Prologue : Sur cet astre où la mort est tombée

-56 av BY

Le vaisseau cuirassé Jedi d'un métal brillant parfaitement ciré, emblème fière et fidèle de la République, Galactique se posa sur la petite Lune où les vestiges encore fumant de ce qui semblait être un laboratoire de haute technologie était resté longtemps invisible aux multiples regards de la Galaxie. Cet édifice pourtant sophistiqué qu'aucune oreille attentive n'avait entendu vibrer. Que même les sens des Jedis n'avaient su distingué avant ce jour. Avant que les cris de douleur qui y avaient résonné ne leur parviennent à travers la Force, empreint de désespoir, mais aussi de quelque chose d'autre qu'ils n'avaient pu identifier. Comme un appel, un signe.

C'était une Lune située dans l'Espace sauvage, au-delà de la Bordure Extérieur, dans ce système peu attirant pour les commerçants de toutes sortes qu'était Chrelythium. Peu s'y aventuraient. Il ne représentait aucun intérêt d'un point de vue politique et ses rares habitants n'en avaient cure. Peut-être était-ce d'ailleurs la raison pourquoi, sur ce satellite où la nature était endormie en permanence sous un filet de givre, un laboratoire tel que celui qu'avaient maintenant sous les yeux les deux Maîtres Jedis avait pu voir le jour et se développer.

Yoda parcouru de regard la végétation maigre, presque surpris que l'air ambiant soit à peu près respirable tellement le panorama semblait désolé. Même les étoiles semblaient plus pâles qu'à l'ordinaire dans l'espace infini qui s'étendait au-dessus de lui, témoins muets de tous ces drames qui avaient ravagés les différentes galaxies depuis le début des temps et les ravageraient à jamais, malgré tous les efforts de son Ordre pour maintenir la paix. Ou du moins, la ramener à un niveau convenable.

Ses yeux vifs malgré son grand âge s'attardèrent un instant sur la structure rocheuse qui semblait retenir dans un écrin le petit édifice qui n'avait, de toute évidence, pas été conçu avec un souci d'esthétisme quelconque. Probablement les grands vents qui balayaient parfois la surface de cette Lune avaient-ils servit à façonner cette colline semblable à des serres dans laquelle le laboratoire avait été encastré.

L'atmosphère brumeuse sur laquelle un vieux Soleil jetait une teinte violacée donnait au paysage une aura presque éthérée, colorant les murs autrefois blancs et lisses de reflets presque féériques, donnant aux ruines noircies qui étaient maintenant à portée du Maître Jedi un aspect séculaire alors qu'on devinait pourtant qu'il n'en était rien. La porte magnétique qui en avait protégé l'entrée gisait maintenant par terre devant celle-ci. Le métal avait été lourdement tordu par la déflagration qui avait détruit l'endroit.

Le Maître Jedi dont personne n'osait plus mettre en doute les capacités malgré sa petite taille s'arrêta, enjoignant son compagnon à faire de même. Il soupira et leva la tête vers l'homme chauve à la peau sombre qui lui avait emboîté le pas, l'air préoccupé:

-Y trouver, que croyez-vous que nous allons?

Mace Windu secoua la tête, sondant les entrailles du bâtiment pulvérisé par une source dont ils ignoraient l'origine.

-Nous avons été incapables d'émettre quelque supposition que ce soit, jusqu'à présent. Et je ne peux en formuler, même en cet instant. Je sens un relent de vie habiter l'endroit, mais il est faible. Très faible.

Cela remontait à quelques jours à peine. Une vision, une impression d'horreur avait envahi l'esprit de chaque Jedi : jeune comme vieux, puissant comme passif, attentionné ou non. Il y avait senti le chagrin, le tourment, le désespoir, chaque émotion que le côté obscur était capable de produire, exacerbées à leur apogée.

Puis, un étonnant paradoxe s'était opposé aux hurlements de douleur qui se répercutaient dans leurs esprits : un son cristallin semblable à un chant, un appel. Une mélopée inidentifiable dont l'auteur pouvait aussi bien être un homme qu'une femme, comme un chœur antique qui les appelait au loin, dans cet endroit reculé, au-delà de l'influence de la République, dans ce recoin de la Galaxie ignoré de tous. Ils y avaient vu la mort, un grand nombre de morts, mais aussi des vies qui tranquillement s'étiolaient, qui s'envolaient comme les pétales des fleurs l'automne venu. Ce chant les guidait vers eux, vers la source de sa mélodie, vers ses vies qui méritaient qu'on les sauve.

