Fanfic : Captain Swan (Univers Alternatif) - Je sais, je viens à peine de poste Le Cygne Sauvage, que je vous poste une nouvelle fiction. C'est un parie dangereux que je me lance ; continuer deux fictions à la fois, ça ne va pas être facile. J'espère que vous saurez être patient avec moi et j'espère que cette nouvelle histoire vous plaira. :)
Disclamer : les personnages ne m'appartiennent pas.
Musique : aucune en particulier, mais il se peut que je poste un lien vers une playlist au fur et à mesure de l'avancement de l'histoire.
Poésie
Chapitre 1 – Nous passons notre vie à courir après le temps sans se préoccuper de nous. Le passé nous rattrape, nous dévore, nous ronge, futile créature que nous sommes.
Emma rangea sa valise vide dans le dressing qu'elle partageait avec Ruby, sa meilleure amie et colocataire. La partie lui étant réservée semblait vide à côté de celle de la brunette, qui était remplie à ras bord de boîtes à chaussures, de manteaux, de t-shirts, de jupes, de jeans... Ruby était un petit génie et les stéréotypes disant que les matheux étaient tous des geeks à lunettes ne s'appliquaient décemment pas à la jeune femme. Ruby prenait plus soin de son apparence que n'importe qui d'autre ici sur le campus de Bates. Et pourtant, ce n'était pas les petits fils et filles « de » qui manquaient à l'appel. Emma et Ruby avaient intégré la faculté grâce à leurs livrets scolaires impeccables. Quand on vient de Storybrooke, dans le Maine, ce n'est pas facile tous les jours d'intégrer une université aussi importante que Bates. Ruby était extravagante et pétillante. Elle n'avait pas eu de mal à imposer sa présence. En moins d'une semaine, elle était déjà invitée à une multitude de fêtes. Emma n'avait pas eu cette chance-là : elle avait beau être en quatrième et dernière année de licence d'Art, ses camarades de classe avaient la mémoire courte quand il s'agissait de se souvenir de son prénom. D'un autre côté, son caractère timide et solitaire ne l'aidait pas beaucoup à se faire des amies.
Emma referma les portes de la penderie et alla s'affaler dans le vieux fauteuil en cuir qui trônait au milieu de la chambre, en poussant un long soupire. Ruby passa sa tête dans l'embrasure de la porte de la salle de bains, une moitié de visage maquillé d'un outrageux trait d'eye-liner et de fard à paupière rouge fraise.
_ Que signifie ce soupir mademoiselle Nolan ? Demanda-t-elle de sa voie haut-perchée.
Emma lui adressa un sourire en coin avant de répondre. Elle n'eut pas le temps de formuler la moindre phrase, Ruby lui vola ses paroles avant qu'elles ne franchissent le pas de sa bouche.
_ Ah non ! Ne me dis pas que Storybrooke te manque déjà !
Emma sourie plus franchement cette fois-ci, levant les mains en guise d'innocence.
_ Hé ! Je n'ai rien dit ! Au contraire, je trouvais que ça faisait du bien d'être de retour.
_ Ah ça ! Je suis bien d'accord ! Lui répondit la brunette, un large sourire illuminant son visage.
Emma laissa échapper un petit rire et son amie en fit de même. Ruby avait l'art de prendre les choses avec légèreté.
_ Je vais aller faire un tour, histoire de m'aérer un peu, le voyage m'a assommé, annonça Emma en se levant de son fauteuil.
_ Ok Swan ! À tout' !
_ À tout' Wolfy ! Lança la jeune fille en refermant la porte derrière elle, tout en enfilant sa veste en cuir rouge.
Swan et Wolfy, c'était comme ça que Ruby les surnommaient. Emma n'avait jamais su pourquoi et n'avait jamais vraiment cherché à comprendre. Ces surnoms l'amusaient plus qu'autre chose. Et puis, contrairement à ce que lui affirmait Ruby à longueur de temps, tout ne s'expliquait pas à coup de formule mathématique.
Emma ne mit pas longtemps à rejoindre le café littéraire qui se trouvait dans la rue en face de l'entrée Ouest de l'université. Matthew, le gérant du bar la reconnu aussitôt et la gratifia d'un grand sourire lorsqu'elle s'avança au comptoir pour commander son grand café, bien noir, bien serré et sans sucre. Matthew McArthur était un Écossais, ancien élève de Bates, qui avait repris le café avant qu'il ne soit transformé en salle de sport par ordre de la ville. Franchement, une salle de sport ? Qui allait dans une salle de sport de nos jours.
