Chapitre 26 : Fíli

Le cheval d'Aghäte galopait comme il pouvait avec toute la neige et le verglas sur le chemin. Au sommet, le brouillard était si intense qu'elle ne voyait pas à plus de deux mètres. Étrangement, elle ne croisait plus aucun orque. Se doutant qu'il y avait quelque chose de pas normal, elle continua d'avancer plus rapidement mais discrètement. Elle finit par entendre des voix au loin. Elle crut reconnaître la voix de Dwalin et galopa vers elle.

Elle retrouva bel et bien Dwalin. Malheureusement, elle se trouvait beaucoup plus en hauteur que lui. La brume s'était dissipée et elle vit aussi Thorin qui parlait avec ses neveux. Elle regarda Fíli et Kíli entrer dans une tour délabrée. Leur oncle leur avait certainement demandé de partir en exploration.

Il était trop tard pour les rejoindre. Elle décida de rester où elle était et de préparer son arc s'ils avaient besoin d'aide. D'où elle était, elle voyait clairement la tour et le sol. C'est alors qu'elle vit Bilbon arriver et parler avec Dwalin et Thorin. Ces derniers semblaient s'activer après leur discussion. Les battements du cœur d'Aghäte commencèrent à s'accélérer. Quelque chose n'allait pas. Surtout si Bilbon avait fait tout ce chemin pour leur annoncer. N'entendant que des voix sans rien comprendre d'où elle était postée, elle commença à se demander si elle ne devait pas les rejoindre.

Observant les nains et le hobbit au sol, elle sursauta lorsqu'elle entendit un orque s'adresser à Thorin et sortir du haut de la tour. Le cœur d'Aghäte s'arrêta quand elle vit qu'il tenait fermement Fíli. Elle fut néanmoins rassurée de voir Kíli sortir en bas.

D'abord sous le choc de voir le nain qu'elle aimait capturé ainsi, elle réussit à reprendre son sang froid et de bander son arc. Elle laissa l'orque parler à Thorin pendant qu'elle se concentrait à le viser. Elle n'aurait qu'une seule chance de sauver son nain.

Quand Azog leva son épée, Aghäte vit instantanément rouge et tira sa flèche. Elle se planta dans l'épaule de l'orque. Désorienté par le coup qu'il venait de recevoir, il lâcha le nain blond. La semi-humaine cria alors « Saute Fíli ! Kíli te rattrappera ! ». Elle hurla si fort que sa voix résonna dans tout le lieu.

Le chef des orques ne semblait aucunement souffrir de sa blessure mais il était fortement énervé contre la semi-humaine. Fíli sauta bien jusqu'en bas. Son frère fit ce qu'il put pour l'attraper mais étant donné la hauteur de la chute, il s'était sûrement fait très mal. Mais au moins il était vivant !

Azog hurla de colère en noir parler avant de retourner dans la tour. Aghäte vit alors Thorin lui jeter un coup d'œil avant de partir à la poursuite du chef des orques. Tirant les rênes de son cheval, elle lui demanda de la conduire jusqu'à Fíli. Elle redoutait le pire avec sa chute mais elle devait le rejoindre.

Malheureusement, les orques commençaient à sortir de leur cachette et certains s'attaquèrent à elle. Lorsque son cheval fut touché, elle tomba brusquement au sol ce qui lui déboita l'épaule. Elle savait qu'elle était à quelques mètres de la tour. Elle jeta son arc et ses flèches et elle remarqua tristement que son cheval était mort sur le coup des orques. Elle essayait de courir auprès du nain qu'elle aimait et qui l'attendait mais elle n'arrivait pas à se débarrasser de ses ennemis.

Se défendant avec ses dagues comme elle le pouvait, elle hurla le nom du nain blond dans l'espoir qu'il lui réponde ; prouvant par conséquent qu'il était vivant. Plus elle criait son nom, plus les orques s'attroupaient autour d'elle. Elle avait beaucoup de mal à s'en débarrasser.

Au moment où elle crut ne jamais survivre, elle sentit une multitude de flèches lui frôler le corps pour finir dans la tête des orques qui l'encerclaient. Elle ne put s'empêcher de sourire à pleines dents quand elle vit Tauriel et Legolas la rejoindre.

- Vous venez de me sauver la vie… Merci.

- Ce n'est rien !, répondit Tauriel dans la précipitation. Tu n'as rien ?

- Épaule déboitée et quelques côtes cassées mais rien de grave.

- Où sont les nains ?, demanda Legolas.

