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D'un rapide mouvement du poignet, Harry Potter raya le nombre 37 inscrit sur le mur de sa chambre. Un an auparavant, il n'aurait jamais osé écrire quoi que ce soit autre part que sur une feuille à carreaux, du moins pendant les grandes vacances, quand il était au 4, Privet Drive. Son oncle et sa tante l'auraient sans doutes privés de nourriture pendant une semaine. Mais cette année tout était différent, il allait partir de cette horrible maison et n'y reviendrait plus. Harry avait préparé son habituelle grosse valise et attendait impatiemment l'arrivée de Mrs Weasley, prévue à midi le surlendemain. Une autre différence par rapport aux années précédentes était qu'il n'irait pas à Poudlard, l'école de sorcellerie. Il avait décidé de partir à la recherche des quatre horcruxes de Voldemort restants, des objets dans lesquels un sorcier peut enfermer des parties de son âme. Ensuite, Harry détruirait Voldemort. Il se sentait assez confiant, mais sa gorge se nouait tout de même chaque fois qu'il y pensait. Harry aurait tout donné pour n'être qu'un sorcier comme les autres. Heureusement, ses meilleurs amis Ron et Hermione avaient décidé de le suivre dans sa quête.

Harry s'ennuyait, il suivait le mouvement régulier de la trotteuse de sa montre, chaque seconde le rapprochant un peu plus du moment où il serait enfin libéré. Quand il la quitta enfin des yeux, ses pensées se tournèrent vers Ginny, la sœur de Ron. Il s'était séparé d'elle à la fin de l'année précédente pour la protéger, pour que Voldemort ne s'attaque pas à elle pour l'atteindre lui, « l'Elu ». La prophétie l'avait désigné comme le seul capable de tuer le Seigneur des Ténèbres, et il comptait bien accomplir sa mission. Il sentit les larmes lui monter aux yeux et serra de toutes ses forces le faux horcruxe trouvé à la fin de sa sixième année à Poudlard. Sans qu'il ne s'en rende compte, l'image de Dumbledore se superposa à celle de Ginny. Albus Dumbledore, le directeur de Poudlard, assassiné par Rogue, un professeur de l'école mais aussi un mangemort au service de Voldemort.

De rage, Harry jeta le médaillon à travers sa chambre. Il avait toujours eu une profonde aversion envers Rogue, mais il n'avait pas pensé qu'elle puisse atteindre un tel niveau de haine. S'il le croisait, il le tuerait. Il réservait le même sort à Drago Malefoy, un élève de son âge qu'il avait toujours détesté et qui avait fait rentrer plusieurs mangemorts dans Poudlard un mois plus tôt.

Harry ferma les yeux et se calma. Quand il les rouvrit, il se leva et se dirigea vers la porte de sa chambre qu'il entrouvrit doucement. Il tendit l'oreille et, n'entendant aucun son, sortit sur le palier. Il s'avança prudemment jusqu'aux escaliers et jeta un œil par-dessus la balustrade. Un long bruit se fit entendre. Il retint son souffle et attendit. Au bout de quelques secondes, il comprit que c'était Dudley, son porc de cousin, qui ronflait si bruyamment. Harry redirigea son attention vers le rez-de-chaussée. Tout avait l'air désert, son oncle et sa tante devaient être couchés aussi. Il regarda sa montre et son cœur bondit dans sa poitrine ; elle indiquait vingt-trois heures vingt-deux. Dans un tout petit peu moins de quarante minutes, il allait avoir dix-sept ans. Mais personne dans cette maison ne les lui fêterait, peut-être même que personne ne s'en souviendrait. Il descendit les escaliers, en faisant attention de ne pas trébucher, puis, quand il atteignit la dernière marche, il sauta par-dessus et s'assit par terre.

