Chapitre 49 : Mission
Après cette froide nuit de fin novembre, je me repris en main. Novembre, était le mois de notre premier rendez-vous amoureux... Peut-être était-ce la raison de ma nostalgie ?
Quoi qu'il en soit, j'avais vidé mes yeux des dernières larmes. Je n'avais plus repensé à lui depuis.
J'avais même rencontré quelqu'un le soir de la nouvelle année de 2008.
Il était beau. Les yeux bleus avec quelques taches dorées et des cheveux bruns, court et bouclés.
C'était l'ami d'une de mes collègues, Maggie, qui nous avait présentés, lors de cette soirée passée entre amis au centre ville.
Nous nous étions directement bien entendu. Nous avions parlé pendant des heures autour d'un verre avant de planifier un deuxième rendez-vous.
Il avait cinq ans de plus que moi, donc vingt-neuf ans, et enseignait la littérature à l'université. Elle n'aurait pas pu trouver mieux pour moi. C'était quelqu'un de facile à vivre, assez introverti tout comme moi. Sa compagnie était rassurante.
J'étais sortie le soir de la nouvelle année dans un bar avec des amis et quelques collègues. J'avais invité cet homme que je fréquentais depuis quelques temps, Sasha.
Et, ce soir-là, il m'invita à rentrer avec lui, chez lui. Nous avions parlé jusque quatre heures du matin avant que je ne m'endorme dans ses bras. Il m'avait conduit jusqu'à son lit et nous avions dormis ensemble.
Le lendemain, nous avions fait l'amour.
C'était un amant doux, adorable. Je m'étais résolue, depuis ma dernière crise de larme à cause d'Edward, à ne plus rechercher quelqu'un comme lui. Cela ne sert à rien. Je préfère me contenter de la douceur de mon amant plutôt que retrouver la passion que je ne retrouverais jamais plus...
J'aime bien Sasha. Vraiment. Il est un bien meilleur amant que l'avait été Felix, l'un de mes deux seuls plan d'un soir, mais soit.
Nous sommes donc sortis ensemble.
Il vivait dans une maison que j'adorais ! Elle était comme dans mes rêves, lumineuse, spacieuse. Un peu trop loin du port et du lac Michigan mais qu'importe. Ce n'était plus qu'un détail.
Et, il m'aimait. Il me faisait me sentir importante à ces yeux. Il m'offrait plein de cadeaux qui me faisaient rougir. Je ne pouvais tout accepter, il insistait toujours.
Quelques fois je rentrais chez moi avec un bouquet de lilas, mes fleurs préférées. Ou encore, un petit mot sous ma porte, me disant que j'étais magnifique et qu'il m'aimait.
Il était si gentil.
Et, comme je passais le plus clair de mon temps chez lui et que j'avais déjà les clés, il me proposa d'emménager chez lui en novembre cette année-là, en 2008.
J'étais heureuse. Pas extatique ou euphorique mais assez heureuse. Tout roulait bien, je voyais une promotion bientôt arrivée.
Je continuais mes articles et j'adorais faire ça. J'aime savoir que mes années d'études à l'universités sont utiles à quelque chose.
J'étais passée de relectrice à correctrice, ce qui est un cran plus haut. Au lieu de donner mes notes et de proposer des modifications, c'est moi qui me chargeais de prendre rendez-vous avec l'auteur et d'en parler avec lui.
J'étais également passée vers le département « romance » et « jeunesse ».
Par contre, comme c'était un secteur bouché, je gardais mon mi-temps dans les deux entreprises. Cela ne me dérangeait pas, Sasha était toujours occupé à l'université et j'adorais travailler.
Je ne pouvais écrire que deux articles par semaine dans le journal local et cela me prenait qu'une après-midi à écrire. Je n'étais pas trop surchargée, j'avais beaucoup de temps pour moi.
Une nouvelle année passa, puis une autre, et encore une autre. C'est difficile à croire mais le temps passe beaucoup trop vite. La vie d'adulte commence seulement et je ne me sens déjà plus... je ne sais pas, vivre ?
Tout semble être trop... ordonné ?
La routine.
