Epilogue
- On est vraiment obligés de le faire ?
James coule un regard moitié agacé moitié assassin dans ma direction, les bras encombrés par deux petits cartons empilés l'un sur l'autre.
- Tradition familiale, assène-t-il ensuite d'un ton sec et impatient avant de me dépasser et de poursuivre son chemin, l'air de rien.
Je roule des yeux et lâche un grognement dépité. Nous sommes en pleine préparation de notre fête de fiançailles. Après cinq ans passés ensemble et trois à partager le même toit, James a fini par trouver le courage de demander ma main à mon père. Un peu vieillot comme méthode, mais il parait que ça se fait encore beaucoup chez les sorciers. Ensuite seulement, il m'a demandé mon avis. J'aurais un chouïa préféré qu'il fasse les choses dans l'autre sens, mais bon . . . En tout cas, si j'avais su la charge de travail que ça me donnerait, j'aurais envoyé bouler les Potter et leur « tradition familiale » de mes . . .
- Tu viens ? m'appelle James depuis le jardin.
Je suis bien tentée de lui répondre un truc mielleux et hypocrite à souhait du style « oui mon canari des îles » mais je sais que James a du mal à apprécier mon sens de l'humour lorsqu'il est stressé, alors je souffle un bon coup, attrape le dernier carton posé sur la table de la salle à manger et le rejoins. Il a commencé à dresser les tables, disposées de sorte à former la lettre u, installées au beau milieu du jardin de mes parents et protégées par une tonnelle blanche louée pour l'occasion. Après avoir rattrapé James, je pose mon carton sur la table la plus proche et commence à en sortir les verres, emballées dans du papier bulle pour les préserver d'un malencontreux accident. Nous travaillons de concert pendant quelques minutes, en silence, avant que ma mère ne déboule soudain de la cuisine en hurlant d'un ton paniqué :
- Eve ! Va vite au supermarché, j'ai oublié les citrons pour les huîtres !
Je repousse un haut-le-cœur qui m'envahit rien qu'en imaginant les fruits de mer grisâtres et tremblotant dans leurs coquilles. Comment peut-on aimer manger une chose aussi dégoûtante ? Ca m'étonnera toujours.
- Papa ne peut pas y aller ?
Ma réponse est loin de plaire à ma mère vu le regard incendiaire qu'elle prend le temps de m'envoyer en se tournant à demi alors qu'elle retourne à l'intérieur de la maison.
- Bon, je suppose que ça veut dire non.
J'abandonne serviettes et couverts, les laissant entre les mains peu délicate de James.
- Je te laisse terminer ça tout seul. Je ne devrais pas en avoir pour long, le magasin n'est qu'à cinq minutes à pied.
- Transplane, tu iras plus vite, rétorque-t-il, tout sorcier de naissance qu'il est, sans même prendre la peine de lâcher sa besogne du regard.
- J'ai vraiment besoin de te rappeler pourquoi on dresse les tables à la main au lieu d'utiliser nos baguettes ? réponds-je avec un air condescendant.
- Ah oui, c'est vrai, répond-t-il en roulant des yeux, exaspéré, parce que monsieur a du mal à se tenir éloigné de sa baguette plus de dix minutes. D'ailleurs il est quelle heure ?
Sans attendre ma réponse, il repose le tas de fourchettes qu'il était en train d'installer pour s'emparer de mon poignet et lire les indications de ma montre bracelet flambant neuve.
- OK, encore une heure à attendre avant que le Ministère rende la maison de tes parents imperméable aux moldus, souffle-t-il d'un ton presque soulagé.
Je retiens un sourire et l'envie de me ficher un peu de lui, et me contente de lui rappeler :
- Oui, et une heure et demi avant l'arrivée des premiers invités, alors active un peu, tu veux ? Crois moi, t'as pas envie de voir dans quel état cela met ma mère quand la réception qui s'organise chez elle n'est pas prête dix minutes avant l'heure fatidique.
James dresse les mains en prenant un air faussement apeuré puis reprend là où il s'était arrêté. Bon, finalement, il est peut-être moins sur les nerfs que ce que je croyais. Tant mieux, je pourrais le taquiner tant que je veux dans ce cas-là. Et j'en aurais bien besoin vu la journée qui se profile. Je lui pique un bisou sur la joue et m'éclipse pour aller acheter les citrons exigés par ma mère.
