Salut à tous ! Bienvenue à vous ! J'espère que ce qui suit saura vous plaire.

Je compte poster le dimanche, si Rowling le veut. A plus !

Poly.

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La Rentrée de Septembre

Aujourd'hui on est le premier Septembre. Et je n'ai vraiment aucune, aucune, aucune envie de me lever. Et pourtant ça doit bien faire une heure que je suis réveillée, avec le boucan que fait mon frère dans la pièce d'à côté. Et je suis affreusement tentée par l'odeur des gaufres qui monte de la salle à manger. Je peux presque entendre le beurre fondre dessus. Pschuuiiiii… Mais, plus fort que tout, mon désespoir me cloue au lit, comme le meilleur des arguments. Aujourd'hui on est le premier Septembre, et mon frère s'apprête à faire sa rentrée en première année. A Poudlard. J'aimerais tellement être à sa place !

Poudlard, c'est comme des vacances, mais encore plus longues que l'été. Il y a la magie, d'abord. C'est là-bas que mes parents ont lancé un sort pour la première fois de leur vie. Ce sera aussi le cas pour Scorp. Et pour moi, dans deux ans. Deux ans !

Et puis, il y a les dortoirs, les amis au bout du couloir, les salles communes accueillantes, les repas pas du tout équilibrés… Finies les infusions d'orties de Maman quand on est malades ! C'est pour ça que c'est génial, Poudlard.

Mon frère a une de ces chances… Pourquoi ce n'est pas moi l'aînée ? Pourquoi ce n'est pas moi qui me moque de lui et lui envoie des piques toutes les quinze secondes ?

Je m'enfonce dans mon lit en entendant sa porte s'ouvrir. Il sort de sa chambre et les pas s'éloignent.

Et dire qu'il a failli ne jamais y aller, à Poudlard ! Il avait déjà dix ans que sa magie ne s'était toujours pas manifestée. Papa en était malade. Maman lui faisait avaler des tonneaux d'orties broyées.

Et un matin on s'est retrouvés inondés, il y a eu de l'eau jusqu'au pied de mon lit, à cause de la tuyauterie qui avait explosé parce que Môssieur Scorpius avait fait un cauchemar. Ce bon à rien. C'est une insulte, ça, non ?

Pardon.

Pardon.

Pardon.

Je ressors la tête de sous mes couvertures et jette un regard circulaire à ma chambre. Elle a été ensorcelée pour ressembler à l'intérieur d'une tour. Toute ronde et avec un plafond en cône dont on ne voit pas le bout. C'est ma Tour de Poudlard à moi. La nuit, le plafond se couvre d'étoiles et je n'ai qu'à ouvrir les yeux pour m'imaginer allongée dans l'herbe du parc du château.

On m'appelle d'en bas. C'est bien la première fois qu'un elfe n'essaie pas de forcer mon cocon pour me tirer de mon lit. Mes parents ont dû comprendre que je suis dans une mauvaise passe. Seulement, maintenant qu'on m'attend, il faut bien que je me lève. Je n'ai aucune envie de me faire punir…

Je rejette mes couvertures et saute sur mes deux jambes. Une nuée de taches noires m'empêche aussitôt de voir, mais j'arrive à saisir à tâtons le peignoir posé sur mon fauteuil. Quand mon léger mal de tête est parti, je me dépêche de quitter ma chambre, tentant d'enrouler mes cheveux sur eux-mêmes pour dégager mon visage. Je remarque aussitôt l'imposante malle de mon frère – comment la rater ? elle a au moins triplé de volume en une nuit. Il transporterait un serpent de mer avec ses œufs que ça ne m'étonnerait pas. Je me faufile dans les escaliers en contournant tant bien que mal l'obstacle.

Quand j'arrive dans la salle à manger, l'odeur est encore plus délicieuse. Elle se mêle à celles des marmelades et du lait chaud.

Scorpius est assis à la place de Papa, et Maman lui verse du jus d'orange.