Aghäte leur expliqua ce qu'elle savait. Legolas décida de partir rejoindre Thorin. Au moment où il demanda à Tauriel de le suivre, deux nains s'approchèrent d'eux. L'un aidant l'autre à marcher en le soutenant par ses épaules. Les deux frères sourirent à la vue des trois elfes et de tous les orques morts au sol. Sans attendre une minute de plus, Aghäte courut vers Fíli, le prit dans ses bras et l'embrassa. Si son frère ne les avait pas soutenus, ils seraient tous les deux au sol. Au bout de quelques secondes, Tauriel intervint.

- Aghäte, lâche-le tu vas lui faire mal !

Kíli ne put retenir un rire et les amoureux se décollèrent. Évitant de regarder cet élan d'affection, Legolas regardait partout autour de lui et continua sérieusement la discussion.

- Je vais rejoindre Thorin. Que faites-vous ?

- Moi aussi, affirma Kíli. Mais par un autre chemin. Son fils, Bolg, est certainement ici et nous devons le tuer aussi.

- Tauriel, va avec lui, ordonna le prince elfe.

- Moi je-, commença Fíli.

- Toi tu rentres. Avec tes blessures, tu ne pourras rien faire, expliqua son frère.

- C'est hors de question !, hurla le nain blond. Notre oncle a besoin d'aide et-

- Kíli a raison, intervint Aghäte. Tu as la jambe totalement brisée. Tu ne pourras rien faire dans ces conditions ! Tu dois te faire soigner.

Fíli lâcha une insulte en khuzdul avant que son frère ne continue.

- Aghäte, je compte sur toi pour le ramener vivant jusqu'en bas.

- Bien sûr ! Allez-y maintenant ! Fini de bavarder ! Et revenez tous vivants !

Legolas, Kíli et Tauriel acquiescèrent avant de courir de leur côté. Aghäte regarda Fíli mais il esquiva son regard. Elle lui proposa son épaule qui n'était pas déboitée et ils partirent en direction d'Erebor dans la plus grande discrétion possible.

.

En chemin, ils rencontrèrent peu d'orques ; qu'Aghäte réussit à éliminer. Le blond ne prononça pas un seul mot ; même à la vue de l'arrivée des aigles et de Beorn sur le champ de bataille.

Arrivé sur la terre ferme, le couple reçut l'aide de deux elfes qui les conduisirent à une tente de soigneurs. Ils devaient avoir deviner qui était réellement Fíli car ils l'emmenèrent dans une grande tente où même le roi des elfes sylvestres recevait des soins. La bataille devait toucher à sa fin si lui aussi se reposait. Thranduil fit un simple signe de tête lorsqu'ils les virent entrer et ne dit rien. Aghäte aida Fíli à s'asseoir sur un lit de fortune. Il ne daignait toujours pas lui parler.

- Mademoiselle, nous allons nous occuper de lui. Vous pouvez vous reposer à l'extérieur si vous le souhaitez, proposa un des soigneurs qui s'était avancé vers eux.

- Non, elle reste avec moi, intervint le nain d'une voix ferme en attrapant la main d'Aghäte. Elle aussi est blessée.

Devinant la fin de la bataille, elle sentit toute l'inquiétude et la peur qu'elle avait depuis ce matin s'envoler. Ils étaient tous les deux revenus vivants jusqu'à Erebor. Très amochés quand on voyait l'état de la jambe de Fíli mais elle sourit en entendant les paroles du nain qu'elle aimait.

- Ce n'est rien. Rappelle-toi que je suis une semi-elfe. Je vais vite-

Elle ne put finir sa phrase qu'elle sentit ses jambes la lâcher puis ses yeux se voilèrent avant qu'elle ne perde conscience. Elle fut rattrapée de justesse par un elfe qui avait écouté leur conversation. Thranduil avait été intrigué d'entendre qu'elle était une semi-elfe et l'avait regardé juste avant qu'elle ne tombe. Il la déposa sur un autre lit.

D'un geste brusque, Fíli essaya de se lever mais il cria de douleur. Il ne pouvait plus poser sa jambe au sol sans qu'il ne souffre horriblement. Un soigneur accourut vers la semi-humaine et dit au nain de rester où il était. Pendant qu'il analysait le corps de la patiente inconscient, Fíli lui détailla, d'une voix tremblante, ce qu'elle lui avait dit pendant le chemin.

- Elle m'a dit qu'elle s'était déboitée l'épaule... et qu'elle avait des côtes cassées...