Comme prévu, il ne me faut pas plus de cinq minutes pour rejoindre le petit supermarché du quartier. Comme c'est samedi matin, il est bondé. Je dois jouer des coudes pour me glisser jusqu'au rayon fruits et légumes et, arrivée devant les citrons, me rend compte que je n'ai aucune idée de la quantité dont on va avoir besoin. Par mesure de sécurité, je décide d'embarquer une trentaine d'agrumes. Au pire, s'il y a du rab, je sais que ma mère trouvera quoi en faire. Et je salive d'avance à l'idée d'une jolie tarte au citron meringuée. Du coup, j'en prends dix de plus, histoire d'être sûre de pouvoir assouvir ma gourmandise. J'ignore les regards abasourdis de certains clients quand ils me voient dévaliser l'étal et déguerpis en direction des caisses avant que l'un ou l'autre ne vienne me taper un scandale : je n'ai pas de temps à perdre, on a encore beaucoup de choses préparer pour la petite sauterie.
Et c'est en me glissant dans l'un des rayons du magasin pour rejoindre l'une des caisses les moins encombrées que mon cerveau fait tilt. J'en suis à deux doigts de laisser tomber mon armée de citrons au sol. Mais je me reprends assez vite, repousse l'idée loin dans ma tête et poursuis ma route comme si de rien n'était. Je m'en inquiéterais plus tard.
oO0Oo
Il est midi passé de deux minutes quand les premiers invités débarquent. Pour l'occasion, mes parents m'ont laissé aménager une petite zone d'arrivée devant le portillon, juste devant la limite de la propriété qu'un membre du Ministère est venu protéger un peu plus tôt. Et ce sont les parents de James qui ouvrent le bal.
Ginny et Harry débarquent en tenue chic mais décontractée, comme nous l'avons exigé. Il embrassent aussitôt mes parents avec bonne humeur, les deux couples s'étant rencontrés régulièrement lors des fêtes Weasley auxquels mes parents sont très régulièrement conviés, et ayant noués un début d'amitié. Je suis toujours aussi heureuse de constater que, comme James l'avait prédit quelques années plus tôt, mes parents acceptent le monde magique avec bonheur et curiosité.
Alors que James escorte ses parents vers le jardin, Albus arrive ensuite avec les grands-parents Weasley. Arthur embarque immédiatement mon père pour découvrir les « bizarreries » moldus qu'il n'a pas eu le temps de voir les rares fois où ils sont venus.
- Tu viens en célibataire ?
Très discrètement, histoire de ne pas être vu par Molly qui tape la bise à ma mère, le jeune Potter me fait un doigt d'honneur. J'émets un petit rire amusé et lui montre de la main la direction à suivre pour rejoindre le jardin alors que Molly et maman disparaissent dans la maison - et certainement même dans la cuisine.
Depuis sa sortie de Poudlard, Albus enchaîne les histories de cœur sans que celles-ci ne durent vraiment, du coup, James lui a interdit de ramener qui que ce soit : il ne veut pas d'une fille de passage au bras de son frère pour le jour de nos fiançailles officielles.
C'est Shelly qui transplane ensuite. Clara, l'amie de James, est accrochée à son bras puisqu'elle n'a jamais réussie à avoir son permis. Je les accueille avec une accolade, toute contente de les revoir enfin après leur périple de trois mois aux États-Unis dans le cadre de leur travail en binôme de magizoologiste.
- Vous m'avez manqué, dis-je en les serrant fort contre moi toutes les deux en même temps.
Elle me rendent mon étreinte avec autant de passion.
- J'ai du mal à croire que vous allez vous marier, déclare Clara en se reculant quelques instants plus tard. Quand Shelly m'a montré la lettre, j'en revenais pas. J'étais persuadée que t'allait mener James par le bout du nez jusqu'à la fin de sa vie.
- J'aurais bien voulu mais il m'a pris en traître : il a d'abord demandé à mon père.