Les secondes s'écoulaient en silence, le regard de Harry passait de sa montre à la pendule de l'entrée. Plus que vingt minutes. Jamais il ne s'était sentit si heureux et si effrayé en même temps. Plus que dix minutes. Et si quelque chose arrivait, une chose à laquelle il n'avait pas pensé. Et si un détraqueur entrait chez lui. Après tout, Dumbledore l'avait bien dit, la protection magique que la maison procurait à Harry disparaîtrait dès qu'il serait majeur chez les sorciers. Il se leva brusquement et se posta près de la fenêtre. Il scruta la rue, éclairée par quelques lampadaires. Il ne voyait pas très bien, une brume assez compacte était tombée pendant la nuit. Soudain, une des lumières s'éleva d'un lampadaire et fila vers le trottoir situé de l'autre côté de la rue. Harry avait déjà vu un phénomène similaire. Un peu avant sa cinquième année à Poudlard, il avait vu Alastor Maugrey, un des membres de l'Ordre du Phénix, se servir d'une sorte de briquet pour aspirer des lumières et ainsi ne pas être vu par les moldus. Mais Harry était certain que ce n'était pas Maugrey qui se trouvait dans la rue. Prit de panique, Harry se rua vers le palier du premier étage, sans prendre garde au bruit qu'il faisait, et couru jusqu'à la porte de sa chambre qu'il ouvrit à la volée. De sa main gauche il envoya son oreiller à travers la pièce et attrapa sa baguette magique, pendant que sa main droite cherchait le feutre noir avec lequel il barrait sur son mur les nombres correspondants aux heures restantes avant son départ. Ses mouvements étaient extrêmement coordonnés. Il raya d'un trait le nombre 36, puis lâcha le feutre sans prendre le temps de le re-capuchonner. Il se redirigeait déjà vers la porte quand il regarda l'heure affichée sur son réveil. Minuit moins trois. Il changea sa baguette de main et s'engouffra sur le palier.

Harry tomba nez à nez avec son oncle Vernon. Le petit homme qui lui faisait face semblait sur le point d'exploser, son visage posé sur un cou presque inexistant était devenu si pourpre que l'on ne remarquait plus sa grosse moustache noire. Quand il vit Harry, baguette en main, il vira rapidement au blanc.

- Harry, tu ne vas quand même pas m'attaquer, gémit-il, je… je suis ton oncle.
- Pousse-toi, cria Harry avec fureur, réveille tante Pétunia et allez vous cacher dans la chambre de Dudley ! Et n'en sortez surtout pas avant que je vous l'aie autorisé !
Vernon Dursley n'était pas le genre d'homme à se laisser faire, mais voyant que Harry avait pointé sa baguette sur lui, il jugea préférable de lui obéir. Harry redescendit les escaliers et sauta les dernières marches. Il ouvrit la porte du placard sous l'escalier et se mit derrière, de façon à ce qu'elle se trouve entre lui et la porte d'entée. Il pouvait ainsi voir cette dernière en se baissant au niveau de la serrure. Sa baguette serrée dans la main, il attendait. Plusieurs séries de bips stridents retentirent. Harry reconnut le son particulier du réveil de sa tante. Il avait tout juste eu le temps de se demander pourquoi elle l'avait programmé pour qu'il sonne à minuit quand la poignée de la porte se baissa. Elle resta comme figée quelques secondes puis reprit sa position normale. Harry perçut une voix très peu audible murmurer quelque chose puis un déclic se fit entendre et la poignée se rabaissa. Cette fois, la porte s'ouvrit et une forme se dessina dans l'embrasure de la porte. Harry n'arrivait pas à définir ce que c'était, il faisait trop sombre dans la maison et il n'y avait plus aucune lumière dehors. Il plissa les yeux mais ne vit pas mieux.
Soudain, le hall fut baigné de lumière. A travers le trou de la serrure, il reconnut une des membres de l'Ordre du Phénix qui étaient venus le chercher l'an passé pour l'amener au 12, Square Grimmaurd. Le bout de sa baguette répandait une intense lueur. Harry jugea qu'il pouvait s'annoncer sans crainte.

- Je suis là, dit-il, derrière la porte.
Harry attendit que la femme ait baissé sa baguette avant de se mettre à découvert. Elle souriait.