- Ce ne sont pas que des côtes cassées…, souffla le soigneur. Elle a une plaie importante sur le côté et elle a perdu beaucoup de sang.

Le soigneur courut chercher un autre elfe à l'extérieur et du matériel de soin. Fíli était désemparé. Elle l'avait soutenu tout le trajet avec une blessure aussi grave sans rien dire ! Il lui en voulait. Il s'en voulait !

À dire vrai, il s'en voulait pour tout. Thorin était seul là-bas. Il avait aussi abandonné Kíli. Et maintenant, la semi-humaine qu'il aimait plus que tout allait mourir par sa faute.

La panique commençait à monter en lui lorsqu'il entendit un des soigneurs dire qu'elle allait s'en sortir. Fíli fit le plus long soupir de sa vie et tourna son regard vers Aghäte encore inconsciente.

..

Aghäte ouvrait ses yeux péniblement. Elle ne savait pas encore où elle était mais il faisait sombre. Elle avait mal partout mais elle était allongée sur quelque chose de moelleux. Un lit. Elle essaya de prendre une grande inspiration mais la douleur sur son flanc gauche lui coupa la respiration. Elle porta sa main sur la douleur et remarqua un bandage bien ficelé autour de son torse. « Ce n'était pas des côtes cassées au final… », se dit-elle.

La douleur l'avait maintenant bien réveillée et elle reconnaissait où elle était. Sa chambre d'Erebor. On l'avait ramené sous la montagne.

Elle se redressa difficilement. Le feu de la cheminée crépitait et elle remarqua qu'elle était seule. Après la douleur plus ou moins passée, elle se leva et s'habilla avec la première robe qu'elle trouva.

Ce fut compliqué et douloureux mais elle réussit à s'habiller de la tête au pied. À part des courbatures, elle était contente de ne rien avoir aux jambes.

Marchant doucement dans le couloir qu'elle connaissait maintenant par cœur, elle se dirigea vers le grand salon. Plus elle avançait, plus elle se rappelait ce qu'il s'était passé et angoissait à propos des nains de la compagnie.

Trouver le grand salon vide ne l'aida pas à la rassurer. Elle se dit alors qu'il serait bien d'aller sur les remparts pour observer le champ de bataille. Elle n'avait aucune idée du temps qu'elle avait dormi et donc de ce qu'elle allait trouver.

En haut des remparts, elle observait la scène encore sanglante des combats. Le soleil était haut dans le ciel. Aghäte se dit qu'elle avait au moins dormi un ou deux jours entiers pour qu'il ne reste pas aussi peu de corps au sol. Il n'y avait plus d'elfe. Il ne restait que quelques humains ou nains qui rapatriaient leurs derniers morts.

Fixant Dale, elle sursauta lorsqu'elle entendit quelqu'un prononcer son nom derrière elle. Elle se retourna et fit face à Bilbon. Le voyant les larmes aux yeux lui serra le cœur.

- Je suis passé dans votre chambre. Vous n'imaginez pas la panique que j'ai eu quand j'ai vu que vous aviez disparu !, dit-il d'une voix dure qu'elle n'avait pas l'habitude d'entendre. Mais je suis rassuré de vous voir debout…

Elle allait lui répondre quand il cria du haut des escaliers qu'il l'avait trouvé. Tous les nains les rejoignirent rapidement. Elle se rendit compte que tout le monde était plus ou moins blessé. Kíli était bien là avec des bandages un peu partout. Elle put enfin voir Fíli qui arrivait en dernier avec une béquille. Sans avoir le temps de dire quoique ce soit, il la prit dans ses bras et pleura à chaudes larmes.

La semi-humaine se raidit sous l'émotion et sentit les yeux s'humidifier aussi. Elle lui frotta dans le dos comme une mère le ferait pour rassurer son enfant qui a un gros chagrin. Elle lui dit qu'elle allait bien. La gardant toujours fermement dans ses bras, Aghäte regarda les autres nains un à un avec le sourire. Elle était rassurée de les voir tous ici. Son regard finit sur le hobbit à côté d'elle. Elle remarqua son regard gonflé et rouge puis, dans un rapide coup d'œil, elle le remarqua sur tous les autres nains.

- Azog est mort ?, demanda-t-elle doucement.

- Oui, affirma Kíli.

- La bataille est finie ?

- Oui…, lâcha Bilbon.

- Alors pourquoi ces têtes d'enterrement ? Tout est bien qui finit bien ! Où est Thorin ? Il-

Sa gorge s'assécha aussitôt qu'elle comprit. Elle le chercha du regard partout d'elle avec peu d'espoir de voir Thorin cacher parmi eux. Certains nains, comme Balin, Dwalin ou Bilbon, ne purent retenir leurs larmes et redescendirent l'escalier. Fíli s'écarta doucement d'elle et demanda à tous de les laisser seuls.