La jeune blonde fit le tour des étagères qui ornaient les murs du café pendant que Matthew lui préparait sa boisson et s'arrêta en face de celle des nouveautés. Fouinant un peu, elle réussit à trouver de quoi satisfaire sa culture littéraire avec un Voltaire et un Hemingway qu'elle n'avait pas encore lu. Elle se dirigea vers sa table, celle au fond de la salle, coincée dans l'angle de deux étagères, éclairée par la lumière tamisée d'un vieil abat-jour des années 70, lorsqu'elle remarqua que quelqu'un avait déjà pris la place. Emma ne cacha pas sa surprise. La plupart des gens qui venaient ici choisissaient des places au bar ou juste à l'entrée du café, en face de la baie vitrée. Cette table était TOUJOURS vide. C'était SA table. Celui qui avait eu l'audace de prendre sa place était un homme, jeune, mais qui avait facilement plus de vingt-cinq ans. Ses cheveux bruns lui tombaient un peu dans les yeux alors qu'il lisait tranquillement son livre - un recueil de poèmes de Baudelaire -, et une barbe d'une semaine lui mangeait la moitié du visage. Il dut sentir le regard insistant de la jeune femme fixé sur lui puisqu'il releva la tête, un peu étonné puis la gratifia d'un sourire polie. Grinçant des dents et tournant les talons, Emma alla s'asseoir à une autre table, à l'opposé totale de son emplacement habituel. Matthew ne tarda pas à arriver et déposa devant elle son grand café - bien noir, bien serré et sans sucre - ainsi qu'une patte d'ourse encore toute chaude. Emma ne put s'empêcher de sourire. Dans la vie, elle adorait quatre personnes : ses parents – qui à ses yeux comptaient pour un -, son fils Henry, sa meilleure amie Ruby et Matthew.
_ Désolée pour la table ma chérie. Tu me pardonneras si je t'offre ta viennoiserie préférée ?
_ Matthew, je te pardonnerai tout sauf peut-être si tu volais mes vêtements ou ma voiture.
_ Dans ce cas, je suis sauf ma chérie ! Je ne veux ni de ton tas de ferraille jaune, ni de tes guenilles de garçon manqué ! S'exclama le jeune homme.
Emma s'esclaffa et Matthew s'éloigna en riant avec elle à gorge déployée. Matthew, en plus d'être géniale était tout ce qu'il y a de plus gay ici à Bates. Mais Emma n'en avait rien à faire de ses préférences sexuelles. Ce qu'elle aimait chez lui, c'est qu'il ne se prenait jamais la tête. Elle avala une gorgée de son café. Divin ! Elle mordit dans la patte d'ourse tout en attaquant Candide de Voltaire. OH MON DIEU. Oui, parce qu'en plus d'être un gars génial, Matthew était l'un des meilleurs cuisiniers de la ville – son père était boulanger et lui avait tout appris avant qu'il ne vienne à Bates pour étudier la littérature. En ouvrant ce restaurant, après seulement une année de licence, Matthew avait réussi à concilier deux de ses rêves : la cuisine et les livres.
Emma consulta son portable et s'aperçut qu'elle avait deux messages en attente. Tous deux venaient de sa mère. Le premier était signé de son fils. Le second de ses parents.
« Bon courage maman chérie pour ta rentrée. Je t'aime. Xxx »
« Bon courage de la part de tout le monde ma chérie. Je t'appelle demain soir. Xxx »
Emma sourie, mais elle ne put pas empêcher les larmes de lui picoter les yeux en lisant le message de son fils. Elle avala une nouvelle gorgée de café avant de répondre aux deux messages et se replongea dans la lecture de son livre. Après quelque minute à feuilleter les pages de son ouvrage, elle leva les yeux de ses pages pour inspecter la salle. Elle remarqua que l'homme qui lui avait « volé » sa place la fixait avec insistance. Il avait des yeux d'un bleu profond et intense. Emma fut parcourue d'un frisson. Elle fit mine de n'avoir rien vu et piqua du nez dans son livre. La curiosité prenant le dessus, elle fut forcée de relever la tête quelque seconde plus tard. L'homme avait disparu. Le cherchant du regard, elle se retourna juste à temps pour l'apercevoir, quittant le café ses livres sous le bras.
