Le pouvoir des sentiments ~

Chapitre 1 : Perte de repères

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- Escadrons 3 et 4, déplacez ces blocs dans l'aile Est ! Escadrons 6 et 7, allez transmettre le rapport pour tenir le Capitaine Général Yamamoto informé et rendez vous à la falaise du Sokyoku pour superviser la fin de la remise en état des quartiers aux alentours ! Escadron 9, veillez au ravitaillement de matériel et apportez-en ici ! Exécution !

- A vos ordres, Lieutenant Iemura ! s'écrièrent les escadrons en question avant de disparaître en un shunpo.

Yasochika remonta ses lunettes avec un soupir.

Ça n'a pas été facile mais les choses redeviennent peu à peu comme avant, pensa-t-il. La Soul Society aurait pu ne pas se relever.

- T'as raison, on n'est pas passé loin, s'éleva une voix derrière lui.

- Harunobu qu'est-ce que tu fais là ? sourit-il nerveusement, les dents serrées. N'es-tu pas supposé superviser la reconstruction de l'aile Ouest ?

- Relax, vieux, répliqua ce dernier en se grattant la tête. J'y peux rien si tu penses à voix haute, tu devrais voir si il n'y a pas un traitement pour ça.

- Espèce de…, commença Iemura.

- Mais tu as raison, reprit Harunobu, les yeux sur l'horizon. La Soul Society aurait pu ne pas se relever. Cela dit, on a déjà survécu à Aizen alors ne pas en faire autant cette fois aurait été une honte pour nous.

- Peut-être, répliqua l'homme à lunettes. Mais même lors de l'affrontement contre ce renégat, les pertes n'étaient pas aussi lourdes.

Un vent souffla sur la colline où ils se tenaient.

La Soul Society avait dû faire face à un nouvel ennemi ou plutôt deux. Deux femmes Espada exilées que l'on avait sous-estimées à cause de leur rang se composant de trois chiffres. Cela s'avéra une grossière erreur puisqu'elles s'étaient durement entraînées ces deux dernières années pour venger l'emprisonnement de leur vénéré Aizen en ravageant la Soul Society. Leur force rivalisait avec celle des Espada possédant un chiffre et sans l'intervention d'Ichigo et ses amis, le monde serait en déséquilibre à l'heure actuelle.

Cette bataille avait eu lieu ici-même il y a un mois et la paix était revenue, mais en apparence seulement. Les dégâts n'étaient hélas pas uniquement matériels, nombre de divisions perdirent des hommes et le Capitaine Kyoraku était dans le coma pour avoir protégé Nanao et trois autres Shinigamis. Ise était déjà mince de nature et très sérieuse mais depuis que son capitaine était inconscient à la 4ème division, elle avait perdu encore plus de poids et se jetait à corps perdu dans le travail pour penser à autre chose que sa souffrance qu'elle refusait de montrer.

Hitsugaya Toshiro pour sa part n'avait perdu aucun membre de sa division, pourtant il n'allait pas bien pour autant, préoccupé par sa vice-capitaine.

Marchant dans le couloir menant à son bureau, il poussa la porte et la vit assise sur le rebord de la fenêtre à fixer l'extérieur d'un regard vide. Elle ne montra pas le moindre signe indiquant qu'elle l'avait entendu entrer dans la pièce. Les traits du visage du petit génie changèrent pour exprimer un sentiment qui lui était peu commun : la tristesse. Ça faisait un mois que cette bataille s'était déroulée et un mois que Matsumoto n'était plus la même. Elle travaillait sans qu'il n'ait à la rappeler à l'ordre et n'avait plus bu la moindre goutte de saké. En temps normal, il aurait apprécié ces changements mais pas dans de telles circonstances. Car en contrepartie, la pétillante Shinigami n'était plus d'humeur joyeuse, ne plaisantait plus, ne souriait tout simplement plus. Elle était là sans y être comme bien d'autres.

Avec un soupir, Toshiro referma derrière lui et s'assit derrière son bureau.

- Matsumoto, dit-il après quelques secondes, ne supportant plus ce lourd silence.

- Oui, capitaine ? répondit celle-ci d'un ton morne sans le regarder, un bras sur son genou fléchit.

- Tu devrais aller prendre l'air.

- Je n'en ai pas envie.

- Tu ne peux pas continuer à t'en vouloir, insista Hitsugaya en osant la fixer, les bras croisés. Tu n'aurais rien pu faire, personne n'y pouvait rien.

L'intéressée eut un sourire triste, la lueur au fond de ses iris bleus disparue depuis un mois.

- Je le sais mais ça ne m'aide pas à refermer le trou qui s'est ouvert en moi.

Son capitaine ne répliqua pas, comprenant ce qu'elle voulait dire.

- Vous savez, je me demande comment vont les autres, poursuivit la belle femme, pas atteinte par son silence.

- Dans le même état que toi, je pense.

- Oui, soupira-t-elle, ses prunelles suivant un nuage blanc filant doucement dans le ciel limpide. Mais une personne doit souffrir plus que moi, ajouta-t-elle en basculant sa tête en arrière sur l'encadrement de la fenêtre.

Rangiku ferma ses paupières et une unique larme s'échappa du coin de ses yeux pour couler lentement vers son menton.

- La douleur que ressent Ichigo ne peut même pas être qualifiée en mots.

[ … ]

A Karakura, le temps était maussade, gris, pluvieux depuis deux semaines. Rares étaient les fois où la météo demeurait si mauvaise. Au moins une personne ne s'en plaignait pas et détestait désormais le soleil.

Chez les Kurosaki, c'était calme, mot qui n'était jamais employé pour définir l'ambiance de cette maison. Quelqu'un connaissant la famille penserait immédiatement qu'il y avait quelque chose d'anormal à moins d'être au courant de la situation.

- Onii chan dort encore ? s'inquiéta Yuzu en préparant la table pour le petit-déjeuner.

- C'est vrai qu'il n'entend plus le réveil ces temps-ci, dit Karin en disposant les bols et les tasses.

Leur père entra dans le salon à cet instant.

- Ne vous en faites pas, je vais le réveiller.

- Merci, papa, lança la petite maman.

Il leva la main sans se retourner, signe que ce n'était rien. Isshin escalada donc les escaliers pour se rendre dans la chambre de son fils. Plus on montait à l'étage plus l'atmosphère s'assombrissait et devenait épaisse tel un brouillard invisible. Il poussa la porte portant maintenant le numéro « 18 » et entra dans la pièce peu éclairée pour s'arrêter au centre. C'est à peine si il distingua la silhouette de son aîné couché sous les draps.

- Ichigo, il est 07h15. Il faut te lever.

Ce dernier remua faiblement avant d'émettre un faible gémissement signalant qu'il quittait le sommeil.

- J'arrive quand je serai douché, marmonna-t-il d'une voix épuisée en continuant à lui montrer son dos.

Son géniteur ne répondit rien. Voilà un mois que son fils allait mal. Au début, il ne dormait pas si bien, s'isolait et ne mangeait pratiquement rien. Depuis quelques jours, il avait fait des efforts en ce sens. Isshin dirait maintenant qu'il réussissait à dormir mais seulement quand l'aube se levait, ce qui expliquerait pourquoi il était si fatigué chaque matin.

- Très bien, on t'attend en bas.

Il tourna les talons et le laissa à nouveau seul. Dès que la porte claqua dans un bruit sourd, Ichigo se tourna sur le dos et fixa le plafond d'un œil éteint, un bras au-dessus de la tête.