Une fois seuls, ils s'asseyèrent sur un banc et le nain blond prit les mains d'Aghäte avant de se racler la gorge.

- La bataille est belle et bien finie. Bard nous a rendu l'Arkenstone, dit-il avant de marquer une pause. Bolg est mort. Kíli, Tauriel et Legolas s'en sont chargés. Azog… est mort aussi. Mon oncle l'a bien tué. Mais il y a laissé la vie. Les autres ne sont pas arrivés à temps pour l'aider. Bilbon était à ses côtés jusqu'à la fin…

Le cœur d'Aghäte se déchira en entendant le récit de Fíli. Une part d'elle ne voulait pas le croire. Pourtant, tous les yeux des nains et du hobbit remplis de larmes qu'elle avait vu plus tôt lui prouvaient bien le contraire. Après avoir accepté la vérité, elle éclata en sanglots. Ses larmes ne s'arrêtaient plus. Fíli la prit dans ses bras et fit ce qu'il pouvait pour la consoler ; même si lui-même était inconsolable.

Une fois calmée, elle se recula de l'étreinte du nain qu'elle aimait et glissa sa main sur sa joue droite. Il avait les yeux troublés, le teint pâle mais il était particulièrement froid.

- Tu es gelé. Tu veux qu'on rentre à l'intérieur ?, proposa-t-elle doucement.

- Non, articula-t-il faiblement. Je préfère prendre l'air.

- Hum, hésita-t-elle. Que s'est-il passé dans la tente quand nous étions avec les soigneurs elfes ?

- Tu t'es évanouies parce que tu n'avais pas des côtes cassées mais une plaie importante qui t'avait fait perdre beaucoup de sang…, soupira-t-il avant de continuer plus sévèrement. Pourquoi ne m'as-tu rien dit ?! Pourquoi tu m'as aidé à descendre cette montagne dans ton état ?!

- P-parce que je ne m'étais pas rendue compte de ma blessure, bafouilla-t-elle surprise de la colère du nain. De plus, ta jambe était dans un état encore pire ! Et le soigneur elfe a pu te soigner ?

- Je n'aurais jamais dû descendre de cette montagne !, s'écria alors Fíli en tapant sur sa jambe blessée. Mon devoir était de protéger mon oncle et-

- Fíli !, s'écria un nain au loin.

Balin s'avança vers Aghäte et Fíli avec empressement. Il expliqua que Dáin, le cousin de Thorin qui les avait aidés lors de la bataille, l'attendait dans le grand salon pour discuter. Refusant l'aide des deux personnes à côté de lui, le nain blond se leva difficilement. Il remercia le vieux nain puis partit sans regarder la semi-humaine.

- Il m'en veut de l'avoir ramené alors que Thorin était encore en train de se battre…

- Si cela peut vous rassurer, je suis heureux que vous l'ayez fait.

- À vrai dire, ramener Fíli était une idée de son frère…

- On m'a raconté comment vous avez sauvé Fíli quand il a été capturé par Azog, continua-t-il. Sachez que nous vous serons à jamais reconnaissant, mademoiselle Aghäte. Et je parle aux noms de tous les nains de la compagnie si ce n'est plus. Si vous n'aviez pas été là, qui saurait lesquels d'entre les héritiers d'Erebor auraient survécu… Bon, je dois vous laisser. J'ai beaucoup à faire.

Aghäte le remercia avec un faible sourire avant qu'il parte. Les paroles de Balin lui avaient un peu remonté le moral jusqu'à ce qu'elle repense à Thorin. Elle repartit en sanglots un bon moment.

.

Les jours passèrent. Aghäte était restée dans sa chambre et ne sortait que pour se rendre à la salle d'eau. Son amie Tauriel, qui logeait à Erebor depuis la fin de la bataille, lui apportait ses repas et l'aidait à la soigner. Sa blessure n'était pas belle à voir et la faisait de plus en plus souffrir. Tauriel lui avait conseillé de retourner à la Forêt Noire. Les elfes réussiraient mieux à la soigner qu'elle ici, sans matériel.

Sachant elle-même que c'était une bonne idée, elle décida qu'elle irait là-bas une fois les funérailles de Thorin passées. Elle s'inquiétait aussi pour son père mais Tauriel lui avait indiqué qu'il était bel et bien vivant.