06 : 25
Emma bondit de son lit et fonça dans la salle de bains avant que Ruby ne s'y enferme pour l'heure suivante. Cinq minutes plus tard, la jeune blonde sortait de la pièce, habillée d'un jogging et d'une paire de baskets. Elle alla secouer sa colocataire, le visage encore enfoncé dans sa couette. Ruby grommela quelque chose d'incompréhensible à propos de Lémuriens avant d'ouvrir un œil endormis et de grogner de nouveau en enfouissant son visage sous ses couvertures.
Emma attrapa son MP3 et glissa ses écouteurs dans ses oreilles alors qu'elle sortait de la cité universitaire. Elle partit en petite foulée régulière faire son footing matinal, petit rituel qu'elle s'était instaurée depuis l'année dernière. Non pas qu'elle eut besoin de perdre du poids, elle avait une tendance naturelle à ne pas prendre un gramme, même après Thanksgiving, mais pour le moral. L'aube pointait timidement le bout de son nez et le campus était encore éclairé par la lumière timide des réverbères. Un vent piquant soufflait et mordait les joues de la jeune femme alors que ses cheveux blonds, relevés en queue de cheval, se balançaient dans son dos, au rythme de ses foulées. Quoi de mieux pour bien se réveiller qu'un jogging à 6h30 du matin ? Elle passa devant la cafétéria et vit le cuisinier entrer par la porte latérale. Elle traversa le jardin botanique, passa devant le cours de tennis, le gymnase et la piscine couverte. Elle contourna le bâtiment des amphithéâtres et sortie dans la rue par la porte Est. Elle continua de courir régulièrement jusqu'à ce qu'elle atteignît le café de Matthew. Elle entra en trottinant sur place. Matthew sortit des cuisines un sachet de croissants frais dans une main et une thermos de café fumante dans l'autre.
_ Ma chérie, je ne sais pas comment tu fais pour courir comme ça si tôt le matin !
Emma éclata de rire.
_ C'est le prix à payer si je ne veux pas ressembler à un tonneau avec tout ce que tu me donnes à manger.
_ Ah parce que ça va être de ma faute maintenant !
Emma plaqua un baiser sur la joue du jeune homme et quitta le café en sautillant. Alors qu'elle saluait une dernière fois Matthew à travers la baie vitrée du café, elle manqua de rentrer dans un passant qui arrivait en face.
_ Pa-Pardon, bafouilla la jeune femme en rougissant.
Elle fut surprise de reconnaître l'homme qui était assis à sa table la veille. Il la gratifia d'un petit sourire en coin.
_ Il n'y a pas de mal mademoiselle.
Il avait une voix douce, suave, aussi agréable que du caramel chaud qui fond dans la bouche. Emma repris sa course sans se retourner, le visage en feu.
_ Ruby ! Le p'tit dej' est servi ! Annonça la jeune femme en entrant dans l'appartement cinq minutes plus tard.
Elle déposa le sachet de croissants frais au centre de la table, remplis deux tasses de café brûlant et fonça frapper à la porte de la salle de bains. Ruby ouvrit, le corps saucissonné dans une serviette de molleton rouge et les cheveux tout dégoulinant d'eau.
_ T'es sérieuse là ! Pesta Emma en fronçant les sourcils. Il est déjà sept heures et quart et tu n'es toujours pas prête ! Dépêche-toi, Matthew m'a fait du café et des croissants et je MEURS de faim !
_ Du café et des croissants de chez Matthew ?!
Ruby termina de se préparer en moins de cinq minutes – ce qui équivalait à un record mondial pour elle.
_ Huuuum ! Ces croissants sont un délice ! Je devrais fabriquer un autel en l'honneur de Matthew, ce gars est un dieu ! Si seulement il n'était pas gay...
Emma laissa échapper un gloussement.
_ J'approuve la création d'un autel en l'honneur de Matthew ! Hier, il m'a même offert une patte d'ours pour se faire pardonner parce que ma table habituelle était prise. Je voudrais bien que ma table soit prise plus souvent moi !
Ce fut au tour de Ruby d'éclater de rire. Emma glissa un coup d'œil à son portable, mais toujours aucun message.
_ À quoi tu penses ? Lui demanda doucement sa meilleure amie.
Emma plongea le nez dans sa tasse de café pour ne pas répondre.