Mais on ne savait pas quoi d'autre on trouverait sur cette Lune qui ne portait aucun nom officiel, que les cartographes avaient parfois désigné comme Moonshine, l'Éclat lunaire, à cause de cette brume lavande qui l'enveloppait d'un aspect particulier. Les Jedis ne connaissaient alors que cet élément de son panorama, cet élément de ce que pouvait bien être cet astre où, pour une raison qu'ils savaient tous placée intentionnellement dans leurs esprits, il pressait d'intervenir.

Ce fut d'ailleurs la principale raison pourquoi le Grand Maître Jedi Yoda choisit lui-même de faire ce voyage dont l'insu était plus qu'incertaine, accompagné seulement d'un des Maîtres Jedis en qui il avait le plus confiance au jugement. Bien qu'honoré de ce choix, Mace Windu, à son habitude, n'en avait rien laissé paraître, et s'était focalisé sur cette mission dont il ignorait jusqu'au but, connaissant seulement la motivation. Cet écho implacable qui avait envahi ses pensées et qui les hantaient depuis.

Le trajet jusqu'à cette destination voilée par les mystères avait été silencieux. Perdus dans le souvenir du léger chaos qui avait suivi cet évènement inexplicable : les pleurs des plus jeunes novices, les questionnements aussi divers que difficiles à définir des Chevaliers Jedis; ce signal que la Force même semblait les pousser à suivre, ce sentiment d'oppression puis cette certitude qu'il était de leur devoir d'agir, les deux Maîtres Jedis avaient tenté de se préparer du mieux qu'ils le pouvaient. Méditant pendant la plus grande partie du voyage. Ils avaient analysé, se repassant mentalement en boucle, les quelques images que cet appel leur avait fait entrevoir.

L'environnement. Les murs d'un blanc immaculé, aseptisé comme on en retrouvait dans les hôpitaux renommé de chaque système solaire. En arrière-plan, des individus de diverses races en sarraus de coupe sévère consultaient des données diffusées par un holocron. La langue affichée était inconnue de toute base de données. Peut-être un code secret. Ou un dialecte qu'on avait cru éteint depuis longtemps. Yoda avait pu retrouver des similitudes avec certaines langues parlées il y avait jadis par des sociétés florissantes aujourd'hui éteintes, mais rien de concluant. L'image était trop brève, trop diffuse pour qu'on en tire quoi que ce soit de concret à ce propos. Tout autour de ces scientifiques affairés étaient éparpillés des instruments de haute technologie comme peu de laboratoires pouvaient se vanter d'en posséder. Ce qui rendait l'ensemble encore plus invraisemblable, presque onirique.

L'improbabilité que de telles installations aient existées pendant un temps indéfini sans que la République Galactique en ait eu connaissance relevait d'un miracle irréel et inquiétant.

Et, à peine la certitude était-elle admise que cette image que la Force leur transmettait était bien celle d'un laboratoire, sentait-on l'image se déformer, exploser sous une déflagration qui, sans même qu'on ne la voit, retentissait de puissance et de colère. Que pouvaient bien être les évènements qui s'étaient réellement déroulés sur la petite Lune? D'où provenait cet appel à la mélodie angoissante et belle à la fois qui avait guidés les deux Maîtres Jedis jusque-là?

Cet amas de métaux en ruine d'où s'échappaient une multitude de câbles électriques crépitants encore alimentés par les nombreuses éoliennes placées sur le sommet de la crête rocheuse leur en révélait bien peu et ne répondait à aucune question, en amenant même maints autres.

Se tournant vers Mace, Yoda hocha résolument la tête. Le temps des questionnements étaient terminés. Ils partaient maintenant quérir les réponses qu'ils étaient venus chercher, résoudre ce mystère opaque. Avec un regard sombre, mais résolu, Mace emboîta le pas au Grand Maître, n'ayant encore aucune théorie tangible quant à ce qu'ils trouveraient au sein des décombres.