Clara éclate de rire puis entraîne Shelly à sa suite à l'intérieur de la maison d'où s'échappent des bruits de discussions. Mon amie de longue date me fait alors signe qu'elle et moi devrons discuter à un moment ou à un autre. J'acquiesce en me demandant de quel sujet il s'agit ; après tout, Shelly n'est pas du genre à s'épancher sur ses voyages.
A la suite des deux amis, c'est la ribambelle d'oncles, tantes et cousins en tous genres qui débarquent coup sur coup. Je laisse la plupart se diriger vers le jardin avec juste un salut oral, trop occupée à gérer l'afflux massif de sorciers et à leur éviter des accidents fâcheux. En même temps, c'est un peu de notre faute, on aurait dû prévoir et agrandir la plage horaire de chacun des Weasley. Il n'y a que pour Dominique que je prends le temps de m'attarder quelques secondes pour un câlin puisque nous n'avons pu communiquer que par lettres durant les derniers mois et qu'elle aussi m'a beaucoup manqué, ainsi que pour Teddy et Victoire qui arrivent avec Andy, leur adorable fillette de deux ans qui ne manque pas de venir voir si je n'ai pas une petite douceur à lui glisser, comme à mon habitude.
Les derniers à transplaner sont Lucretia et Scorpius. En les voyant débarquer accrochés l'un à l'autre, je ne peux me retenir de sourciller de surprise. Lucretia remarque mon mouvement et s'offusque aussitôt :
- Cela fait plus de six mois, tu pourrais peut-être te faire une raison, non ?
Accepter que Lucretia Nott est à trente jours de devenir Mme Malefoy ? Euh non, désolée, mais il va me falloir plus de temps que ça pour encaisser. J'en suis encore à les voir se balancer de la purée à la table des Serpentard après une énième dispute à propos de Quidditch.
- T'es gonflée de me dire un truc pareil, il t'a fallu deux ans pour enfin te faire à l'idée que James et moi, c'était du solide.
Alors qu'elle me tape la bise, elle rétorque avec justesse :
- Pour ma défense, c'est le temps qu'il t'a fallu pour lui dire que tu l'aimais.
Je l'envoie bouler en direction de la maison, prévenant Scorpius que Albus doit bien se trouver quelque part dans la propriété à l'attendre. James choisit ce moment pour revenir du jardin, les mains pleines de pâtée en croûte qu'il a certainement chaparder en douce dans la cuisine.
- Tu n'as pas eu peur que Molly te voit ? dis-je alors que j'attrape un morceau qu'il me tend.
- C'est le cas mais elle s'est contenté de me faire les gros yeux. C'est ma fête de fiançailles, je peux bien faire ce que je veux quand même, non ?
Si seulement ma mère était aussi ouverte d'esprit. Quand j'ai voulu me servir un verre de citronnade dans la cuisine il y a trois quart d'heure, elle a failli me balancer sa pelle à tarte en pleine face.
- On attend encore beaucoup de monde ? demande James.
- Seulement ceux qui prennent le portoloin. J'ai hâte de voir la tête que fera Ellen à son arrivée d'ailleurs.
Et j'espère qu'elle sera encore plus laide à voir que moi la première fois que j'ai utilisée un de ces fichus objets ensorcelé .
- Tu es une horrible personne, fait James en secouant la tête d'un air affligé. Mais je t'aime quand même.
Il me pique un baiser en souriant puis repart en sens inverse, non sans m'avoir confié un peu de munitions pour reprendre des forces, au moment où un scintillement du côté des rosiers de mon père m'indique que le premier portoloin arrive.
oO0Oo
Je referme la porte de la salle de bain au moment où Victoire débarque en trombe, portant dans ses bras une Andy recouverte de chocolat de la tête aux pieds, et s'engouffre dans la pièce que je viens de quitter.
- Désolée pour la fontaine de chocolat de ta mère, Andy a échappé à la vigilance de tout le monde, se contente de d'expliquer Teddy qui apparaît derrière sa femme, sac à langer en main.