Les nains passaient prendre de ses nouvelles de temps à autre mais Fíli ne semblait pas avoir le temps. Kíli lui avait expliqué qu'il était débordé avec ses futures responsabilités de roi. Pourtant, elle savait que s'il ne venait pas la voir c'est parce qu'il lui en voulait toujours pour la mort de Thorin. Elle ne lui en voulait pas. Elle avait sa part de responsabilité dans ce qui était arrivé…

.

Le jour des funérailles de Thorin fut un jour plus sombre et triste qu'Aghäte ne pouvait le supporter. Elle était restée en retrait avec Tauriel. Celui qui lui faisait le plus de peine était ce pauvre Bilbon qui était inconsolable. De ce qu'elle avait compris, il resterait jusqu'au couronnement de Fíli et il rentrait ensuite chez lui.

Le soir des funérailles, Aghäte alla trouver Kíli et lui demanda de transmettre une lettre pour Fíli en lui expliquant qu'elle partait pour se soigner à la Forêt Noire. Le futur roi d'Erebor ne l'avait pas approché de la journée. Elle avait décidé de partir le lendemain à l'aube. Vu la gravité de sa blessure, Tauriel avait prévu de l'accompagner.

..

Trois mois avaient passé. Tauriel résidait à Erebor et s'occupait des relations entre les nains et les elfes. Elle envoyait des lettres à son ami dès qu'elle le pouvait pour la tenir informée de la situation.

Totalement guérie, Aghäte hésitait à revenir voir les nains. Mais quand elle reçut l'information que le couronnement de Fíli se tiendrait dans quelques semaines, elle ne put résister à l'occasion.

Au bout de trois mois, elle commençait à se rappeler pourquoi elle avait quitté cet endroit il y a longtemps. Elle n'était vraiment pas à l'aise avec les elfes ! Sauf son père bien entendu. Ce dernier avait été blessé pendant la bataille mais il avait guéri plus vite qu'elle. D'abord choqué de son état quand elle était arrivée à la Forêt Noire, il avait été plus qu'heureux qu'elle reste avec lui pendant ces trois mois.

.

Quelques jours avant le couronnement, Aghäte était passée par Dale et avait retrouvé Bard et sa petite famille. Tout le monde allait bien et ils proposèrent de l'héberger le temps du jour J.

Le fameux jour du couronnement arriva. La semi-humaine appréhendait de retrouver toute la compagnie mais surtout Fíli. Il lui avait terriblement manqué mais elle avait peur de sa réaction quand il la verrait. À vrai dire, elle n'était pas spécialement invitée…

Aghäte était arrivée avec Bard et ses enfants et ne s'attendait pas à voir autant de monde. La libération d'Erebor était vite arrivée aux oreilles des Nains et tous revinrent au plus vite retrouver leur grande cité.

La cérémonie du couronnement s'était très bien passée et il avait été prévu une grande fête qui durait jusqu'au matin. Aghäte était ravie de retrouver Erebor de cette façon. La joie pouvait se lire sur les visages des nains et des naines.

Bard et ses enfants finirent par rejoindre d'autres connaissances. Même entourée d'autant de nains, Aghäte se sentait petite. Elle n'était déjà pas très grande…

Elle voyait au loin Fíli, entouré de nombreux vieux nains, avec la couronne de ses ancêtres et habillé comme un roi. Elle n'osait pas s'approcher puis elle remarqua facilement Tauriel dans la foule. Son amie fut très heureuse de la voir. Elles discutèrent seules toutes les deux jusqu'à ce que quelques nains de la compagnie vinrent leur parler.

- Je suis très heureuse de vous voir !, dit-elle en sautillant sur place.

- Nous aussi ! Quelle surprise !, s'écria Dwalin. On vous croyait chez les elfes !

- J'y étais. Mais trois mois dans la Forêt Noire c'est déjà beaucoup trop pour moi ! Beaucoup trop d'elfes !, riait-elle en faisant rire les autres par la même occasion.

- Je vous comprends !, intervint Glóin.

- Glóin ! Votre fils et votre femme sont là ?

- Non pas encore, ronchonna-t-il. Ils arriveront dans quelques semaines !

- Aghäte ! Vous avez l'air en forme !, s'exclama Bilbon qui venait de les rejoindre.

- Oui ! Vous aussi !

- Vous êtes allés voir le nouveau roi ?, demanda Bofur enthousiaste.

- Non. Je n'oserai pas déranger le roi. Il m'a l'air déjà bien entouré !, plaisanta-t-elle. Et Kíli ? Je ne l'ai pas trouvé.

