, laisse-t-il tomber.

QUOI ?! C'est quoi ce délire ? D'accord, il ne m'a pas sauvée pour la queue des prunes, ça je m'en doutais… Mais je ne m'attendais pas à ça !

- Pourquoi ?

La question a fusé presque contre mon gré, et beaucoup trop gentiment à mon goût…

- Ce serait dommage de mourir si jeune avec ton talent.

Bon, au moins la situation est claire ! Mais je ne suis pas effrayée par la mort, et la possibilité est tout à fait envisageable de mon point de vue. Mourir par fierté, où est le problème ? Seul périr dans le déshonneur et la honte est inacceptable. Une nouvelle sommation et une main tendue me ramènent à la réalité :

- Porte mon emblème et deviens ma fille.

Je réfléchis. En quoi mon orgueil serait-il blessé par l'acceptation de sa proposition ? Je n'ai pas d'attache, je suis seule au monde et je veux être pirate. L'Équipage de Barbe-Blanche a depuis longtemps acquit mon respect. Alors pourquoi hésiter me demanderez-vous ? Parce que je suis indépendante, solitaire, libre et que je ne veux pas qu'on découvre ça. Je fixais jusque là sa main de géant, alors je lève les yeux pour rencontrer à nouveau les siens. La voix de la raison s'impose finalement à mon esprit : je ne survivrais pas longtemps seule sur les océans et j'avais besoin de compagnons. Et la liberté existe pour être utilisée afin de se plier à des règles en posant des choix. Alors je me redeviens entièrement humaine et me redresse pour formuler ma décision :

- J'accepte. Mais à la condition que vous me promettiez de ne pas porter atteinte à ma liberté.

Il plisse les yeux un instant avant de rire.

- Tu me plais, gamine ! Tu es bien la première à avoir l'audace à poser une condition à ton admission ! Mais c'est d'accord, ajoute-t-il en recouvrant son sérieux, je te le jure sur mon honneur.

Je place ma main droite, qui semble minuscule tout-à-coup, dans la sienne et déclare :

- Puisque c'est dans cette poignée de main que nous venons de celer notre pacte et mon allégeance, c'est à la main droite que je veux être tatouée de votre marque.

- Très bien, ma fille, répond-il avec de la fierté dans la voix.

Un médecin est appelé et, après m'avoir jugé en parfaite santé, m'avoir placé un pansement là où se trouvait l'aiguille de la perfusion et m'avoir apprit, à mon grand étonnement, que j'avais dormi une semaine entière, il saisit mes doigts et tatoue le dos de ma main la même marque que celle d'Ace. Merde, ça fait un mal de chien ! Mais je ne bronche pas, si ce n'est la commissure de mes lèvres légèrement tordues. Une fois le travail terminé, je me tourne vers mon capitaine et lève mon bras au coude replié, ma paume à hauteur de mon œil. Je prononce le mot que je redoutais le plus :

- Père.

Il approuve d'un hochement de tête.

- Tu seras sous la responsabilité de Marco pour les premiers temps puisque vous semblez bien vous entendre…

La concerné croise les bras sur son ventre et me contemple d'un air amusé tandis qu'Ace ricane et qu'une lueur de malice danse dans les prunelles de Barbe-Blanche. Mes oreilles se plaquent aussitôt sur mon crâne et un grognement sourd sort de ma gorge. Puis je hausse les épaules et descends du lit où j'étais assise pour me diriger sans plus de commentaires auprès du Commandant de la Première Flotte.

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Le Phœnix m'a fait faire le tour du bateau et présenté les membres d'équipage. Les salutations se sont faites courtoisement. Pas de place pour les mauvaises blagues sur ce navire, c'est déjà ça !

Il s'arrête finalement devant une porte :

- Voici ta cabine. Comme tu es une fille, elle est à toi seule, comme pour les Commandants.

Je hoche la tête pour montrer que j'ai intégré l'information. Il ouvre la porte et j'entre dans une pièce aux murs clairs, avec un lit qui semble très confortable, un petit bureau et une chaise, ainsi qu'une commode, une armoire et un coffre à cadenas –ce qui me fait ricaner. La clef est posée dessus pour le moment. Une porte donne sur une petite salle de bain privée. Je remarque au passage que mon sac et mes dagues ont été déposés dans cette pièce, sans doute pendant ma visite guidée. Je récupère mes lames avec bonheur. Une à ma ceinture, une à mon bras gauche et une autre à ma cuisse droite, retenues par de fines courroies de cuir. J'attache mes cheveux en une courte queue de cheval. Je soupire d'aise je me sens enfin redevenue moi-même. Une question retentit dans mon dos.

- Tu n'avais pas de chaussures ?

Je me retourne et adresse un sourire resplendissant à Marco.

- Nan ! Je suis toujours pieds-nus, je ne crains rien.

- Un vrai chat !

Mon sourire diminue mais de disparaît pas. Il se moquait trop gentiment pour que je lui en veuille. Mon estomac choisi de gargouiller à l'instant précis où une cloche retentit dans tout le bâtiment. Ce qui ressemble à un troupeau de bisons fait trembler le sol et les murs. Je couvre mes oreilles sensibles. Mais le boucan n'empêche pas le Commandant d'entendre les protestations de mon ventre. Bah quoi ? Une semaine sans rien avaler que du liquide injecté à la perf', ça creuse ! Déjà que je n'avais pas beaucoup mangé avant de croiser la route de Barbe-Blanche ! Le Phœnix explose de rire :

- On peut dire que tu es synchrone petite sœur ! C'est la cloche du dîner qui vient de sonner !

Je sursaute à l'emploie du surnom mais il ne semble pas le remarquer et m'attrape doucement le poignet pour m'entraîner à sa suite alors qu'il se remet de son fou rire. Je le suis vers l'immense réfectoire et en profite pour regarder l'océan. Le soleil est déjà bas sur l'horizon…

Je ne serais bientôt plus la prédatrice, mais la proie.

À suivre…


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