_ Si tu t'inquiètes pour ton fils, je suis sûre que tout va bien se passer. Ta mère sera avec lui à l'école, il ne sera pas perdu. Et tu sais bien que son meilleur ami Roland sera avec lui.
La blondinette gratifia Ruby d'un regard noir.
_ Quoi ? C'est vrai après tout ! Sérieusement, Emma, ne t'en fais pas pour Henry, c'est un petit garçon très mature pour son âge. Tout se passera bien. Ce n'est pas comme si c'était sa première rentrée !
La jeune femme posa une main rassurante sur celle d'Emma.
_ Ce n'est pas vraiment ça qui m'inquiète, répondit-elle après un moment de réflexion. Je sais que tout va bien se passer. Pendant tout l'été, il n'a pas arrêté de me parler de l'école et de sa rentrée, de sa nouvelle maîtresse et de ses amis. C'est juste que..., Emma hésita un instant, mordillant sa lèvre inférieure. Je ne regrette pas d'avoir gardé Henry. Je ne regrette pas d'avoir repris les études un peu plus tard que prévu. Mais parfois... Je regrette de ne pas être présente aux moments importants de sa vie.
Les lèvres de Ruby s'étirèrent en un petit sourire.
_ Emma Nolan, il te reste une année à tenir, une fois ta licence en poche, tu pourras rentrer à la maison et y rester. Tu pourras avoir la vie que tu souhaites avec ton fils. Je sais que tu as fait beaucoup de sacrifice en acceptant de venir ici, mais ça en valait la peine. Ça en vaut toujours la peine ! Alors tu vas me décrocher ton diplôme avec une mention et ensuite, on rentrera à Storybrooke pour de bon !
Le visage d'Emma se détendit un peu. Pourquoi Ruby était-elle sa meilleure amie déjà ? Peut-être parce qu'elle était l'une des rares personnes qui savait lui dire ce qu'elle avait besoin d'entendre au moment opportun.
_ Maintenant, file à la douche, tu es toute dégoulinante de sueur et tu ne peux PAS aller en cours comme ça ! Ajouta la brunette en la désignant du doigt, une moue faussement dégoûtée déformant son visage.
La jeune femme ne se fit pas prier. Plus qu'un an, se dit-elle en entrant sous la douche. Plus que deux maudits semestres et elle pourrait enfin offrir à son fils la vie qu'il méritait.
La journée touchait à sa fin. Son emploi du temps du lundi était plutôt tranquille. Deux heures de Littérature Classique le matin, une heure et demie de Latin en début d'après midi, et pour finir, deux heures d'Histoire Coloniale Anglaise. Les cours en fin de journée ne la dérangeaient pas vraiment. En générale, une option qui avait lieu à une heure aussi tardive attirait peu de monde. Et moins la salle était remplie, meilleure le cours était !
Après avoir quitté Ruby à la cafétéria du campus, Emma rejoignit sa salle en avance. Elle aimait arriver dix minutes avant le début des cours, afin de pouvoir choisir sa place au fond de la salle. L'amphithéâtre était vide et la jeune femme alla s'installer au premier rang, dans un coin. Dans ce genre d'option, inutile d'aller s'asseoir au fond. On était tout de suite repéré et prit en grippe par le professeur, car les effectifs ne dépassaient pas plus d'une dizaine d'élèves. Elle sortit son portable de sa poche ; son écran affichait un nouveau message de sa mère.
« J'ai croisé Henry à la cantine, il est dans la même classe que Roland et il avait l'air très content. »
Emma ne répondit pas, de toute façon, elle appellerait sa mère ce soir. Elle sortit de son sac de quoi prendre des notes et s'amusa à dessiner dans la marge de sa première page en attendant l'arrivée du professeur et des autres élèves. Ces derniers ne tardèrent pas à arriver, babillant bruyamment. D'abord deux, puis cinq, puis douze, puis vingt-sept... L'amphithéâtre n'en finissait plus de se remplir. Emma consulta son emploi du temps, persuadée en voyant tous ces étudiants affluer, de s'être trompée de salle.
18:00/20:00 : Histoire Coloniale Anglaise (XVe - XVIe siècle), Amphithéâtre Bronthë, M. JONES.