Encore un week-end de passé et une nouvelle semaine qui commence. Sans elle. Aujourd'hui, ça faisait un mois jour pour jour qu'Inoue avait « disparu ». Lors de cette bataille à la Soul Society, il avait été convenu qu'elle reste à Karakura jusqu'à leur retour, loin de tout danger. Malheureusement, le roux avait sous-estimé la détermination d'Orihime décidée à protéger ses amis coûte que coûte, car elle avait forcé Urahara à lui ouvrir le Senkaimon dès qu'on lui rapporta que plusieurs d'entre eux étaient blessés. Elle voulait se rendre utile, là encore c'était du Inoue tout craché. Ichigo aurait dû le voir venir.

FLASH-BACK

Soul Society, un mois plus tôt.

Des bâtiments tombaient en ruine, des cratères perforaient le sol, des corps étaient étendus ici et là, de la fumée s'élevait un peu partout. Des brèches dans le ciel donnaient le libre accès aux Hollows que l'on pouvait compter par centaines et dont le nombre ne semblait pas faiblir en dépit de la quantité incroyable tués, pulvérisés, brulés, électrifiés et de bien d'autres façons selon les attaques lancées par les Shinigamis de différents grades, y compris des capitaines aidés par Uryuu et Sado.

Les deux femmes responsables de ce carnage, prénommées Yui et Mei, se battaient contre les Capitaines Soi Fon et Kyoraku, ces deux derniers ayant l'avantage permettant d'espérer que la victoire était proche.

Seulement voilà, tout ne se déroula pas comme prévu.

Ichigo aidait à terrasser des Menos de la catégorie des Adjuchas. Il se protégea d'une attaque en levant Zangetsu à hauteur de son visage pour mieux riposter ensuite.

- Ichigo, attention ! le prévint Rangiku qui combattait cinq monstres à la fois.

Trop tard. Un autre Hollow arriva sur le côté droit du Shinigami remplaçant et le projeta au sol où il fit plusieurs roulades avant d'enfin s'arrêter avec une grimace de douleur. Il ne se doutait pas que dès la seconde où il toucha le sol, la haine de Mei et Yui grimpa en le voyant. Lui, le responsable de l'emprisonnement d'Aizen.

Yui qui possédait un zanpakuto capable de transformer l'air en énergie envoya une pluie de boules de diverses couleurs semblables à des cero, que Soi Fon évita aisément jusqu'à en recevoir une en pleine poitrine qui la brûla comme de l'acide. Yui disposait d'un autre pouvoir caché que seul le fils d'Isshin avait vu à l'œuvre en arrivant. Quant à Mei, elle ne prit pas la peine de viser Kyoraku mais plutôt sa vice-capitaine pas loin sur un toit avec d'autres hommes, et leur jeta son attaque de type foudre. Shunsui ne réfléchit pas et s'interposa dans la trajectoire, ce qui lui fit perdre connaissance et tomber au sol d'une hauteur d'au moins quinze mètres dans un angle inquiétant.

- CAPITAINE KYORAKU ! hurla Nanao, les larmes aux yeux.

Orihime arriva à cet instant, ce qu'elle vit la paralysa sur place. Il y avait tant de blessés conscients ou non, la 4ème division s'activait vraiment et elle vit même Uryuu allongé avec une blessure à l'épaule et Renji qui avait une profonde coupure à la jambe, tous deux pris en charge par Hanataro. La beauté auburn s'élança vers eux pour prêter main forte tout en cherchant ses autres amis du regard. Dès qu'elle pénétra dans la Soul Society, son esprit s'était immédiatement focalisé sur l'un d'eux. Assez loin, elle vit Kurosaki kun se relever péniblement en s'appuyant sur Zangetsu, le corps tremblant. Penché en avant, il ne remarqua pas qu'il devint la cible principale des deux femmes ennemies, l'une l'attaquant par devant, l'autre par derrière. Le cœur de la guérisseuse faillit s'arrêter. Ses amis étaient déjà en train de se faire soigner mais l'homme qu'elle aimait, lui, avait besoin d'aide et elle ne pouvait pas rester sans rien faire. Pas encore une fois.

- Kurosaki kuuun !

Il ne réagit pas à cause de la distance et du boucan provoqué par les Hollows. En revanche, Rukia qui se battait sur un toit entre elle et Ichigo l'entendit parfaitement et écarquilla ses yeux indigo en voyant Inoue foncer à une vitesse incroyable sur le champ de bataille sans réfléchir.

- INOUE !

Cette inattention lui valut de recevoir un coup de queue dans le ventre qui l'expédia sur la façade d'un bâtiment déjà en piteux état. Orihime ne freina pas sa course, ne soupçonnant pas dans le désordre ambiant que son amie qui la suppliait de rebrousser chemin venait de se faire battre. Tout ce qu'elle avait en tête, c'était de sauver celui qui faisait battre son coeur de la puissante attaque le prenant pour cible. Elle zigzagua parmi les corps, sauta au-dessus de certains, les larmes brouillant sa vue pour ainsi passer près d'eux sans leur venir en aide. Orihime s'écarta pour éviter des projectiles, appela son bouclier pour en repousser quelques uns et trébucha plus d'une fois sur le sol instable et couvert de sang, sans tomber. Elle courait encore et encore, ses jambes filant presque d'elles-mêmes, les muscles de ses cuisses et de ses mollets protestant sous l'effort. Peu lui importait la douleur, la fatigue, les égratignures. Tout ce qui comptait, c'était de sauver Ichigo qui risquait de vivre ses derniers instants et c'est bien pour cela qu'elle alla au-delà de ses limites.

En effet, le fils Kurosaki n'avait vu que Mei lui faisant face et faisait en sorte de le distraire pour l'empêcher de voir Yui qui se préparait à lancer sa plus puissante attaque avec l'énergie qu'elle pouvait encore utiliser. Cependant, le frère des jumelles avait parfaitement entendu la petite Kuchiki crier à s'en déchirer la gorge. Il s'était retourné après avoir enfin réussi à éjecter Mei plus loin, pour voir son amie Inoue essoufflée debout à cinq mètres devant lui, les bras écartés, dans la trajectoire d'une attaque énorme dont la taille défiait l'imagination et qui aspirait des gravats, des tuiles telle une mini tornade.

Tout se passa en une fraction de seconde pendant laquelle le lycéen se demanda ce qu'Inoue faisait là, comment elle était arrivée ici, pourquoi diable son bouclier n'était pas dressé autour d'elle tandis qu'elle lui souriait faiblement sous ses perles argentées remplies d'eau. Il était évident qu'elle était sur le point d'ouvrir la bouche pour lui dire quelque chose même à cette distance, et Ichigo aurait probablement été le plus rapide, son cri d'horreur au bord de ses lèvres, prêt à la rejoindre pour la tirer de là malgré son shihakusho presque en lambeaux et son corps aux multiples blessures.

Hélas, c'était déjà trop tard.

Le temps qu'il envoie la commande à son cerveau, l'immense sphère d'énergie frappa Orihime dans le dos et explosa à son contact. Le souffle fit décoller tous ceux présents dans le périmètre et nul ne put ignorer le hurlement déchirant suivit du cri d'agonie s'élevant du centre de l'explosion, qui fit même voler des morceaux du sol et souffla des vitres. L'impact fut si violent qu'ils furent tous éblouis, la terre trembla, des Hollows furent anéantis et des débris divers soulevés par cette force frappèrent des Shinigamis en les blessant davantage ou les tuant sur le coup.