- Tu te souviens de moi Harry ?
- Oui, bien sûr, mais euh… Je n'ai pas mémorisé votre nom…
- Oh, ce n'est rien. Je m'appelle Hestia Jones, l'Ordre ma demandé de veiller sur toi jusqu'à ce que Molly vienne te chercher. Maintenant que tu peux utiliser ta baguette, j'en profiterai pour t'apprendre quelques sorts.
- Merci beaucoup ! s'enthousiasma Harry.
- Au fait, que faisais-tu caché derrière cette porte ?
- Hein ? Euh, je… J'ai vu un lampadaire s'éteindre, j'ai pensé que quelqu'un attendait minuit pour m'attaquer… Dumbledore m'a dit l'année dernière que la maison ne me protègerai plus…
- C'est exact, mais d'après nos sources, l'armée de Tu-Sais-Qui est calme en ce moment.
Il y eut un long silence pendant lequel Harry et Hestia se dévisagèrent. Soudain, une porte grinça à l'étage et Hestia pointa sa baguette vers le palier. Elle regarda Harry, qui lui fit comprendre par un signe de tête qu'elle pouvait baisser sa baguette. La voix de Pétunia leur arriva aux oreilles.

- Harry , appela-t-elle de sa voix perçante, Tout va bien ?
- Oui, oui, ça va, répondit-il du tac au tac, vous pouvez descendre, venez dans le salon.
Harry se dit que les Dursley avaient dû débattre car ils ne descendirent que cinq minutes plus tard. Quand ils rentrèrent dans le salon, Harry eut la surprise de sa vie : Dudley et l'oncle Vernon tenaient chacun un cadeau tandis que la tante Pétunia portait à bout de bras un gâteau à la fraise. Les trois Dursley arboraient un sourire banane, du moins jusqu'à ce qu'ils voient Hestia. Mais aucun d'eux ne s'arrêta avant d'avoir atteint le canapé où ils se laissèrent tomber lourdement. Harry n'en croyait pas ses yeux. Il ouvrit et ferma la bouche à plusieurs reprises sans qu'aucun son n'en sorte puis se contenta finalement de sourire. Ce fut Dudley qui parla le premier.
- Joyeux anniversaire, dit-il en tendant son cadeau à Harry.
Harry le prit délicatement, en murmurant une sorte de remerciement gêné. Aucun son ne vint troubler l'ouverture du cadeau. Après avoir déballé le paquet, Harry laissa échapper un cri de surprise.

Une plume blanche trônait au milieu du beau papier cadeau rouge. Dans la maison, le temps semblait figé, personne ne bougeait. Harry avait les yeux rivés sur le premier vrai cadeau que les Dursley lui faisaient. Certes, une plume n'aurait jamais été un présent convenable pour un Moldu, ni d'ailleurs pour un sorcier, les plumes sont trop courantes dans le monde de la magie pour faire offices de cadeaux, mais pour Harry tout était différent. Il avait comprit dès qu'il avait vu la plume qu'elle avait appartenu à sa chouette, Hedwige, disparue deux semaines auparavant. Harry sentit des larmes couler le long de ses joues et les essuya d'un revers de manche. Des dizaines de questions se bousculaient dans sa tête mais il n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche, l'oncle Vernon lui tendait déjà le second cadeau. Celui-ci était beaucoup plus volumineux et son papier était doré.
- Qu'est-ce que c'est ? demanda Harry tout en l'ouvrant.
- Tu vas voir, un peu de patience.
La voix de l'oncle Vernon était beaucoup moins dure qu'à l'ordinaire, mais cela devait sans doute lui demander un effort surhumain car ses paupières étaient agitées de tics. Harry eut enfin raison des gros morceaux de ruban adhésif et tira d'un coup sec le papier. En voyant le cadeau, il eut envie d'éclater de rire mais se retint. Il prit à deux mains le balai qui avait servit à balayer la cuisine pendant quatre ans et le montra de plus près à Hestia. Un sourire se dessina sur le visage de la jeune femme, elle avait vraisemblablement comprit que les Dursley ne connaissaient rien à la magie.