Non, elle était bien au bon endroit. La salle était à moitié pleine lorsque le professeur fit son apparition. De taille moyenne, une chevelure d'ébène, la moitié du visage mangé par une barbe d'une semaine... Ce visage semblait familier à Emma et lorsque le professeur se tourna vers son auditoire, elle reconnut le « voleur de table ». Leurs yeux se croisèrent et il parut aussi surpris qu'elle de la retrouver ici. Il lui adressa un petit sourire, ou du moins, elle crut qu'il lui en adressa un. Il tapota dans son micro afin d'attirer l'attention de ses élèves et un lourd silence s'abattit dans l'amphithéâtre.
_ Bonjour à tous et bienvenue dans le cours d'Histoire Coloniale Anglaise. Je me présente, professeur Killian Jones, c'est moi qui assurerais le cours de ce semestre.
Emma s'effondra sur son lit, les bras en croix en poussant un long soupir épuisé. Ruby leva furtivement la tête de son manuel avant de replonger dedans la seconde qui suivait.
_ Laisse-moi deviner, tu as eu cours d'Histoire Coloniale Anglaise avec le professeur Jones.
_ Bravo Ruby, tu sais lire autre chose que tes calculs maintenant ! Répondit-la jeune femme d'un ton pince-sans-rire.
_ Hahaha ! Hilarant ! Répliqua la brunette en levant les yeux au ciel. Je disais ça parce que Katelyn et Johanna ont assisté au cours et qu'elles m'ont bombardé de messages comme quoi le professeur était totalement canon au point qu'elles passeraient bien volontiers sous le bureau pour obtenir une bonne note !
Emma grommela quelque chose de totalement inaudible en guise de réponse.
_ J'ai fait des recherches sur internet et il s'avère que ce Monsieur Jones est véritablement un beau morceau. Tu crois qu'il remarquera que je suis une matheuse si je viens en douce assister à son cours ?
_ Tu ne tiendras pas une heure Ruby ! Marmonna Emma le visage écrasé dans son oreiller.
_ Tu as raison, je tiendrais le semestre entier s'il le faut ! Non mais Emma, tu as bien regardé ce type !
_ Je crois que je l'ai assez vu, sachant que je viens d'assister à deux heures de son cours.
_ Ce que tu peux être désagréable parfois ! S'exclama la jeune femme en frappant le haut du crâne de son amie avec son coussin.
_ Rubyyy ! Geignit Emma sans pour autant bouger d'un seul centimètre.
Il fallait être aveugle pour ne pas remarquer que le Professeur Jones était beau. Il fallait être sourd pour ne pas craquer en entendant son petit accent irlandais. Il fallait être lesbienne pour ne pas tomber instantanément sous le charme du bleu limpide de ses yeux. Il fallait s'appeler Emma Nolan pour se ficher complètement de tout ça. Ok, ce type était canon. Et alors ? Ce qu'elle avait retenu de ces deux heures en amphi, ce n'était pas la façon ultra sexy qu'il avait de rouler les « r », mais surtout le fait que son cours était vraiment intéressant et si elle avait hâte d'être à jeudi, ce n'était pas pour le revoir, mais pour savoir si son cours de Littérature Étrangère serait aussi intéressant que celui-ci. Emma roula sur le dos.
_ On a quelque chose à manger dans le frigo ? Demanda-t-elle, sachant pertinemment que leur frigo était vide.
_ Non.
_ Matthew ? Demanda-t-elle en la gratifiant d'un regard complice.
_ Matthew ! Répondit Ruby avec un large sourire.
Deux heures plus tard, les deux jeunes femmes rentraient chez elles le ventre plein et en riant à gorge déployée.
_ Tu te souviens la fois où on a botté les fesses des types chez Granny ? Ceux qui étaient partis sans payer ?
_ Olala ! S'écria la brune. « C'est bon, c'est bon, on va payer ! On va payer, mais s'il vous plaît, arrêtez ! »
Emma éclata de rire de plus belle en entendant l'imitation de Ruby. Elle avait mal au ventre à force de rigoler.
_ Il- Il faut que j'appelle Henry, hoqueta-t-elle.
_ Je vais dans la salle de bains.
Emma hocha la tête tout en composant le numéro de sa mère et Ruby s'éclipsa sans bruit. Mary Margaret décrocha à la première sonnerie. Emma était contente d'entendre la voix de sa mère. Même si elles s'étaient quittées il y a deux jours, Madame Nolan et sa fille était très proche l'une de l'autre.
_ Alors ce premier jour ? S'enquit Mary Margaret.