- Je suis làààà !

Entendant son nom, le nain concerné cria de loin. Aghäte lui fit signe de loin. Il semblait s'approcher avec une naine à ses côtés.

- Aghäte ! Tu nous a manqué !, s'écria-t-il en lui tapant dans le dos. Tu es très jolie aujourd'hui !

- C'est moi qui t'ai manqué ou c'est de ne pas pouvoir m'embêter qui t'as manqué ?, lui rendant son coup.

- Les deux !, avoua-t-il en souriant.

La naine à côté de lui se racla la gorge pour rappeler sa présence. Elle ne semblait pas jeune et elle portait une très belle robe. Une robe de quelqu'un de hautes sociétés. Après son analyse, Aghäte comprit qui elle avait en face d'elle avant que Kíli ne la présente. Elle devint alors gênée de son comportement aussi jovial et si peu féminin.

- Maman, je te présente Aghäte ! Celle qui m'a sauvé à la Ville du Lac et qui a sauvé Fíli dans la bataille, dit-il en s'écartant pour qu'elles puissent se faire face. Aghäte, je te présente ma mère, Dís.

- Hum, hésitait-elle. Déjà c'est Tauriel qui a sauvé Kíli. Mais enchanté de faire-

La semi-humaine ne put parler davantage car Dís la prit de toutes ses forces dans ses bras. Tellement fort qu'elle crut qu'elle allait y passer…

Dís et Aghäte discutèrent un petit moment. Peu à peu les nains qui les entouraient partirent du groupe jusqu'à ce qui ne reste qu'Aghäte, Kíli, sa mère et Tauriel. La semi-humaine observait le nouveau roi et finit par demander son état de santé à son frère.

- À part sa jambe, le reste a l'air d'aller. Il ne pourra plus marcher comme avant ni même courir, répondit le jeune brun. Cela aurait pu être bien pire...

- Les elfes n'ont rien pu faire ?, demanda-t-elle à Tauriel.

- Non… Nous avons essayé divers onguents et autres traitements. Mais au moins, il semblerait qu'il ne ressente presque plus de douleurs grâce à quelques remèdes.

- Au moins il est en vie !, dit sa mère pour clôturer le sujet. Bon, je vous laisse les jeunes !

La mère de Kíli partit en souriant. Aghäte put enfin souffler. Elle avait eu une montée de stress dû à la présence de Dís et Kíli se moqua maintenant d'elle.

La semi-humaine finit par laisser seuls Tauriel et Kíli pour aller chercher un nouveau verre. Elle n'en n'était pas à son premier et elle commençait à avoir chaud. Elle décida alors d'aller prendre l'air dans un endroit tranquille.

.

Du haut des remparts comme elle avait l'habitude d'aller avant la bataille, Aghäte était assis sur un petit banc en pierre. L'air frais lui faisait grand bien !

Elle ferma les yeux quelques instants pour profiter du calme jusqu'à ce qu'elle sente quelqu'un s'asseoir à côté d'elle. Pensant qu'il s'agissait de Kíli qui venait encore l'embêter, elle ne réagit pas. La personne à côté d'elle se racla la gorge puis dit : « La fête n'est pas à ton goût ? ». Elle reconnut instantanément la voix du nain blond pour lequel elle a fait tout ce voyage jusqu'ici.

Sous la surprise, elle se leva du banc brusquement et fit face à Fíli. Une petite brise fraîche lui fit reprendre ses esprits. Elle observa quelques secondes le nouveau roi avec sa tenue et tous les accessoires qui en découlaient.

- Que me vaut votre présence à mes côtés, cher roi sous la montagne ?, plaisanta-t-elle en souriant.

- Tu m'enlèves les mots de la bouche, dit-il sérieusement. Que me vaut ta présence ici ? Je ne m'attendais pas à te voir. C'est pour Bard que tu t'es fait aussi belle ?

- Q-quoi ?, bafouilla-t-elle en assimilant tout ce qu'il lui disait. Bard m'a accompagné pour que je n'arrive pas seule. C'est tout… Et pour la robe, c'est mon père qui me l'a offerte. Une robe elfique aussi belle rend ridicule portée par une petite humaine comme moi.

- Elle te va très bien. Tu es ravissante, dit-il tout aussi sérieusement qu'avant.

- Ah. Hum. Merci…, articula-t-elle les joues cramoisies de gêne en se rasseyant sur le banc.

- Pourquoi… Pourquoi es-tu partie sans me prévenir ? En me laissant juste une lettre, dit-il en la regardant enfin dans les yeux.