« Tiens tiens, l'autre blairelle s'est levée ! » lance-t-il avec un sourire taquin.

Il me traite de Poufsouffle. Classique. Cette insulte n'est qu'une simple petite pique de rien du tout sans valeur, en fait. Puisqu'une cousine de Maman est allée à Poufsouffle.

Je m'assieds en face de lui, à la place de Maman. La table serait assez longue pour que deux filles de ma taille s'y allongent, les pieds de l'une contre la tête de l'autre. Je le sais parce que j'ai déjà essayé. En général nous mangeons dans la cuisine, tous les quatre, mais la table de la cuisine ne serait pas assez résistante pour supporter tous les plats de ce matin.

Et je n'ai d'yeux que pour l'assiette de Scorp où s'empile une dizaine de gaufres chaudes et craquantes… Et moelleuses à l'intérieur…

Il ne va pas m'en passer.

Maman fait le tour de la table pour m'embrasser, puis tresse mes cheveux d'un coup de baguette. Je ne quitte pas les gaufres du regard alors qu'elle approche de moi un plat de je ne sais quoi.

« Mange, on va être en retard » me glisse-t-elle.

Je jette un coup d'œil à la montre à son poignet. Il est neuf heures.

« On a le temps, affirme Scorpius en découpant ses gaufres en tout petits morceaux.

— Où est Papa ? » je demande à Maman qui s'est mise en devoir de remplir mon assiette.

Un petit sourire étire ses lèvres.

« Il dort » répond-elle.

Tu m'étonnes. Papa est rentré hier d'un voyage de six jours pour son travail. Il a promis à Scorp d'être là pour le mettre dans le train, mais vu qu'il a toujours besoin de quinze heures de sommeil…

Je me force à croquer dans un toast trempé dans la sauce des haricots blancs, et mon appétit refait surface. Scorpius grogne dans son coin.

« Maman, dis à ma sœur de manger proprement, s'il-te-plait. Elle va me faire vomir le sixième jour le plus important de ma vie. »

Les cinq premiers jours étant celui de sa naissance, ceux de ses deux vols sur un balai avec Papa, celui qu'il réserve pour ses A.S.P.I.C. et le dernier, il n'a jamais voulu le dire.

« Maman, dis à mon frère que ça ne changerait rien du tout qu'il soit malade ou non, il est déjà tellement pâle qu'il effraierait un fantôme.

— Les fantômes ont toujours peur, réplique-t-il.

— Ils n'ont 'eur que parche que 'u es là. »

Il n'a pas dû comprendre puisque je mâche des pêches au sirop. Il lève les yeux au plafond et avale une bouchée de gaufres.

Maman quitte la pièce en nous rappelant de nous dépêcher mais de ne pas manger trop vite.

Scorpius me lance un regard appuyé.

« Tu comptes me demander ? Ou je dois te les apporter de moi-même ? »

Il pousse légèrement ses gaufres vers moi. Oh, oh ? Est-ce bien ce que je crois ? Scorp serait-il passé en mode Gentil Grand Frère ?

Je me lève précipitamment et me dirige vers lui, mon assiette à la main, pour la lui tendre.

Happyhappyhappyhappy !

« On est bien d'accord, si je t'en passe c'est parce que tu m'as harcelé. Je ne suis pas gentil.

— Mais non mais non, très méchant Scorpius. Cela dit, c'est pas parce que pour une fois tu es sympa que tu finiras chez les blaireaux, tu sais ! »

Il me lance un faux regard d'incompréhension totalement innocent.

« Tu iras à Serpentard, Scorp. »

Il hausse les épaules comme s'il s'en fichait, seulement je sais très bien ce qu'il pense. Il crève d'envie de rejoindre la maison de nos ancêtres.

Je retourne à ma place et appelle notre elfe de maison. Maman m'a dit de l'appeler Jéricho mais je préfère Jerry, c'est plus… A la mode. Je lui demande de me faire couler un bain et Scorpius toussote pour qu'il s'éclipse.