_ C'est comme si je n'étais jamais partie ! Les seules choses qui ont changé, ce sont mon emploi du temps, mes professeurs et mes cours. En dehors de ça, toujours la même routine. On rentre juste de chez Matthew, tu vois, oh et Ruby te passe le bonjour, ajouta Emma devant les gesticulations frénétiques de son amie. Ah et j'ai un super emploi du temps qui me laisse mon vendredi après-midi de libre et mon lundi matin aussi, du coup, je pourrais venir de temps en temps le week-end pour vous voir. Et toi ta journée ?
_ Comme une rentrée ! Je commence à être rodée depuis le temps. Je me retrouve avec mes deux petits monstres dans ma classe.
_ Tu as Henry et Roland dans ta classe ?
_ Oui. Roland pense que je l'ai fait exprès. Si seulement ! Ordre du directeur : on n'a pas assez de postes et trop d'élèves. C'était ça ou la classe mixte.
_ Je vois... Henry est dans le coin ? Demanda Emma, un soupçon d'impatience vibrant dans sa voie.
_ Tu n'as pas eu mon message ? C'est son père qui l'a récupéré en sortant de l'école. Il passe la soirée avec lui et il le ramène d'ici... Il devrait être rentré dans une vingtaine de minutes.
_ Il est avec Neal ?
_ Emma, ne t'énerve pas. C'est Henry qui m'a demandé d'appeler son père pour qu'il vienne le chercher à la sortie des classes.
_ ... Ok.
_ Tu es fâchée ? Demanda sa mère.
_ Non... Enfin si ! Maman, tu sais ce que je pense de Neal et de son influence sur Henry...
_ Il reste son père Emma, la coupa Mary Margaret.
_ Oui, ça, je suis au courant. Emma fit une pause, expirant longuement par le nez afin de se calmer. Écoute maman, je peux comprendre qu'Henry ait besoin de voir son père. Il compense vu que je ne suis pas là. Mais... Fais en sorte qu'il ne compense pas trop, d'accord ?
_ D'accord, répondit Mary Margaret en soupirant.
_ Bon, je te laisse, je vais essayer d'avoir Neal. Embrasse tout le monde pour moi. Je t'aime.
_ Je t'aime aussi chérie.
Emma s'assit sur le bord de son lit, faisant passer son portable d'une main à l'autre. Ruby avait mis la radio dans la salle de bains et s'égosillait sur les paroles de Let It Be. Bénit soit l'inventeur des murs insonorisés ! Emma déverrouilla son portable et parcouru son répertoire à la recherche du numéro de Neal. Pourquoi, de tous les pères du monde, il avait fallu que Neal Gold soit celui d'Henry ? Conseil numéro un d'Emma Nolan : ne jamais tomber amoureuse. Conseil numéro deux : ne jamais tomber amoureuse d'un gros lâche qui se barre dès que vous lui annoncez que vous êtes enceinte. Conseil numéro trois : éviter de tomber enceinte dudit « gros lâche » quand vous n'avez que seize ans. « Erreur n°01 » : voilà le nom que portait Neal dans le répertoire d'Emma. D'accord, elle y allait peut-être un peu fort. Peut-être qu'il ne méritait pas ça. Elle avait eu six ans pour lui pardonner. Il avait eu six ans pour lui prouver qu'il avait fait une erreur en agissant comme un lâche.
Elle l'avait rencontré au lycée, en seconde. Il allait avoir dix-sept ans, elle en avait quinze. Ils avaient commencé à traîner ensemble. C'était pendant sa période d'adolescente rebelle. Au départ, elle restait avec lui pour taper sur les nerfs de ses parents. Neal était le fils de Robert Gold, l'homme le plus puissant et le plus riche de Storybrooke. Les relations entre le père et le fils étaient plutôt tendues et Neal faisait tout à cette époque pour rendre son père complètement fou. C'est à de nombreuses reprises que Neal avait passé la nuit au bureau du shérif Nolan. Et puis Emma était tombée sous le charme de ses belles paroles, de ses promesses... Jusqu'au jour où elle s'était rendu compte que ça n'allait pas. Jusqu'à ce jour où elle avait acheté ce test de grossesse. Elle l'avait appelé, il lui avait répondu. Il lui avait promis de se ranger, d'arrêter les bêtises. Il lui avait promis une vie confortable, pour elle et le futur bébé. Une vie rien que tous les trois. Deux mois avant la naissance d'Henry, il quittait Storybrooke en stop pour rejoindre New York. Adieu Tallahassee. Adieu le maison près de la plage. Adieu la coccinelle jaune qui rouillait au fond du garage de Gino. Emma avait gardé Henry, qui était naît le 5 août 2006. Emma était sortie diplômée avec mention Très Bien du lycée. Elle avait accepté de travailler chez Granny pour pouvoir rester auprès d'Henry. Elle avait renoncé à l'université pour élever son fils. Malgré tout ce qu'elle avait pu leur dire, ses parents et Ruby savaient bien qu'Emma regrettait d'avoir arrêté ses études.