À peine avaient-ils franchi ce qui demeurait du seuil autrefois étanche qu'ils sentirent les relents encore brûlant du Côté Obscur, de cette énergie sombre imparable qui avait dévasté tout sans discernement dans une zone étrangement restreinte et contrôlée. Ils s'arrêtèrent, tous deux ébranlés par ces ondes négatives qui les assaillaient, par la rémanence des cris et de la souffrance qui éclataient partout autour. Comme s'ils avaient pénétré dans une poche temporelle où la mémoire de ce moment resterait à jamais gravée.

Se concentrant au-delà de ces impressions négatives qui semblaient vouloir le ronger, se laissant guider par la Force, Yoda observa un instant ces murs entièrement carbonisés de l'intérieur; les équipements qui n'étaient plus que des squelettes de métal dépouillés de toute fonction, de tout espoir de reprendre l'usage qu'ils auraient pu accomplir auparavant; les droides, autant médicaux que destinés à des fonctions plus scientifiques ou quotidiennes, avaient subi le même sort.

De chaque côté, des masses informes qui avaient dû être des bureaux destinés à la consultation documentaire et aux expériences de base se comptaient par dizaine. Devant eux, un long corridor laissait encore deviner les structures qui devaient avoir délimité des salles de recherches avancées compte tenu des instruments impressionnants qui gisaient par terre, désarticulés et carbonisés dans leur totalité. Et, des occupants des lieux, il ne restait aucune trace, comme s'ils avaient été sublimés lors de la tragédie pour laquelle le laboratoire avait été le théâtre.

Tout était noir, taché par des cendres dont la cause était plus que jamais imprécise.

Dans ce cadre désolé, Mace Windu, l'âme opprimée par les dizaines de hurlements réclamant d'être secouru, ces complaintes anonymes qui résonneraient à jamais sous ce ciel aux étoiles blafardes, entrepris de rechercher quelque holocron encore utilisable que ce soit. Une caméra de surveillance, une ancienne étude, n'importe quoi qui aurait pu les mettre sur la piste de cet évènement insensé, de la raison pour laquelle il avait tant affecté les membres de l'Ordre. Pourquoi l'avait-il ressenti avec une telle intensité?

Alors que son compagnon s'affairait à peut-être découvrir un quelconque indice de ce que, même en son épicentre, ils ne parvenaient pas à comprendre, Yoda s'avança lentement dans le long corridor qui s'enfonçait jusque sous la colline semblable à des griffes qui s'effritait légèrement au-dessus des débris de ce laboratoire dont ils ignoraient encore tout il n'y avait pas si longtemps. Il laissait la Force l'envahir, éclairer chacun de ses pas, l'amener là où il devrait se rendre.

Il pénétra dans la toute dernière pièce au fond du bâtiment, la seule dont les murs étaient demeurés un tant soit peu intacts. Il resta là quelques instants, à observer ce spectacle aussi étonnant qu'incompréhensible, interdit. Ne sachant comment interpréter les informations qui lui étaient délivrées, comment analyser ce qui s'offrait à son esprit pourtant aguerri.

Tout en refermant la main sur la multitude d'éclats du seul holocron dont la possibilité d'être reconstitué n'était pas perdue, Mace sentit le trouble qui avait surgit dans l'être même du Grand Maître Jedi, une émotion aussi rare qu'inquiétante. Ramassant en vitesse ce qui devait être le seul indice utilisable récolté lors de cette mission, il saisit son sabre-laser d'une main et en fit jaillir le redoutable flux mauve qui lui était propre, se sentant immédiatement rassuré au contact du métal que l'air hiémal de la Lune avait refroidi. Il se précipita vers l'endroit où se tenait Yoda, toujours concentré sur cet objet et son contenu insensé.

Là, au centre de ce qui devait avoir été une grande salle médicale, flottant dans ce qui semblait être une immense cuve à bacta, un minuscule être dont le corps était relié à des récepteurs de toutes sortes pour la plupart non fonctionnels flottait, endormi. Une fissure le long du réservoir faisait tranquillement s'échapper le liquide qui, on aurait dit, reproduisait le liquide amniotique de la plupart des mammifères. Le petit être ne bougeait pas, insensible aux stimuli extérieur, luttant pour sa propre survie. Ses signes vitaux étaient faibles. C'était cet infime éclat de vie que Maître Windu avait décelée avant d'entrer dans l'établissement aux allures cataclysmiques.