« Tu vas prendre un bain ?! On n'a pas le temps pour prendre des bains ! Le Poudlard Express part à onze heures je te rappelle ! Et encore, il faut que Papa se lève ! »

Je déteste quand il prend son petit ton de préado comme ça ! J'ai envie de les lui enfoncer dans la gorge, ses gaufres, en un bloc compact avec lequel il s'étoufferait, et mourrait pour toujours ! Tiens !

J'essaye de terminer mon petit-déjeuner le plus vite possible, tout en remarquant que le cracmol-jusqu'à-dix-ans n'a presque rien mangé. Il est stressé. J'aurais presque pitié, si j'acceptais d'oublier l'idée qu'il VA A POUDLARD ! Mais chiottes quoi !

Pardon.

Pardon.

Pardon.

« Il y a bien un moment où il faut que je me lave, non ?

— Peut-être après mon départ, ce serait une merveilleuse idée !

— Je ne vais pas me rendre pour la première fois de ma vie sur le quai du Poudlard Express sans m'être lavée, quand même ! »

Il semble réfléchir puis souffle :

« Pas faux… (Il a peur que je lui fasse honte.) Mais tu ferais mieux de te dépêcher. Et arrête de te gaver, on dirait un loup-garou après Azkaban. »

Je me lève en lui jetant un regard noir et quitte la pièce en défaisant ma natte à la main. La salle de bains est déjà remplie de vapeur et de fumée rose. Je n'ai jamais demandé ça, mais Jerry a le sens du détail !

Maman m'a choisi une nouvelle robe exprès pour aujourd'hui, avec des étoiles argentées sur la doublure. Même si le col est dur et gratte un peu, j'ai presque l'impression d'être grande et belle comme elle. Encore faudrait-il que mes cheveux soient comme les siens, parce que le blond, dans cette famille, ça n'a rien de génial. Alors que Maman a des cheveux bruns, longs et épais. On dirait du caramel !

Quelqu'un vient taper à la porte alors que je continue de m'observer des pieds à la tête.

« Miss Malefoy ! Hors de cette pièce immédiatement ! Tu fais du bruit et tu m'empêches de dormir ! »

Papa. Egal à lui-même, c'est-à-dire d'une humeur de sinistros. Il n'a pas assez dormi… J'ouvre la porte et me retrouve face à lui, qui est déjà habillé et coiffé. Je crois que je n'ai jamais vu Papa en pyjama. En même temps, berk quoi.

Comme d'habitude il me sort la devise de Poudlard. Ne jamais embêter un dragon qui dort. Il trouve ça drôle parce qu'il s'appelle Draco… A croire que l'école a été fondée pour lui ! Les Malefoy y ont largement leur place, moi c'est tout ce que j'en déduis.

« Allez ma couleuvre, on sort et on laisse son père entrer. »

Je m'exécute. Papa a le don de parler sévèrement tout en ayant l'air gentil. C'est rare de le voir vraiment fâché. Et je pense que Scorp a hérité de cette faculté. C'est un faux-aimable.

Je rejoins ma chambre dont le lit est fait. Le miroir de ma coiffeuse m'indique par sa couleur terne qu'aujourd'hui ne va pas être une grande journée pour moi. Un jour « sans », où j'aurais mieux fait de rester au lit… N'empêche, je suis contente de voir le Poudlard Express et de poser enfin mes pieds sur le Quai 9 ¾ ! Ça fait neuf ans et neuf mois au moins que j'attends ce moment.

Dans deux ans, Wendy. Deux ans.