- Je te l'avais expliqué dans la lettre. Je suis partie pour me faire soigner par des elfes, dit-elle en esquivant son regard. Je ne voulais pas vous gêner alors que vous aviez tous mieux à faire. De plus, mon père était blessé et je souhaitais le voir.

- Tu m'as laissé seul le lendemain des funérailles de mon oncle… J'étais-

- Tu n'étais pas seul ! Ton frère et la compagnie étaient avec toi ! Et j'en ai marre de me justifier à la fin !, s'emporta-t-elle en se levant du banc. Je sais que tu me détestes depuis que je t'ai ramené au campement des elfes ! Je sais que tu penses que Thorin est mort à cause de moi ! Alors pourquoi es-tu venu me parler ?

Aghäte avait parlé plus fort qu'elle ne le voulait. Elle recula de quelques pas. Sentant ses larmes monter aux yeux, elle était prête à partir mais Fíli la retient par la main. Il se leva doucement et elle l'aida par réflexe en pensant qu'il allait tomber. Elle lui tenait les bras quand il leva sa tête. Ils purent enfin se regarder tous les deux dans les yeux. Après un moment silencieux, Fíli commença à parler en glissant sa main sur la joue de la semi-humaine.

- Je ne t'ai jamais détesté, Aghäte. Je m'excuse si tu as pu le penser. À la mort de mon oncle, j'étais perdu. Je m'en voulais tellement et j'avais honte de moi au point de ne plus pouvoir te faire face. J'ai compris mon erreur trop tard ; quand tu n'étais plus là. Mais sache que je te serais éternellement reconnaissant de m'avoir sauvé la vie, finit-il en caressant la joue d'Aghäte du bout des doigts.

- Je suis désolée, Fíli. Je pensais que tu ne voulais plus me voir et je t'ai laissé juste après les funérailles… Tu m'as tellement manqué ces derniers mois, avoua-t-elle en glissant elle aussi sa main sur la joue du nain.

- Moi aussi. J'ai cru ne jamais te revoir mais tu es bien là.

Fíli souriait enfin chaleureusement à celle qu'il aimait. Elle lui rendit son sourire. Il lui essuya les quelques larmes qu'elle avait aux coins des yeux avant d'attirer ses lèvres sur les siennes. Rapidement, Aghäte approfondit leur baiser. Cela faisait bien trop longtemps qu'elle rêvait de cet instant qu'elle ne voulait plus perdre une seconde. Fíli, d'abord surpris par les avances de la semi-humaine, en profita pour passer sa main derrière son dos et l'attira fortement contre lui.

Leurs baisers continuèrent un long moment jusqu'à ce qu'Aghäte recula un peu pour reprendre son souffle.

- Fíli, quelqu'un pourrait nous voir…

- J'ai une solution. Suis-moi !, s'exclama-t-il en souriant jusqu'aux oreilles.

- Mais c'est ton couronnement. Tu dois retourner à la fête !

- À cette heure-ci, les Nains s'intéressent plus à ce qu'ils ont dans leur chope qu'à leur roi !

Aghäte rit à sa remarque puis le suivit.

Fíli ouvrit une porte et Aghäte entra à l'intérieur. La chaleur de la cheminée lui fit remarquer qu'il faisait finalement bien froid à l'extérieur. Elle remarqua alors qu'il s'agissait d'une chambre. Elle regarda alors le nain poser son grand manteau de roi sur un fauteuil près de la cheminée.

- Attends, c'est ta chambre ? Tu m'as emmené dans ta chambre ? Et si quelqu'un nous avait vu !?

- Ils sont tous à la fête, dit-il en l'invitant à le rejoindre près du feu. Et c'était le seul moyen d'être tranquille tous les deux.

Elle réfléchit et se rendit compte qu'il s'agissait bien de la seule solution possible. Elle s'approcha du nain et toucha sa jambe anciennement blessée.

- Elle te fais encore souffrir ? Je veux dire, tu veux t'asseoir ?

- Non, tout va bien. Je sais que je ne pourrais plus jamais courir et encore moins me battre mais certains ont connu pire. Et toi à la Forêt Noire, ils t'ont bien soigné ?, demanda-t-il en glissant sa main sur son flanc gauche.

- Ah hum, essayait-elle de dire perturbé par la main du nain. Oui très bien. J'ai eu de la chance que la blessure ne soit pas du même côté que celle de votre évasion sur la rivière. Je n'ai jamais été autant blessée de toute ma vie qu'en étant dans cette compagnie !

