Et voici le début de la 5ème partie !

Attention, lecteur, si tu es tout nouveau, tout neuf, tu ne vas rien comprendre si tu n'as pas lu les parties précédetentes :) (bien entendu, elles sont aussi sur ce site)


Juillet

Dimanche

Les mains sur les hanches, Sarpédon observe la cellule vide. Les chaînes qui retenaient le Titan prisonnier pendouillent contre le mur, brisées.

Elles ne servaient pas à grand-chose de toute façon, souffle Hadès dans la tête du rouquin.

- Depuis combien de temps programme-t-il son évasion, selon toi ?

Qui sait ? Enfermé, Père a eu tout le temps d'y penser.

Le jeune Seigneur des Enfers soupire et quitte la cellule, avant de retourner devant les portes grandes ouvertes du Tartare, poste déserté par Arès. Cerbère couine, ses trois têtes couchées sur le sol, penaud d'avoir laissé le prisonnier s'enfuir. Sarpédon pose sa main, qui fait à peine la taille de l'une des truffes, sur le museau le plus proche et le lui tapote gentiment :

- Ce n'est pas de ta faute. Tu as fait de ton mieux.

Et c'est vrai. Percevant l'évasion, le gros chien des Enfers a accouru jusqu'ici pour retenir le fuyard. Malheureusement, Cronos a réussi à l'esquiver et l'a assommé pour avoir la paix. En arrivant, Sarpédon a trouvé le gardien canin inconscient devant le Tartare grand ouvert.

Pour lui montrer qu'il ne lui en veut pas, le rouquin lévite jusqu'au dos de Cerbère et s'installe sur le poil chaud :

- Amène-moi au niveau d'Elysion.

Immédiatement, le chien à trois têtes se redresse sur ses pattes, les oreilles bien droites, et se met en route, fier de promener son Maître.

Zeus est diminué, souffle Hadès. Si Père l'attaque, je doute qu'il s'en sorte cette fois.

- Je sais. Il faut trouver un moyen de lui donner de l'Energie s'il en a besoin.

Et retrouver Arès et le Dragon des Mers.

- Tu te soucies de Kanon ? Voilà qui m'étonne de toi.

Le rouquin devine le sourire d'Hadès.

Ce gosse a réussi à contrôler Poséidon et, avec lui, a failli détruire le monde. Ça mérite des applaudissements.

- J'ai d'ailleurs perçu la téléportation de Poséidon sur l'Olympe, avec Albafica. Zeus doit être au courant, à l'heure qu'il est.

Sûrement. Il faut les rejoindre et décider de la suite.

- C'est ce que je compte faire. A ton avis, où est Cronos à présent ?

Va savoir. Père sait circuler entre les dimensions, il a dû trouver refuge dans l'une d'entre elles.

Sarpédon caresse machinalement les poils chauds de Cerbère sous ses doigts, conscient du non-dit qu'il partage avec son Oncle des Enfers. Il se sent en partie responsable de l'enlèvement de Kanon et de l'évasion du Titan. Ces dernières semaines, il a relâché sa vigilance pour s'amuser avec Aiacos. Et Hadès, tout aussi curieux de voir le monde à travers ses yeux, ne l'en a pas empêché. A présent, ils n'ont pas d'autres choix que de réparer cette erreur d'inattention, en espérant que les conséquences ne seront pas trop importantes.


Les sourcils froncés, le regard rivé au sol, Rhadamanthe ne cesse de faire les cent pas dans le salon de la Villa. De temps à autre, malgré l'absence de vibreur et de sonnerie, il saisit le téléphone dans sa poche et contemple l'écran qui reste désespérément vide de nouvelles. Ce manque d'informations est à la fois source de frustration et de soulagement. Tant qu'il ne sait rien, il y a toujours l'espoir de retrouver Kanon… et s'il reçoit des nouvelles, elles pourraient être mauvaises…

Pour la douzième fois, le Spectre d'Hadès consulte son portable, constate encore une fois qu'il n'a ni sms, ni appel manqué, et le remet dans sa poche. En soupirant, il tourne la tête vers Luco, au chevet d'Asmita toujours allongé dans le canapé. Le médecin veille sur le Chevalier inconscient à qui il a pu donner les soins nécessaires. Les jours du Guerrier Aveugle ne sont, à priori, plus en danger. Toutefois, Luco préfère rester jusqu'à son réveil, par mesure de sécurité. Son patient s'est frotté à un être profondément dangereux et il n'a pas hésité à faire savoir à Rhadamanthe que sa survie tient à une chance inouïe, pour ne pas dire à une chance quasi miraculeuse.