« Waldie ! Sœur indigne ! C'est toi qui as ma baguette ?! »

Scorpius fait irruption dans la pièce et fonce sur moi pour m'attraper pas les épaules et me secouer. Je tente de le repousser, mais c'est de lui-même qu'il me lâche pour courir vers mon lit. Il en arrache les draps et retourne le matelas en continuant de crier. Ma voix se joint bientôt à la sienne, encore plus stridente :

« Arrête ça ! Je ne l'ai pas moi, ta baguette ! Si tu prenais soin de tes affaires, Povrebine mal léché… ! »

En moins d'une minute, Maman est dans ma chambre et ramène Scorpius contre elle, alors qu'il se débat encore mais en silence cette fois. Maman aurait pu être psychomage si elle avait été un homme. Toujours calme et calmante…

« Pas d'insultes, Waldie. Tu viens de perdre tout accès au jardin en dehors de tes heures de cours pour une semaine. »

Je suis tellement indignée que j'ai du mal à ne pas lui répondre. Une semaine sans sorties ? A cause de mon satané frangin ?!

Pardon.

Pardon.

Pardon.

Mon frère s'immobilise, tout aussi étonné de ma punition. Mais il ne me défend pas, non, ça serait trop beau !

« Et toi, Scorpius, si tu veux quelque chose, demande-le gentiment. Je passe l'éponge aujourd'hui. Pour la dernière fois.

— Oui, Maman. »

Il se dégage doucement et fait un pas vers moi.

« Ma baguette. »

Il tend la main et attend. Je m'apprête à hausser les épaules mais Maman murmure un sortilège et la baguette de Scorpius vole à elle, en provenance de ma petite bibliothèque. Et zut !

« Merci bien, dit mon frère en la récupérant. J'apprendrai à faire plus attention et moins confiance. »

Maman secoue doucement la tête de gauche à droite avec son petit sourire. Elle pousse Scorpius hors de ma chambre et je reste là à fixer la porte close. Je les entends discuter du menu du dîner à Poudlard, et Maman lui conseille de ne pas goûter la tarte aux airelles, s'il y en a. Scorpius affirme qu'il ne touchera à rien de rouge, ce soir.

Ils sont en train de rire, sans doute encore en train de remplir la malle de mon aîné, quand je me retourne vers mon miroir. Il ne renvoie plus aucun reflet. Le néant total. Bouse de dragon.

Pardon.

Pardon.

Pardon.

Je resserre ma main dans celle de Maman quand nous nous retrouvons au milieu de la foule. Je n'ai jamais vu un Centre de Transplanage aussi bondé. Horrible.

La boucle de veston d'un homme s'accroche à une de mes nattes, et je ne peux retenir un cri qui le fait se retourner.

« Ce n'est pas drôle, jeune fille, je suis pressé », me dit-il en défaisant le nœud, arrachant au passage quelques uns de mes cheveux. Maman ne m'accorde que peu d'attention, se contentant de me traîner à travers la multitude de sorciers tous plus pressés les uns que les autres. Je peux voir la cape de Papa, devant, plus noire et plus neuve que celles tout autour. Il a la main posée sur l'épaule de Scorp, qui paraît soudain tout petit. Nous sortons enfin dans la rue, et Scorp se retourne une énième fois pour vérifier que Jabin a bien sa malle. Jabin est l'elfe femelle de la maison. Elle a plus de force que Jerry, donc elle part souvent en voyage avec Papa. Du coup elle a tendance à se croire supérieure à Jerry mais ses dîners sont infects, à mon avis.

Papa relâche mon frère quand nous entrons dans la gare. Je crois que je n'ai jamais vu quelque chose d'aussi incroyable. Des dizaines de sorciers au milieu de centaines de moldus. Normalement, nous sommes toujours plus importants en nombre, peu importe où je vais. Ici à King's Cross, toutes les différences entre nos deux mondes sont beaucoup, beaucoup plus marquées. Une chouette passe au-dessus de ma tête et je peux clairement voir le parchemin dans son bec. Papa nous guide à travers le hall de la gare et Maman me désigne une boutique :

« Tu peux y acheter des bricoles de dernière minute, comme la Gazette ou un jus de citrouille. Un moldu et un sorcier y travaillent ensemble.

— C'est un problème, non ? Le moldu doit se poser des questions.