Ichigo, qui avait été propulsé le dos contre un mur qui tenait encore miraculeusement debout, toussa à cause de la fumée épaisse et agita la main pour dégager son champ de vision essentiellement constitué de cendres et de poussière. C'est là qu'il prit conscience d'avoir une tige de métal enfoncée dans l'épaule gauche. Ignorant la douleur, il empoigna l'objet qu'il tira d'un coup sec avant de le jeter en étouffant son cri et sans attendre, il se précipita à l'endroit le plus dévasté de la zone.

- Kurosaki san, attendez ! l'arrêta un Shinigami indemne.

- La zone n'est pas sécurisée ! le mit en garde un autre. Vous ne pouvez pas...

- LÂCHEZ-MOI ! s'égosilla-t-il. Mon amie est là-bas bande de crétins !

- Il n'y a plus...

- Je vous ai dit de me lâcher ! répéta Ichigo en leur donnant à chacun un coup suffisamment fort dans la poitrine pour qu'ils lui foutent la paix.

Sans un regard en arrière, il reprit sa course. Son cœur pompait si vite qu'il en avait mal, il avait tellement de difficultés à respirer que ses poumons le brûlaient et ce n'était pas en raison de l'environnement à l'aspect hostile. Soudain, il arriva devant un cratère si profond qu'il manqua de tomber dedans et n'en distinguait pas le fond. Pas découragé pour autant, il continua.

- Inoue ! appela-t-il en toussant plus fortement, ses yeux le piquant.

Maudite fumée.

- Inoue, réponds !

L'absence de réponse le tuait. La peur grandissait en lui à chaque pas, à chaque inspiration, à chaque battement de son cœur comprimé. Il glissa sur une paroi et se rendit au centre.

- Je vais te sortir de là, tiens bon !

Aussi dur que ça pouvait être à admettre, il s'attendait à voir son corps qui justifierait son silence et qu'il pourrait prendre dans ses bras pour l'emmener se faire soigner. Certainement pas… le vide.

- Non… pas toi…

Il n'y avait rien. Rien du tout alors qu'il était plus que certain qu'elle avait crié ici, à cet emplacement précis. Il ne restait même pas un fragment de ses vêtements, quoi que ce soit pouvant témoigner de son existence.

- I… Inoue…

Le souffle saccadé, sa gorge le brûlant comme si il avait avalé un flacon d'acide, Ichigo lâcha son zanpakuto qui tomba dans un bruit métallique. Ses yeux étaient écarquillés mais ne reflétaient plus rien. Ses lèvres tremblaient mais ne pouvaient plus laisser passer un son. Son cerveau ne parvenait plus à réfléchir. Son cœur lui parut aussi lourd que de l'acier. Ses membres comme transpercés par une armée de lances. Son corps en piteux état s'engourdit comme si un venin mortel s'y répandait avec une froide lenteur et il s'effondra à genoux, ses bras pendant de chaque côté de lui, ses orbes sans éclat fixant l'endroit où son amie se tenait il y a quelques minutes pour lui sauver la vie.

D'abord silencieux, plaidant intérieurement pour qu'on le tire de ce cauchemar, Ichigo fut rattrapé par la réalité douloureuse qu'il cherchait déjà à fuir par tous les moyens possibles et imaginables, le bord de ses yeux le piquant plus fortement.

Maudite fumée. Maudite fumée. Maudite fumée.

Il se pencha à quatre pattes, son poing serrant un tas de poussière. Il regarda aveuglément la fine poudre dans sa paume ouverte avant que celle-ci ne soit soufflée par le vent en agitant ses cheveux et sa tenue déchirée. La poussière ne fut pas la seule à être emportée, l'humanité d'Ichigo également. Il frappa violemment le sol alors qu'un reiatsu aussi noir que les ténèbres et aussi rouge que le sang tourbillonnait autour de lui.

- INOUEEEEE !

Ce cri de douleur, de peine, de désespoir, d'incompréhension fut sans doute entendu jusque dans le Rukongai.

FIN FLASH-BACK

Toujours allongé dans son lit, Ichigo pensait, repensait chaque minute de la journée à ce jour horrible où il avait l'impression d'avoir lui-même cessé de vivre. Fou de colère, il avait perdu le contrôle de son Hollow (d'après ce qu'on lui avait rapporté) et avait achevé Mei sans (étonnamment) s'en prendre à qui que ce soit d'autre et était redevenu lui-même grâce à Rukia et Chad qui le résonnèrent. Les Shinigamis, eux, se chargèrent de Yui.

Observant toujours le plafond, Ichigo plissa les yeux. Il avait repris le chemin du lycée. Oui, il n'avait pas longtemps sombré dans le désespoir parce que pour lui, Inoue était toujours en vie. Il en était sûr et certain et refusait de croire à sa mort en dépit des circonstances. Pour preuve, ça faisait des semaines qu'il la cherchait partout où il le pouvait à la Soul Society comme à Karakura. Il fronça les sourcils en voyant une pâle lueur se frayer petit à petit un chemin à travers ses rideaux.

Le jeune Shinigami jeta un œil à son réveil, se leva et s'empara de son uniforme scolaire posé sur le dossier de la chaise de son bureau. Avant de se rendre dans la salle de bain, il alla devant la fenêtre et grimaça sous les rayons inattendus.

Pourquoi le ciel n'était-il pas resté orageux ? Comment pouvait-il être si beau et lumineux alors qu'Inoue n'était plus physiquement avec eux ?! Qui avait décidé que la Terre devait continuer de tourner comme si de rien n'était quand une personne à laquelle on tient n'est plus à nos côtés ?!

L'adolescent grogna et se détourna. Il détestait vraiment le soleil.

[ … ]

Après sa douche, Ichigo était descendu partager le petit-déjeuner avec ses sœurs. Yuzu égayait l'ambiance avec ses sourires et sa joie de vivre naturelle tandis que Karin agissait comme d'habitude, c'est-à-dire apparemment indifférente. Toutes deux savaient pertinemment que leur frère souffraient, seulement elles ne voulaient pas l'encourager à se comporter ainsi en le laissant seul. Au contraire, leur but était de ramener les vieilles habitudes.

Yuzu avait fini par songer à la possibilité qu'Orihime chan n'était pas morte, son onii chan avait peut-être raison en affirmant qu'elle était forte comme fille en dépit des apparences, et vivante quelque part. Elle ne connaissait pas très bien Orihime mais faisait confiance à Ichigo. Sa jumelle pour sa part ne savait pas trop quoi penser. Leur grand frère ne leur avait donné aucun détail mais d'après sa réaction et celle de ses amis, notamment Tatsuki, Rukia et Renji (puisque Chad ne s'exprimait pas autant mais son aura peinée en disait suffisamment), ce qui était arrivé à Inoue san était affreux. Karin se demandait donc si son frère ne se raccrochait pas plutôt à un espoir inexistant pour éviter de faire face à la réalité.

Des coups retentirent, la sortant de ses pensées. Yuzu fila ouvrir et sourit largement à la personne sur le seuil.

- Ohayo, Abarai kun ! Tu veux entrer un instant ? Onii chan a presque fini de manger !

Il portait l'uniforme scolaire ce qui ne la choqua pas du tout étant donné qu'elle savait tout sur les Shinigamis (dont certains allaient en cours avec son frère), les Hollows etc. Son père avait fini par lui expliquer.

- Non, je préfère l'attendre dehors, lui sourit le tatoué. Tu peux lui dire de se dépêcher par contre ?