S'approchant lentement de cette étrange découverte, Yoda sentit lien ténu avec la Force émaner de ce qu'il constata être une fillette qui ne devait pas encore avoir un an. Ses longs cheveux pâles, d'une couleur indéfinissable à travers le liquide d'un blanc-bleuté, flottaient autour d'elle. Tout comme sa peau qui semblait presque transparente dans cette cuve éclairée faiblement par un néon blafard placé sous le socle. Ses traits étaient ceux d'une humaine, mais ils laissaient transparaître une grâce atypique, une noblesse singulière chez une enfant si jeune.

Derrière lui, le Maître Jedi reconnu pour ses capacités de combattants exceptionnelles, laissa ce don particulier qu'il possédait évaluer ce miraculé improbable qui flottait devant eux dans cette cuve de survie. Il ferma les yeux, laissant se présenter à lui les diverses points critiques qui morcelleraient la vie de ce petit être qui ne semblait pas encore avoir vu la lumière du jour, qui ne semblait pas encore être né tout-à-fait. C'était un parcours tranquille où de multiples embranchements semblaient tous mener vers le même flot paisible, tel une rivière se jetant dans l'océan, des flots doux et tempérés. Toutefois, déviant de ce courant serein, un immense point de rupture, qu'il n'était possible d'emprunter qu'à partir de quelques minces embranchements qui se brisaient à mesure qu'il ne les détaillait, disparaissant à jamais dans le gouffre des possibles qui ne seraient plus, un point de rupture qui semblait absorber toute lumière, condamner ce petit être au pire des destins, rompait le tableau en apparence si pur.

-Que ce soit elle qui ait provoqué tout ceci, croyez-vous cela possible? Questionna Yoda, voyant son compagnon passer une main songeuse sur son crâne chauve.

Ce dernier réfléchit un instant, parcourant une dernière fois le dédale des points de rupture qui jalonnait l'avenir potentiel de cette enfant avant de se prononcer d'un ton résolu, mais où perçait un certain dépit de ne pouvoir apporter qu'une réponse teintée à cette interrogation :

-Je ne sais pas. Malgré le fait qu'elle soit le seul survivant de tout l'édifice, il n'émane pas d'elle une puissance suffisante pour provoquer ce genre de désastre d'une quelconque façon que ce soit. Et je ne vois en elle aucune possibilité de menace immédiate. Je ne sais pas ce qu'est exactement cette enfant, mais elle ne représente pas à mes yeux une menace immédiate. Toutefois, il n'est pas à exclure que ce qui a provoqué ce drame ne l'ait pas délibérément gardée en vie.

-Pourquoi la garder en vie, dans quel but, croyez-vous, l'a-t-on fait?

Yoda avait déjà pu élaborer plusieurs théories à ce propos, mais il ne souhaitait en considérer aucune avant d'avoir entendu l'opinion de Mace Windu qui lui répondit avec la même réserve qu'il avait manifestée plus tôt :

-Si ce n'est qu'on a l'impression qu'elle est l'objet d'une étude scientifique, je ne sais que penser.

-Ou le résultat de cette expérience, peut-être, est-elle…

Oui, cette possibilité n'était pas à exclure. Rien dans la pièce ne permettait de déterminer clairement quel en avait été l'usage, ni le but.

-Agir vite, nous devons, trancha le vénérable Maître en observant le liquide quitter petit à petit le bassin par la fissure qui avait commencé à s'agrandir. Laisser un être vivant d'apparence innoncent mourir, nous ne pouvons pas. L'amener au Temple et décider avec le Conseil, voilà la solution envisageable.

Il approcha ses doigts griffus du panneau de contrôle presque entièrement arraché qui contrôlait difficilement les divers éléments encore en marche du bassin, arrêtant son geste à mi-chemin. Un petit écriteau numérique dont l'énergie faiblissante y affichait le texte avec juste suffisamment de clarté pour le lire.

-Qu'y a-t-il? s'enquit son confrère en voyant le geste du Maître Jedi soudain se suspendre.