— Si tu veux mon avis, le moldu ne s'en pose pas assez, des questions. Ils ne se rendent jamais compte de rien. »

Ce n'est pas une insulte, ça ? Les parents peuvent vraiment tout faire. Ça me dépasse, toute cette injustice.

Papa s'arrête devant un mur. J'aperçois au sol, quelques mètres devant nous, le chiffre 10 peint en blanc. C'est donc là que se trouve le passage pour la voie 9 ¾ ! J'essaie de photographier ce moment dans mon esprit. Scorpius se charge de sa malle, hissée sur un charriot, et l'elfe de maison disparaît aussitôt. Mon père se dirige vers le mur et passe au travers sans un regard vers l'arrière. Il a l'air plutôt pressé d'en finir. Scorpius regarde Maman et je vois bien qu'il se retient de paniquer. Il va pleurer, ce blaireau.

Pardon.

Pardon.

Pardon.

Même si ce n'est plus une insulte, je n'ai pas le droit de dire ça, pas aujourd'hui. Après tout, ce « blaireau », je ne le reverrai que dans… Trois mois !

Maman lui sourit comme elle sait si bien le faire et il prend son courage à deux mains pour traverser le mur. Il commence à pousser son charriot, qui zigzague un peu sous le poids de la malle, puis se volatilise à son tour.

A nous maintenant. Maman me pousse dans le dos, pressée de rejoindre son petit dragonneau sur le point de quitter le nid. Je préfèrerais courir, pour que ça aille vite, mais Maman se contente de marcher rapidement à mes côtés. Je ne remarque même pas que je traverse le mur, mais seulement que les bruits ont changé. La foule est encore plus dense et, là, devant moi, nous écrasant de son ombre, se dresse la locomotive.

Le Poudlard Express est plus rouge que sur les photos. Plus bruyant, aussi, et ce n'est pas peu dire puisque Papa est obligé d'ensorceler l'album et de le ranger à la cave pour étouffer les sifflements du train…

Je me sens petite ! Je ne veux pas que Scorp entre là-dedans, c'est trop… Agressif. Je suis presque intimidée par le train. Je comprends maintenant l'expression « se sentir comme renversé par le Poudlard Express » !

« Maman, c'est bien là ? » demande Scorpius d'une toute petite voix.

Il fixe les élèves autour de lui. La plupart semblent détendus et heureux de se retrouver les uns les autres. J'ai hâte d'être à leur place… A ma rentrée en deuxième année.

Quelques uns restent avec leur famille. Je repère une fille accrochée à sa mère, en larmes, et une autre qui triture son chapeau de sorcière comme pour le déchirer en petits bouts de tissu.

Papa est en train de parler avec un homme en uniforme bleu marine et Maman le rejoint, Scorp et moi sur les talons.

« Tu veux que je porte la cage de Quill ? je lui propose.

— Non merci, Waldie.

— C'est Wendy.

— Oh, pas aujourd'hui, s'il-te-plait. »

On dirait que c'est la Fête de la Libération, aujourd'hui. Il faut bien se tenir, et tout et tout… Moi qui essayais juste d'aider.

Mon père se tourne vers Maman pour lui désigner une femme dans la foule. Sans doute une de leurs amis d'enfance. Je ne connais pas l'âge exact de Papa et Maman, mais je crois qu'ils ne se sont pas beaucoup fréquentés à Poudlard, alors ils ne connaissaient pas énormément d'élèves en commun. Maman s'éloigne de nous pour aller dire bonjour et Scorpius observe de bas en haut le garçon aux côtés de l'amie de Maman. Celui-ci lui rend son regard. Brrr, il n'a pas l'air sympa l'inconnu.

« Je sens un futur Serdaigle », me glisse Scorp.

Oui, il a sans doute raison. Les Serdaigle sont difficiles à attendrir, d'après mon cousin Conrad. D'ailleurs, on ne devrait pas tarder à le croiser, celui-ci. Même s'il vient tout seul et qu'il est donc souvent en retard. Il est en sixième année, du coup il peut faire tout ce qu'il veut. Tante Daphné n'est pas du tout sévère, je crois, et Oncle Lewis n'est jamais là. Comme Papa, sauf que Papa garde en permanence un œil sur nous, à distance.