- Oui, ne bouge pas !

Sur ces mots, elle retourna à l'intérieur en laissant la porte entrouverte. Renji poussa un soupir et s'appuya dos au mur le plus proche. Le sombre reiatsu instable d'Ichigo lui était perceptible d'ici. Moins puissant qu'il y a un mois mais toujours présent.

Ce dernier quitta la table, remercia sa sœur pour le déjeuner qu'elle lui avait préparé et fila à l'entrée mettre ses chaussures. Il s'apprêtait à ouvrir la porte quand une main se posa sur son épaule, le forçant à s'arrêter.

- Papa…

- Une minute, j'ai quelque chose à te dire.

- Quoi ? soupira son fils qui se tourna lourdement vers lui, visiblement las.

Son père l'observa avec tristesse.

- Je sais que tu fais des efforts depuis le mois dernier, Ichigo. Tu inquiètes moins tes sœurs, tu recommences à te nourrir et tu ne t'isoles plus autant. Seulement moi, tu continues à m'inquiéter parce que tu n'es toujours pas toi-même et tu sembles animé par des pensées mauvaises, acheva le brun en pressant son épaule.

Son aîné maintint son regard sans rien dire, puis lui montra son dos -se dégageant ainsi de sa prise. On voyait nettement que les muscles de son corps entier étaient tendus.

- Je redeviendrai moi-même quand Inoue sera de retour parmi nous, déclara-t-il d'un ton ferme et sans réplique.

Là-dessus, il sortit rejoindre Renji en laissant son géniteur encore plus inquiet qu'avant cette courte conversation.

- Et si Orihime chan ne revenait pas, Ichigo, devrai-je penser que j'ai à la fois perdu ma femme et mon fils ? murmura doucement Isshin, le cœur lourd.

Avec un soupir en disant long, il se dirigea vers son bureau pour commencer sa journée de travail.

[ … ]

Ichigo et Renji marchaient depuis cinq minutes à peine en parlant de la vie à Karakura et des travaux en bonne voie à la Soul Society. Le Shinigami de la 6ème division et la sœur de Byakuya furent envoyés à Karakura pour surveiller la ville. En dehors du Shinigami stationné ici, ce travail revenait normalement à Ichigo mais il délaissait sa fonction de Shinigami remplaçant, car trop occupé à essayer de retrouver Orihime dès qu'il en avait le temps.

La princesse fut effacée de la mémoire de ses camarades par le biais d'Urahara, excepté de celle de ses amis. C'est-à-dire Sado, Tatsuki, Keigo, Uryuu, Mizuiro et Chizuru. Pour tous les autres -élèves et enseignants, y compris ses voisins et connaissances-, Inoue Orihime n'avait jamais existé ou était partie ailleurs. Au début, Ichigo avait vraiment très mal réagi à cela au point qu'on craigne que son Hollow ne refasse surface et tue quelqu'un à savoir Kisuke. Pour lui, c'était trahir Inoue que de faire en sorte d'effacer son existence en ce bas monde alors qu'elle avait aidé tant de personnes et apporté plus qu'elle n'avait jamais reçu et ne recevrait jamais. Après réflexion, Ichigo s'était dit que ce n'était peut-être pas plus mal puisque ce n'était que provisoire -pour lui, Inoue reviendrait tôt ou tard- et puis il ne supporterait pas de voir ses camarades lui manifester peine et pitié.

- A part ça, comment tu vas ? demanda soudain Renji d'un ton qui se voulait détaché, une main dans sa poche.

- C'est quoi cette question ? grogna le roux, son sac derrière l'épaule.

L'autre fronça légèrement les sourcils mais sans plus, s'attendant à cette réaction.

- Ben ce que tu deviens, comment tu passes tes journées…

- Je vais au lycée, je travaille et je continue à chercher Inoue. Mais ce n'est pas tout à fait ça que tu voulais entendre ? répliqua l'adolescent avec colère.

- Ichigo…, commença-t-il tristement.

- Laisse tomber, Renji. Où est Rukia au fait ?

- … Elle tuait un Hollow, elle ne devrait pas tarder à nous rejoindre.

Juste à ce moment, des pas précipités résonnèrent derrière eux. Rukia, en uniforme également, les rejoignit rapidement et fit la route avec eux.

- Je pensais vous retrouver au lycée et non en chemin.

Marchant entre les deux garçons, elle regarda Ichigo qui n'avait pas sourcillé à son arrivée. Normalement, elle le frapperait sans retenue pour lui sortir cette tête de déterré et laisser cette sombre énergie émaner de lui. Sauf que depuis la disparition d'Inoue, c'était difficile de reprendre le cours de la vie. Si elle titillait Ichigo maintenant, elle réveillerait automatiquement le dragon qui dormait et très en colère. Pas la colère liée au fait qu'il n'aimait pas être embêté, mais une colère, une fureur peut-être, ayant une origine bien plus profonde.

- Comment vas-tu Ichigo ?

Ce dernier s'arrêta net pour leur faire face.

- Tu t'es passé le mot avec Renji ?

Rukia frissonna légèrement à son ton agressif.

- Non, c'est juste une question comme ça.

- Une question comme ça ? répéta-t-il, les dents serrées. Vous vous foutez de moi ?

- Nous...

- J'en ai assez qu'on me demande sans arrêt comment je vais ! Vous voulez que je me sente comment, bordel !

- Ichigo…, retenta-t-elle, la main tendue vers lui.

- Vous savez que je ne vais pas vous répondre avoir la forme alors arrêtez avec ça !

N'en pouvant plus, la brunette saisit le col de sa chemise et le secoua violemment.

- Rukia ! essaya de la raisonner Renji, une main sur son bras.

Il craignait qu'elle ne fasse exploser le fort sentiment grossissant jour après jour en leur ami, mais elle ne l'écouta pas et rejeta sa main en haussant les épaules.

- Tu devrais déjà commencer par cesser de sauter à la gorge de tes amis ! hurla-t-elle au visage du frère des jumelles. Nous souffrons nous aussi mais on ne peut pas se noyer dans notre souffrance, tu dois avancer au moins pour ta famille si tu refuses de le faire pour toi !

Ses prunelles indigo brillant de larmes, elle se mordit la lèvre et baissa la tête.

- Inoue nous manque également, murmura-t-elle, la voix déraillant. Mais ce n'est pas une raison pour te laisser aller de la sorte, Ichigo.

Ce dernier, des franges orange couvrant ses yeux, porta une main sur celle de son amie pour lui faire lâcher prise.

- C'est vous qui vous laissez aller en recommençant à vivre votre vie comme si rien ne s'était passé alors que ce n'est pas le cas, dit-il d'une voix sombre et basse d'où perçait la douleur. Inoue n'est plus à nos côtés, merde. Et vous voulez que j'agisse en passant au-dessus de ça ? Je refuse de croire qu'elle est morte et je continuerai à la chercher autant de temps qu'il le faudra, acheva-t-il.

Sur cette déclaration, il leur montra son dos et reprit sa marche vers le lycée en laissant ses deux amis plantés sur place. La petite Kuchiki n'avait pas bougé de sa position, ses poings très serrés. Son ami d'enfance vint à sa hauteur et passa un bras autour de ses épaules tremblantes en voyant des gouttes partir de son visage pour s'éclater au sol. Enfin, elle craquait. Enfin, elle montrait ses sentiments qu'elle avait tant bien que mal étouffés.

- Laisse tout sortir, Rukia.

Il leva les yeux sur le ciel qui recommençait à se couvrir alors que le soleil régnait en maître il y a peu.