Sasha partait toujours au boulot, revenais avec des corrections ou reste à l'université pour corriger. Il aimait faire écrire ses étudiants mais se donnait beaucoup de travail pour pas grand-chose, au final.
Je ne le vois pas beaucoup et je ne sais pas si cela me dérange.
Après trois ans de relation, des choses doivent changer, non ? C'est normal, non ? D'autant plus que nous vivons ensemble...
Je ne sais pas.
Je me réveillais ce matin-là, le jeudi 11 juin 2011. Je ne sais pourquoi, j'attendais avec impatience le lendemain.
Bientôt huit ans. Plus que deux avant de savoir si nous serions réunis. Et cela me foutais la frousse...
Bientôt, le compte à rebours sera terminé. Je n'avais pas envie qu'il se termine. Je n'ai que 26 ans et je ne pense qu'à une chose – ne pas arriver aux 28 sans l'avoir ce serait-ce que vu.
Ce jeudi onze juin deux-mille-onze, je fus appelée dans le bureau du directeur du journal local. Il y avait deux solutions : soit il me virait ou bien il me donnait enfin une promotion. Après cinq ans de durs services, j'espérais pour la deuxième solution.
J'entrais dans son bureau.
« Oh, bonjour mademoiselle Swan. Asseyez-vous je vous prie »
Ce que je fis.
« Alors, je remarque que vous faites du bon travail. C'est pourquoi j'aimerai vous donner une mission. Je sais que ce n'est pas votre rôle, vous n'êtes pas réellement formée pour cela mais je tiens à vous donner une chance. »
Il me regardait, ses yeux gris perçants mon âme.
« Je voudrais que vous interviewer le gérant d'un nouveau bar qui a ouvert. Moonlight Sky. C'est un bar la nuit et une école de musique le jour, vous comprenez ? » J'hochais la tête « Bien. J'aimerais que vous interviewiez le gérant du bar et que vous fassiez une critique de son établissement. Je veux tout savoir, le bon comme le mauvais. »
« Oui Monsieur, je serais honorée de faire cette critique. »
« Bien. Vous avez un rendez-vous demain à dix-huit heures avec lui, ça vous convient ? »
« C'est parfait. Merci. »
« Je pense que vous méritez une chance. Si tout se passe bien, je pourrais sûrement vous envoyer faire d'autres missions. »
« Très bien, merci encore. »
Et je sortis.
J'étais stupéfaite, aux anges ! J'allais enfin faire une critique ! Et, même s'il s'agissait d'un bar, et non d'un livre, c'était mieux que rien.
Oh mon dieu, je suis si heureuse !
J'étais rentrée, comblée chez Sasha ce jour-là. Je lui avait annoncé la nouvelle et nous avions ouvert une bouteille de champagne. Il était content pour moi et ma promotion. Je me rapprochais de plus en plus de mon rêve.
Ce soir-là, nous avions encore fait l'amour.
Je lui avais raconté mon envie d'avoir des enfants et une maison remplie d'amour. Ce n'était pas dans ces projets pour tout de suite et ne voulait malheureusement pas en entendre parler... On a le temps, me disait-il. On est encore jeune, réalise d'abord ton rêve professionnel avant de penser à ces choses-là, me disait-il.
Sa réaction me peinait un peu. Il ne comprenait pas, mon rêve n'était pas uniquement d'avoir une réussite professionnelle, bien que ça en fasse partie. Mon plus grand rêve a toujours été d'avoir une grande famille heureuse.
Je suis fille unique. Je n'ai pas connu l'amour d'un grand frère... j'aurai aimé en avoir un. Je me suis toujours imaginée avec un grand frère, pas autre chose. Peut-être, j'imaginais qu'il me viendrait en aide. Que, s'il avait existé, je n'aurai pas été harcelée au lycée.
Je ne voulais pas ça pour mes enfants. Je voulais qu'ils soient heureux... et je voulais un mari qui en veuille autant et aussi voir que j'en voulais.
J'étais satisfaite avec Sasha. Quelque chose me manquait simplement, je ne sus exactement si c'était les enfants ou autre chose.
Je m'endormis paisiblement dans ses bras.