Le Guerrier d'Athéna est donc hors de danger, c'est déjà une bonne nouvelle. Qu'en est-il du cas de Kanon ?

Rhadamanthe reprend ses cent pas en se massant le front, soucieux.

Arès. J'en suis sûr, c'est lui qui a été décrit par Albafica.

Le Spectre serre rageusement les dents en se souvenant des nombreuses fois où il a invoqué le Dieu de la Guerre, le priant de l'aider à sortir victorieux des batailles livrées au nom du Roi de Crète. Des prières entendues et exaucées quasiment à chaque fois. Il s'arrête pour regarder par la fenêtre, mais le paysage de l'Ile lui est invisible, ses pensées sont entièrement focalisées sur Arès et sur Kanon.

Où sont-ils ? Je ne sais même pas où chercher.

Extrêmement nerveux, le Juge se pince l'arrête du nez en soufflant un grand coup.

J'ai toujours fait de mon mieux pour protéger les miens. D'abord, j'ai guerroyé pour Minos, pour son pays et une fois en Enfer, le Seigneur Hadès et Dame Pandore nous ont réquisitionnés. Depuis, je me bats pour mon Maître et je protège, du mieux possible, Aiacos, Minos, Sarpédon… Ma famille et mes devoirs sont ce qu'il y a de plus important. Et il y a Kanon au milieu. Est-ce trop égoïste de vouloir le garder à mes côtés ?

Ses doigts pianotent machinalement sur son téléphone et composent le numéro de Sarpédon qui sonne dans le vide.

Allez ! Avec toutes ses capacités, son Cosmos et celui de Maître Hadès, il doit bien pouvoir m'aider un minimum, me donner une piste à explorer ! Réponds !

Trois fois, il appelle son plus jeune frère. Trois fois, il tombe sur le répondeur.

Merde !

Dans un geste de rage, le Spectre jette son téléphone dans le fauteuil le plus proche, arrachant un sursaut de surprise à Luco de la Dryade. Ce dernier lance un regard inquiet en direction de son Supérieur, incapable de faire autre chose que de le regarder tourner en rond comme un Dragon en cage. Il ne peut pas aider son Maître, malgré toute sa bonne volonté.

A ce même instant, le Chevalier d'Or de la Vierge est animé d'un frémissement qui parcourt tout son être. Immédiatement, Luco baisse les yeux sur lui. Asmita grimace en portant une main à son front, cependant sa voix est ferme lorsqu'il prend la parole :

- Kanon est en Enfer, Rhadamanthe…

Immédiatement, le Juge vient à son chevet, les mains tremblantes de nervosité :

- Quoi ? Comment tu… ?

- L'inconscience du corps n'est pas forcément celle de l'esprit, j'en ai profité pour le chercher.

Par réflexe, la Dryade ouvre la bouche avec pour objectif de faire remarquer que c'est dangereux et que ça aurait pu l'affaiblir, toutefois il préfère finalement la refermer sans rien dire. Sans son intervention, son Maître ne saurait toujours pas où chercher le Dragon des Mers.

Une certaine émotion de reconnaissance passe sur le visage habituellement fermé de Rhadamanthe :

- Tu aurais dû te reposer mais…merci.

Ses doigts se crispent sur l'accoudoir, ses sourcils se froncent à nouveau :

- A ma connaissance, Kanon ne maîtrise pas le Huitième Sens, s'inquiète-t-il. Le simple fait de rester trop longtemps en Enfer pourrait le tuer !

Le Guerrier d'Athéna acquiesce :

- Derrière la grande Cascade de Sang, il y a une cavité creusée dans la roche. Il est là-bas…

- Merci !

Il récupère son téléphone et sort précipitamment du salon. Tout en se dirigeant vers sa chambre pour enfiler son Surplis, le Chef des Armées compose le numéro de Saga. Il tombe directement sur le répondeur du Grand Pope et laisse un message :

- Asmita a repris connaissance, il m'a indiqué où trouver Kanon. Je pars immédiatement le chercher.

Le Juge raccroche. Il ne lui faut que quelques secondes pour revêtir son Armure Noire et se transposer aux Enfers.

Adossé contre le mur, dans le couloir devant la chambre entrouverte de Rhadamanthe, Aiacos soupire. Avec son ouïe fine, il a tout entendu de la conversation avec Asmita. Laisser partir son grand frère tout seul ne le rassure pas vraiment, surtout depuis qu'il sait qu'Arès est mêlé à cette histoire.