Depuis que tu n'es plus là, le monde part de travers, Inoue san, pensa Renji, une boule à l'estomac.

Le vice-capitaine n'était certes pas proche d'Orihime, mais cela ne signifiait pas qu'il était pour autant insensible à sa disparition.

[ … ]

En classe, Ichigo salua brièvement Chad, Ishida et Mizuiro, esquiva Keigo moins turbulent que d'habitude et alla rejoindre son siège. Il faisait en sorte de ne plus maintenir une trop grande distance avec ses sœurs, surtout Yuzu qui détestait ça, seulement avec ses amis, c'était différent. Il savait ce qu'ils pensaient et il ne voulait pas l'entendre. Le fils Kurosaki ne prêta pas attention à Renji et Rukia entrant peu après lui et sortit ses affaires.

Le premier cours débuta comme à l'accoutumée, ses orbes marron dérivant de temps à autre sur la chaise vide d'Inoue. Avec un soupir, le Shinigami remplaçant se força à écouter le professeur. Ça n'arrangerait pas ses affaires qu'il foire son semestre. Cependant, quand Tatsuki arriva en retard en s'excusant et qu'il croisa son regard sombre souligné de cernes, Ichigo comprit direct qu'elle avait une chose de la plus haute importance à lui dire, et qu'il n'aimerait peut-être pas l'entendre non plus.

[ … ]

- Kurosaki a changé.

- On n'avait pas remarqué, Ishida, lança ironiquement Renji.

- Ce qu'il veut dire, intervint Sado, c'est que ce n'est pas lié au fait qu'il soit plus mince, les traits tirés ou plus agressif. Mais ce qui se passe dans sa tête. Plus les jours passent, plus il se comporte comme si Inoue pouvait apparaître d'un instant à l'autre, finit-il, la voix troublée par l'émotion.

- Sauf que c'est impossible, rejeta Rukia. Il ne reste rien d'elle, aucune trace ce qui laisse supposer qu'elle a explosé en particules spirituelles même si elle n'était pas une Shinigami. Le Capitaine Kurotsuchi a lui-même avancé cette hypothèse.

Tous quatre se tenaient dans un coin isolé de la cour.

- Que devons-nous faire dans ce cas ? questionna Uryuu en remontant ses lunettes. Laisser Kurosaki croire ça…

- J'ai essayé, le coupa la brune, une main serrant son coude. J'ai essayé ce matin de lui ouvrir les yeux mais il ne veut rien savoir, il s'obstine dans cette vaine recherche en oubliant presque qui il est.

- Je ne dirais pas ça, la contredit Chad, ses bras massifs croisés. La détermination et l'entêtement font partie de la personnalité d'Ichigo, c'est ce qu'il est.

- Peut-être. Mais sa détermination le pousse à s'entêter à croire en un miracle qui n'arrivera jamais, marmonna Renji, les yeux fermés.

Plus un mot ne fut prononcé. Ichigo était déjà têtu de nature alors lui faire entendre raison quand ses sentiments -si forts actuellement- le poussaient à agir était hélas peine perdue.

Au même moment, dans le gymnase vide, le sujet de leur conversation discutait.

- Qu'est-ce que tu veux, Tatsuki ?

Dès le début de la récrée, celle-ci avait fait en sorte qu'il la suive ici. Ichigo ne l'avait pas vue de si près depuis longtemps bien qu'ils avaient de nombreux cours en commun. Tatsuki avait les yeux fatigués comme si elle n'avait pas dormi depuis des jours, ses cheveux étaient quelque peu négligés et elle paraissait plus mince malgré le sport qu'elle pratiquait toujours. A la voir et la connaissant, on devinait qu'elle avait perdu une partie d'elle-même.

- Je ne vais pas tourner autour du pot, amorça-t-elle, debout face à lui.

Il attendit.

- Je veux que tu arrêtes de chercher Orihime.

Énorme silence. Les mots ne parvinrent pas tout de suite à franchir l'esprit encombré du roux.

- … Quoi ? fit-il, profondément choqué.

Il aurait pu s'attendre à entendre ça de la bouche de n'importe qui mais pas elle. Pas Tatsuki qui n'abandonnait jamais. Pas Tatsuki qui se battait pour ce en quoi elle croyait… Pas Tatsuki la meilleure amie d'Inoue et qui serait prête à donner sa vie pour la protéger !

- Je sais ce que tu te dis, ça me fait mal de te demander ça, ajouta la championne en s'entourant elle-même de ses bras.

- Alors pourquoi tu le fais ? ne capta-t-il pas, irrité. Bon sang, on parle d'Inoue ! Tu es aussi déterminée que moi à la protéger alors pourquoi… !?

- Parce qu'il n'y a plus lieu de la protéger ! l'interrompit-elle avec force, la voix cassée.

Son ami écarquilla les yeux, le corps raide.

- Tatsuki…

- Ouvre les yeux, Ichigo, elle n'est plus là ! s'exclama-t-elle, les yeux remplis de larmes. Elle est partie dans un endroit où tu ne peux la rejoindre et la ramener.

- Je l'ai toujours retrouvée où qu'elle soit, ça ne changera pas cette fois ! s'obstina-t-il, la mâchoire serrée.

La jeune fille eut un sourire sans joie.

- Tu cours après un fantôme et si tu veux la retrouver, c'est ce que tu deviendras toi aussi.

Le lycéen afficha un air signifiant qu'il ne saisissait pas où elle voulait en venir, l'incitant à s'expliquer en tendant une main vers son avant-bras.

- J'ai déjà perdu ma meilleure amie, je ne veux pas en plus perdre mon ami d'enfance souffla-t-elle. Orihime n'aurait pas voulu ça, elle n'aurait pas voulu que tu passes tes journées à la chercher plutôt que de continuer à vivre ta vie.

Il bouillonna.

- Vous êtes tous là à me dire de vivre ma vie mais ce n'est pas si simple ! Vous y arrivez peut-être mais pas moi ! cria-t-il, lacéré par la douleur lancinante. Inoue s'est sacrifiée pour moi et sous mes yeux ! Je suis celui qu'elle a vu en dernier et à qui elle a souri avant de partir ! Souri alors que la mort se trouvait juste derrière elle ! Le soleil se lève tous les jours, les cours continuent, Karakura a pu être protégée mais Inoue n'est pas là pour en profiter ! Elle a laissé un vide derrière elle et je ne pourrai pas avancer en me disant qu'il ne sera jamais comblé, c'est impossible !

Il marqua une pause, la respiration rapide, la gorge nouée, la tête baissée. Les larmes de Tatsuki chutèrent sur ses joues à cause de ce qu'elle venait d'entendre et en le voyant serrer les poings si fort qu'elle ne serait pas étonnée qu'il saigne. Néanmoins, elle pressa son bras qu'elle tenait toujours pour lui rappeler qu'elle était là.

- Je ne peux pas faire ce que vous me demandez.

- Tu devras pourtant essayer, murmura son amie attristée. Orihime a laissé un vide, c'est vrai. Mais à ce rythme, c'est toi qui deviendras vide, tu as tellement changé…

Elle renifla.

- Cette douleur que tu refoules est la preuve que tu es vivant alors ressens-la et accepte-la. Ainsi, le sacrifice de ma meilleure amie n'aura pas été vain.

- Je n'ai pas demandé à être sauvé, le prix à payer est trop élevé. J'aurais préféré mourir si ça signifiait la perdre.

