Chapitre 32.

J'agrippe ma grosse veste en laine grise, et file dehors. Il fait très beau aujourd'hui, mais également assez froid, je crois que nous ne dépasserons pas les dix degrés. Pour l'heure, il doit faire moins et pour preuve, un nuage de condensation apparaît alors que je m'amuse à respirer par la bouche. Rien d'anormal, après tout nous sommes déjà le vingt-cinq novembre. Tiens, dans un mois pile, ce sera Noël. Il va falloir que je réfléchisse aux cadeaux à faire à mes parents.

Après avoir trépigné un long moment dans le bus, puis marché un peu, j'atteins l'entrée de Central Park, où Peter m'a donné rendez-vous. L'idée de passer l'après-midi ici me réjouit, les couleurs automnales sont embellies par le ciel bleu.

De longues minutes passent, pendant lesquelles je me demande si mon ami aurait encore pu avoir un empêchement, mais je l'aperçois finalement traverser la route en courant, pour venir se planter devant moi.

- J'ai vraiment cru que t'allais me laisser patienter ici toute l'aprèm, j'avoue un peu nerveuse.

- Pas cette fois, promis, m'assure Parker en souriant.

- On va au parc du coup ? je demande en tourant la tête vers l'entrée.

- Pas vraiment. Viens, on va par-là.

Nous avançons côte à côte alors que je tente malicieusement de gratter des informations, mais Peter ne lâche rien. Il rigole en répondant qu'il m'abandonne ici si je continue à agir comme une enfant et je plisse les yeux en le toisant, alors qu'il me fait signe de la tête pour que je regarde dans la même direction.

Face à nous se dresse la tour Stark, qui a également servi aux Avengers à un moment.

- T'as prévu qu'on aille la piller ou quoi ? je demande en fourrant mes mains dans mes poches.

Il soupire sans être vraiment agacé et nous faisons le tour pour atterrir devant une porte de service. Peter tape un code, et l'entrée s'ouvre tandis que j'écarquille les yeux.

- Wow. Alors ça c'est la classe.

Mon ami pouffe doucement alors qu'il me fait signe d'entrer d'un geste de la main, et je fronce les sourcils en effectuant quelques pas à l'intérieur.

- Attends Parker, comment ça se fait que t'aies accès à cette tour ? Me dit pas que Stark donne un badge à tous ses stagiaires.

- Il n'a pas d'autre stagiaire, me corrige Peter. Et ne t'en fais pas, ça fait bien longtemps que les Avengers ont bougé leur QG. Il n'y a plus rien ici.

- T'as l'air bien au courant, je réplique alors qu'il allume l'interrupteur. C'est Spidey qui t'a dit tout ça ?

- E-Euh ouais. Pourquoi tu demandes ça ?

- Parce qu'il m'a dit qu'il était au courant que l'on se voyait aujourd'hui, mais il n'a rien voulu avouer de plus. C'est parce que tu lui as demandé si on risquait de croiser des gens ici ?

Il acquiesce brièvement, avant de reprendre.

- Quoi qu'il en soit, même si l'endroit est désert, il reste un truc très cool.

- Une armure d'Iron man ? Si j'envoie une photo à Laureen, elle fait un infarctus.

- Encore mieux.

Je hausse les sourcils, mais arrête de poser des questions. Heureusement que le courant fonctionne encore, bien que personne ne vive plus ici, car nous pouvons emprunter l'ascenseur plutôt que prendre les escaliers. Et tant mieux, car quand je vois qu'il y a quatre-vingt-quinze étages, je me dis que ç'aurait été long, à pieds.

On s'arrête au quatre-vingt-dixième, pour découvrir une grande superficie habitable, mais vide. Le sol est éclaté par endroits, et il fait froid puisque l'ancienne baie-vitrée a été grandement fracturée.

Les pièces du puzzle s'assemblent dans ma tête, et je jette un coup d'œil à mon ami.

- C'est là que… Les Avengers se sont battus contre le gars venu de l'espace ?

- Ouais. C'est pas pour ça qu'on est montés, mais c'était ici.

Encore une fois, je pense à Laureen. Si elle avait été avec nous, elle aurait été aux anges. Mais elle n'est pas là et c'est tout aussi bien. J'adore mon amie d'enfance, mais je suis contente de passer du temps seule avec Peter. J'ai vraiment l'impression que rien ne change de d'habitude. Pas de gêne entre nous, mais en même temps pas d'ambiguïté. Peut-être qu'au final je me suis fait des films et qu'il s'agit réellement d'une sortie entre amis.

Parker m'indique l'extérieur, et je réalise qu'une grande terrasse s'étend devant nous. Tout en me précisant de faire attention au verre qui n'a jamais été ramassé, nous sortons et la vue me fait stopper net. Il n'y a pas de vent, alors c'est agréable, si l'on oublie qu'il doit faire plus froid qu'en bas. Tout semble terriblement petit d'ici, même Central Park.

- C'est incroyable, j'arrive à lâcher après avoir remarqué que Peter me fixe depuis quelques secondes.

- Ça te plait ? s'enquit mon ami alors qu'il semble douter.

- Carrément ! je reprends avec plus d'entrain. Dire que Stark voyait ça tous les jours, c'est fou.

Le brun acquiesce et va s'assoir un peu plus loin sur l'avancée de la terrasse, je le rejoins quelques secondes plus tard. On voit jusqu'au pied de la tour, si bien que je redresse finalement la tête rapidement pour fixer l'horizon.

- T'as le vertige ?

- C'est haut.

Il ricane et je lui jette un regard de travers.

- Je pensais pas que tu craignais le vide alors que tu fais de l'escalade.