Je secoue la tête pour lui signifier que ce n'est pas grave et redescends au jardin, où quelques braves s'attellent déjà à réparer les dégâts. Grâce aux relations du père de James qui nous ont permis d'obtenir les protections posées sur la propriété, Ginny a vite fait d'effacer l'incident d'un tour de baguette magique. Même si je suis à cinq bons mètres d'elle, je vois clairement les yeux de ma mère briller d'envie. J'ai intérêt de me méfier, elle risquerait de m'obliger à m'occuper bénévolement de son mènage.
- T'étais où ? s'exclame James en apparaissant soudainement à mes côtés.
- Aux toilettes, pourquoi ?
A voir son air paniqué, on dirait qu'on vient de lui annoncer que les commandes de la semaine passée arriveront avec trois jours de retard. Je ne plaisante pas, c'est exactement la tête qu'il a tiré quand ça nous est arrivé il y a quelques semaines. En le voyant, j'avais cru que quelqu'un était mort, moi.
- T'as vu Albus ?
- Euh non, pourquoi ?
- Et ta copine des supporteurs des Lions Ailés, tu l'as vu elle ?
- Marie ? Non plus, pourquoi ?
Bon, je commence sérieusement à en avoir marre de lui demander ce qu'il se passe. Il compte me répondre un jour ou pas ?
- Punaise, mais il peut pas se tenir tranquille deux heures, celui-là ! râle James avant de disparaître à l'intérieur de la maison au pas de course.
Je me tâte un instant à lui courir après, histoire de comprendre ce qu'il se passe, mais renonce rapidement en voyant que le buffet a été servi et que les invités commencent à piller les munitions. Je m'approche de ma place, glisse le petit flacon que je gardais cachée au creux de mon poing dans une des poches de la veste de costume de James, qu'il a posé sur sa chaise dès le lancement des festivités, et attrape mon assiette pour aller me servir à mon tour.
- Je crois que Albus s'est trouvé une nouvelle conquête, m'annonce Shelly dès que je me glisse près d'elle pour faire mon choix.
- Ah bon ? Comment ça ?
J'hésite entre le pâté en croûte de Molly - une dinguerie ! - et les crudités, des deux le meilleur choix si je ne veux pas voir mon tour de taille s'élargir durablement comme l'a fait celui de ma mère dès qu'elle a cessé de faire attention à sa ligne - même si elle ne s'en plaint pas.
- Je l'ai vu tenter de s'éclipser discrètement avec une de tes invitées parisiennes.
Et là, c'est le déclic. Ca aura mis le temps mais je finis par percuter. Je lâche un juron à mi-voix et dépose mon assiette sur le buffet avant de retourner vers la maison au pas de course. Si je n'arrête pas James avant qu'il chope son frère, ça va finir en scandale cette histoire. Je ne comprends pas cette lubie de la part de mon cher et tendre : qu'est-ce que ça peut bien lui faire que son frère se tape tout ce dont il a envie ? Il est jeune, il est mignon, il se fait plaisir. Je ne vois pas où est le mal !
J'ignore le rez-de-chaussée, il n'y a pas besoin d'avoir eu la totalité de ses APSIC's pour comprendre que ce n'est pas là qu'il faut chercher un coin discret. Je monte directement à l'étage et trouve James occupé à échanger des banalités avec Teddy et Victoire qui viennent de finir de rendre son humanité à leur fille.
- Vous devriez vous dépêcher de rejoindre le buffet, dis-je avec un entrain un peu poussée. Si vous tardez de trop, il ne restera plus rien. Lily est déjà en train de faire leur fête aux petits-fours de ma mère.
Je ne mens qu'à moitié, je sais que la benjamine des Potter raffole de toutes nourritures qui existent en format miniature. D'ailleurs, mon demi-mensonge convainc Teddy et Victoire de rejoindre le jardin aussitôt. Mais pas James. Donc, je dois de nouveau mentir si je ne veux pas qu'une énième dispute entre les frères éclate.
- Au fait, si tu cherches toujours ton frère, Shelly m'a dit qu'elle avait vu Scorpius et Albus en train de discuter devant la maison il y a vingt minutes. Ils doivent encore y être.
Je vois le corps de James se détendre.
