Merci à Lyane qui nous a proposé une suite de mots à première vue incompréhensibles, mais tous issus de notre belle langue natale, pour former une histoire la plus compréhensible possible.
Ces mots sont en gras et expliqués en fin de texte.
Disclaimer : tous les personnages sont de Tolkien, mais (un peu) revus et corrigés
«Hallefessier ! Vil pleutre ! »
La roguerie d'Elrond augmenta quand il vit ses deux fils se pourchasser dans le couloir, la tignasse hurlupée, une épée en bois à la main. Il rognonna tout haut : à quel aliboron devait-il sa postéromanie antérieure, qui avait permis la venue de tels fauteurs de piaffes, qui faisaient naître des dragons et autres monstres à phantasmaisie grâce à leur ubéreuse imagination, pour le simple plaisir de se battre ? Ce n'était pas ça, la vraie guerre…
Il avait beau les vespériser pour les accoiser, Elladan et Elrohir, prenaient ses réprimandes pour des turlutaines sans importance et continuaient de plus belle. Quelle immanité ! Elrond ne demandait qu'à leur transmettre sa précieuse sapience, de peur que leur impéritie ne les entraîne vers une bissêtre, voire la malemort…
Le Semi-Elfe sortit sur le balcon, où le glacial aquilon masquait un peu les cris des jumeaux. La neige recouvrait tout et scintillait au soleil. Parcourant des yeux la vallée concolore, il y vit soudain une forme mouvante qui se rapprochait. Il n'était pas caliborgnon, mais il lui fallut un moment pour comprendre ce que c'était et alors, il descendit bredi-breda dans la cour.
« Bonjour, dame Gilraen, dit-il. »
Il ne l'avait jamais vue, mais sa vénusté était célèbre, même chez les Elfes.
« Monseigneur, je viens vous demander asile, répondit-elle d'une voix cacochyme. Et pour lui aussi. Il a besoin de protection. »
Elle entrouvrit son manteau et fit apparaître le sade visage d'un jeune enfant.
« Vous êtes les bienvenus, dit Elrond. »
Il réalisa soudain que les jumeaux s'étaient approchés sans bruit. Ils étaient couverts de riflades –Elrond se promit de régler ça à rémotis- mais leur calme était inhabituel.
« -Il a l'air d'avoir froid, remarqua Elrohir.
-Oui, et vous aussi, madame, ajouta Elladan. Venez, rentrez vite vous réchauffer !
-Nous protégerons votre enfant, vous pouvez compter sur nous ! assura Elrohir en brandissant sa petite épée en bois. »
Gilraen sourit malgré sa fatigue.
« Je vous remercie. Mon fils se nomme Estel. »
Elrond les regarda s'éloigner avec étonnement. Ce n'était pas leur genre d'être mirliflores… ou peut-être qu'il s'était tant emberlucoqué de leurs foucades qu'il avait oublié l'une des qualités les plus profondes et immarcescibles chez les Elfes : la compassion.
Mais peut-être changera-t-il d'avis en tombant nez à nez avec le dragon grandeur nature construit par les jumeaux… ou quand ce seront trois, et pas deux garçons qui parcourront les couloirs en criant…
Hallefessier : gueux
Roguerie : humeur rogue
Hurlupé : hérissé, ébouriffé
Rognonner : grommeler
Aliboron : homme ignorant qui fait le connaisseur
Postéromanie : envie d'avoir des descendants
Piaffe : braverie pour attirer l'attention
Phantasmaisie : apparence fantastique
Ubéreux : qui produit avec abondance
Vespériser : réprimander
Accoiser : rendre tranquille
Turlutaine : ce qu'on répète sans cesse lubie, manie
Immanité : cruauté monstrueuse
Sapience : sagesse
Impéritie : inhabileté, défaut d'expérience
Bissêtre : malheur, mésaventure
Malemort : mort funeste et cruelle
Aquilon : vent du nord
Concolore : qui est partout de même couleur
Caliborgnon : qui y voit mal
Bredi-breda : avec précipitation et confusion
Vénusté : grâce, élégance
Cacochyme : faible, languissant
Sade : agréable et gracieux
Riflade : blessure ne faisant qu'égratigner
A rémotis : à l'écart
Mirliflore : jeune homme qui fait l'agréable, qui cherche à briller
S'emberlucoquer : s'entêter d'une idée
Foucade : mouvement impétueux et désordonné
Immarcescible : qui ne peut se flétrir