-Le nom de l'expérience dans laquelle cette enfant a été utilisée, je crois avoir trouvé. À moins, que son propre nom, ce soit…

«Naitama»… Dans un ancien dialecte dont le petit extraterrestre à la peau olive connaissait les bases rustiques ce mot signifiait plus ou moins «Ange blanc.» Comme tous les autres éléments qu'ils avaient décelés sur cette Lune, cette information ne vint que s'ajouter à l'immense énigme édifiée par l'ensemble. Il soupira à nouveau. Quelle folie avait porté les desseins des scientifiques qui avaient œuvré dans ces contrées reculées de l'Espace sauvage? Quelles expériences si inadmissibles qu'ils ont dû fuir toute civilisation s'y sont déroulées?

Qu'était cette petite fille? Ils devaient la ramener au Temple Jedi. C'était le seul endroit où ils possédaient la technologie nécessaire pour être en mesure de répondre à cette question. Peut-être…

Yoda activa les touches de la cuve à bacta afin d'en déclencher l'ouverture et libérer le petit être dont il avait pris la peine de vérifier les signes vitaux sur le petit écran un peu brouillé par les flammes qui l'avaient vraisemblablement léché de près. Ils étaient stables. Faibles, mais stables.

Soudain, il fut frappé d'une impression désagréable. Il observa à nouveau les signes vitaux. Ce n'était pas ceux d'un humain en traitement, mais plutôt ceux d'un embryon au dernier stade de développement sur le point de voir le jour. Comme si cette fillette n'était pas encore née, qu'elle s'apprêtait à le faire. Si cet édifice avait servi à procéder à des expériences génétiques illégales, cela aurait expliqué à la fois son emplacement géographique et la présence de ce petit être baignant dans un semblant de liquide amniotique.

Le Maître Jedi appuya sur le bouton qui déclencha le mécanisme de vidange de la cuve. L'état précaire de l'instrument fit se déverser une grande quantité de liquide par terre, mais il était encore suffisamment fonctionnel pour que le minuscule corps soit déposé délicatement au fond du réservoir, recueilli par une cavité qui semblait avoir été modelée à cet effet. Les tubes se désunirent doucement les uns après les autres et le masque respiratoire qui l'avait alimentée en oxygène jusque-là fut le dernier à se détacher, révélant la respiration un peu difficile de celle qui aurait probablement dû compléter sa croissance dans ce réservoir, mais dont le destin avait jugé autrement.

Jetant sa cape sur l'être frêle et grelottant à la peau si pâle qu'elle semblait iridescente, Mace Windu l'enveloppa chaudement avant de la lover au creux de ses bras. On avait l'impression qu'elle continuait à dormir, cette fillette plus grande qu'un nouveau-né, mais qui en avait tous les aspects si ce n'avait été de ses longs cheveux argentés encore trempés du liquide gluant qui l'avait vu grandir.

-Nous devrions partir d'ici, Maître Yoda. Probablement cette enfant est-elle la chose la plus près d'une réponse que nous obtiendrons sur ce qui s'est passé ici.

-Une grande réceptivité en la Force, en elle, je ressens, murmura presque Yoda. Mais son avenir, entièrement caché est…

Le petit être émis un son semblable à un gémissement, une plainte étouffée.

-Nous devons faire vite, pressa Mace Windu en jetant un regard soucieux à l'enfant presque immobile. Je ne crois pas qu'elle survivra très longtemps si on ne lui administre pas des soins médicaux rapidement.

Quittant prestement la Lune désolée, les deux Jedis, toujours silencieux, tentant de trouver un sens à ce qu'ils avaient vu là, s'installèrent sommairement pour le voyage de retour qui prit bien peu de temps. L'urgence de cette minuscule vie menacée les pressait d'obtenir une intervention plus approprié que les kits médicaux disponibles sur le cuirassé aussi élégant que rapide.

Les résultats qu'ils obtinrent lors des jours qui suivirent leur retour sur Coruscant -alors que la fillette fut prise en charge par des droïdes médicaux dignes de ce nom qui lui permirent bientôt de faire tout ce qu'un bambin d'une année était en mesure de faire- ces résultats plongèrent le Grand Maître Jedi dans une réflexion difficile. Une réflexion qui devait le conduire à une décision à laquelle il ne pouvait porter aucune certitude. Une décision dont il ignorerait les conséquences jusqu'au moment où elles surviendraient. Bonnes ou mauvaises.