- Comme toi, Orihime était prête à tout pour ses amis surtout toi, Ichigo. Tu as longtemps sous-estimé ce côté d'elle, mais tu as fini par le voir lorsqu'elle a donné sa vie pour une personne qui en valait la peine.

La sonnerie annonçant la reprise des cours retentit et elle se détourna. Parvenue dans l'encadrement de la porte, Tatsuki stoppa ses pas.

- Il y a quelque chose que tu dois savoir sur Orihime.

- Qu'est-ce que c'est ? interrogea-t-il pas plus fort que nécessaire.

L'adolescente lui jeta un œil par-dessus son épaule pour voir qu'il était toujours prostré dans la même position. Ichigo était dans le déni total, refusant obstinément de croire en la mort d'une amie à laquelle il était plus attaché qu'il ne l'aurait cru. Donc lui avouer maintenant qu'Orihime était profondément amoureuse de lui pourrait le faire réagir d'une manière plus négative que positive. Elle se mordit la lèvre et lui montra à nouveau son dos.

- Rien, oublie ça. Je t'attends en classe.

Là-dessus, la karatéka sortit à l'extérieur en laissant la porte ouverte.

[ … ]

La journée passa. Après les cours, le badge d'Ichigo sonna alors qu'il se trouvait en ville avec Renji et Rukia.

- On va s'en charger, décida-t-elle rapidement.

- Non, j'y vais, refusa-t-il. Tenez, allez plutôt à l'épicerie acheter le riz et le curry pour ma soeur, proposa-t-il en lui fourrant l'argent dans la main.

Ils n'étaient pas fâchés tous les deux en dépit de leur querelle de ce matin, mais on sentait toutefois une certaine tension venant d'Ichigo.

- Laisse-le y aller, Rukia, approuva Renji en se frottant la nuque.

- Mais…

- Si ça peut l'aider à se défouler.

Elle se tourna vers Ichigo qui partait déjà, elle se résigna à ne pas le suivre en espérant qu'il ne se ferait pas blesser. Encore.

Le roux trouva le monstre non loin d'un magasin un peu isolé, perché sur l'enseigne. Enfin un peu de distraction avant de reprendre son rituel qui consistait à retrouver son amie. Il leva son insigne à son torse mais avant qu'il ne touche même son pull, le Hollow fut pulvérisé dans un éclat bleu. Le fils Kurosaki serra les dents avant de se retourner.

- Ishida.

- Kurosaki, déclara-t-il, le majeur au centre de sa monture. J'ai cru comprendre que tu avais besoin d'aide.

- Je ne me souviens pas t'avoir appelé au secours, grogna-t-il.

- Le temps que tu as perdu à le fixer aurait pu lui être suffisant pour te porter une attaque peut-être mortelle vu ton état.

Une veine pulsa sur un certain front.

- Je… Tu… Qu'est-ce que tu fous là ?

- Je vais travailler, répondit simplement Uryuu. C'est le chemin que j'emprunte habituellement.

- Ben je t'en prie, poursuis-le, lâcha sèchement le Shinigami qui reprenait sa route.

L'autre le fixa une seconde avant de lancer…

- Tu fais vraiment peine à voir.

Ichigo se figea, tournant juste sa tête de profil pour croiser son regard fier.

- Tu as dit ?

- Tu as très bien entendu, soupira le Quincy. Tu inquiètes ton entourage sans le voir ou alors tu t'en fiches tout simplement.

- Tu ne fais pas partie des personnes se souciant de ma santé alors qu'est-ce que ça peut te foutre ?! pesta le fils d'Isshin en lui refaisant face. Plus je suis loin de toi mieux tu te portes, non ? Et c'est réciproque !

Des passants les contournaient rapidement, ne souhaitant surtout pas se retrouver embringués dans leurs histoires.

- La situation est différente, affirma le brun d'un ton étrange.

- Ah ouais ? Et en quoi ?

Le jeune homme à lunettes l'observa avec une certaine tristesse qu'Ichigo ne vit pas, trop remonté.

- Nous souffrons tous mais ta souffrance que tu n'exprimes pas émane lourdement de toi. Elle nous atteint et nous empêche en quelque sorte de faire notre deuil.

- Oh, excuse-moi de ne pas souffrir dans mon coin pour vous épargner avec mes mauvaises ondes, ironisa le frère de Karin et Yuzu.

- Ce n'est pas ce que je…

- Je me fiche de ce que tu veux dire ! trancha-t-il en s'avançant à grands pas pour le choper par le col. Tu me dis que vous souffrez et je peux le voir chez Tatsuki, Rukia, Rangiku san, Chad et même Renji alors qu'il n'était pas aussi proche que nous d'Inoue mais et toi, Ishida ! Tu es toujours là droit et fier, sarcastique et emmerdant ! Où est ta souffrance là-dedans, tu peux me le dire ! prononça-t-il si fort en le secouant que des oiseaux s'envolèrent de leurs nids. Comment peux-tu te comporter ainsi alors que notre amie n'est plus là ! Comment tu peux cacher aussi bien ta souffrance alors qu'on arrive tout juste à vivre avec de notre côté ?!

Uryuu avait été secoué si violemment que ses lunettes glissèrent au bout de son nez. Pour une fois qu'il avait une excuse valable pour les remonter, il n'esquissa pas un geste.

- Je dois avoir une capacité à faire mon deuil plus vite que les autres.

Deuil. Deuil. Deuil. Bon Dieu mais qu'Ichigo détestait, haïssait, maudissait ce putain de mot ! Sauf que ce n'est pas ce qui tripla l'intensité de sa colère. Pour lui, Ishida venait de dire avoir déjà oublié Inoue après un mois seulement ou plutôt qu'il parvenait à vivre normalement même en la sachant pas là. C'était déjà dur à constater mais alors l'entendre… c'était trop. Il leva son autre poing.

- Parce que j'ai pleuré.

Le poing du roux s'immobilisa à dix centimètres de son visage pâle, son cœur sembla faire de même.

- Tu… Tu as quoi ?

Il vit une substance brillante dans l'œil droit de son ami et rival, et c'est cela plus qu'autre chose qui l'incita à desserrer sa poigne sans le libérer.

- J'ai pleuré, Kurosaki, répéta-t-il, un peu gêné mais honnête. Seul chez moi et je me suis senti mieux après même si la douleur de la perte d'Inoue san est toujours présente.

Sa main attrapa le poignet du jeune Shinigami pour l'abaisser le long de son corps, ses iris bleus étincelant d'une vive lueur derrière sa monture qu'il remonta enfin.

- Si tu en faisais autant, je suis sûr que tu étoufferais moins sous le poids écrasant de tes sentiments.

Sur ces mots, Ishida remit sa cravate en place et laissa Ichigo donner un sens à ses paroles.

Le concerné resta au même endroit un temps indéfinissable. Ce qui le ramena sur terre fut une goutte sur son nez. En levant ses orbes ambre foncé, il en reçut une autre sur le front, puis sur les joues, les épaules et enfin le corps entier. La pluie se déversa sur lui et la population, fuyant ce ciel gris acier si lourd, orageux, terne. A l'image de son âme.