Et un jour, Neal était revenu. Comme ça, sans crier gare. C'était juste avant qu'Emma ne parte pour l'université. Elle avait envoyé sa candidature à plusieurs universités, ses parents avaient réussi à l'en convaincre, et elle avait été reçue à Bates. On lui offrait même une bourse et un appartement d'étudiant sur le campus. C'était un soir d'août, ils étaient tous en train de fêter ses résultats et ceux de Ruby chez Granny. Henry venait d'avoir quatre ans. Emma avait d'abord refusé que Neal s'implique dans la vie de son fils. Il lui avait tourné le dos avant même qu'il ne voit le jour. Monsieur Gold était intervenu en la faveur de son fils, rappelant à Emma la légitimité de Neal en tant que père, aux yeux de la loi. Emma avait plié.
Elle appuya sur la touche d'appel et approcha le portable de son oreille. La tonalité résonna une fois. Deux fois. Emma se leva et alla appuyer son front contre la baie vitrée qui donnait sur la rue.
_ Emma ?
Le cœur de la jeune femme se serra en entendant la voix de son ex.
_ Elle-même ! Répondit la jeune femme d'un ton aussi neutre que possible.
_ Oh, tu veux parler à Henry je suppose.
_ Tu supposes bien.
Elle entendit Neal appeler son fils. Connaissant le petit garçon, il avait dû supplier son père d'aller au parc pour jouer au chevalier et maintenant, il devait être devant la télévision, mangeant une pizza en regardant Peter Pan, son dessin animé préféré.
_ Maman ! S'exclama la voix enjouée d'Henry.
_ Salut mon chéri !
Un large sourire illumina le visage d'Emma alors que le petit garçon lui racontait sa première journée d'école. Il était dans la même classe que Roland de Locksley, son meilleur ami. Il était très content d'avoir sa grand-mère pour maîtresse. La cantine était géniale, la salle de classe était géniale. Tout était génial. Il insista ensuite pour que sa mère passe au crible les moindres faits et gestes de sa propre journée.
_ Tu rentres dans combien de jours maman ? Demanda Henry d'une toute petite voix.
_ Attends que je compte... Lui répondit la jeune femme en attrapant son agenda. 45, 46... Dans 47 jours.
_ Ça fait beaucoup 47 jours ?
_ Pas tant que ça mon cœur.
_ Hum... Tu me manques maman, murmura la petite voix d'Henry.
Le cœur d'Emma était comme étouffé dans un étau et les larmes commencèrent à lui monter aux yeux.
_ Toi aussi tu me manques mon bébé, répondit-elle d'une voix un peu tremblante.
_ Ah non, j'suis pas un bébé maman ! J'ai huit ans, je te rappelle !
Emma éclata de rire ; le poids sur sa cage thoracique avait disparu.
_ Oui, tu es un grand maintenant ! Bon, il faut que je te laisse, il est tard et tu devrais déjà être rentrée chez mamie et au lit ! Moi aussi d'ailleurs, je vais aller me coucher. Je t'aime mon grand garçon. Je t'appelle samedi soir, d'accord.
_ D'accord maman. Je t'aime trèèès fort !
_ Et moi encore plus !
_ Pas autant que moi ! Répliqua le petit garçon.
Emma raccrocha en soupirant. Un soupir à la fois triste et heureux. Ruby émergea enfin de la salle de bains et demanda des nouvelles du petit héros. Les deux jeunes femmes finirent la soirée assises sur le lit de Ruby, un pot de Ben and Jerry's coincé entre elles, devant un épisode de Games of Throne. La vie reprenait son court normal. Plus qu'une année à tirer Emma, se dit la jeune femme en avalant une cuillère de glace à la vanille et aux noix de pécans, plus qu'une année.
Et voilà, fin de ce premier chapitre. :) Vos impressions ?