Prévenons Sarpy de ce qu'il se passe ici.


D'une main agacée, Saga repousse ses cheveux en arrière et les maintient, empêchant le vent de les lui rabattre sur la figure. Satisfait, il s'accroupit ensuite au bord de la Source Miraculeuse.

C'est donc ça…

Il a entendu parler de cet endroit par Sage et Hakurei, néanmoins il n'avait pas encore eu l'occasion de venir le voir de ses propres yeux. Cette Source est précieuse, les aînés préfèrent la préserver et ne l'utiliser qu'en cas d'extrême nécessité. Située au sommet d'un ancien volcan éteint depuis des millénaires, la Source est un bassin naturel, creusé dans la roche et rempli d'eau. Celle-ci est d'une transparence sans égale, tant et si bien que l'on pourrait même croire qu'il n'y a rien si le vent n'était pas là pour rider sa surface. Cependant, un détail intrigue le Grand Pope tandis qu'il plisse les yeux en observant les alentours.

Comment se remplit le bassin ?

Aucun filet d'eau ne coule pour l'alimenter et rien ne semble indiquer que l'approvisionnement se ferait sous la surface.

Soit je ne le vois pas, soit ne j'y connais rien, soit quelque chose m'échappe.

C'est peut-être aussi pour cette raison que mes prédécesseurs évitaient d'en prélever, la quantité disponible est probablement limitée.

Du bout des doigts, Saga touche l'onde.

Ouh, c'est froid !

Machinalement, il recule sa main et l'observe, constatant avec une certaine surprise qu'il ressent une légère impression de bien être là où sa peau est mouillée.

En tout cas, on dirait que ça marche.

Sans plus perdre de temps, le Grand Pope ramasse la bassine à côté de lui et la remplie jusqu'à la moitié en espérant que ce sera suffisant. Il ne lui faut ensuite que quelques minutes pour rebrousser chemin et rejoindre le portail dimensionnel laissé ouvert.

- Et voilà !

- Merci, c'est super ! s'exclame Shion toujours au chevet du mystérieux Chevalier.

Saga ferme le portail, puis dépose la bassine près de son camarade. Ce dernier s'empresse d'imbiber un linge avec l'eau apportée. Sentant son portable vibrer, le Grand Prêtre s'en saisit machinalement.

C'est Rhadamanthe ! Pourvu que…

Fébrile, il se précipite sur la messagerie. Les quelques mots du Spectre le frustrent tout en le réjouissant. Il réécoute tout pour être sûr de ne rien avoir omis.

- Tout va bien ? s'enquiert prudemment le Chevalier du Bélier.

- Asmita a repris connaissance.

- Excellente nouvelle !

- Et Rhadamanthe sait où est mon petit frère, il ne m'a pas dit où mais a précisé qu'il allait le chercher.

Shion cligne des yeux et s'efforce d'afficher un sourire rassurant adressé à son camarade dont le visage est chiffonné.

- Ça va aller. Je n'aime pas beaucoup les Juges des Enfers, mais Rhadamanthe a l'air d'être le plus sérieux et le plus stable. Il fera certainement de son mieux pour récupérer Kanon.

Machinalement, Saga acquiesce sans l'écouter vraiment. Le message date d'une vingtaine de minutes, le Spectre a peut-être déjà trouvé son frère à présent.

Et pourquoi Arès ? Par Athéna, pourvu que cet idiot ne se soit pas amusé à provoquer le Dieu de la Guerre. Les autres disent que non, mais…

- Tu devrais retourner auprès d'Asmita en attendant, conseille Shion d'une voix douce. En plus, en étant à la Villa, tu auras les nouvelles beaucoup plus vite.

- Et toi ? Tu vas t'en sortir, tout seul ? Veux-tu que je demande à Dokho de te rejoindre ?

- Inutile de le déranger, sourit le Chevalier, il s'entraîne en Chine et il ne pourrait pas faire grand-chose pour m'aider. Je peux me débrouiller, surtout que grâce à l'eau Miraculeuse, ça devrait être plus facile de soigner cet homme.

Le regard du Grand Pope tombe sur l'inconnu toujours inconscient.

- Retourne près d'Asmita, répète encore son camarade. S'il y a du neuf, je te tiens immédiatement au courant.

Hésitant encore quelques instants, Saga finit par se ranger à son avis et prend congé, avant de repartir pour la maison d'Albafica et des Juges.