Ichigo se décida finalement à bouger, ses doigts tournoyant un objet dans la poche de son pantalon au fur et à mesure qu'il se rapprochait de sa destination. Il n'en avait rien dit à ses amis, son père ou même ses sœurs. Personne ne le savait à part lui. Personne ne soupçonnait que quelques jours après le sacrifice d'Orihime, Ichigo s'était rendu chez le propriétaire de la résidence où elle vivait. Il s'était arrangé avec l'homme pour continuer à payer le loyer de son amie à la condition qu'il ne mette pas son appartement en location. Le loyer de la guérisseuse n'était pas très élevé puisqu'elle avait réussi à se débrouiller pour bénéficier de quelques aides, et avec son salaire de travail à temps partiel plus ce qu'il gagnait en aidant son père à la clinique, le fils Kurosaki avait largement de quoi prendre en charge ce loyer. Et quand bien même ça n'aurait pas été le cas, il aurait trouvé une solution. Pas question de permettre à un inconnu d'habiter ici. C'était tout ce qui lui restait, la dernière parcelle prouvant qu'Inoue avait bien vécu à Karakura.

Au bas des marches menant à l'étage de l'immeuble, le roux expira bruyamment avant de monter, traverser le long palier regroupant plusieurs appartements et s'arrêter devant une porte précise. De là, il extirpa la clef de sa poche pour l'enfoncer dans la serrure, entra et referma doucement derrière lui sans allumer. Il ôta ses chaussures et s'enfonça dans le modeste logement. Quand Tatsuki avait émis le souhait de s'occuper des affaires d'Orihime, Ichigo proposa immédiatement de s'en charger et le sujet ne fut plus abordé. Depuis lors, il venait ici pratiquement tous les jours.

Tout de suite, il se sentit… plus apaisé, presque « bien ». Le jeune homme n'était pas une fée du logis, seulement il entretenait cet appartement. Il le ferait jusqu'à son retour mais il avait vidé le réfrigérateur pour éviter que ses aliments variés ne pourrissent à l'intérieur.

Il soupira.

Dans le salon, il passa sa main sur des meubles, les murs en même temps qu'il marchait jusqu'à arriver à l'autel de Sora auquel il ne pouvait toujours pas faire face. Comment le regarder alors qu'il avait été incapable de sauver sa sœur ? Où et comment trouver les mots pour s'excuser alors qu'elle était « partie » par sa faute ? L'adolescent serra les dents et tourna les talons.

La décoration d'Inoue était simple, agréable, discrète. Elle ne possédait que le strict nécessaire et ne semblait pas s'encombrer de choses inutiles contrairement à ce qu'il avait cru la première fois qu'il était entré ici après ce jour… Une semaine après sa disparition, son doux reiatsu flottait fortement ici, comme si elle était toujours là. Trois semaines plus tard, Ichigo dirait qu'il s'évaporait et ça lui faisait mal. C'était comme si Inoue s'estompait progressivement, totalement en ne lui laissant rien du tout à quoi se raccrocher. Le cœur battant trop vite, Ichigo quitta le salon à grandes enjambées pour aller occuper une autre pièce dont il avait eu quelques réticences à franchir la porte. Mais un jour, ça avait été plus fort que lui et il avait poussé cette fameuse porte servant de barrière, exactement comme maintenant.

A l'entrée de la chambre de son amie, il sentit son estomac se contracter tandis que sa main lâchait lentement la poignée. Tout était à la même place : son futon qu'il avait couvert, son armoire, ses rideaux tirés, son sac d'école dans le coin, le dernier livre qu'elle avait lu ouvert à une certaine page, ses vêtements posés sur le dossier de la chaise qu'elle aurait dû mettre après le travail pour être plus à l'aise, les cours qu'elle avait prévu d'étudier avant d'aller se coucher étalés sur le bureau… Ici, surtout, son reiatsu bien que plus faible était plus puissant que dans le reste de l'appartement. Dans cette chambre, c'est comme si son amie se trouvait juste à côté de lui.

Le frère des jumelles s'avança à petits pas à croire qu'il craignait quelque chose dont il ignorait la nature. A chaque pas, la boule née dans son estomac remonta dans sa gorge au point d'avoir des difficultés à avaler et ses membres s'engourdirent. Ses orbes tombèrent sur un cadre représentant une Orihime tout sourire fermement accrochée au bras de Tatsuki souriante également. Toutes deux avaient le teint lumineux -Inoue les joues roses- et étaient en parfaite santé. Le jeune Shinigami s'empara de la photo pour l'observer de plus près, elle datait à l'évidence de quelques mois, un an maximum. Son doigt traça le côté du verre où il y avait Inoue.

Kurosaki kun ~ !

Voilà qu'il recommençait à se l'imaginer l'appelant ainsi avec un immense sourire éclatant comme à son habitude.

« J'ai pleuré, Kurosaki. Si tu en faisais autant, je suis sûr que tu étoufferais moins sous le poids écrasant de tes sentiments. »

Affaiblit, tourmenté, écrasé par l'océan de sentiments l'assaillant, Ichigo s'effondra à genoux en retenant tant bien que mal son poids à l'aide du bureau avant de s'affaisser dos au mur, ses longues jambes repliées contre lui, sa main pressant fortement la photo au niveau de sa poitrine.

Pour lui, Inoue était une amie toujours présente autour de lui qui ne partirait jamais. Une amie sur laquelle il pouvait compter et inversement, une amie avec laquelle il voyait les choses différemment, une amie parvenant à le faire rire, oublier temporairement ses problèmes, une amie à qui il pouvait montrer sa part de faiblesse sans la honte ou la crainte d'être jugé.

C'était cela, il considérait Inoue comme acquise alors que ce n'était pas vrai. Bon sang, ce n'était même pas du tout le cas.

Kurosaki kun !

Deux fois qu'on se sacrifiait pour le sauver. En valait-il vraiment la peine ? Qui pouvait en décider ? Pourquoi devrait-il permettre ça ? Qu'avait-il fait dans sa vie pour justifier de tels actes où il n'avait pas son mot à dire bien qu'il était concerné ? Devait-il se résoudre à voir disparaître les êtres auxquels il tenait ? A quoi lui servaient ses pouvoirs si durement récupérés dans ce cas s'il devenait celui qui doit être protégé au lieu de celui supposé protéger ? Le roux glissa involontairement sur le côté, son épaule et sa tête cognèrent contre l'une des faces du bureau mais il ne s'en souciait pas. Il se fichait pas mal de la douleur si ça voulait dire faire revenir Inoue.

Kurosaki kun.

Quand on perd un être cher, la douleur soulevée surpasse n'importe quelle douleur physique, il pouvait en témoigner pour être déjà passé par là. Ce qu'il ressentait n'était en rien comparable à tous les combats qu'il avait livrés ou les accidents qu'il avait eus. Il se sentait blessé, torturé comme consumé par un brasier refusant de s'éteindre et dont il ne voulait pas s'échapper par peur d'affronter ce qu'il y avait derrière. Ichigo était prisonnier de son propre corps, chaque pore de sa peau le faisait souffrir à différents degrés jour après jour, son âme se fragmentait tel un puzzle aux pièces incalculables jusqu'à devenir poussière. Tout ça ne représentait pourtant qu'une infime part de ce qu'il éprouvait vraiment. Tout ça, c'était ce que percevaient ses amis mais il restait ce qu'il avait enfoui au fond de lui. Le temps atténue la douleur disait-on. Dans son cas, le temps augmentait la sienne au-delà de la raison.

Kurosaki kun ?

