La soeur du fantôme,
par Evert Khorus
Chapitre 1: Le dernier voyage
-Harry, Harry! Tu m'écoutes ? demanda Ginny. Je voulais juste te dire que je reviens dans un instant... le temps de rendre Coq à Dean...
Harry la regarda longuement comme s'il ne comprenait pas la langue qu'elle utilisait, et tenta d'acquiescer. Il la contempla tandis qu'elle s'éloignait et vit les pans de sa robe de sorcière disparaître dans un des compartiments du Poudlard Express. Ginny avait beaucoup changé ces derniers temps et elle semblait avoir perdu ses airs de petite fille. Elle était vraiment très belle, songea Harry. Moins que ne l'aurait été Hermione si elle avait survécu, mais Ginny avait cependant un charme inimitable: la légère expression insolente qui s'épanouissait sur son visage et ses cheveux roux (presque aussi indisciplinés que ceux de Harry!) lui donnaient un petit air rebelle qui avait toujours attiré les garçons de tout âge à Poudlard. De Michael Corner à Malfoy, en passant par Dean, Neville ou Ernie Macmillan, Ginny n'avait pas manqué durant les six années qu'elle avait passé à Poudlard, de s'attirer des regards de convoitise de la part des garçons ou de jalousie chez les filles. IL y avait cependant un jeune homme qui n'avait pas succombé à son charme ensorceleur, et Harry eut un mince sourire en songeant à l'amour que lui avait voué Ginny en secret (de polichinelle certes, mais quand même!) durant ses premières années à l'école. Aujourd'hui, Harry ne voyait plus une gamine en elle, mais une jeune femme, une jeune femme qui aurait pu l'attirer et qu'il aurait convoité s'il n'avait pas été tourmenté par ce qui s'était passé durant les dernières semaines...
Le regard de Harry se reporta sur la cage vide d'Hedwige, et après un soupir, il entreprit de traîner sa lourde valise jusqu'à un compartiment libre. IL avança péniblement dans les étroits couloirs du train et il remarqua au passage que comme souvent depuis qu'il était à Poudlard, les regards se posaient sur lui avec insistance. Mais ces regards avaient changé. Harry n'y lisait plus de la curiosité, ni du mépris ou de la colère, ni même de la peur comme cela avait pu être le cas auparavant... en fait, on pouvait déceler dans tous les regards qui glissaient sur lui de la pitié... ET pour Harry, c'était plus insupportable que tout ce qu'il avait pu subir auparavant. Jamais il n'aurait pensé faire un jour l'objet de la pitié des autres élèves...
Harry se réfugia dans le dernier compartiment du wagon et avant qu'il ait eu le temps de hisser sa grosse valise dans le porte-bagages, plusieurs personnes avaient pénétré dans le wagon. IL regarda avec incrédulité tous ceux qui venaient s'installer auprès de lui et reconnut enfin Ginny, Dean, Seamus, Justin Finch-Fletchley, Ernie, Susan Bones, les frères Crivey, Euan Abercrombie, et à sa plus grande surprise, Pansy Parkinson et Goyle. Pour Harry, il était encore surprenant de voir que les derniers évènements avaient enfin fini par rapprocher les maisons, y compris Serpentard pour une fois! Harry leur adressa un vague sourire et une fois que tout le monde fut entassé dans le compartiment, il leur fut reconnaissant de ne pas le forcer à prendre part à la conversation, qui d'ailleurs ne l'intéressait pas le moins du monde... ils discutaient d'une des plantes carnivores du Professeur Chourave, une liontule, qui avait failli faire ses dents sur la main de Colin Crivey. Neville aurait sûrement aimé être là pour en discuter avec eux...
Le train circulait rapidement parmi les collines, et Harry songea qu'il y a bien longtemps, il aurait imaginé que son dernier voyage dans le Poudlard Express se déroulerait d'une toute autre manière. I l aurait sans doute pensé aimer fêter avec Hermione et Ron la fin de leur scolarité. Peut-être auraient-ils joué aux échecs et ils auraient sûrement dévoré des Chocogrenouilles en essayant d'imaginer ce que l'avenir leur réservait. Ils auraient aussi savouré l'intense plaisir d'être enfin débarrassés de Malfoy, Rusard et Rogue. Mais même une telle pensée ne suffisait pas à satisfaire Harry. IL aurait mille fois préféré devoir supporter indéfiniment ses trois ennemis les plus féroces si seulement il avait pu vivre auprès de ceux qu'il aimait...