- Il est vraiment magnifique, murmura-t-elle, j'ai toujours rêvé d'en avoir un aussi beau.
L'oncle Vernon se redressa et dit à l'attention de Harry :
- Evité de l'utiliser avant ton départ, je préfèrerai que les voisins ne te voient pas dessus.
- D'accord, répondit Harry, merci beaucoup, c'est mon plus merveilleux anniversaire.
Et il était sincère, il n'aurait jamais imaginé, même en rêve, recevoir un jour un cadeau des Dursley. Sa tante prit la parole, elle avait l'air gênée.
- Vernon, je croyais que tu voulais aider Dudlynouchet à monter sa voiture à essence…
L'interpellé ouvrit la bouche pour répliquer mais changea d'avis en voyant le signe de tête peu discret de sa femme.
- C'est exact, Dudley, on monte.
Ils se levèrent en même temps, saluèrent Hestia et sortirent rapidement du salon, laissant la tante Pétunia se ronger les ongles, seule sur son canapé. Après s'être raclée la gorge, elle dit d'une voix tremblante :
- Harry, il faut que je te parle.
- Euh… Hestia peut rester ?
La tante Pétunia dévisagea la sorcière puis fit un signe de tête presque imperceptible que Harry prit pour un « oui ».
- Tout d'abord Harry, je tenais à m'excuser pour tous ce que nous t'avons fait subir ton oncle et moi depuis que nous t'avons recueilli.
- Et Dudley dans tout ça ? Il est aussi fautif que vous !
Sa réponse avait été cinglante, Pétunia sursauta légèrement.
- Oui, Dudley aussi… Mais j'avais une bonne raison pour faire ce que j'ai fait…
Harry lui coupa une seconde fois la parole, il s'énervait.
- Tu croyais vraiment que j'accepterai tes excuses ? Et celles de ces deux…
Il se tut. La tante Pétunia s'était mise à pleurer, l'implorant du regard. Compatissante, Hestia alla s'asseoir à côté d'elle et lui dit de continuer. Un regard à Harry fit aussi comprendre à ce dernier qu'il devait arrêter de couper la parole à sa tante s'il tenait à la sienne. Pétunia essuya ses larmes, inspira une grosse bouffée d'air et reprit.

- Je… Voilà, quand ta mère et moi étions jeunes, elle devait avoir neuf ans environ, j'ai reçu une lettre de Poudlard.
- Toi ?
Les yeux de Harry étaient si exorbités qu'on aurait pu croire ceux de Dobby, l'ancien elfe de maison des Malefoy.
- Oui, reprit-elle comme si elle en avait honte, mais j'ai refusé de m'y inscrire, j'avais peur que tes grands-parents ne me prennent pour un monstre.
Elle marqua une courte pause et Harry en profita pour regarder l'heure. Il était presque minuit et demi, mais le jeune homme ne ressentait aucune fatigue, c'était la première fois qu'il avait une réelle discussion avec sa tante et il devinait par l'attitude de celle-ci qu'elle s'apprêtait à lui révéler d'importantes informations.
- Je ne l'avais dit à personne, ni mes parents, ni ma sœur n'étaient au courant. Et deux ans plus tard, voilà que ta mère reçoit sa lettre et qu'elle accepte d'entrer dans cette école. Au terme de sa première année, nos parents étaient si fiers d'elle que j'ai regretté mon choix. Mais j'étais trop orgueilleuse pour l'admettre totalement. Un an plus tard, j'ai emprunté son hibou pour envoyer une lettre au directeur, lui demandant de m'intégrer dans son collège, mais il a refusé… C'est à ce moment là que j'ai détesté ma sœur, la magie et les rêves…
Harry était bouche-bée, jamais il ne lui était venu à l'esprit que sa tante aurait pu être une sorcière, comme sa mère. Il voulait en savoir plus.

- Et ?

- J'ai quand même continué à correspondre avec le directeur, il savait que je ne m'entendais plus du tout avec ta mère et essayait de m'aider.
- Alors, pourquoi n'étiez vous pas d'accord pour que j'aille à Poudlard ?

La tante Pétunia ne répondit pas tout de suite, elle semblait réfléchir à la question, et à la meilleure façon d'y répondre. Harry regardait le salon. Cette salle ne lui avait jamais parue aussi calme. Il brisa le silence.
- Alors ?