Je feins d'être offusquée, mais un sourire me trahit.

- Eh ! Le mur du lycée doit faire dix mètres maximum, là on est à… Près de quatre cents mètres ?

- Environ oui.

J'avale ma salive et tente un nouveau coup d'œil en bas.

- Ça me rappelle la fois où j'ai rencontré Spiderman.

- A-Ah ouais ?

- Ce taré m'a attrapée avant de s'envoler grâce à ses… Fils là. J'ai cru que j'allais mourir quand j'ai vu qu'on se promenait tranquillement à au moins quinze mètres de haut.

Peter rigole, imaginant probablement la scène et je me joins à lui. Quand nous nous calmons, je cherche quoi dire pour relancer la conversation et sors la première chose qui me vient à l'esprit.

- En tout cas, je suis contente que tu m'aies proposé qu'on passe l'après-midi ensemble.

- Moi pas trop, mais bon, fallait bien que je me rattrape…

Je tourne brusquement la tête vers lui, pour observer un rictus railleur et je fais la moue.

- Je plaisantais Naia, se sent-il obligé de préciser.

- Depuis quand tu fais de l'ironie toi ? je rétorque.

- Mais j'en ai toujours fait. C'est juste que toi, MJ et Ned vous concourrez pour la première place, je fais pas le poids à côté.

Je retiens un demi-sourire alors que Peter enchaîne.

- Mais je suis content aussi. J'avais peur que tu m'en veuilles vraiment et que tu me mettes un vent quand je suis venu.

Je plisse les lèvres. Effectivement j'y ai songé. S'il ne m'avait pas fourni une bonne explication à son absence et qu'il n'avait pas proposé cette sortie, j'aurais peut-être été plus virulente.

- Bon et… Je sais pas trop quand te l'offrir, alors… Tiens.

En même temps qu'il parle, il fouille dans son sac et sort un petit paquet. Je pensais à une boîte, mais en le déballant, je découvre qu'il s'agit en réalité d'un cube avec des photos. Je tombe sur la face où Ned, MJ, Peter et moi sourions en discutant tous les quatre. En analysant les tenues et le décors, je finis par reconnaître et ouvre un peu plus les yeux.

- C'était à la soirée de Lloyd, me confirme Parker. Un de ses amis adore la photo et il les a envoyé à MJ l'autre jour. Elle me les a donné et… Voilà.

- C'est génial… je réponds à mi-voix en tournant le cube dans mes mains pour découvrir les autres photos.

Sur une autre face, Michelle et moi sommes en train de danser, toujours à cette soirée. La photo d'après a été prise au moment où Ned m'a piqué mon verre et la tête que je tire est plutôt marrante. La dernière immortalise un autre moment du début de soirée : peu après que Parker soit arrivé, quand nous étions débout tous les deux alors que Ned et MJ étaient partis s'assoir. Nous sourions tous les deux en nous regardant, impossible de me rappeler qui avait dit quoi pour qu'on soit comme ça.

- C'est nul comme cadeau ?

- Tu plaisantes ? je contre en redressant la tête vers lui. J'adore.

Il semble rassuré et je souris grandement avant de le remercier. Je me surprends même à le prendre dans mes bras, et je réalise que ça le met visiblement mal à l'aise puisqu'il s'est figé. Au moment où je pense à le relâcher, Peter me rend mon étreinte et je souris bêtement.

- Bon anniversaire, avec deux semaines de retard.

- T'étais déjà le premier à me le fêter le jour J.

Après quelques secondes, nous nous lâchons et je réplique doucement qu'il reste encore deux emplacements à combler sur ce cube tout en le rangeant précautionneusement dans mon sac.

- Faudra en prendre d'autres, peut-être la prochaine fois qu'on… Qu'est-ce qui a ?

Je me suis stoppée en tournant la tête vers lui, pour me rendre compte qu'il fixe le centre-ville en contrebas, l'air préoccupé.

- Les gars là-bas…

- Quels gars ? je l'interroge en me penchant pour tenter de voir quelque chose. T'arrives vraiment à voir des gens d'ici ? T'as combien au test visuel toi ?

- Ce sont ceux qui ont fait sauter les deux immeubles récemment.

Je fronce les sourcils, puis saisis qu'il fait référence à ce que j'ai vu aux informations. Les deux incendies volontaires, qui ont causé de gros dommages matériels et surtout qui ont conduit plusieurs personnes à l'hôpital voire peut-être même au cimetière. A chaque fois, Spiderman aidait les gens à sortir.

- Comment tu sais ça ? je poursuis en me souvenant d'un détail important. Ils ont dit qu'ils n'avaient pas pu identifier les coupables.

Sans me répondre, il se lève et file à l'intérieur.

- Eh, Parker ! je le hèle en me redressant à mon tour, bien qu'il soit déjà au niveau de l'ascenseur.

Il rentre dedans au moment où je passe l'ancienne baie-vitrée, et il appuie sur le bouton pour descendre. Sans m'attendre.

- Wow, Peter, je te cause !

- Reste ici, t'es à l'abri, m'ordonne-t-il alors que les portes se ferment.

- Quoi ? je demande en m'inquiétant. Non attends, Peter, reste avec moi !

Je tente de courir pour espérer me faufiler dans l'interstice, mais j'arrive alors que je fais face à un mur. En vain, je viens assassiner le bouton de l'ascenseur pour que les portes se rouvrent, mais bien évidemment, la machine ne l'entend pas de cet avis. Le compteur fait défiler les étages à rebours et ne voyant pas d'autres solutions, je me précipite vers les escaliers en pestant.