Il a bien de la chance, Conrad.

Papa dit au revoir à l'homme en uniforme et me prend par la main, pour que nous rejoignions Maman, Scorpius nous suivant avec son charriot.

« Je présume que tu es Scorpius ? » dit la dame en regardant mon frère.

Elle me sourit sans pour autant présumer qui je suis. Scorpius se présente et salue le fils de la dame, qui ne répond pas. Les adultes entament une conversation et je me retourne pour chercher un quelconque visage connu. Une amie dont le frère ou la sœur ferait sa rentrée, par exemple. J'aurais dû demander à Tiffany Goyle, la dernière fois que je l'ai vue : ses frères ont-ils un, ou deux ans de plus que moi ?

J'aperçois quelqu'un au loin et je retiens mon souffle. Ces cheveux noirs, ces lunettes rondes… C'est… C'est… Potter ! C'est l'homme qui a ramené le calme sur notre monde ! J'ai appris sa biographie quand j'étais petite, et en fait, il paraît… Jeune. Je pensais qu'il aurait au moins quatre-vingts ans ! Ou alors, ce n'est pas lui. Ce n'est peut-être pas lui, si on y réfléchit bien. Qu'est-ce que Potter ferait ici, sur le quai 9 ¾, le jour de la rentrée de mon frère ? Quoiqu'il va peut-être leur faire une conférence… Il y a un discours de lui dans mon livre d'Histoire de la magie, quand il venait de mettre fin à la guerre. Oui, je me souviens très bien, il devait avoir au moins quarante ans… Forcément, parce qu'on ne sauve pas le monde quand on est petit.

Ça ne doit pas être lui.

Alors que je le regarde, il s'approche de nous et je ne peux m'empêcher de me glisser derrière la grosse malle de Scorp. Si c'est Potter, si c'est vraiment lui… Il paraît que son regard peut tuer. Il a des éclairs dans les yeux. Mes parents arrêtent de parler et l'observent. La dame et son fils font de même. D'accord, ça doit être lui. Je pourrai le dire à Mr Wisem, il sera content de savoir que j'ai rencontré un homme qui marqué l'Histoire.

Quand je quitte Potter des yeux, j'aperçois Conrad qui court vers nous. Il a les cheveux longs – c'est affreux, sans vouloir l'insulter – ce qui cache ses yeux et couvre sa nuque. Ça fait vraiment longtemps qu'on ne s'est pas vus. Il a autour du cou son écharpe aux couleurs de Serpentard. Elle est brûlée à un bout et décousue à l'autre. Tante Daphné lui en commande souvent une nouvelle, paraît-il, mais il ne sait pas prendre soin de ses affaires.

« Bonjour Oncle Draco, bonjour Tante Astoria, bonjour Madame », halète-t-il en nous atteignant.

Il me sourit et tapote sur l'épaule de Scorpius, qui lui serre la main avant de lui désigner Quill, qu'il vient d'hériter de Papa. Mon frère est très fier de ce hibou.

« J'ai un truc à te montrer », me glisse Conrad en me prenant par le bras.

Il m'emmène vers l'avant de la locomotive et mes parents ne semblent même pas le remarquer. Tant que Scorpius est là, le reste ils s'en fichent !

Conrad fouille dans sa poche tout en jetant des regards autour de lui, méfiant. Il me tend ses deux mains fermées l'une sur l'autre.

« Je te présente Marcus, dit-il en écartant les doigts.

— Tu as adopté un rat ? »

Je ne peux m'empêcher d'avoir une voix dégoûtée. Un rat… C'est sale, ça n'a absolument rien de joli… Cependant, il sourit, insensible à ce que je pourrais bien en penser.

« Il mange tout ce que je mange et il ne prend pas beaucoup de place. Père me l'a offert.

— Oncle Lewis ne ferait jamais ça.