- Excuse-moi, reprit Pétunia, je pensais à certaines choses… En fait, quand tes parents sont… morts, c'est le directeur de Poudlard qui t'a déposé devant chez nous. Vernon n'a pas mauvais fond, mais il a trouvé que cet homme avait nu extrême culot : il m'avait éloigné du monde de la magie mais nous y projetait littéralement en te confiant à nos soins. J'avais raconté à ton oncle tous mes problèmes, et il compatissait, il a détesté la magie avec moi. La lettre qui nous avait été destinée l'a mis dans une rage folle, et il a décrété qu'il voulait bien t'accueillir mais qu'il faudrait oublier toute idée de magie.
- Vous m'avez accepté de bon cœur ? s'écria Harry, Je n'en ai pourtant pas l'impression…
- Nous t'avons aimé comme Dudley jusqu'à tes trois ans… C'est à cet âge que les choses ont commencées à se passer bizarrement. Dès que tu t'énervais ou que tu avais peur, tu faisais de la magie, sans même t'en apercevoir… Au début, ton oncle et moi ne nous sommes pas trop alertés, jusqu'à ce que tu mettes le feu à la chambre de Dudley parce qu'il t'avait prit un jouet. Nous avons envoyé une lettre au directeur pour qu'il te reprenne, mais il nous a forcé à te garder, nous menaçant des pires choses.

Harry en avait assez entendu, il avait comprit et sa curiosité l'avait abandonné.

- Je… Je vous excuse, toi, oncle Vernon, et Dudley…

Cette déclaration mit les deux femmes assises sur le canapé dans un état proche de l'hystérie. Elles pleuraient en se serrant dans leur bras. Harry était gêné d'être la cause de ces larmes et détourna le regard. Les femmes ne réussirent à se contrôler qu'une trentaine de minutes plus tard. Il était déjà une heure quinze du matin quand Hestia s'adressa à Harry, la voix encore tremblotante.

- Harry, il est tard, tu devrais aller te coucher, demain, je vais t'enseigner quelques sortilèges qui te permettront de te protéger si tu subis une attaque.

L'adolescent ne répondit rien, il se leva et embrassa sa tante sur la joue, ce qui replongea les deux femmes dans une crise de pleurs. Sans attendre, il se dirigea vers sa chambre. Il ne prit même pas la peine de se déshabiller, il ramassa juste son oreiller et s'étendit sur son lit, posa ses lunettes sur sa table de nuit et ferma les yeux.

Le lendemain, quand il se réveilla, Harry se demandait si toute cette histoire n'avait pas été un merveilleux rêve. Il tendit le bras vers ses lunettes, les mit et se tourna vers son mur. Quand il vit que le chiffre 36 était barré, il sauta de son lit et exécuta une petite danse qui aurait fait mourir de honte n'importe quelle personne censée. Il regarda son réveil et sursauta, ce dernier indiquait quatorze heures douze. Il ne souvenait pas avoir fait une telle grasse matinée chez son oncle et sa tante. Il attrapa son feutre, dont la mine était étrangement sèche, puis raya les nombres 35 à 22. Dans vingt-deux heures, Molly Weasley viendrait le chercher et il rejoindrait le Terrier. Il avait hâte de voir Ron et ses frères. Une petite voix dans sa tête lui fit remarquer qu'il avait encore plus envie de voir Ginny. Il tourna la tête, comme pour nier ce fait, et son regard se posa sur la cage vide d'Hedwige. Un picotement dans les yeux lui fit comprendre qu'il allait pleurer s'il ne tournait pas la tête. Il se demandait où sa chouette, une de ses plus fidèles amies, sa confidente, avait bien pu passer. Il ferma les yeux et attendit. Des voix s'élevèrent du rez-de-chaussée et il se rendit compte qu'Hestia était toujours là. Il changea de vêtements et descendit dans la cuisine, où une grande discussion battait son plein. La sorcière était assaillie de questions sur la magie et elle devait poser sa tasse de café toutes les dix secondes pour pouvoir répondre. Quand Harry entra, les Dursley lui firent un grand sourire. Il s'attablait quand Hestia fit apparaître un paquet sur la table, sous les coups d'œil intéressés de Dudley et Vernon. Dire qu'en une nuit, la magie était passé du sujet tabou au phénomène le plus remarquable.