Mais Ron et Hermion n'étaient pas là et ne seraient plus jamais là... Harry resta perdu dans ses pensées tout le long du voyage. Il était triste mais cependant rassuré par la présence de tous ses anciens camarades autour de lui, ces adolescent qui étaient venus dans ce compartiment pour le soutenir moralement une dernière fois... Même Ginny participait à l'allégresse en riant à toutes les plaisanteries et en jouant avec Pattenrond comme le faisait Hermione avant. Parfois, Ginny lançait à Harry des regards inquiets, mais elle se retournait bien vite vers les autres pour ne pas laisser transparaître un quelconque malaise. Harry admirait sa force: pas une seule fois elle n'avait fait montre de la moindre faiblesse. Elle était restée sereine en apparence, même si Harry avait pu sentir parfois qu'elle hurlait intérieurement, et elle avait refoulé ses sentiment au plus profond d'elle-même pour soutenir Harry. Ce dernier s'était senti lâche et abject d'accepter le soutien de Ginny alors qu'elle avait elle aussi grand besoin d'aide... Cependant, il n'avait pas eu la force de l'aider et plus personne ne semblait à même de le faire. Harry s'était senti si seul, si démuni que la seule pensé de l'appui de Ginny l'avait égoïstement réconforté. Ginny avait toujours été près de lui ces derniers jours, mais dans quelques minutes, le train arriverait en gare de King's Cross et Harry serait à nouveau seul face à son tourment.
Il essaya de chasser bien loin ces tristes pensées et reporta son attention sur la bataille explosive qui opposait Dean et Pansy. Cette dernière, voyant que Harry se tournait vers eux, lui adressa un large sourire encourageant, puis se reconcentra sur sa partie de cartes. Harry esquissa un sourire puis se renfrogna: non seulement il allait se replonger dans la solitude pour une période indéterminée, mais il ne verrait plus jamais la plupart des personnes présentes. Celles-ci n'avaient pas toujours été ses amis: Justin l'avait accusé il y a bien longtemps d'une tentative d'attaque, Seamus l'avait pris pour un fou et un menteur il y a deux ans, et Pansy et Goyle l'avait détesté ouvertement pendant des années... Cependant ils étaient maintenant tous unis pour reconstruire la société des sorciers, et pour Harry, chacun d'entre eux représentait une parcelle de sa vie à Poudlard... La fin de la septième année était vue par les élèves plus jeunes comme la fin d'un long périple semé d'embûches telles les montagnes de devoirs, les mauvaises notes, les retenues et les examens, mais maintenant que la joyeuse période de Poudlard touchait à sa fin, Harry se rendit compte que cela signifiait aussi une brutale séparation avec d'anciennes connaissances... la fin d'une agréable période, la fin de l'insouciance et de l'enfance en quelque sorte... Il aurait tout donné pour revenir à ses anciens soucis, et par exemple s'inquiéter comme en cinquième année des « T » qu »il aurait pu avoir en potions...
Le Poudlard Express s'arrêta enfin et les élèves, surexcités par le début des vacances, se précipitèrent sur le quai. Harry s'attarda quelque peu pour ranger les quelques livres dans lesquels il avait cherché en vain de la distraction durant le voyage. IL vit par la fenêtre les septièmes années se dire au revoir bruyamment, se promettant de garder contact, et il devina que certains le cherchaient du regard, mais il demeura caché derrière le rideau, en attendant que le quai devienne plus calme. Au bout d'un certain temps, il sentit quelqu'un lui prendre délicatement la main. Harry se retourna et vit Ginny le regarder avec douceur.
-Allez viens Harry... ils sont tous partis, il n'y aplus personne sur le quai... Le Poudlard Express n'a pas le pouvoir de te ramener dans le passé, ni même de te ramener à l'école désormais. Il faut que... que... que tu tournes la page et que tu ouvres une nouvelle période de ta vie...
Harry ne dit rien, et c'est en serrant fort la main de Ginny dans la sienne qu'il passa de l'autre côté de la barrière...