Elle lui manquait tellement. Pas seulement sa présence, aussi sa voix, ses sourires, son rire cristallin contagieux, ses grands yeux gris perle scintillants, ses longs cheveux cuivrés qui la distinguaient des autres filles, ses idées loufoques mais amusantes, ses plats vraiment trop bizarres qu'il regrettait de ne pas avoir goûtés rien que par curiosité, son imagination débordante et sans limites, sa capacité à se soucier des autres avant elle-même au risque de se négliger, son courage pour avoir supporté tant de visions d'horreur et de situations difficiles en ayant réussi à se relever et continuer à vivre, son talent pour interagir avec autrui et se faire facilement des amis, sa bonté naturelle la poussant à voir le bon côté d'une personne en particulier quand celle-ci n'avait pas conscience de son existence… Tout cela, toutes ces choses et bien davantage constituaient Inoue Orihime.

Maintenant qu'elle n'était plus là, qu'elle les avait laissés, qu'elle l'avait laissé, le vide incommensurable résultant de sa disparition n'était pas uniquement présent autour d'Ichigo mais aussi en lui. Dans son cœur, le moteur de la vie. Cet endroit si particulier, fragile, la cible principale de la douleur à l'état brut. Cette partie de lui où il ne pensait plus souffrir autant depuis un tragique jour de juin l'année de ses neuf ans.

Kurosaki kun…

- Tu me manques, Inoue, chuchota-t-il dans l'obscurité croissante, les paupières closes.

Cette confession portait avec elle l'ensemble de ses sentiments difficiles pour lui à exprimer en mots. Pourtant, dès qu'ils franchirent ses lèvres, le bouclier qu'Ichigo avait érigé autour de lui pour se protéger durant un mois se brisa, soufflé par son chagrin qu'il acceptait enfin de ressentir pleinement.

Bientôt, les nuages presque noirs s'amoncelant au-dessus de Karakura ne furent plus les seuls à verser des gouttes à n'en plus finir.

[ … ]

La nuit était tombée depuis un moment. Ichigo déambulait sur la berge, c'est par là qu'il avait choisi de passer pour rentrer après avoir reçu un appel inquiet de Yuzu lui demandant où il était passé.

Ses franges collant à son front, en raison de sa capuche pas pleinement tirée, comme ses vêtements trempés collant à sa peau, il leva les yeux vers le ciel pour constater que la pluie n'avait pas l'air décidée à s'arrêter. Le narguait-elle ? Lui donnait-elle une leçon pour avoir gardé si longtemps ses larmes en lui alors qu'elles ne demandaient qu'à être déversées ? Il n'aurait jamais la réponse à ces questions alors autant continuer sa marche, ses mains froides et humides profondément enfoncées dans ses poches.

Ishida avait raison. Tch, il le savait mais ne voulait pas l'avouer. Ichigo se sentait effectivement mieux mais sur une échelle de un à dix, sa douleur se situait tout de même au niveau huit et il ne pouvait être certain qu'elle ne grimperait pas à nouveau au point de faire exploser cette mesure.

Dire qu'il admettait qu'Inoue était morte, non. Avancer l'hypothèse qu'il ferait son deuil tôt ou tard, plutôt mourir. Participer aux frais de la pierre tombale pour honorer sa mémoire même en l'absence de corps, ne pas compter sur lui. Affirmer que sa détermination avait faibli, certainement pas. Cesser de la chercher, hors de question car aujourd'hui était juste une exception. Aujourd'hui, il n'était pas parti à la recherche de son amie mais à la recherche de ses sentiments. Oui, il avait été dans le déni total, seulement c'est normal, humain que de refuser de croire en la mort d'une personne à laquelle nous sommes attachés. Et puis, ce n'était même pas le fait qu'il ne voulait pas croire au décès tragique d'Inoue mais il ne le pouvait pas pour la simple raison qu'il était impossible qu'elle meurt ainsi, comme ça et si sauvagement.

Les trois heures passées dans son appartement n'avaient pas été une pure perte cependant parce que là, il se sentait au moins prêt à ne plus s'en prendre à ses proches et contrôler sa colère. Il ne fallait pas lui en demander davantage, c'était déjà beaucoup pour lui. Il lui était même impossible d'envisager ce résultat en se réveillant ce matin.

Ichigo remonta la pente pour regagner le bitume quand soudain, deux cris atteignirent ses oreilles malgré le vacarme de la pluie s'abattant sur le fleuve, et manquèrent de le faire chuter dans l'herbe. L'une des voix était de toute évidence humaine ou celle d'un Plus mais alors l'autre…

- Et merde !

Un Hollow gigantesque s'acharnait sur le pont plus loin, essayant de toute évidence de saisir sa proie cachée là. Sans attendre, le Shinigami remplaçant plaqua son badge sur son torse et se précipita vers son ennemi, attrapant Zangetsu sur son dos pendant sa progression. Parvenu à deux mètres du monstre, le fils Kurosaki bondit du sol et lui trancha un bras qui tomba lourdement. L'erreur de la nature poussa un gémissement de douleur assourdissant et comme il l'avait prévu, tourna son corps vers lui. Son attention était à présent détournée de sa proie et il donnait le champ libre au jeune homme pour fracasser son masque. Le Hollow poussa un autre hurlement, sur le point de visiblement contre-attaquer mais il serait évident pour quiconque capable de le voir qu'il n'avait rien anticipé.

En effet, en une seconde à peine Ichigo se volatilisa avec le shunpo pour se hisser à hauteur de son visage laid. Son zanpakuto brandit au dessus de sa tête, il n'hésita pas un instant et abaissa ses bras pour scinder sa face blanche en deux ainsi que son corps monstrueux puisqu'il continua à le trancher verticalement pendant son retour sur la terre ferme. Lorsque ses pieds touchèrent le sol, le monstre s'était évaporé en ne laissant rien derrière lui à part des parties du pont endommagées. Avec un soupir, le roux replaça son sabre sur son dos et s'apprêta à réintégrer son corps pour enfin rentrer chez lui avant que sa sœur cadette ne se noie dans un étang d'inquiétude. C'est à cet instant qu'un léger cri apeuré se fit entendre derrière lui. Avait-il oublié quelque chose ?

- Bordel !

La personne qui avait failli se faire dévorer évidemment ! Bon sang, il avait vraiment l'esprit ailleurs. Il se retourna et s'approcha de la petite forme accroupie dans l'ombre, le visage contre les genoux, les mains sur la tête.

- Hey, ça va aller, la rassura-t-il en lui tendant une main. Il ne t'embêtera plus, tu peux sortir.

L'inconnue -qu'il supposait être une fille d'après son cri aigu au début- releva la tête mais il ne parvenait toujours pas à voir son visage.

- Donne ta main, l'encouragea-t-il en l'agitant.

Il aurait pu sourire pour paraître moins… ben moins « lui » mais il ne le pouvait pas. Il avait perdu cette faculté il y a un moment. Malgré tout, après hésitation, la victime qu'il avait sauvée consentit à attraper sa main et il eut la certitude au contact qu'il ne s'agissait pas d'un fantôme.

- Ça va, tu n'es pas blessée ? Comment tu t'appelles ?

La tenant fermement, Ichigo la tira doucement dans la flaque de lumière du lampadaire pour mieux distinguer ses traits et voir au moins à qui il avait affaire puisqu'elle ne semblait pas très causante.

- Que… ?

Tout se passa très vite. Les yeux d'Ichigo s'écarquillèrent, son cœur fit une embardée, sa bouche devint sèche et sa main tenant cette jeune fille fut comme parcourue d'un courant électrique à haute densité qui le cloua sur place. Était-ce… Était-ce réellement possible ?

- I-Inoue.


Salut à tous ! Eh oui, une nouvelle fiction plus sombre dont j'ai eu l'idée il y a peu ! Vos avis ? =)