- Encore joyeux anniversaire, lui lança-t-elle.
Harry arracha le papier bleu et en sortit un livre intitulé « Tout ce que doit savoir un futur Auror ». Il se leva d'un bond et embrassa Hestia sur la joue. Il regarda rapidement la table des matières et fila au chapitre « Les sortilèges à maîtriser ». Une longue liste se présenta à ses yeux et il fut déçu de ne pas connaître la moitié des sorts. En voyant sa tête, Hestia le rassura.
- Tu sais, la plupart ne demandent pas un très haut niveau, tu les apprendras assez simplement. Si tu veux manger, ne t'en prives pas, nous, nous avons terminé. Après, va faire ta valise et rejoins-moi dans le salon, je vais t'apprendre quelques-uns uns de ces sorts.

- Je n'ai pas faim du tout, je vais aller faire ma valise.

Sur ce, Harry sortit en trombe de la cuisine avec son livre à la main. Il alla chercher les deux cadeaux laissés la veille dans le salon puis monta faire ses bagages. Il jeta tout ce qui lui semblait utile dans sa valise, car même s'il ne retournait pas à Poudlard cette année, il lui fallait avoir à portée de main le matériel nécessaire à ses recherches. Il pensait habiter l'ancienne maison de son parrain et transplaner pour les déplacements longues distances. Quand il en arriva au tri des diverses lettres qu'il avait reçues depuis le début des vacances, il ne sut lesquelles jeter et finit par toutes les prendre. Il relut rapidement le faire-part du mariage de Fleur et Bill, la lettre contenant la date pour passer le permis de transplaner et quelques autres lettres de ses camarades. Il s'attarda particulièrement sur une étrange lettre de Dean Thomas, un élève de Gryffondor qui partageait le même dortoir que lui. Le garçon parlait d'un projet top-secret mené par son père. Harry sourit et la rangea dans sa valise avec les autres.

Après avoir remplit sa valise, il passa un coup de balai par terre, pour inaugurer son cadeau, et fut soudain prit de colère. A ses pieds se trouvait le faux Horcruxe de R.A.B., celui pour lequel Dumbledore était mort, car, Harry en était certain, l'ancien directeur serait encore vivant s'ils n'avaient pas tenté une expédition hors de Poudlard. Et cet objet, le jeune sorcier avait failli l'oublier. Il le glissa dans un de ses poches, refit un dernier tour de sa petite chambre e sortit sa baguette. Il la pointa vers la valise et jeta un sortilège de locomotion. De sa main libre, il prit la cage vide et descendit le tout dans le salon. Les rideaux étaient tirés et les Dursley étaient venus assister au spectacle.

- Te voilà enfin, soupira Hestia, j'ai cru que tu t'étais endormi.

- Non, non, je suis prêt.

- Alors c'est partit, j'ai pensé qu'on devrait commencer par un sortilège permettant de stupefixier un solide à l'endroit exact où il est.
- Je sait déjà stupefixier…
- C'est un peu différent, si tu stupefixe un homme sur un balai, il tombera, alors qu'en utilisant le sortilège que je vais t'enseigner, l'homme resterait en l'air. La formule est simple, mais le geste est délicat.
Elle sortit de sa poche une petite balle en mousse.
- Regarde bien.
Elle lança la balle en l'air et pointa sa baguette vers cette dernière.
-Spatio Paralysis ! cria-t-elle en dessinant en l'ai un cercle avec une croix verticale dedans.
La balle s'arrêta en plein vol. Les Dursley applaudirent de toutes leurs forces. Harry se demandait toujours s'ils étaient dans leur état normal. Il poussa quand même un cri d'admiration. Hestia redirigea le bout de sa baguette vers la petite sphère de mousse.