— Puisque je te dis que c'est lui ! Il est génial, hein ? »

Je me demande s'il parle de son père ou de… Marcus. C'est une petite boule marron dont les moustaches bougent en tous sens comme les antennes d'une fourmi.

« Maman trouverait ça répugnant.

— Tante Asto est frigide. »

Tante Asto ?! J'espère qu'en ce moment même, il demande pardon à Morgane pour sa conduite ! Comment peut-il déformer le prénom de Maman ? On dirait qu'il a été élevé par des... des… Sauvages ! Qu'Oncle Lewis m'excuse !

« Mais de toute façon, je suis sûr que tu n'as aucune idée de ce que ça veut dire, frigide. »

Je ne démens pas. Parce que mentir, c'est mal, mais surtout parce que le jour où je saurai, il se sentira bien débile.

« Tu es plus bête que ton rat, Conrad. Laisse-moi tranquille.

— Mon rat est très intelligent !

— Ce qui n'améliore pas ton cas. »

Il prend son air menaçant qui ne marche plus depuis longtemps :

« Cousine Malefoy, aurais-tu un souci à résoudre avec ton Cousin Carmichael ? Parce que tu peux tout de suite me le dire et je…

— Conrad ! »

Une main attrape mon cousin et le tire vers l'arrière. La fille devant moi se met à lui ébouriffer les cheveux et Conrad a à peine le temps de glisser Marcus dans sa poche.

« Comment ça se fait que tu sois toujours aussi bruyant ? Espérons que la Sixième année te réussira mieux que les autres ! »

Elle me regarde et perd son sourire.

« Tu fais dans les pré-pubères maintenant ?

— Pas du tout ! »

Il ne lui donne cependant pas plus de détails. Tant mieux, je ne veux pas que cette folle en habits de moldue sache tout de ma vie. Elle me tend la main mais je fais comme si je n'avais rien vu, me contentant d'adresser un signe de tête à Conrad pour lui montrer que je vais les laisser seuls. Je tourne les talons en entendant la voix de la fille faire un commentaire stupide. Disons qu'elle a au moins une chose pour elle : le blason vert et argent.

Je passe de nouveau devant Potter. Il est entouré d'enfants. J'aurais pensé à des fans si ceux-ci lui avaient accordé un peu plus d'importance. Se pourrait-il que… Que les enfants de Potter étudient à Poudlard ? Je pensais qu'ils vivaient en Ecosse ! Que viendraient-ils faire en Angleterre ? Poudlard a beau être la meilleure école de magie au monde, Potter aurait largement les connaissances pour tout leur enseigner sans quitter son salon.

Il faudra que je demande à Scorpius, ou à Conrad.

Je glisse à nouveau ma main dans le creux du coude de Maman alors que celle-ci conseille à mon frère de se trouver une place dès maintenant dans le Poudlard Express.

« Je dois déjà y aller ? »

Il n'a plus l'air très sûr, mais ça il n'y a que nous pour le voir. Il a toujours l'air courageux, de loin, mon frère. Il embrasse Papa, et Maman le prend un long moment dans ses bras, m'incluant au câlin. Je me retrouve coincée entre elle et Scorp, qui m'accorde un vague regard.

« J'écrirai », dit-il.

C'est ça, comme si c'était nous qui avions besoin de courrier. Il espère juste que Maman lui promette qu'elle aussi, elle écrira. Elle lui enverra sans doute des compotes d'orties par hibou.

« Au revoir, Scorpius. Fais attention. Ne réponds pas à tes professeurs et respecte le Baron Sanglant. »

Nous y voilà. Papa surmonte sa fatigue et lui tient l'épaule. Maman lui donne une lettre de dernière minute qu'il pourra lire dans le train. Scorp empoigne sa cage et Papa fait voler sa malle à l'intérieur du train. Il monte les quelques marches et disparaît dans le couloir du wagon. Le deuxième wagon. Il est parti pour trois mois.

Quand il reviendra, on fêtera Noël.