- Ce n'est pas vraiment drôle, tu sais. Bon, laissons les blessures de côté, dit-il en l'attirant contre lui avec sa main qui était sur le flanc d'Aghäte. Tu es magnifique ce soir. Ton père a bon goût ; même si c'est un peu bizarre de le dire comme cela.

- Ah je retrouve enfin le Fíli qui me complimente beaucoup trop !, plaisanta-t-elle pour cacher sa gêne.

- Et moi l'Aghäte qui rougit beaucoup trop ! rit-il en passant sa main dans les cheveux de la semi-humaine. Tu n'as plus le bijou que je t'avais donné ?

- Si, bien sûr. Mais je l'ai transformé en collier. Regarde, dit-elle en sortant le collier de sa robe. Je ne voulais pas que les autres le voient.

- C'était le but, murmura-t-il à l'oreille d'Aghäte. Que les autres le voient et sachent que tu appartiens déjà à un nain

Sentant le souffle du nain dans son cou, elle frissonna. Plus qu'heureux de l'effet qu'il avait sur elle, Fíli profita d'être près de son cou pour y déposer de légers baisers. Il remonta vite sur ses lèvres pour l'embrasser. Seuls et à l'abri des regards, le couple s'embrassait de plus en plus passionnément. Fíli se détacha en souriant. « Viens, nous avons trois mois à rattraper ! », dit-il en l'invitant vers son lit.

.

Le lendemain, le réveil fut plus brutal que prévu. Confortablement allongé dans des draps bien chauds, Aghäte entendit des voix et ouvrit ses yeux. Elle vit Fíli debout, à moitié habillé, parlant fort avec un autre nain. Ce dernier entra brusquement dans la pièce alors que Fíli lui disait d'attendre à l'extérieur. Elle reconnut alors Kíli et son stress diminua.

- Fíli ! Il faut que tu-

- Tu ne peux vraiment pas attendre le petit déjeuner !, le coupa-t-il énervé.

- Mais tu-

Le jeune nain brun remarqua alors Aghäte dans le lit de son frère et devient rouge de la tête au pied. Gênée, elle lui fit un petit « coucou » de la main et il tourna son regard vers son frère. Il s'excusa rapidement et quitta la chambre en courant.

Aghäte éclata de rire et Fíli vint s'asseoir à côté d'elle. Il lui déposa un baiser sur le front avant de s'excuser.

- Je suis désolé de ce réveil quelque peu mouvementé.

- Ce n'est pas ta faute. Et je commence à connaître ton frère. Le point positif, c'est qu'il ne rentrera plus jamais dans ta chambre maintenant !

Ils rirent un petit moment jusqu'à ce qu'Aghäte reprenne la conversation.

- Hum, Fíli. Je pense qu'il serait mieux de le dire à personne, pour nous deux. Kíli et Tauriel sont déjà au courant - voire même Legolas - mais ce serait mieux de ne pas l'ébruiter.

- Pas question ! Tu vas m'épouser et tu deviendras la reine d'Erebor à mes côtés, disait-il sérieusement.

- Non mais tu t'entends parler ? Tu es le roi maintenant. Tu ne peux pas te marier du jour au lendemain avec une semi-elfe qui sort de nulle part !

- Et pourquoi pas ? Mon père n'était pas quelqu'un de spécial. Et tu ne sors pas de nulle part !

- Fíli… On laisse cette histoire de mariage, de reine et de tout le reste de côté ; le temps qu'Erebor soit reconstruite. Et on verra après. D'accord ?

- D'accord…, dit-il d'une mine boudeuse. Est-ce que j'ai le choix, de toute façon ?

- Pas du tout !

Aghäte lui sourit avant de l'embrasser puis de le serrer fort dans ses bras.

.

Après le couronnement, Bilbon repartit chez lui avec les trésors qui lui était dû. Certains nains avaient promis de passer le voir s'ils passaient dans la région. Aghäte et lui s'étaient promis de s'envoyer régulièrement des lettres pour se tenir informer.

Peu après le départ de Bilbon, Fíli proposa à Aghäte le poste similaire de Tauriel mais pour les humains. Elle devait donc s'occuper des affaires entre les humains et les nains. Et ce n'était pas de tout repos !

Même si Fíli s'opposa à son idée, Aghäte prit une petite maison à Dale pour s'y installer. Elle passait la majeure partie de son travail à Dale mais elle revenait au moins une fois par semaine à Erebor.

.

La suite au chapitre 27 - F : Et après ?