- Spatio Derylis !
L'objet retomba mollement par terre. Harry avait hâte de maîtriser ce sort. Il passa une bonne partie de la journée à lancer la balle en l'air et à la ramasser un ou deux mètres plus loin. La difficulté résidait dans le fait que le cercle devait être parfait. Les Dursley n'avaient pas fait de commentaires désobligeants et Harry les en remerciait intérieurement. Enfin, vers dix-huit heures, la balle se paralysa. Le garçon leva les bras sous les sifflements admiratifs d'Hestia, les applaudissements de Dudley, les petits cris perçants de la tante Pétunia et les yeux éberlués de l'oncle Vernon. Il réussit à libérer la balle du premier coup. Hestia lui dit de s'entraîner encore un peu. Ils passèrent à table à dix-neuf heures, car les gargouillements de l'estomac de Dudley s'entendaient à cinq mètres autour du jeune adolescent en surpoids. Après le dîner, Harry était tellement fatigué d'être resté quasiment immobile qu'il monta se coucher sans essayer d'apprendre d'autres sorts. Il s'endormit presque instantanément, en ayant juste eut le temps de barrer les nombres qui devaient l'être sur son mur.

Il se réveilla le lendemain aux alentours de dix heures, avec le souvenir d'un rêve étrange. Il avait rêvé que Kreattur, l'elfe de maison dont il avait hérité, avait rejoint Bellatrix Lestrange et lui avait révélé des informations sur l'Ordre du Phénix. Harry chassa ce mauvais rêve de sa tête, Kreattur travaillait aux cuisines de Poudlard et très peu de personnes le savaient. Il chaussa ses lunettes et descendit dans le salon.

Il entra tranquillement dans la salle et n'eut pas le réflexe d'inspirer. Mrs Weasley l'étouffa presque tant elle le serrait fort. Quand elle desserra enfin son étreinte, Harry suffoquait. Il inspira plusieurs fois puis dit bonjour aux Dursley qui regardaient la femme rousse assez bizarrement. Il salua aussi Hestia qui somnolait sur le canapé et s'adressa à l'arrivante.

- Je ne vous attendais que pour midi, il y a un problème ?
On sentait dans sa question un peu d'appréhension. Molly Weasley le rassura.

- Je ne suis pas sûre, mais Minerva à demander un rassemblement de l'Ordre, alors je suis venu te chercher maintenant. A moins que tu ne préfère que je vienne te chercher demain ? elle avait chuchoté la fin de sa phrase et fit un clin d'œil à Harry.
- Je suis prêt à partir, répondit-il, Hestia, merci pour le livre.
- Pas de quoi, grogna l'interpellée d'une voix pâteuse.
Harry se tourna alors vers les Dursley et les remercia chaleureusement pour ces dernières journées passées en leur compagnie. Sans qu'il n'ait le temps de comprendre ce qui lui arrivait, la tante Pétunia courut vers lui et le prit dans ses bras, de la même façon que Mrs Weasley l'avait fait une poignée de secondes auparavant. Pétunia s'écarta et Dudley s'avança, d'un pas mal assuré. Harry lui serra la main de bon cœur. Il fit de même avec l'oncle Vernon puis se tourna vers la mère de Ginny.
- Au fait, comment êtes vous venue ? Pas en transplanant j'espère, je n'ai toujours pas mon permis…
- Regarde un peu autour de toi mon garçon, répondit-elle avec un sourire plein de malice.
Ce n'est qu'à ce moment que Harry remarqua ce dont elle parlait. Dans la fausse cheminée ronflait un feu bien réel. Le garçon tendit la main vers Mrs Weasley qui déposa au creux de sa paume un peu de poudre de cheminette.

- Tu n'es pas si bête que ça, lui dit elle, tu fera un bon Auror.

Et elle éclata de rire. Harry se sentit rougir, sourit rapidement et se marcha vivement vers la cheminée. Il jeta la poudre dans les flammes qui se colorèrent d'une teinte verte. Il entra dans l'âtre, fit un dernier signe de main aux Dursley et se concentra sur sa destination.

- Le Terrier !

Il voyait des dizaines de salons défiler sous ses yeux, il se sentit tourner sur lui-même et finalement, atterrit face contre terre sous les regards amusés de Ginny et Ron Weasley.