- Dis, fais-je en m'approchant de lui pour lisser sa chemise blanche sur son torse d'un geste doux, tu peux m'expliquer pourquoi tu ne veux pas que ton frère fasse ce qu'il veut de ses fesses ? C'est un grand garçon, tu sais. Et les filles qu'il drague sont assez grandes pour savoir ce qu'elles font elles aussi. Tu devrais lui lâcher un peu la grappe. Surtout aujourd'hui. C'est notre journée.
J'essaye d'avoir l'air aussi mignonne que je peux, histoire de le distraire et de l'obliger à ne penser qu'à nous. James passe une main irrité dans ses cheveux, désordonnant au passage une coiffure que j'ai mis plusieurs minutes à fignoler ce matin, puis soupire :
- Ce qu'il fait est complètement débile, il cherche juste à oublier son ex. Toutes ces filles sont des pis-aller.
Je me demande de quelle ex-copine en question il parle vu que son Don Juan de frère en a à la pelle. Mais je vois Albus qui me fait silencieusement signe de libérer le passage depuis l'embrasure de la porte de mon ancienne chambre alors je garde mes questions pour plus tard.
- Bon, tu me parleras de tout ça une autre fois, d'accord ? Je voudrais que tu m'accompagnes au jardin pour qu'on déjeune ensemble. J'ai l'impression qu'on ne fait que se croiser depuis que cette fête de fiançailles à débuter.
Le visage de James prend instantanément un air amoureux et se penche pour m'embrasser. Je lui rends son baiser avec entrain, tentant de le faire durer un petit peu, aussi bien par envie que pour faire chier ce crétin d'Albus. Mais quand les mains de James commencent à s'égarer sur mes cuisses et soulèvent la jupe de ma robe pour tenter une escapade intime, je me détache de lui.
- Gardons ça pour plus tard, tu veux ?
James fait une moue un peu déçue mais me suit docilement lorsque je l'attrape par la main pour l'obliger à descendre avec moi. Depuis les escaliers, d'un simple coup d'œil, j'avise Albus qui me tend un pouce tendue vers le haut depuis l'embrasure de la porte.
T'inquiètes beau frère, ce n'était pas gratuit . . .
oO0Oo
Entourée de Dominique, Shelly, Clara et Lucretia, je surveille Andy en train de crapahuter près des massifs de bégonias que ma mère chouchoute avec amour depuis des années. La petite fille aussi les trouve à son goût, si j'en juge par la détermination avec laquelle elle tente de cueillir les fleurs, sa maladresse de bambin ne lui permettant que d'arracher des poignées de malheureux pétales.
Clara et Shelly nous font le récit de leur escapade professionnelle depuis presque vingt minutes à présent. A travers leur façon de narrer ce qu'il s'est déroulé pendant toutes ces semaines, on sent toute leur passion et leur affection pour les créatures magiques. On peut sentir autre chose aussi . . . ou peut-être suis-je la seule à ressentir les choses ainsi . . . mais j'ai l'impression que ces deux-là se sont développées des atomes plus que crochues. Rien d'étonnant de la part de Clara, tout le monde sait depuis longtemps qu'elle aime les femmes, mais je ne m'y attendais pas vraiment de la part de Shelly. Même si, dans les faits, elle n'a jamais verbalement assuré sa préférence envers la gent masculine, je l'ai seulement déduit de son histoire avec Michaël Flint, histoire qui a pris fin avec l'arrêt de nos études à Poudlard.
Avisant le geste de Lucretia à ma gauche qui frotte son front d'un air douloureux, je m'enquiers de son bien-être :
- Ca ne va pas ?
- Une migraine, ça va passer, me rassure-t-elle aussitôt.
- Tu veux un remède ? James en trimbale toujours quelques uns sur lui.
Tout ça à cause des vapeurs de potions. Il passe tellement de temps dans la cave de la boutique à faire des expérimentations pour les nouveaux produits de Weasley & Co qu'il finit par se manger des migraines carabinées aux moment les plus inattendus. C'est sans doute ce qu'on appelle le revers de la médaille.
- C'est pas de refus.
- Va lui demander, il a dû en planquer quelque part en arrivant.
Lucretia s'éclipse aussitôt. Je me lève ensuite pour récupérer Andy qui a profité de mon manque d'attention envers elle pour aller se balader dans la terre sous le massif de bégonia. Je l'en retire, les genoux crottés. De la main, j'enlève ce que je peux de son pantalon rose, le dernier vêtement propre que ses parents ont emportés avec eux. J'espère qu'ils ne m'en voudront pas trop.