Malgré cela, malgré le fait que je sois dans les bras d'un autre homme, comme toujours lorsque je me réveillais un douze juin, je repensais à lui.
C'était étrange de penser à mon ex alors que je dormais dans les bras de mon compagnon. Je tournais la tête et le contempla. Il semblait si paisible.
Je restais quelques minutes supplémentaires dans mon lit, rêvant silencieusement que les deux prochaines années se passent autrement.
Finalement, je sortis du lit et me prépara pour une journée de travail – ouais, je travaille même le dimanche maintenant !
J'aurais beaucoup de choses à faire aujourd'hui, je ne savais rien de l'établissement ni du gérant mais je devais préparer mes questions – mission impossible.
Ils avaient fait exprès de rien me dire, ils voulaient savoir si j'allais poser des questions pertinentes et si j'allais faire un bon travail. Je sais simplement que le bar se trouve dans le Nord, à Evanston. Il avait trouvé un bon emplacement, l'université Northwestern et plusieurs école (primaire et secondaires) se trouvaient à proximité. De plus, il était situé près de la plage et j'aimais bien cet endroit.
Je savais aussi que cet établissement ouvrait officiellement le vendredi suivant. Le dix-sept juin.
Je devais réaliser mon article pour le journal spécial de la semaine (la semaine commençait bizarrement un mardi chez eux, je n'ai jamais compris pourquoi) afin de faire leur publicité.
J'avais un rendez-vous avec lui ce soir et je devais rendre l'article pour demain quinze heures. J'allais faire des heures supplémentaires pour profiter de cette promotion !
Le temps passa encore une fois très vite. À quinze heure, le directeur me donna l'adresse et me dit de m'y rendre dans trois heures. Seule. J'avais le temps de rentrer chez moi, de me préparer avant d'y aller.
J'étais stressée.
Je n'avais toujours pas les moyens pour m'acheter une voiture. Je me rendis là-bas en métro. Heureusement, l'établissement se trouvait à cinq cents mètres de l'arrêt Davis.
J'avais mis un pantalon tailleur noir, des ballerines noires avec une bride à la cheville, un blaser noir et un t-shirt crème.
J'étais très sobre et raffinée.
Je m'étais légèrement maquillée. J'avais mis un rouge à lèvre cuivré mat et un peu de mascara. Je n'étais pas très douée avec le maquillage mais c'était suffisant. Comme le disait Sasha, j'étais encore plus belle au naturelle.
Quel charmeur.
Je trouvais rapidement ce bar. Il était très joli de l'extérieur. Il avait été construit en bois, lui donnant un certain charme. De grandes baies vitrées montraient l'intérieur. J'examinais.
C'était un bar tout ce qu'il y a de plus banal. Des tables en bois, des chaises et des banquettes qui semblent être plus confortables que la moyenne.
La baie vitrée donnait sur un parc. C'était très joli.
Je remarquais qu'il y avait deux portes. L'une, vitrée, donnant directement accès au bar mais une autre porte se trouvait à deux mètres d'elle. Je remarquais donc deux entrée, l'une sûrement pour le bar et l'autre pour les cours de musique.
Caché dans un coin de la salle je vis une scène. Des artistes pouvaient sûrement se produire ici.
Stressée et la gorge nouée, j'entrais.
Je fus directement arrêtée par un homme derrière le bar.
« Mademoiselle, nous ne sommes pas encore ouverts. »
Je n'avais pas encore fermé la porte qu'il me demandait déjà de partir.
« Je suis la journaliste. Je viens voir le gérant pour faire un article dans le Chicago Times. »
« Oh, je vais appeler le boss. »
Il partit derrière le bar, sûrement vers le bureau du gérant. J'entrais et fermais la porte derrière moi.
C'était, comme je l'avais remarqué, chaleureux. Très spécieux et intime. Quelques places étaient même fermées par un demi-mur.
Quelques secondes plus tard, l'homme derrière le bar revient.
« Il est là dans une minute. »
Je patientais.
Comme il le prédit, je vis une ombre se déplacée de derrière le bar et arriver près de moi.
« Désolé je n'avais pas vu l'heure. » dit-il.
Je me raidis.
Avais-je bien reconnu cette voix ?