Le mystère s'épaississait chaque jour un peu plus autour de la miraculée de cette Lune dans le système Chrelythium.

Les premières analyses sanguines révélèrent que celle qu'on avait baptisée Naitama Moonshine, faute de ne posséder aucune autre indication en ce sens, possédait un taux déjà impressionnant de midi-chloriens. Toutefois, un autre test, à peine quelques jours plus tard, montra que le taux avait cru quelque peu. Quelques jours plus tard, la même constatation eu lieu. C'était la première fois qu'un tel phénomène était répertorié dans les archives Jedis et aucune explication ne pouvait y être apportée.

Puis, les données concernant son génome furent apportées à Yoda alors qu'il méditait la bonne décision à prendre concernant la jeune Naitama. Alors qu'il les détaillait avec une surprise mitigée, confirmant certains de ses doutes, mais en creusant d'autres, Mace Windu entra dans la petite pièce plongée dans la pénombre et s'assied sur un banc en face de son vieil ami, le visage soucieux, lui-aussi.

-Que nous dit l'analyse génétique? s'informa-t-il d'un ton neutre.

-Humaine, Twi'lek, Togruta, même des gènes Zabraks… Posséder un ADN aussi métissé que ne l'est la Galaxie, elle semble. Mais, en plus grande proportion, partage-t-elle celui des Diathims et d'une autre race inconnue.

-Les Diathims, répéta Windu, songeur. Cela explique son apparence. Mais elle ne possède pas les ailes qui leurs sont caractéristiques. Probablement le mélange des gènes a-t-il annulé celui-là. Mais là n'est pas la question. Les analyses de l'holocron que nous avons ramené et que les équipes informatiques ont tenté de remettre en état n'ont pas révélé beaucoup, mais on a tout de même pu en extraire une donnée intéressante. Selon toute vraisemblance, les expériences qui avaient lieu dans ce laboratoire concernaient la Force directement.

Yoda rendit à son collègue un regard soucieux.

-Et la fonction de notre jeune protégée, dans ces expériences, nous ne connaissons pas et ne connaîtrons probablement jamais.

Il s'interrompit, fixant un instant le vide devant lui.

-Que faire, devons-nous? Aucun danger, elle ne semble représenter. Réceptive en la Force, elle est. La prendre comme novice, devrions-nous? Malgré ses origines nébuleuses? Malgré le drame de l'endroit où créée, elle a été?

Ses iris jaunes semblaient plus assurés lorsqu'il les leva à nouveau vers Mace Windu qui ne l'avait pas quitté des yeux et avait analysé ses paroles pour arriver à la même conclusion :

-Ce n'est qu'une enfant en très bas âge. Elle démontre tous les signes typiques des jeunes destinés à suivre la voie de la Force. Et je crois, que si nous suivons son évolution au sein du Temple Jedi, nous serons plus à même de la guider vers la lumière. Je crois possible qu'un jour elle serve les intérêts de la République. Nous ne savons rien de ce laboratoire où elle fut conçue, pas plus que nous connaissons ceux qui y ont été impliqué ou le sont encore. Nous ne pouvons l'abandonner dans un quelconque orphelinat où ses créateurs risqueraient de vouloir la retrouver et risqueraient de pouvoir conclure cette expérience obscure. Ici, au Temple, en tant que novice, en tant que Jedi, elle pourrait s'épanouir dans le côté lumineux et nous pourrons garder un œil sur ce qu'elle devient. Si quoi que ce soit risquait de mal se passait, nous pourrons le prévenir.

-Avec vous, mon ami, d'accord, je suis, opina Yoda.

Ainsi, Naitama Moonshine, novice dont on ignorait jusqu'à la race exacte, à laquelle on ne révéla les origines inexplicables que bien plus tard, rejoignit les rangs des Jedis.

Le Grand Maître Jedi lui rendit visite, dans le petit centre où les apprentis trop jeunes pour suivre les cours de base étaient recueillis avant de commencer leur apprentissage en bonne et due forme. Lorsqu'il rencontra ce regard intelligent, semblable à une émeraude bordé d'or, lorsque la petite fille encore frêle, mais joyeuse lui sourit, il sut qu'il avait pris la bonne décision malgré toutes les incertitudes, toutes les zones grises qui la cernaient de toutes parts.