A peine ai-je remise Andy sur pieds et l'ai envoyé s'amuser loin des précieux massifs de fleurs de ma mère, que Ginny vient nous chercher.
- Les filles, nous allons servir le dessert. Eve, je crois que ton père a préparé un discours.
Ouhlà, je la sens mal cette histoire. Mon père n'a jamais été très prolixe et je n'imagine pas ce qu'il peut donner avec un petit coup dans le nez. Je sais qu'il a abusé sur la boisson parce que je l'ai vu s'enfiler plus de verres qu'il n'en a l'habitude. J'espère que ça ne va pas tourner à la honte ultime.
Dominique, Shelly, Clara et moi retournons à nos places. Je fais un crochet du côté de Teddy et Victoire pour leur rendre leur fille avant de m'asseoir sur ma chaise, remarquant au passage l'absence de James. Tout le monde se réinstallant tranquillement, j'en profite pour me servir un verre d'eau et tirer sur le tissu de ma robe qui me serre un peu au niveau de la ceinture abdominale : j'aurais sans doute dû éviter de me resservir une troisième fois.
James et Lucretia arrivent bon derniers, émergeant des profondeurs de la maison. James est intercepté par mon père mais Lucretia poursuit sa route dans ma direction. Arrivé à ma hauteur, je la vois glisser ses mains dans les poches de la veste de James. J'en éprouve un léger élan de panique.
- Qu'est-ce que tu fais ?
- James m'a dit qu'il avait bien une potion contre les maux de tête dans l'une de ses poches. Il m'a dit de me servir.
Mon estomac fait un triple salto arrière quand je le vois retirer une petite fiole ovale au contenu laiteux.
- La dose est un peu légère mais ça fera l'affaire, déclare mon amie avant de déboucher franco la fiole et d'amorcer un geste pour en avaler le contenu.
- Arrête ! fais-je alors en hurlant et en lui sautant dessus pour l'empêcher de s'empoisonner.
Le silence se fait autour de la table et Lucretia me regarde avec des yeux ronds. Je tente alors de m'expliquer :
- C'est pas une potion contre les maux de tête, c'est . . . euh . . .
J'essaye de trouver une excuse sans dévoiler la vérité mais mon cerveau patauge dans la semoule. Je ne vois aucune potion de cette couleur qui aurait une bonne raison de se trouver là.
Lucretia reporte son regard sur la fiole et aperçoit le petit parchemin noué autour du goulot que je n'ai pas pensé à enlever. Elle ouvre des yeux ronds puis un sourire ravie s'étale sur ses joues. Elle laisse échapper ensuite un énorme cri de joie et me serre dans ses bras. Je n'ai même pas le temps de commencer à réfléchir à une solution pour empêcher Miss Ragot de trop l'ouvrir, que James nous rejoint.
- Qu'est-ce qu'il se passe ? demande-t-il.
- Félicitations ! hurle Lucretia, toujours au comble de sa joie et indifférente à ma réaction, avec de serrer contre elle un James ébahi.
Dépitée, je porte une main à mon front. Moi aussi je sens la migraine poindre le bout de son nez. Surtout que, je le sais, je ne peux plus stopper ce qui est en train de se passer. Même si j'arrive à faire taire Lucretia dès à présent, tout les gens présents seront trop curieux pour laisser couler. J'esquisse une grimace d'excuse à James, qui me lance un regard interrogateur au moment où Lucretia le relâche pour annoncer haut et fort :
- J'arrive pas à croire que vous allez être parents !
Pourquoi je suis amie avec cette fille déjà ?
FIN
Potter is my king se termine ici. Honnêtement, il y a encore peu de temps, si on m'avait dit que je terminerais un jour cette fanfic, je ne l'aurais pas cru. Mais je suis ravie de voir que c'est le cas et j'espère que c'est aussi le cas pour vous.
Merci à celles et ceux qui ont poursuivi leur leture malgré mes parutions en dents de scie et peut-être à une prochaine fanfic !
